Création d'une commission d'enquête sur les facteurs de risques et les conséquences sanitaires d'épidémies de légionellose et sur les moyens des services d'État à renforcer pour prévenir, contrôler, contenir tout risque d'exposition comme de contamination
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N°
154
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SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 janvier 2004
PROPOSITION DE
RÉSOLUTION
tendant à la création d'une commission d'enquête
parlementaire sur les
facteurs de risques
et les
conséquences sanitaires
d'
épidémies
de
légionellose
mais également sur les
moyens
des
services d'État
à
renforcer
pour
prévenir
,
contrôler
et
contenir
tout risque
d'
exposition
comme de
contamination
.
par M. Yves COQUELLE, Mme Michelle DEMESSINE, MM. Ivan RENAR, Guy FISCHER, Roland MUZEAU, François AUTAIN, Jean-Yves AUTEXIER, Mmes Marie-Claude BEAUDEAU, Marie-France BEAUFILS, M. Pierre BIARNÈS, Mmes Danielle BIDARD-REYDET, Nicole BORVO, M. Robert BRET, Mmes Annie DAVID, Évelyne DIDIER, MM. Thierry FOUCAUD, Gérard LE CAM, Paul LORIDANT, Mmes Hélène LUC, Josiane MATHON, M. Jack RALITE, Mme Odette TERRADE et M. Paul VERGÈS,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Affaires sociales et pour avis à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, en application de l'article 11, alinéa 1 du Règlement).
Santé publique
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La
légionellose
est une infection respiratoire
provoquée par des bactéries vivant dans l'eau douce
appelées légionelles. La maladie a été reconnue
pour la première fois en 1976 à l'occasion d'une
épidémie survenue aux États-Unis lors d'un congrès
d'anciens combattants. C'est la raison pour laquelle la pathologie a pris le
nom de « maladie des légionnaires ». On peut trouver des
légionelles dans tous les milieux aquatiques naturels ou artificiels,
notamment dans les installations sanitaires (douches, robinets...), les
installations de climatisation et les dispositifs de refroidissement (tours
aéroréfrigérantes, circuits de refroidissement
industriels...).
Ainsi, différentes zones de fréquentation peuvent être
source de contamination. Les établissements de soins ont
déjà été décelés comme zone sensible,
plus récemment encore les sites industriels ou l'habitat ont
été porteurs de souches infectieuses.
C'est ainsi que selon l'Institut de Veille Sanitaire en 1998 :
20 personnes ont été contaminées à Paris, dont
4 sont mortes. En 2000 : 22 cas dont 5 mortels en Ille-et-Vilaine. En
décembre 2000 et juillet 2001 : deux vagues de
légionellose entraînent la mort à Paris de 4 patients
de l'Hôpital Pompidou. En 2002 : 17 cas dont 4 mortels au centre
hospitalier de Meaux en Seine-et-Marne. En 2002 : 6 personnes
décèdent à Sarlat en Dordogne. En juillet-août
2003 : une trentaine de cas, dont 4 mortels à Montpellier. Enfin,
autre épidémie à Poitiers : 20 cas dont aucun mortel.
Sans développer la situation de la région Nord-Pas-de-Calais
où le nombre des victimes et des décès dépasse
toutes les situations rencontrées jusqu'ici.
La recrudescence des phénomènes épidémiologiques de
ce type inquiète et appelle des réponses.
Surtout lorsqu'on sait que dans environ 70 % des cas, la forme la plus
sévère de la maladie touche des personnes fragilisées :
des sujets âgés, immunodéprimés, des personnes
atteintes d'autres maladies respiratoires.
Différentes réglementations, relativement inégales,
existent selon les zones sources pour alerter et déceler les risques.
Par exemple pour les sites industriels, selon les termes d'une circulaire de
1999, un industriel doit signaler un incident lorsque la mesure des
concentrations bactériennes est du niveau de 1 000 unités
formant colonie (UFC), ce que l'on appelle le seuil de surveillance
rapprochée, et décider l'arrêt de l'usine à partir
de 100 000 unités formant colonie (UFC), seuil dit d'intervention.
D'une manière générale, les pouvoirs publics doivent
envisager des actions destinées à renforcer la surveillance et
les procédures d'entretien de ces tours
aéroréfrigérées responsables d'environ la
moitié du millier de cas de maladie du légionnaire
détectés ces dernières années. Si les tours
situées dans des usines classées sont bien connues (environ
1 700 en France), celles installées dans les centres commerciaux et
les immeubles sont mal identifiées. Sur les quelques 3 000
contrôles effectués l'an dernier, environ 6 % des cas ont
conduit à demander un nettoyage, et 2 % ont provoqué
l'arrêt pour désinfection. Il reste encore beaucoup à faire.
