Question de M. SÉRUSCLAT Franck (Rhône - SOC) publiée le 16/11/1995
M. Franck Sérusclat attire l'attention de M. le Premier ministre sur les problèmes qui ont été posés à un groupe de jeunes Danois au prétexte que les tee-shirts dont ils étaient vêtus en arrivant en France portaient " offense " à Monsieur le Président de la République française. Il s'étonne gravement des exigences formulées par les policiers lors de la descente du train de ce groupe de jeunes, notamment la demande d'enlever sur le champ les tee-shirts aux messages litigieux. Il s'interroge d'ailleurs sur le fondement juridique à l'origine de cette demande, tant l'obligation de se déshabiller sur la voie publique paraît peu conforme à la tradition d'accueil de notre pays de même qu'aux simples habitudes de la décence et des bonnes moeurs. Il insiste sur le fait que l'objet du " litige " est apparu, semble-t-il, par l'expression d'une opposition à la reprise des essais nucléaires français dans le Pacifique. Il s'étonne que vingt-cinq jeunes en provenance du Danemark aient été pris à partie par les forces de police alors que ce sont des centaines de milliers de personnes en France et dans le monde qui sont opposés à cette politique française, et qui le manifestent par le port d'insignes, tee-shirts, badges, etc. Il en déduit que les manifestants français qui ont porté des tee-shirts exprimant leur opposition aux essais nucléaires auraient dû sur le champ être déshabilllés par les forces de police, ce qui n'aurait pas manqué d'assurer une publicité plus grande aux différents mouvements de protestation. Il se demande surtout qui a pu prendre l'initiative d'une telle intervention policière dont l'" offense " au Président de la République semble être le motif ; cette invocation n'avait pas réapparu depuis la fameuse affaire du " Hou hou " prononcé à l'encontre du général de Gaulle ; elle n'avait pas laissé dans la mémoire collective une trace qu'il semblait nécessaire de réactiver. Il s'inquiète particulièrement du ton que pourrait prendre la vie politique française si, à chaque opposition exprimée dans le respect des règles démocratiques à une mesure annoncée par le chef de l'Etat, s'ensuivent des interventions policières fondées sur l'offense qui lui serait portée. Le précédent président de la République française avait fort judicieusement considéré que les fonctions qui étaient les siennes lui interdisaient toute action judiciaire ou policière à l'encontre de ses opposants. Il souhaiterait que cette règle perdure pour la sérénité de la vie démocratique. Il lui demande de bien vouloir intervenir auprès de M. le ministre de l'intérieur pour que de telles procédures ne puissent plus être diligentées, notamment à l'encontre de personnes étrangères.
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Transmise au ministère : Intérieur
Réponse du ministère : Intérieur publiée le 28/12/1995
Réponse. - L'intervention le dimanche 8 octobre, Gare du Nord, de fonctionnaires de la sécurité publique de la préfecture de police, à l'arrivée d'un train en provenance de Hambourg fait suite à la présence dans le train d'une cinquantaine de lycéens danois, accompagnés par trois professeurs, portant des maillots hostiles au Président de la République et aux essais nucléaires. Un tel comportement, s'il est limité à la fantaisie d'un seul individu, pourrait être interprété comme un simple manque de courtoisie. Adopté par un groupe dans son ensemble, il a été perçu comme une manifestation de fait, non déclarée, donc illégale. Telle a été l'analyse des fonctionnaires de police qui, sensibilisés aux risques de manifestations antinucléaires dans la capitale, ont de leur propre initiative réagi. Après avoir invité ces jeunes gens à adopter une tenue vestimentaire plus conforme, ce qu'ils ont obtenu sans recourir à interpellation, les fonctionnaires de police, pour prévenir tout risque de manifestation, ont assuré l'accompagnement du groupe et sa surveillance aux abords de sa résidence hôtelière à Paris.
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