II. EXAMEN DE L'AVIS
Au cours d'une première réunion tenue le jeudi 26 octobre 2000 , sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Marcel Lesbros sur le projet de loi de finances pour 2001 (crédits consacrés aux anciens combattants ).
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a présenté les grandes lignes de son rapport pour avis (cf. exposé général du présent avis).
M. Gilbert Chabroux, après avoir reconnu que les observations du rapporteur étaient le plus souvent justifiées, a fait part de sa perplexité sur les conclusions du rapporteur pour avis, considérant que celui-ci avait souligné de nombreux points positifs dans le projet de budget. Il a déclaré qu'il avait certes espéré des avancées plus nombreuses dans le projet de budget notamment en faveur des veuves et des plus grands invalides mais qu'il importait d'inscrire ce projet de budget dans la durée, l'action du secrétaire d'Etat ayant permis d'apurer une grande partie du contentieux existant avec les anciens combattants d'Afrique du Nord. Dans ces conditions, il a estimé que ces évolutions favorables ne justifiaient pas le rejet du budget.
M. Guy Fischer a jugé que la " régression budgétaire " était certes plus faible pour 2001, mais qu'il aurait été possible de présenter un budget plus ambitieux dans un contexte de croissance économique. Il a notamment insisté sur l'assouplissement des conditions d'attribution de la carte du combattant pour les rappelés, qui ne règle pas le cas particulier des anciens combattants du Maroc et de Tunisie, l'absence de rattrapage intégral des pensions des plus grands invalides, l'absence d'avancée sur la retraite du combattant et le caractère partiel de la mesure en faveur des orphelins de déportés. Sur ce dernier point, il a considéré qu'il était important d'étendre les critères d'indemnisation dans un souci de non-discrimination. Il a alors déclaré qu'il réservait son vote sur les crédits en l'attente du débat à l'Assemblée nationale.
M. Jean-Louis Lorrain a regretté l'absence de mesures en faveur des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, soulignant l'urgence à intervenir en ce domaine compte tenu du vieillissement des intéressés. A cet égard, il a considéré qu'il était certes légitime de travailler dans la durée comme le fait le secrétaire d'Etat mais que pour certains cas, la durée était précisément une contrainte majeure.
Mme Gisèle Printz a également abordé la question des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, soulignant la forte amertume des intéressés face à la non-reconnaissance par l'Etat de leur souffrance passée. Elle a jugé nécessaire d'intervenir rapidement dans ce domaine.
M. Gilbert Chabroux est enfin revenu sur la question de la date de commémoration de la fin de la guerre d'Algérie. Il a souligné les divisions existant au sein du monde combattant. Il a alors déclaré qu'il ne souhaitait pas que la date du 11 novembre soit retenue comme date de commémoration pour ce conflit.
En réponse aux différents intervenants, M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a rappelé que ce projet de budget contenait certes quelques avancées. Mais il a considéré qu'elles étaient le plus souvent très partielles (revalorisation du plafond majorable de la retraite mutualiste du combattant, remise à niveau des pensions des plus grands invalides). Il a également observé que de nombreux problèmes particulièrement urgents et importants n'étaient pas abordés par ce budget, citant les exemples de la décristallisation, du dispositif en faveur des veuves et de l'indemnisation des orphelins des déportés. Il a alors indiqué que c'était principalement au regard de ces carences qu'il proposait un avis défavorable.
S'agissant de la question des incorporés de force, il a indiqué que le refus du Gouvernement d'avancer en ce domaine s'expliquait sans doute par la crainte de nouvelles revendications pour l'indemnisation des personnes ayant participé au service du travail obligatoire (STO). Il a cependant observé que les souffrances des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes avaient été, dans la plupart des cas, bien plus fortes que celles des anciens du STO.
S'agissant de l'attribution de la carte du combattant aux rappelés, il s'est déclaré en accord avec M. Guy Fischer, observant que la mesure proposée ne réglait pas le cas particulier des rappelés du Maroc et de Tunisie.
A l'issue de ce débat, la commission, sur proposition de M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a décidé d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits des anciens combattants pour 2001 et d'émettre un avis favorable à l'adoption des articles 51, 52 et 53 rattachés aux crédits des anciens combattants .
Au cours d'une seconde réunion tenue le jeudi 23 novembre 2000 , sous la présidence de M. Jean Delaneau, président , la commission a procédé à un nouvel examen du présent rapport pour avis, suite aux modifications apportées en première lecture par l'Assemblée nationale.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis des crédits consacrés aux anciens combattants, a rappelé que la commission avait examiné, le 26 octobre dernier, le projet de budget pour 2001 relatif aux anciens combattants et que celle-ci avait alors donné un avis défavorable à son adoption.
Après avoir indiqué que son examen en première lecture à l'Assemblée nationale s'était traduit le 3 novembre à la fois par une légère majoration des crédits et par l'adoption d'articles additionnels rattachés à ce budget, il a précisé qu'il importait d'examiner à nouveau ce budget non seulement pour donner un avis sur les trois nouveaux articles rattachés, mais aussi pour juger si les modifications intervenues étaient de nature à remettre en cause l'avis adopté par notre commission le 26 octobre dernier.
Il a constaté que la première modification résidait dans la majoration de 15 millions de francs des crédits, destinée à abonder la subvention d'action sociale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), notamment en faveur des veuves. Il a observé que cette majoration allait dans le bon sens, le projet initial se traduisant par une réduction des crédits d'action sociale de l'ONAC.
Il a toutefois constaté qu'elle ne modifiait pas sensiblement l'équilibre général du budget puisqu'elle ne représentait en effet que 0,06 % des crédits et qu'elle restait inférieure de moitié à la majoration des crédits intervenue l'année passée en première lecture à l'Assemblée nationale. Il a également considéré que la politique en faveur des veuves d'anciens combattants ne pouvait se réduire à une simple politique ponctuelle d'action sociale.
