Neutralité vestimentaire des élèves de l'enseignement primaire, secondaire et supérieur lorsqu'ils assistent aux cours, passent des concours ou des examens, ainsi que celles des fonctionnaires et des salariés, dans l'exercice de leurs fonctions
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N° 163
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004
Annexe au procès-verbal de la séance du 21 janvier 2004
PROPOSITION DE LOI
visant à garantir la neutralité vestimentaire des élèves de l' enseignement primaire , secondaire et supérieur lorsqu'ils assistent aux cours, passent des concours ou des examens, ainsi que celles des fonctionnaires et des salariés , dans l'exercice de leurs fonctions,
PRÉSENTÉE
Par M. Nicolas ABOUT,
Sénateur.
(Renvoyée à la commission des Affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Éducation nationale. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'éducation, « les
obligations des élèves consistent dans l'accomplissement des
tâches inhérentes à leurs études ; elles
incluent l'assiduité et le respect des règles de fonctionnement
et de la vie collective des établissements ». Ainsi, si les
élèves disposent, au sein de l'institution scolaire, d'un certain
nombre de libertés (liberté d'information et liberté
d'expression), l'exercice de ces libertés ne peut toutefois pas
« porter atteinte aux activités d'enseignement »
(article L. 511-2 du même code). Respecter le bon déroulement
des enseignements, constitue donc une obligation inhérente - voire
première - à la qualité même d'élève.
Le premier devoir de l'élève (du
« disciple », si l'on s'attache au terme premier), c'est en
effet celui d'apprendre. Pour lui, suivre une
« discipline », c'est bien entendu recevoir un
enseignement, étudier une matière, découvrir une branche
de la connaissance - mais c'est aussi, de façon indissociable, montrer
son aptitude à suivre un ensemble de règles, de lois,
d'obligations qui lui sont fixées par cette même discipline ou cet
enseignement.
La discipline scolaire impose aux élèves des
établissements d'adopter une attitude générale - tant
physique que morale - qui ne perturbe pas le bon déroulement des cours.
Le comportement de l'élève se doit d'être en
conformité avec ce qui va lui être demandé pendant le
cours, y compris sur le plan vestimentaire. Il doit avoir un habillement qui
lui permette la pratique de la discipline enseignée. Ainsi, en cours
d'éducation physique, l'élève a l'obligation de
revêtir une tenue de sport. L'apprentissage de la physique-chimie
nécessite le port d'une blouse, etc. Il s'agit, en premier lieu, d'une
question de sécurité pour l'élève, mais pas
uniquement. La tenue vestimentaire fait partie intégrante des outils
dont il doit se munir pour suivre correctement ses cours, au même titre
qu'un cahier, un livre de cours ou une fourniture spéciale, exigé
par une matière ou un enseignement.
Le contrôle continu des connaissances, auquel sont soumis les
élèves lorsqu'ils assistent aux cours, nécessite que leurs
professeurs puissent les identifier de façon certaine et
immédiate. Cela est d'autant plus vrai lorsqu'il s'agit, pour des
examinateurs, de faire passer des concours ou des examens. Suite à une
récente tentative de fraude (où un étudiant, caché
sous un morceau de tissu, était venu passer une épreuve à
la place de sa soeur), une note interne du ministère de
l'Éducation nationale a précisé qu'il fallait interdire
les « tenues contraires à la dignité
humaine » et celles « ne permettant pas de voir le visage
des candidats ». Il convient en effet que les examinateurs puissent,
au minimum, s'assurer que le candidat qu'ils ont en face d'eux soit bien celui
qui figure sur la carte d'identité qu'on leur présente.
C'est pourquoi, considérant que l'école est un lieu
d'apprentissage permanent, que les cours constituent en soi un contrôle
continu des connaissances (comme les examens), il est proposé que les
élèves ne puissent pénétrer en cours que
« la tête et les mains nues et à visage
découvert ». Il convient en effet que les professeurs soient
en mesure de les identifier immédiatement, dès leur entrée
en salle de classe. Cette obligation, insérée dans le code de
l'éducation, dans le chapitre consacré aux « droits et
obligations des élèves », ne vise toutefois que le
temps des enseignements. Elle ne s'applique pas aux périodes qui se
déroulent entre les cours (récréation ou restauration, par
exemple). Elle s'étend, par contre, aux périodes d'examens et de
concours, donnant ainsi force légale à la note interne du
ministère, destinée aux surveillants et aux examinateurs, et dont
l'auteur de cette proposition de loi a pu constater, auprès des
intéressés, le caractère encore quasi confidentiel.
Des exceptions à la règle générale sont toutefois
prévues dans la proposition de loi. Il convient en effet de
prévoir les cas où le port d'un couvre-chef ou d'un masque peut
être recommandé, soit pour des raisons de climat ou de
santé, soit pour des questions d'hygiène ou de
sécurité.
Le présent texte élargit également cette règle de
neutralité vestimentaire aux fonctionnaires et aux salariés, en
tenant compte des mêmes cas d'exceptions. Sa généralisation
au monde du travail nécessite, d'une part, la modification de la loi du
13 juillet 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires et, d'autre
part, l'insertion d'une nouvelle sous-section dans le code du travail, afin que
cette disposition d'ordre législatif puisse s'imposer au
règlement intérieur des entreprises. Dans les deux cas, le
non-respect de cette obligation pourra donner lieu à des sanctions
disciplinaires.
C'est donc dans un esprit de généralisation de ce dispositif,
tant pour assurer la conformité vestimentaire des élèves
avec la pratique des enseignements, que pour garantir la neutralité des
fonctionnaires et des salariés, dans l'exercice de leurs fonctions,
qu'il vous est proposé d'adopter, Mesdames, Messieurs, la
présente proposition de loi.
* *
*
PROPOSITION DE LOI
Article 1
er
L'article L. 511-2 du code de l'éducation est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf dans les cas où les conditions climatiques, les
disciplines enseignées ou un état pathologique le recommandent,
les élèves des écoles, collèges et lycées et
ceux de l'enseignement supérieur assistent et participent aux cours, aux
concours et aux examens, la tête et les mains nues, et à visage
découvert. »
Article 2
Après l'article 28 de la loi n° 83-634 du 13
juillet
1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est
inséré un article 28
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 28
bis.- Sauf dans les cas où les conditions
climatiques, les nécessités de service, d'hygiène ou de
sécurité ou un état pathologique le recommandent et,
conformément au principe de neutralité des services publics, les
fonctionnaires exercent leurs fonctions la tête et les mains nues, et
à visage découvert. »
Article 3
L'intitulé de la section VI du chapitre II du
titre II du livre I
er
du code du travail, est
rédigé comme suit :
« Section VI - Neutralité vestimentaire, règlement
intérieur, protection des salariés et droit
disciplinaire ».
Article 4
Au
début de la section VI du chapitre II du titre II du
livre I
er
du code du travail, il est inséré une
sous-section 1 A intitulée comme suit :
« Sous-section 1 A - Neutralité vestimentaire des
salariés ».
Article 5
Dans la
sous-section 1 A de la section VI du chapitre II du titre II du
livre I
er
du code du travail, il est inséré un
article L. 122-32 ainsi rédigé :
«
Art. L. 122-32
.- Les salariés respectent la
même obligation de neutralité vestimentaire que celle
prévue à l'article 28
bis
de la loi n°
83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Le
non-respect de cette obligation peut donner lieu à des sanctions
disciplinaires de la part de l'employeur, qui peuvent aller jusqu'au
licenciement. »