Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 25/03/1998
M. Philippe Richert attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la situation des personnels civils travaillant pour les forces françaises en Allemagne, et plus particulièrement les agents de droit privé qui sont touchés par les mesures de restructuration des armées. Contrairement à leurs collègues engagés sous contrat de droit public, l'intégration de ces agents dans la fonction publique territoriale n'a pas été retenue. Des mesures d'accompagnement social ont en revanche été mises en place, telles qu'une commission franco-allemande itinérante, chargée d'aider et de conseiller ces personnes dans leur recherche d'un nouvel emploi. Il semblerait cependant, selon les personnes concernées, que ces mesures n'aient pour l'instant que très peu d'effets et que de nombreux agents n'aient pas encore trouvé de solution de reclassement. Parallèlement à cette situation, il semblerait que, dans le cadre de la professionnalisation des armées, l'embauche de plusieurs centaines de personnels civils soit envisagée dans un proche avenir. Ne serait-il pas concevable dans ce cas de proposer certains de ces futurs postes à des anciens agents civils de nos forces armées, compte tenu des années qu'ils ont passées au service de la défense nationale ? Par ailleurs, il souhaiterait être informé, dans la mesure du possible, de l'état actuel des travaux de la commission franco-allemande chargée du suivi de ces personnes, ainsi que du bilan provisoire de son action, et notamment le nombre de personnes qui ont, à la date d'aujourd'hui, retrouvé un emploi stable par ce biais.
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Réponse du ministère : Défense publiée le 20/05/1998
Réponse apportée en séance publique le 19/05/1998
M. le président. La parole est à M. Richert, auteur de la question n° 217, adressée à M. le ministre de la défense.
M. Philippe Richert. Monsieur le président, mes chers collègues, je voudrais attirer l'attention de M. le ministre de la
défense sur la situation des personnels civils ayant travaillé pour les forces françaises en Allemagne, et plus
particulièrement celle des agents de droit privé qui sont touchés par les mesures de restructuration des armées.
Contrairement à ce qui a eu lieu pour leurs collègues engagés sous contrat de droit public, l'intégration de ces agents
dans la fonction publique territoriale n'a pas été retenue. Des mesures d'accompagnement social ont en revanche été
prises, telles que la mise en place d'une commission franco-allemande itinérante, chargée d'aider et de conseiller ces
personnes dans leur recherche d'un nouvel emploi.
Il semblerait cependant, selon les personnes concernées, que ces mesures n'aient pour l'instant que très peu d'effets et
que de nombreux agents n'aient pas encore trouvé de solution de reclassement.
Parallèlement, dans le cadre de la professionnalisation des armées, l'embauche de plusieurs centaines de personnels
civils est envisagée dans un proche avenir.
Ne serait-il pas concevable dans ce cas de proposer certains de ces futurs postes à des anciens agents civils de nos
forces armées, compte tenu des années qu'ils ont passées au service de la défense nationale ?
Par ailleurs, je souhaiterais être informé, dans la mesure du possible, de l'état actuel des travaux de la commission
franco-allemande chargée du suivi de ces personnes, ainsi que du bilan provisoire de son action, et notamment du
nombre de personnes qui ont, aujourd'hui, retrouvé un emploi stable par ce biais.
Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, des réponses que vous apporterez à mes interrogations.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, la réforme des forces armées, que vous connaissez
bien, inclut en effet une profonde transformation de l'organisation des forces françaises stationnées en Allemagne. Ces
restructurations, notamment la réduction importante des effectifs, ont des incidences sur les diverses catégories
d'agents civils employés par les forces et l'ensemble des organismes militaires ou civils de soutien de la communauté
française en Allemagne. Ces personnels étaient au nombre de 3 601 avant le début des opérations de retrait, en 1997.
Au cours de l'année 1997, 446 personnes ont vu leur emploi supprimé, dont 103 fonctionnaires et agents publics
relevant du ministère de la défense, 211 agents de droit privé allemand et 132 agents de droit privé français.
Des reclassements ont été effectués au sein même des forces françaises stationnées en Allemagne - dont une partie
doit encore séjourner au moins un an et demi dans ce pays - et le nombre de licenciements effectifs s'est donc trouvé
ramené à 213, dont 147 Français.
Parmi ces derniers, seuls 86 résidaient ou sont revenus sur le territoire national.
Sur ces 86 personnes, 68 sont des frontaliers, 55 ont retrouvé un emploi, 13 sont encore inscrits à l'Agence nationale
pour l'emploi.
J'indique que ces opérations se sont déroulées pendant toute l'année 1997, souvent au cours de l'été, et les personnes
concernées ont donc perdu leur emploi depuis moins d'un an.
Désormais, ce sont 3 134 agents civils qui restent concernés par des mesures de reconversion qui, pour l'essentiel,
prendront effet en 1999 : 702 fonctionnaires seront reclassés en France et 2 432 agents de droit privé, dont 1 848
personnels civils de droit allemand. Parmi les agents de droit privé, signalons que, à ceux, nombreux, qui ne sont pas
de nationalité française s'ajoutent des Français conjoints d'Allemands et souhaitant rester outre-Rhin.
Le Gouvernement a souhaité qu'un dispositif d'accompagnement crédible soit mis en place pour chaque catégorie de
personnels concernée, y compris et même d'abord pour les agents de droit privé qui ne peuvent pas bénéficier d'un
reclassement dans les cadres de la fonction publique.