La commission a ensuite procédé à l'examen des trois nouveaux articles additionnels.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis , a indiqué que l'article 53 bis (nouveau) répondait au souci de préserver la spécificité de la retraite mutualiste, en excluant les entreprises d'assurance du champ des organismes habilités à la gérer.
Déclarant partager les préoccupations exprimées par cet article, il a fait part de sa perplexité face à la rédaction " hasardeuse " de cet article, rappelant que le Gouvernement s'apprêtait à refondre le code de la mutualité par ordonnance. Il a souligné que sa portée était principalement symbolique et se voulait être un signal adressé au Gouvernement, qui a d'ailleurs déjà donné des assurances au monde combattant sur ce point.
Il s'est interrogé aussi sur sa compatibilité avec le droit européen.
M. Marcel Lesbros a donc proposé de s'en tenir à un avis de sagesse.
Présentant l'article 53 ter (nouveau) , il a indiqué qu'il visait à lever la forclusion de fait pesant sur les demandes nouvelles d'attribution de la retraite du combattant -au taux " cristallisé "- pour les anciens combattants d'outre-mer.
Il a ajouté que, sous une apparence de premier pas en faveur de la " décristallisation ", cet article était en réalité très restrictif et risquait de se traduire par un retour en arrière sur le plan législatif.
Il a souligné que, seule, une interprétation abusive de la législation en vigueur par l'administration interdisait l'attribution de droits nouveaux.
Il a alors exprimé la crainte qu'une telle disposition ne se traduise a contrario par l'interdiction de toute ouverture de droits nouveaux hormis la seule attribution de la retraite du combattant.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, insistant sur ces réserves, a donc proposé de s'en remettre à la sagesse du Sénat quant à l'adoption de cet article dans l'attente des explications du Gouvernement en séance publique.
Il a indiqué que l'article 53 quater (nouveau) prévoyait la mise en place d'une commission chargée de réfléchir sur la décristallisation.
Déclarant n'être pas favorable à la multiplication des commissions ad hoc, il a rappelé qu'en matière de décristallisation les constats étaient déjà établis et que seul manquait le courage dans la prise de décision.
Il a toutefois proposé de donner un avis favorable à l'adoption de cet article, estimant qu'une telle commission pourrait éventuellement contribuer à débloquer la situation.
Après avoir indiqué qu'au total les modifications apportées par l'Assemblée nationale ne lui paraissaient pas suffisantes pour devoir modifier l'avis de la commission sur ce budget, il a proposé de maintenir l'avis défavorable sur les crédits, de donner un avis de sagesse sur les articles 53 bis et 53 ter et de donner un avis favorable à l'adoption de l'article 53 quater.
M. André Jourdain s'est interrogé sur la compatibilité des dispositions introduites par l'Assemblée nationale dans le nouvel article 53 ter avec le droit européen. Il s'est en outre demandé s'il n'aurait pas été plus opportun d'attendre le projet de loi de ratification de l'ordonnance portant refonte du code de la mutualité pour légiférer en matière de rente mutualiste si les spécificités de celles-ci n'étaient pas garanties par l'ordonnance.
M. Guy Fischer , après avoir déclaré ne pas partager l'avis défavorable déjà émis par la commission tout en s'associant aux réflexions particulières du rapporteur pour avis, a jugé qu'il s'agissait du moins mauvais budget présenté ces dernières années. Il a indiqué que son groupe s'abstiendrait sans doute, à moins que le Gouvernement ne fasse de nouvelles propositions.
M. Claude Huriet est revenu sur le dispositif d'indemnisation des orphelins des déportés d'origine juive et a observé notamment que l'indemnisation ne pouvait pas s'appliquer à ceux d'entre eux qui n'étaient pas morts en déportation non plus qu'à l'ensemble des orphelins de déportés. Il s'est alors interrogé sur la possibilité d'une amélioration du dispositif.
M. Alain Gournac, tout en se déclarant favorable au dispositif d'indemnisation des orphelins des déportés juifs, s'est toutefois interrogé sur la possibilité de l'étendre à l'ensemble des orphelins de déportés sans distinction d'aucune sorte.
M. Louis Boyer a estimé qu'une telle mesure devait effectivement être étendue à tous les orphelins par souci d'équité.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a reconnu que l'article introduit à l'Assemblée nationale, concernant le code de la mutualité, était effectivement d'une rédaction imparfaite et pouvait soulever une question d'incompatibilité avec le droit européen.
S'agissant de la question de l'indemnisation des orphelins de déportés d'origine juive, il a rappelé qu'il avait abordé cette question dans son rapport pour avis et qu'il avait souhaité, à cette occasion, que soient étudiées les conditions dans lesquelles avaient été indemnisés les orphelins pour juger de l'opportunité de l'extension de l'indemnisation. Il a rappelé que les indemnisations qui avaient été versées au lendemain de la guerre lui paraissaient relativement faibles. Il a néanmoins précisé que les crédits relatifs à cette indemnisation n'étaient pas inscrits au budget des anciens combattants, mais au budget des services généraux du Premier ministre.
La commission a alors confirmé son avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs aux anciens combattants. Elle a émis un avis de sagesse quant à l'adoption des articles 53 bis et 53 ter. Elle a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 53 quater.
Au cours de ses réunions des 26 octobre et 23 novembre 2000, la commission des Affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits des anciens combattants pour 2001. Elle a émis un avis favorable aux articles 51 à 53 et 53 quater , et un avis de sagesse quant à l'adoption des articles 53 bis et 53 ter qui sont rattachés à ces crédits. |