Pour l'habitat privé, il n'existe pas pour l'instant d'obligation de
contrôle bactériologique spécifique dans les habitations
privées de grande taille (tours, barres d'immeubles) ou les maisons
individuelles. Certes, la loi du 13 décembre 2000 fait obligation, lors
des transactions ou mises en copropriété d'un immeuble à
usage d'habitation, d'un diagnostic technique « Véripierre ».
Mais il ne s'agit là que de contrôles visuels des canalisations
apparentes, qui ne recourent pas à des sondages, endoscopies,
prélèvements dans les tuyaux. La réglementation est donc
insuffisante malgré deux problèmes distincts qui se posent : les
réseaux d'alimentation en eau chaude et, moins fréquemment, les
systèmes de climatisation.
L'absence de réglementation de ce type avait, en mars 2003, fait
reconnaître à l'ancien Directeur général de la
santé, Lucien ABENHAÏM, qu'aucune autorité sanitaire
n'est concernée par l'habitat privatif : « Sauf à ce qu'une
mise en danger de la vie d'autrui soit dénoncée, la Direction
Générale de la Santé ou l'Institut de Veille Sanitaire
n'ont pas mandat de contrôle » dans des bâtiments
privés. Le vide juridique ici ne doit pas demeurer.
Chacun sait aussi que les industriels réalisent eux-mêmes des
auto-contrôles de leurs installations, notamment des tours
auto-réfrigérantes, et qu'il ne suffit que d'une information
à la Direction Régionale de l'Industrie, de la Recherche et de
l'Environnement (DRIRE) pour être conforme à la
réglementation.
Les DRIRE ayant peu de moyens, et insuffisamment dotées en personnels et
techniciens, se voient évidemment dans l'impossibilité de suivre
d'aussi près qu'il le faudrait l'évolution de ces situations.
Il conviendrait, face à cette situation, d'impulser une
démocratisation des contrôles, notamment avec la mise en place de
comités de suivi et de vigilance des risques industriels au plan local,
réunissant : des représentants des populations, des
élus locaux, des salariés et des directions des entreprises, des
services de la Direction Départementale de la Santé, de la DRIRE,
de la Préfecture pour une information complètement transparente
sur l'entretien et le contrôle des différents équipements
et sites.
Les conséquences sanitaires des épidémies de
légionellose, comme la France les a connues, méritent que toutes
ces questions soient reconsidérées et examinées afin que
le législateur, comme les pouvoirs publics, puissent dégager des
moyens permettant de répondre à ces enjeux de santé
publique.
En effet, le respect de toutes ces normes, lorsqu'elles existent,
nécessite que l'État et ses services décentralisés
disposent des moyens suffisants pour assurer le contrôle, prévenir
les risques et, le cas échéant, engager toute mesure
destinée à enrayer la contamination. Or, au jour d'aujourd'hui,
les derniers épisodes de développement de légionellose ont
davantage suscité un sentiment d'abandon chez les populations
exposées que celui d'une véritable prise en charge du
phénomène.
Encore une fois, l'État, dont c'est la compétence, ne semble pas
avoir fait son devoir ni engagé les moyens d'action nécessaires
à enrayer le développement des contaminations.
Il est donc de la responsabilité du Gouvernement d'organiser une
mobilisation exceptionnelle de toutes les équipes pluridisciplinaires
compétentes, françaises ou européennes, dans le domaine de
la santé et de l'environnement. En effet, les moyens humains et
matériels doivent être considérablement accrus.
C'est un véritable plan d'urgence qu'il convient d'impulser pour
garantir la santé de nos populations, les rassurer en toute
transparence.
Une commission d'enquête parlementaire s'impose, par conséquent,
pour faire toute la transparence attendue sur les facteurs risques qui ont
provoqué les épidémies ainsi que leurs conséquences
sanitaires, mais également sur les moyens à mobiliser pour
prévenir, contrôler et contenir tout risque.
Telles sont les motivations qui conduisent le groupe communiste
républicain et citoyen à vous proposer la création d'une
telle commission d'enquête parlementaire.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Article unique
En application de l'article 11 du Règlement du Sénat, est créée une commission d'enquête parlementaire de vingt et un membres chargée d'investiguer sur les facteurs de risques et les conséquences sanitaires d'épidémies de légionellose, mais également sur les moyens des services d'État à renforcer pour prévenir, contrôler et contenir tout risque d'exposition comme de contamination.