Bien entendu, ce reclassement est possible pour toutes les personnes qui se soumettent à la procédure normale
d'entrée dans la fonction publique, c'est-à-dire le concours, qui, lui-même, est l'application du principe d'égalité entre les
citoyens, s'imposant à nous.
Ces dispositifs d'accompagnement social ont été négociés selon les règles applicables avec les représentants élus de
ces personnels. Outre le versement de diverses indemnités, nettement améliorées par rapport aux règles
contractuelles, ils comportent surtout un volet significatif de formation, d'aide à la recherche d'emploi et d'adaptation au
nouvel emploi.
S'agissant de la catégorie la plus nombreuse, celle des salariés de droit privé allemand, leur statut relève du droit du
travail et de la juridiction allemandes.
Un réexamen des plans sociaux bénéficiant aux seuls agents de nationalité française serait une remise en cause des
règles définies jusqu'à présent avec le ministre fédéral allemand, les représentants des forces alliées et les
représentants du personnel.
Un accord a été signé par les représentants du personnel le 10 octobre 1996. Il comporte un ensemble de mesures qui
témoignent du souci du Gouvernement de prendre en compte, avec l'aide des autorités allemandes, la situation du
personnel civil ayant oeuvré au sein des forces françaises en Allemagne.
Le ministère fédéral des finances a décidé d'accorder au personnel frontalier français de droit privé allemand le bénéfice
de la convention sur la sécurité matérielle propre au droit du travail allemand.
En vertu de ce dispositif, les salariés de plus de quarante ans ayant une ancienneté supérieure à dix ans et dont
l'emploi a été supprimé perçoivent une indemnité différentielle leur assurant le maintien du niveau de rémunération
antérieur, lorsque leur nouveau salaire est inférieur ou lorsqu'ils se trouvent au chômage. La durée du versement
complémentaire varie de deux ans minimum à cinq ans maximum ; elle est illimitée pour les salariés âgés de cinquante
ans ayant vingt-cinq ans d'ancienneté ou âgés de cinquante-cinq ans et ayant vingt ans d'ancienneté.
Parmi les treize ex-personnels civils des FFSA encore inscrits à l'ANPE en Alsace, douze bénéficient de ce dispositif.
Simultanément, ces personnes pourront recevoir des prestations de chômage en France. Une commission mixte
franco-allemande travaille à leur reclassement avec une cellule placée auprès du général commandant les forces
françaises stationnées en Allemagne et en liaison avec l'ANPE, dont les effectifs ont été renforcés par des agents du
ministère de la défense mis à sa disposition.
L'ensemble de ces éléments montre la grande attention que le Gouvernement porte à la situation des intéressés avec le
concours efficace des autorités allemandes.
Bien entendu, je reste à votre disposition, monsieur le sénateur, puisque vous êtes élu d'un de ces départements
frontaliers du nord ou de l'est de la France où les représentants de ces personnels sont très actifs pour envisager les
mesures complémentaires qui pourraient encore être ajoutées à ce dispositif.
M. Philippe Richert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Je tiens à remercier M. le ministre des précisions qu'il m'a apportées et lui donner acte des
efforts que lui-même et ses services déploient pour répondre le plus efficacement possible aux situations que j'ai
évoquées et qui, pour certaines, sont préoccupantes.
Je me permettrai cependant de formuler trois remarques.
En ce qui concerne les reclassements, il arrive très fréquemment que les contrats qu'obtiennent ces personnels soient,
comme il se doit aujourd'hui, des contrats à durée déterminée. C'est ainsi qu'une grande partie d'entre eux n'ont trouvé
un emploi que jusqu'en 1999 ; après, point d'interrogation !
C'est un grand sujet de préoccupation pour des personnes dont la situation a été « assurée » pendant de longues
années et qui, aujourd'hui, se retrouvent, avec leur famille, dans une situation totalement précaire.
A l'écoute des chiffres que vous avez cités, on pourrait imaginer que tout est résolu. Or, si la situation est effectivement
réglée pour un certain nombre d'entre eux de façon ponctuelle, le problème se posera à la fin de 1999 de façon accrue.
Ma deuxième remarque concerne la difficulté, pour ces personnes, de trouver un emploi. En effet, très souvent, elles ont
travaillé dans l'armée sur du matériel très spécifique et parfois même, reconnaissons-le, un peu obsolète, d'où la
difficulté pour elles de se réadapter à du matériel actuel et à des fonctions nouvelles. Je crois qu'il faut être très attentif
à ces cas particuliers.
Ma dernière remarque porte sur les concours.
Il est vrai qu'il reste à ces personnes la possibilité de se présenter aux concours de la fonction publique, mais il ne faut
pas oublier qu'elles commenceront alors au bas de l'échelle. Or, pour une personne qui travaille depuis vingt ans, parfois
plus, recommencer une carrière au niveau zéro constitue une épreuve difficile à surmonter. En effet, avec une famille,
des enfants à nourrir, il est très difficile de recommencer au bas de l'échelle comme un jeune de dix-huit ans.
Je souhaitais, monsieur le ministre, évoquer ces trois cas pour montrer que, malgré vos efforts, qui sont réels et que je
ne mésestime pas du tout, ce dossier doit recueillir toute notre vigilance.
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