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N° 89
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019
Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 octobre 2018 |
PROPOSITION DE LOI
visant à instaurer un mécanisme de « TICPE flottante » afin de préserver le pouvoir d' achat des ménages ,
PRÉSENTÉE
Par MM. Roland COURTEAU, Marc DAUNIS, Patrick KANNER, Maurice ANTISTE, Mme Viviane ARTIGALAS, MM. Jacques BIGOT, Joël BIGOT, Mmes Maryvonne BLONDIN, Nicole BONNEFOY, MM. Henri CABANEL, Yves DAUDIGNY, Alain DURAN, Rémi FÉRAUD, Jean-Luc FICHET, Mmes Martine FILLEUL, Samia GHALI, Nadine GRELET-CERTENAIS, Annie GUILLEMOT, Laurence HARRIBEY, MM. Olivier JACQUIN, Éric KERROUCHE, Mme Claudine LEPAGE, MM. Didier MARIE, Rachel MAZUIR, Mmes Michelle MEUNIER, Marie-Pierre MONIER, Marie-Françoise PEROL-DUMONT, M. Claude RAYNAL, Mme Sylvie ROBERT, MM. Gilbert ROGER, Jean-Pierre SUEUR, Rachid TEMAL, Mme Nelly TOCQUEVILLE, MM. Jean-Marc TODESCHINI, Jean-Louis TOURENNE, Mme Sabine VAN HEGHE, M. Yannick VAUGRENARD et les membres du groupe socialiste et républicain,
(Envoyée à la commission des finances, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES MOTIFS Mesdames, Messieurs, Au cours des derniers mois, le prix du pétrole sur les marchés internationaux, et les prix des carburants et du fioul domestique sur le marché français ont connu une hausse vertigineuse. Une charge de plus en plus lourde pour les Français Cette hausse continue des prix sur les marchés mondiaux se traduit dans le coût des carburants et du fioul pour les ménages comme pour les entreprises. Ainsi, les prix à la pompe ont-ils augmenté, pour le gazole, de plus de 28 centimes au cours des 12 derniers mois (hausse du prix du baril et hausse de la fiscalité écologique). L'envol de ces prix pénalise fortement les ménages ruraux et périurbains. Une forte proportion de l'augmentation des prix provient de la hausse du prix de la matière première et, pour une part, de la fiscalité écologique. Les automobilistes ne sont pas les seuls à ressentir les effets de la hausse des prix du pétrole. Les ménages qui se chauffent au fioul domestique ont ainsi vu ce poste de leur budget augmenter fortement. Au total, les ménages qui peuvent difficilement réduire de façon massive leur consommation de carburant et d'énergie de chauffage se trouvent confrontés à un prélèvement important sur leur pouvoir d'achat, et ce d'autant plus que s'ajoute maintenant une hausse de la fiscalité écologique qui devrait se renforcer encore, en 2019 et les années suivantes. Fiscalité écologique, dont il ne nous appartient pas de critiquer la mise en oeuvre, en raison des dérèglements climatiques que subit la planète, mais qui devrait être compensée par de réels soutiens en faveur des catégories plus modestes pour lesquelles la voiture est incontournable pour se rendre au travail ou qui se trouvent captives des énergies fossiles en matière de chauffage. Cette situation est également très préjudiciable pour bon nombre d'entreprises et de secteurs économiques dont la facture énergétique s'alourdit considérablement. Des réponses s'imposent Conscient des effets sur la facture énergétique des ménages, le groupe socialiste a, à plusieurs reprises, exigé une intervention du Gouvernement. En porte-à-faux avec les estimations de bon nombre d'experts, le Gouvernement a non seulement sous-estimé l'ampleur de la hausse des prix du pétrole, mais également sa durabilité. Faut-il rappeler que les cours du pétrole se situaient autour de 40 dollars, il y a plus d'un an, alors que ceux-ci se sont ensuite élevés entre 75 et 80 dollars. Rappelons aussi que face à une situation semblable, un mécanisme de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) flottante avait été mis en place en 2001, de façon permanente, afin d'atténuer, pour tous les consommateurs, les effets des hausses importantes des cours du pétrole. Nous proposons donc, dans un premier temps, la mise en place d'un dispositif identique en nous laissant la possibilité de les compléter ensuite le présent texte par des mesures destinées à compenser, pour les catégories modestes, les effets de l' augmentation de la fiscalité écologique. Ce mécanisme permettrait, en fait, de rendre aux Français les surplus de recettes (TVA et TICPE) engrangés mécaniquement par l'État du fait de la hausse des cours . Car en effet, au prix hors taxe des carburants ou du fioul s'ajoutent la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) puis la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Or, si