EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, les communes sont appelées à prendre en charge les frais des cultes statutaires, c'est-à-dire des quatre confessions reconnues 1 ( * ) par le droit local issu du Concordat de 1801, en cas d'insuffisance des revenus des établissements publics 2 ( * ) de ces cultes, auxquels incombent ces frais à titre principal.
Cette obligation, qui joue par conséquent à titre subsidiaire, est inscrite au 3° de l'article L. 2543-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Elle porte notamment sur les dépenses afférentes à la réparation et à l'entretien des édifices du culte.
Sa mise en application implique que soient définies les modalités de répartition de ces frais lorsque le ressort cultuel d'un édifice s'étend au-delà d'une seule commune, ce qui est souvent le cas, pour les temples protestants et les synagogues.
Or, aucune disposition ne prévoit la clef de répartition pour les temples et les édifices du culte israélite. Le législateur n'est en effet intervenu que pour le culte catholique : selon l'article 4 de la loi du 14 février 1810 relative aux revenus des fabriques des églises, lorsque le ressort d'une paroisse comprend plusieurs communes, ces frais sont répartis entre ces communes « au marc le franc » , soit au prorata des contributions directes locales.
Répondant à une question orale 3 ( * ) lors de la séance du Sénat du 24 octobre 2017, Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'Intérieur, a d'ailleurs confirmé qu'aucune disposition équivalente ne s'appliquait aux autres confessions, précisant qu' « il est communément admis que [peut] être appliquée, par analogie, la règle de répartition des charges selon le critère fiscal de la loi de 1810 ».
Cette application « par analogie » peut sans doute se justifier au nom du pragmatisme, puisqu'il faut bien procéder à une répartition des frais, mais son fondement juridique reste hypothétique. Deux siècles après les églises catholiques, il est plus que temps de prendre une initiative et de sécuriser le droit applicable aux temples protestants 4 ( * ) .
Ces édifices sont en effet ceux à l'égard desquels le « vide juridique » est le plus frappant. Comme l'a relevé la Ministre en réponse à la question orale susvisée, les circonscriptions rabbiniques ont à tout le moins été délimitées réglementairement. Cela permet d'identifier les communes appelées à contribuer aux dépenses d'entretien des synagogues. Il en va autrement des paroisses protestantes, « pour lesquelles les communes comprises dans le ressort paroissial n'ont pas été précisément désignées ».
C'est à ce « vide juridique » pour la prise en charge des frais d'entretien des temples par les communes que tend à répondre la présente proposition de loi 5 ( * ) . À cette fin, elle prévoit :
- de poser un critère -inspiré de celui décidé pour les églises catholiques, à savoir une répartition au « marc le franc » - pour le partage des frais entre les communes. Tel est l'objet de l'article premier, complétant pour cela le 3° de l'article L. 2543-3 du CGCT par un renvoi à la loi de 1810 ; un tel renvoi s'inspire de ceux auxquels procède déjà le 2° du même article, relatif aux indemnités de logement des ministres des cultes ;
- d'exiger que les périmètres des paroisses protestantes soient déterminés dans les six mois suivant la publication de la loi. Cette tâche est confiée au représentant de l'État dans le département, déjà compétent, aux termes du décret du 26 mars 1852 portant réorganisation des cultes protestants, pour arrêter les limites des paroisses de ces cultes. L'arrêté sera pris après avis des conseils presbytéraux et des conseils municipaux.
* 1 Cultes catholique, israélite et protestants (luthérien et réformé).
* 2 Fabriques d'église, consistoires israélites départementaux et conseils presbytéraux.
* 3 Question orale n°073, JO Sénat du 24 octobre 2017.
* 4 Question écrite n° 440, JO Sénat du 13 juillet 2017.
* 5 Cette sécurisation de la pratique n'emporte notamment pas extension du droit local des cultes d'Alsace-Moselle, ce qui garantit ainsi la conformité du dispositif envisagé avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel.