Question de Mme GOULET Nathalie (Orne - UC) publiée le 03/10/2024
Mme Nathalie Goulet attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale à propos de l'application de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, dite loi contre le séparatisme
Lors de l'audition au Sénat du 11 mars 2021 du ministre de l'éducation nationale, celui-ci avait rappelé que la volonté du Gouvernement est de lutter contre le séparatisme et précisé que « les familles qui ne poseront pas de problème au niveau des critères de l'enseignement ne seront nullement inquiétées pour leur choix de l'instruction en respect au principe de liberté auquel nous sommes très attachés ». Or la majorité des demandes d'autorisation sont refusées, ce qui est contraire tant à l'esprit qu'au texte de la loi.
Aux termes de l'article L.131-5 du code de l'éducation : « Les personnes responsables d'un enfant soumis à l'obligation scolaire définie à l'article L. 131-1 doivent le faire inscrire dans un établissement d'enseignement public ou privé ou bien, à condition d'y avoir été autorisées par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, lui donner l'instruction en famille ». L'autorisation mentionnée au premier alinéa peut être accordée pour 4 motifs : état de santé, activité sportive, itinérance de la famille ou éloignement géographique ou intérêt propre à l'enfant.
Dès lors que la situation propre à l'enfant représente une quatrième catégorie, l'administration est-elle en droit de refuser l'autorisation au motif que les parents ne justifient ni de circonstances liés à l'état de santé, ni d'activité sportive ni d'un critère géographique et que rien ne le rend inapte ?
Le 4° de l'article L.131-5 prévoit « l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l'engagement d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille ».
À la suite de l'amendement n° 454, le projet initial « situation particulière propre à l'enfant » a été remplacé par « situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif ».
Dans sa décision n° 2021-8223 du 13 août 2021, le Conseil constitutionnel a estimé qu'en prévoyant que l'autorisation est accordée en raison de « l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif », le législateur a entendu que l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction en famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptée au rythme d'apprentissage de l'enfant.
Elle lui demande si l'administration est en droit de refuser l'autorisation au motif que l'enfant n'est pas dans une situation particulière, alors que les parents ont déposé un dossier complet présentant les caractéristiques propres à l'enfant et le projet éducatif avec les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie.
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Transmise au Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche
Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 06/02/2025
Le Conseil d'État a apporté des précisions concernant le traitement des demandes d'autorisation d'instruction dans la famille, effectuées au titre du motif fondé sur la situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif. Le ministère ne prévoit pas d'apporter de précisions supplémentaires par voie réglementaire. L'autorité administrative doit ainsi contrôler que « cette demande expose de manière étayée la situation propre à cet enfant motivant, dans son intérêt, le projet d'instruction dans la famille et qu'il est justifié, d'une part, que le projet éducatif comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de cet enfant, d'autre part, de la capacité des personnes chargées de l'instruction de l'enfant à lui permettre d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire » (décision CE n° 467550 du 13 décembre 2022). Il en résulte que les responsables légaux sollicitant une autorisation d'instruction dans la famille pour ce motif ne doivent pas seulement justifier de la situation propre de leur enfant et présenter un projet éducatif. Ils doivent justifier que ce projet éducatif est conçu en fonction de la situation de leur enfant et adapté à celle-ci, de telle manière que l'enfant puisse bénéficier d'un enseignement conforme à l'objet de l'instruction obligatoire. En tout état de cause, en cas de décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille, les personnes responsables de l'enfant ont la possibilité de former un recours administratif préalable obligatoire devant une commission présidée par le recteur d'académie et composée d'une équipe pluridisciplinaire qui pourra se prononcer aussi bien sur des aspects pédagogiques que médicaux dans l'intérêt de l'enfant. Le Gouvernement entend bien garantir l'application des dispositions de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République et de ses textes d'application. Le ministère accompagne les services académiques afin d'harmoniser le traitement des demandes d'autorisation d'instruction dans la famille, dans l'intérêt supérieur de l'enfant et de ses droits, notamment son droit à l'instruction. Par ailleurs, les éventuelles différences de traitement des demandes d'autorisation d'instruction dans la famille en fonction des départements ont récemment fait l'objet de consignes auprès des recteurs.
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