II. LES MESURES NOUVELLES : DES AVANCÉES POUR LE MOINS PARCIMONIEUSES
Votre commission avait insisté l'an passé sur un certain nombre d'améliorations nécessaires des dispositifs en faveur du monde combattant. Elle aurait souhaité que le projet de loi de finances les prennent, au moins pour partie, en considération dans un contexte budgétaire plus favorable.
Tel n'est hélas pas le cas, ses propositions n'ayant en effet trouvé qu'un bien faible écho.
A. DES ATTENTES DÉÇUES
1. Des arbitrages initiaux très médiocres
Le projet de loi de finances adopté en Conseil des ministres ne prévoyait que quatre mesures nouvelles.
Si l'effort budgétaire supplémentaire peut paraître conséquent (236 millions de francs y sont en effet affectés), ces mesures nouvelles restent néanmoins insuffisantes, celles-ci ne constituant en définitive qu'un simple prolongement des mesures adoptées les années précédentes.
En outre, ces mesures nouvelles sont d'importance diverse. Si certaines apparaissent effectivement nécessaires, d'autres restent en revanche très en retrait par rapport aux attentes du monde combattant.
a) Des mesures souvent insuffisantes
• Le rattrapage inabouti des pensions des plus grands invalides
L'article 52 du projet de loi de finances pour 2001 prévoit, dans la continuité de la loi de finances initiale pour 2000, la poursuite du rattrapage de la valeur du point de la pension militaire d'invalidité pour les plus grands invalides.
Ce rattrapage reste cependant inachevé.
Votre commission avait l'an dernier exprimé la crainte que la revalorisation trop limitée intervenue en 2000 ne permette pas un rattrapage intégral en 2001. Cette crainte a hélas été confirmée. Il manque en effet 35 millions de francs.
M. Jean-Pierre Masseret s'est engagé, lors de son audition devant votre commission, à ce que le rattrapage soit définitif en 2002. Votre commission en prend acte, mais aurait souhaité un rattrapage intégral dès 2001.
• Le relèvement bien lent du plafond majorable de la retraite mutualiste
L'article 53 du projet de loi de finances prévoit de porter l'indice de référence du plafond majorable de la retraite mutualiste de 105 à 110 points d'indice à compter du 1 er janvier 2001, pour un coût budgétaire de 13 millions de francs.
Votre commission observe que cette mesure n'est que la simple poursuite, à un rythme identique, des revalorisations instituées par les précédents budgets. Elle considère cependant que ce rythme de progression reste bien lent, retardant d'autant l'aboutissement de l'objectif des 130 points qu'il reste souhaitable d'atteindre à terme.
b) Des réformes parfois souhaitables
• L'attribution de la carte du combattant aux rappelés d'Algérie
Votre commission avait l'an passé observé que l'assouplissement progressif des conditions d'attribution de la carte du combattant ne permettait pas " de prendre en compte la situation particulière des rappelés ".
Aussi, elle ne peut que se féliciter de la mesure prévue à l'article 51 du projet de loi de finances pour 2001 qui ramène à quatre mois la durée de séjour minimale en Algérie pour les seuls rappelés leur ouvrant droit à l'obtention de la carte du combattant. Une telle disposition, qui représente un coût budgétaire évalué à 118 millions de francs en 2001, au titre de la retraite du combattant, devrait concerner 44.000 anciens combattants.
Votre commission observe toutefois qu'une telle mesure n'est pas explicitement étendue aux rappelés en Tunisie et au Maroc -même si le secrétaire d'Etat s'est engagé à faire bénéficier ceux-ci de la mesure- et souligne qu'elle ne prend pas en compte la situation particulière des " maintenus ".
• L'attribution du titre de reconnaissance de la Nation (TRN) aux anciens combattants d'Algérie et d'Indochine présents sur les théâtres d'opérations postérieurement à la date officielle de cessation des combats
Là encore, votre commission ne peut que se féliciter d'une telle mesure, qui permet aux anciens combattants ayant servi en Algérie jusqu'au 1 er juillet 1964 et en Indochine jusqu'au 1 er octobre 1957 de pouvoir obtenir le TRN.
Elle rappelle d'ailleurs qu'elle s'était, dans son précédent avis budgétaire, prononcée en faveur d'une telle disposition.
" Actuellement, le Titre de reconnaissance de la Nation (TRN) ne peut être attribué au titre des services effectués en Algérie après le 2 juillet 1962.
" Or, l'insécurité a existé pour les militaires français bien après cette date. En outre, la médaille commémorative des opérations de sécurité et de maintien de l'ordre en Algérie est attribuée jusqu'au 1 er juillet 1964.
" Votre commission ne peut alors qu'être favorable à ce que le TRN puisse être attribué aux militaires français qui ont servi en Algérie jusqu'au 1 er juillet 1964. "
Cette disposition, dont les modalités d'application seront définies par décret, est intégrée dans le projet de loi de finances qui prévoit l'inscription de crédits nouveaux à ce titre -du fait de l'incidence d'une telle mesure sur le fonds de solidarité- à hauteur de 84 millions de francs.
2. De nouvelles propositions à l'Assemblée nationale trop timides
a) Des améliorations très partielles
L'examen du budget des anciens combattants en première lecture à l'Assemblée nationale n'a pas, loin s'en faut, permis de modifier l'équilibre général de ce budget.
Il s'est toutefois traduit par un double infléchissement 9 ( * ) .
D'une part, le Gouvernement a inscrit 15 millions de francs supplémentaires pour les crédits du titre IV " sur le chapitre 46-51 afin d'abonder la subvention d'action sociale de l'ONAC en faveur d'actions prioritaires de solidarité " selon les termes du secrétaire d'Etat.
D'autre part, le Gouvernement a introduit une disposition permettant la levée de la forclusion pesant sur l'attribution de la retraite du combattant des anciens combattants d'outre-mer.
b) Des effets en définitive très relatifs
Si ces mesures apparaissent incontestablement aller dans le bon sens, elles n'en demeurent pas moins très relatives, voire ambiguës.
Ainsi, la majoration de 15 millions de francs des crédits se révèle inférieure à celle de 30 millions de francs obtenue l'année passée en première lecture à l'Assemblée nationale.
De même, la levée de la forclusion sur les retraites du combattant " cristallisées " ne doit pas être surestimée.
Sur ce point, votre commission observe qu'il s'agit simplement de mettre en conformité la pratique gouvernementale avec le droit, un récent avis du Conseil publié au Journal officiel du 1 er janvier 2000 précisant l'illégalité des irrecevabilités opposées par l'administration aux demandes d'obtention de la retraite du combattant.
Elle constate en outre qu'une telle mesure n'est pour l'instant pas financée.
Elle souligne enfin que cette mesure reste très partielle et ne peut en aucun cas être assimilée à une mesure générale de décristallisation. Elle n'aborde en effet que l'attribution de la retraite du combattant et n'évoque ni les pensions d'invalidité, ni le montant de la retraite du combattant. Tout juste en constitue-t-elle une première ébauche pour la seule retraite du combattant. En ce sens, votre commission exprime même la crainte qu'une telle disposition ne se traduise en définitive par un retour en arrière par rapport à la législation actuelle dont le tort principal est finalement de ne pas être appliquée.
* 9 Auquel il fait également ajouter le vote de deux articles additionnels sans incidence budgétaire, le premier modifiant le code de la mutualité afin de préserver la spécificité des organismes mutualistes gérant la rente mutualiste du combattant, le second instituant une commission d'étude sur la décristallisation.