Allocation personnalisée d'autonomie
PROJET DE
LOI
|
|
N° 116
|
PROJET
DE LOI
|
||
Le Sénat a adopté, en nouvelle lecture, la motion, opposant la question préalable à la délibération du projet de loi, dont la teneur suit : |
||
Voir les
numéros
:
|
En
application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le
Sénat,
Considérant que la prestation spécifique dépendance
instituée par la loi du 24 janvier 1997 constituait une
première mais décisive étape dans l'attente d'une loi
instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées
dépendantes ;
Considérant que, lors de l'examen en première lecture du
présent projet de loi, le Sénat avait regretté le choix
fait à dessein par le Gouvernement d'une présentation complexe et
ambiguë destinée à faire apparaître artificiellement
une rupture entre l'allocation personnalisée d'autonomie et la
prestation spécifique dépendance ;
Considérant que l'allocation personnalisée d'autonomie retient
pourtant l'essentiel des apports de la prestation spécifique
dépendance en tant qu'elle est une prestation en nature servie et
gérée par les départements et reposant sur un plan d'aide
individualisée ;
Considérant que son dispositif est toutefois moins précis et
moins protecteur et renvoie pour l'essentiel à des décrets
d'application dont les projets, en dépit des engagements pris par le
Gouvernement dès le 28 mars 2001, n'ont pas été transmis
aux parlementaires ;
Considérant qu'en première lecture, le Sénat a
souhaité apporter un certain nombre de précisions et de garanties
figurant dans la loi du 24 janvier 1997 et qui sont parfaitement compatibles
avec le texte du Gouvernement ; qu'il en est ainsi, par exemple de
l'information des maires, de la possibilité de la personne
âgée de se faire assister de son médecin ou encore du
contrôle régulier de l'effectivité de l'aide
apportée ;
Considérant que l'Assemblée nationale a entendu revenir pour
l'essentiel à son texte initial, supprimant ainsi les précisions
et garanties apportées par le Sénat ; que lorsque sa
commission des Affaires culturelles, familiales et sociales entendait se
rallier au texte du Sénat, le Gouvernement a pris, lui-même,
l'initiative de demander à l'Assemblée nationale de n'en rien
faire ;
Considérant que, lors de l'examen du présent projet de loi en
première lecture, le Sénat a pris acte que le dispositif du
Gouvernement allait plus loin que l'actuelle prestation spécifique
dépendance qui s'était adressée en priorité aux
plus démunis et aux plus dépendants mais qu'il a fait grief au
Gouvernement de ne pas avoir assorti cette mesure généreuse des
financements nécessaires ;
Considérant, de fait, que le Gouvernement reporte sur les
départements et la sécurité sociale le soin de financer
les générosités de sa politique sociale dont il
s'exonère lui-même totalement ;
Considérant que le financement de l'allocation personnalisée
d'autonomie en 2002 fait appel à un effort supplémentaire des
départements, à un prélèvement opéré
sur la contribution sociale généralisée affectée au
fonds de solidarité vieillesse et à une contribution des
régimes de retraites ;
Considérant que, dès 2003, le dispositif n'est plus
financé et renvoie à un rapport d'étape le soin de trouver
les expédients nécessaires constituant autant de menaces pour
l'équilibre des finances départementales et des finances
sociales ;
Considérant que le Sénat a estimé, en première
lecture, que le prélèvement opéré sur la
contribution sociale généralisée constituait un double
détournement, d'abord pour financer une allocation qui n'est pas une
prestation de sécurité sociale, ensuite pour contribuer
spécifiquement à un fonds de formation professionnelle
constitué au sein du fonds de financement de l'allocation
personnalisée d'autonomie ;
Considérant qu'il a de même dénoncé la contribution
des caisses de retraite, imposition de toute nature dont ni le taux, ni
l'assiette ni les modalités de recouvrement ne sont clairement
identifiés ;
Considérant que ces deux prélèvements amputent les
excédents tant du Fonds de solidarité vieillesse que de la Caisse
nationale d'assurance vieillesse qui doivent abonder le fonds de réserve
des retraites ; que, dans ces conditions, les moyens accrus
consacrés à pallier les effets de la dépendance feront
défaut au service des pensions à compter de 2020 ;
Considérant que cette politique de « Gribouille » ne
saurait tenir lieu de projet pour les personnes âgées ;
Considérant qu'en conséquence le Sénat avait
proposé un dispositif de financement raisonnable faisant intervenir
l'Etat au titre de la solidarité nationale sous la forme d'un concours
particulier au sein de la dotation globale de fonctionnement des
départements ;
Considérant qu'en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a
écarté cette solution non sans apporter, à ce stade de la
navette et à l'initiative du Gouvernement, de profondes modifications
aux modalités de répartition entre les départements des
concours du fonds de financement de l'allocation personnalisée
d'autonomie pour les deux exercices 2002 et 2003 ;
Considérant que le projet de loi met à la charge des
départements une dépense supplémentaire en ne
prévoyant qu'une compensation tardive et partielle ; que cette
compensation s'opère selon des critères dont le texte ne
précise nulle part la pondération ;
Considérant en outre que, selon l'article 72 de la Constitution,
« les collectivités territoriales s'administrent librement
par des conseils élus et dans des conditions prévues par la
loi »
; que l'intervention, supprimée par
l'Assemblée nationale en première lecture mais rétablie
par elle en nouvelle lecture, d'une commission d'attribution, dont la
composition est insuffisamment définie et qui est chargée de
« proposer » au président du conseil
général l'attribution de l'allocation, supprime de fait toute
marge de manoeuvre aux conseils élus pour s'administrer librement ;
que si l'objet de la dépense apparaît clair, son ampleur reste
incertaine ;
Considérant qu'à l'occasion de la nouvelle lecture à
l'Assemblée nationale, le Gouvernement a tenu à apporter
également des «
précisions
importantes
» qui se traduisent par la création d'un
«
groupe de suivi
» de la tarification, d'un
«
groupe de réflexions
» sur le devenir des
petites structures d'hébergement et d'une réflexion sur la
«
mise à
plat
» des aides aux
logements pour les personnes hébergées en institutions, que, par
ailleurs, le Gouvernement demande que lui soient laissées
«
encore
quelques semaines pour formaliser
l'esquisse
» du dispositif qu'il propose pour l'examen des
demandes d'attribution de l'allocation personnalisée d'autonomie ;
Considérant que se trouve ainsi illustrée la démarche du
Gouvernement tendant à proposer dans l'urgence au Parlement un texte non
abouti et non financé ;
Considérant que le Gouvernement déplore que «
le
petit jeu de la navette parlementaire (le contraigne) à une gymnastique
complexe dont (il) espère (que) le projet de loi sortira
indemne
» ;
Considérant que cette conception du dialogue entre les
assemblées, passablement éloignée des termes et de
l'esprit de l'article 45 de la Constitution, confirme le souci du
Gouvernement de n'autoriser à l'Assemblée nationale que des
remords sur son propre texte, au demeurant fort insuffisants pour en corriger
les ambiguïtés et les imperfections et, en tout état de
cause, incapables de lui donner une base financière viable ;
Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération
sur le projet de loi n° 367 (2000-2001), adopté par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la prise en
charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à
l'allocation personnalisée d'autonomie.
En conséquence, conformément à l'article 44,
alinéa 3, du Règlement, le projet de loi a été
rejeté par le Sénat.
Délibéré en séance publique, à Paris, le 19
juin 2001.
Le Président,
Signé :
Christian PONCELET.