la TICPE, qui est une taxe « fixe » quel que soit le prix du pétrole, est exprimée en euros par hectolitre, la TVA est au contraire un impôt proportionnel : 20 % de 40 dollars ne sont, en effet, pas équivalents à 20 % de 70 ou de 80 dollars... Ainsi, quand le cours du pétrole s'élève, la TVA perçue par l'État sur les produits pétroliers consommés par les ménages augmente de façon mécanique. D'où notre proposition visant à instaurer le mécanisme de TICPE flottante, qui permet de rendre aux consommateurs, sous forme d'une baisse de cette TICPE, le surplus de TVA perçu. La mise en oeuvre de la TICPE flottante permettrait ainsi d'assurer, de façon continue, un lissage des effets des hausses des prix sur le marché, favorable à l'ensemble des consommateurs. Le temps est venu aujourd'hui de prendre des mesures fortes pour assurer la défense du pouvoir d'achat des ménages, et notamment des plus modestes, face à la ponction croissante liée au renchérissement des prix du pétrole et à la fiscalité. La hausse des prix du pétrole ne doit pas permettre à l'État d'encaisser des recettes supplémentaires de TVA au détriment du pouvoir d'achat des Français. L'article 1 er de la présente proposition de loi dispose ainsi que la TICPE flottante sera mise en oeuvre à compter du 21 janvier 2019. Cette modification est effectuée le 21 janvier 2019 pour la période du 21 janvier 2019 au 20 mars 2019 si la variation cumulée du cours moyen du pétrole “brent daté” constatée sur la période du 1 er novembre 2018 au 31 décembre 2018 est supérieure de 10 % au cours moyen du mois de janvier 2018. Tout en orientant les comportements dans le sens de la prise en compte des nécessités d'une croissance durable respectueuse de l'environnement, la fiscalité doit permettre de limiter les effets néfastes (pour le pouvoir d'achat et la consommation) de la hausse brutale des prix. À défaut, l'ensemble des Français et de nombreux professionnels continueront de voir leurs revenus et leur pouvoir d'achat amputés par la facture pétrolière. |
Proposition de loi visant à instaurer un mécanisme de “TICPE flottante” afin de préserver le pouvoir d'achat des ménages
Article unique
I. - Le d du 2° du 1 de l'article 265 du code des douanes est ainsi rétabli :
« d) Lorsque le cours moyen du pétrole, dénommé “brent daté”, varie de plus de 10 % dans les conditions précisées au deuxième alinéa du présent d, les tarifs prévus au présent 1 pour les supercarburants mentionnés aux indices d'identification 11 et 11 bis , le gazole mentionné à l'indice d'identification 22 et le fioul domestique mentionné à l'indice d'identification 20 sont corrigés d'un montant égal au produit de la variation en valeur absolue de la moyenne des prix hors taxe de ces produits pétroliers et du taux de 16,388 %. Cette correction est effectuée à la baisse en cas de hausse des prix hors taxe et à la hausse dans le cas contraire.
« Cette modification est effectuée le 21 janvier 2019 pour la période du 21 janvier 2019 au 20 mars 2019 si la variation cumulée du cours moyen du pétrole “brent daté” constatée sur la période du 1 er novembre 2018 au 31 décembre 2018 est supérieure de 10 % au cours moyen du mois de janvier 2018.
« Elle est effectuée pour les périodes ultérieures, lorsque la variation cumulée constatée au cours des bimestres suivants est supérieure de 10 % à la moyenne des prix du “brent daté” qui a entraîné la modification précédente mentionnée au premier alinéa du présent d.
« Ces modifications s'appliquent à compter du 21 du premier mois du bimestre suivant celui au titre duquel une variation de 10 % du cours du “brent daté” a été constatée.
« Les cours moyens du pétrole “brent daté” et les prix moyens hors taxe des supercarburants, du gazole et du fioul domestique sont calculés, pour chacune des périodes mentionnées au présent d, par l'autorité administrative compétente.
« Les modifications prévues au premier alinéa du présent d ne peuvent pas avoir pour effet de porter les tarifs à un niveau supérieur à celui fixé par la loi de finances au tableau B du présent 1. Ces modifications ne sont plus appliquées lorsque le cours moyen bimestriel du “brent daté” est redevenu inférieur à la moyenne constatée au titre du mois de janvier 2018.
« Le ministre chargé du budget constate par arrêté les modifications de tarifs de la taxe intérieure de consommation résultant des alinéas précédents. Un décret fixe les modalités d'application du présent d. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.