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N° 391
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2006-2007
Annexe au procès-verbal de la séance du 17 juillet 2007 |
PROPOSITION DE
RÉSOLUTION
PRÉSENTÉE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 73 BIS DU RÈGLEMENT,
sur la proposition de règlement du Conseil portant organisation commune du marché vitivinicole et modifiant certains règlements (E 3587),
Par M. Gérard CÉSAR,
Sénateur.
(Renvoyée à la commission des Affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Si l'Europe viticole reste leader dans son secteur, les évolutions de ce dernier menacent aujourd'hui sa suprématie autrefois incontestée. Montée en puissance des pays producteurs dits du « nouveau monde » et atonie de la consommation sur notre continent rendent en effet de plus en plus difficile l'écoulement d'une production communautaire structurellement excédentaire.
Bien qu'ils aient été révisés en 1999, les mécanismes structurant cette Europe du vin, regroupés au sein d'une organisation commune de marché (OCM) vitivinicole, ne sont visiblement plus adaptés à la nouvelle donne du secteur. Si leur réforme paraît donc opportune, les modalités qu'en a proposées la Commission européenne dans sa communication du 22 juin 2006, puis dans sa proposition de règlement du 4 juillet 2007, sont en revanche très fortement sujettes à caution.
D'inspiration très libérale et remettant en cause une grande partie des instruments de régulation du marché contenus dans l'actuelle OCM, le projet de la Commission ne trace en effet aucune vision d'avenir pour le secteur, mais induit en revanche un large désengagement de la politique communautaire de soutien.
Cette position est intolérable pour la France, premier pays viticole de l'Union européenne, mais également pour de nombreux autres pays producteurs, qui ont comme elle manifesté leur hostilité au projet de réforme. Votre commission des affaires économiques, en adoptant à l'unanimité le rapport d'information présenté voici peu par votre rapporteur, s'est elle-même prononcée très défavorablement vis-à-vis de ces propositions 1 ( * ) .
Il s'agit à présent d'aller plus loin encore, en prenant position très clairement sur chacun des éléments avancés par la Commission dans sa proposition de réforme, en vue de soutenir les représentants de notre pays dans les négociations européennes qui vont se dérouler pendant plusieurs mois 2 ( * ) . C'est l'objet de cette proposition de résolution, qui reprend les principales conclusions du rapport d'information précité, tout en tenant compte des légères modifications qu'a apportées à ses propositions initiales la Commission européenne dans son dernier projet de règlement.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la proposition de règlement portant organisation commune du marché vitivinicole et modifiant certains règlements (COM [2007] 372 du 4 juillet 2007),
Considérant que la filière vitivinicole européenne, qui traverse depuis plusieurs années une crise structurelle, n'en reste pas moins un secteur d'excellence occupant une place de leader au niveau mondial et assurant des fonctions économiques, sociales, environnementales et culturelles irremplaçables,
Reconnaissant que l'actuelle organisation commune du marché (OCM) vitivinicole n'est plus en mesure de répondre aux défis que rencontre la filière européenne, à savoir une offre excédentaire sur un marché intérieur dont la consommation s'essouffle et une concurrence accrue des pays producteurs dits du « nouveau monde »,
Considérant toutefois que le marché vitivinicole, dont la demande à l'échelle mondiale est en progression continue, demeure un marché d'avenir sur lequel les producteurs européens disposent potentiellement des moyens de conserver et de renforcer leur rang,
Rappelant la spécificité, tant de nature physique qu'immatérielle, des produits de la vigne et du vin,
Soulignant à cet égard la nécessité de conserver un système communautaire d'organisation et de régulation des marchés, dans le respect des règles concurrentielles émises au niveau international,
Insiste sur l'indispensable maintien d'une OCM dotée d'instruments communautaires de soutien spécifiques à la filière vitivinicole,
Consent à ce que soit instauré un dispositif d'arrachage dès lors qu'il est suffisamment incitatif, basé sur le volontariat et accompagné de mesures permettant d'en encadrer au niveau national les conséquences territoriales et environnementales,
Rappelle que la régularisation des plantations illicites dans certains États doit être menée à terme, comme préalable à la mise en oeuvre de tout nouveau programme d'arrachage communautaire,
S'oppose à une libéralisation entière et non encadrée, à partir de 2013, des droits à plantation, qui aurait irrémédiablement pour effet de créer de nouveaux déséquilibres entre offre et demande pesant négativement sur les prix de marché, et donc sur le revenu des professionnels de la filière,
Demande à ce que soient maintenus et que continuent d'être financés par le budget communautaire les mécanismes de régulation des marchés que constituent, notamment le régime des prestations viniques et la distillation de crise, indispensables pour traiter de façon respectueuse de l'environnement les sous-produits de la vigne et pour faire face à des surplus d'offre conjoncturels,
Juge nécessaire d'inciter les acteurs de la filière, par des mécanismes règlementaires ou financiers appropriés, à se regrouper au niveau professionnel et interprofessionnel afin de mieux équilibrer l'évolution de l'offre à celle de la demande et d'acquérir un poids et une visibilité réels à l'export sur les marchés des pays tiers,
Est favorable à un rapprochement des différentes catégories de vins sur le règlement transversal distinguant les appellations d'origine protégée (AOP) des indications géographiques protégées (IGP), afin d'introduire une plus grande lisibilité pour les consommateurs, dès lors que sont maintenus les liens entre appellation, origine et qualité,
Approuve l'alignement des pratiques oenologiques de l'Union européenne sur les prescriptions de l'Organisation internationale du vin (OIV),
Réaffirme son hostilité à toute autorisation de vinifier des moûts importés et de mélanger des vins communautaires avec des vins de pays tiers,
S'oppose à tout transfert de compétences du Conseil vers la Commission européenne, s'agissant notamment de l'étiquetage et des pratiques oenologiques,
Préconise, du fait de la diversité des pratiques spécifiques à chaque territoire et des traditions qui lui sont propres, un maintien du régime actuel d'aide à l'enrichissement,
Réaffirme la nécessité de mener une action globale, cohérente et équilibrée d'information des consommateurs européens, associant pouvoirs publics et responsables professionnels, contribuant à la réduction des comportements à risque tout en valorisant, de façon respectueuse des exigences de santé publique, les produits de la vigne et du vin,
Estime largement insuffisantes les sommes affectées à la promotion des produits vitivinicoles sur le marché intracommunautaire, au vu de l'importance essentielle qu'il revêt pour la commercialisation des productions européennes, et demande par conséquent leur augmentation dans une proportion substantielle,
Juge également insuffisants les crédits mobilisés pour la promotion sur les marchés extérieurs et demande qu'ils soient accrus de façon significative afin de donner à nos entreprises les moyens de reconquérir des parts de marché à l'international.
* 1 Réforme de l'OCM vitivinicole : sauvons notre filière et nos viticulteurs, rapport d'information n° 348 (2006-2007) fait au nom de la commission des affaires économiques par M. Gérard César.
* 2 L'objectif de la Commission européenne étant de parvenir à un accord politique sous présidence portugaise, d'ici la fin de l'année, et de faire en sorte que la réforme soit applicable pour les vendanges de 2008, c'est-à-dire en septembre de la même année.