NOTE DE SYNTHESE
En
France, l'enfant légitime porte obligatoirement le nom de son
père. Le nom de la mère peut seulement être ajouté,
à titre d'usage, mais n'est pas transmissible. L'enfant naturel porte
également le nom de son père, dans la mesure où il a
été reconnu simultanément par ses deux parents. Dans le
cas contraire, il a le nom de sa mère. Quant à l'enfant
adopté, lorsque l'adoption a été réalisée
sous forme plénière, il perd son nom pour prendre celui de la
personne qui l'adopte ou celui du mari s'il est adopté par un couple.
Préalablement à l'élaboration d'un projet de loi visant
à rénover le droit de la famille, un rapport a été
demandé par le ministre de la Justice à Mme Françoise
Dekeuwer-Defossez. S'agissant du nom patronymique, il préconise
notamment d'adopter les mesures suivantes :
- donner la possibilité aux parents de changer, sous contrôle
judiciaire, le nom de leur enfant, pour que ce dernier puisse prendre le nom du
parent qui ne lui a pas transmis le sien, et offrir cette faculté
à l'enfant lui-même ;
- en cas de changement dans la filiation, c'est-à-dire notamment en cas
d'adoption, autoriser l'enfant, sous contrôle du juge, à conserver
le nom qu'il portait précédemment.
Il a donc semblé utile d'examiner l'ensemble des dispositions relatives
à la transmission du nom patronymique dans quelques pays
étrangers : l'
Allemagne
, l'
Angleterre
et le
Pays
de Galles
, la
Belgique
, le
Danemark
, l'
Espagne
et
l'
Italie
. Les règles applicables en France ont également
été étudiées.
Pour chacun de ces pays, on a analysé les modalités de
transmission du nom patronymique par filiation et par adoption, ainsi que par
mariage, bien que ce dernier point ne soit pas abordé dans le rapport de
Mme Dekeuwer-Defossez.
Cette étude fait apparaître que :
- la Belgique, la France et l'Italie sont les seuls pays où l'
enfant
légitime
porte obligatoirement le nom de son père ;
- en Allemagne, en Angleterre et au Pays de Galles, ainsi qu'au Danemark, les
parents choisissent le nom qu'ils transmettent à l'
enfant
naturel
tandis que, dans les autres pays, le nom de l'enfant naturel
dépend de l'ordre d'établissement des filiations maternelle et
paternelle ;
- dans tous les pays étudiés, l'
adoption
plénière
entraîne un changement de nom, à la
différence de l'
adoption
simple
, qui permet à
l'enfant adopté de conserver son nom ;
- d'après la loi, le
mariage
est, sauf en Allemagne, sans effet
sur le nom des époux.
1) La Belgique, la France et l'Italie sont les seuls pays où l'enfant
légitime porte obligatoirement le nom de son père
a) L'enfant légitime porte le nom de son père en Belgique, en
France et en Italie
Cette règle résulte de la loi en Belgique, et de la coutume en
France ainsi qu'en Italie. En France, l'enfant peut, à titre d'usage,
ajouter au nom de son père celui de sa mère. Ce nom d'usage, qui
n'est pas transmissible, ne figure ni sur les registres de l'état civil
ni sur le livret de famille.
b) En Espagne l'enfant légitime porte à la fois le nom de son
père et celui de sa mère
En Espagne, chaque personne porte un nom double, et l'enfant légitime a
comme premier nom le premier des noms de son père et comme second nom,
le premier des noms de sa mère.
c) En Angleterre et au Pays de Galles, les parents choisissent le nom qu'ils
transmettent à l'enfant légitime
En vertu de la coutume, l'enfant légitime prend
généralement le nom de son père. Toutefois, les parents
peuvent décider qu'il porte le nom de sa mère ou leurs deux noms,
reliés par un trait d'union et dans l'ordre qu'ils souhaitent, voire un
tout autre nom qu'ils choisissent librement.
d) En Allemagne et au Danemark, l'enfant légitime porte le nom de
famille de ses parents et, à défaut d'un nom commun aux parents,
ces derniers choisissent le nom qu'ils lui transmettent
Dans ces deux pays, si les époux ne portent pas le même nom de
famille, ils décident ensemble s'ils donnent à leur enfant le nom
du père ou celui de la mère.
Au Danemark, la pratique du nom " intermédiaire ",
placé entre le prénom et le nom patronymique, permet à
beaucoup d'enfants de porter des noms doubles.
2) Les règles de transmission du nom à l'enfant naturel sont
très différentes d'un pays à l'autre
a) En Allemagne, en Angleterre et au Pays de Galles, ainsi qu'au Danemark,
les parents choisissent le nom qu'ils transmettent à l'enfant naturel
En Angleterre et au Pays de Galles, la règle, qui résulte de la
coutume, est la même que celle qui est appliquée à l'enfant
légitime. De plus, la mère a la possibilité de donner
à l'enfant le nom de son père, même si celui-ci n'a pas
reconnu l'enfant et s'il conteste sa paternité.
En Allemagne et au Danemark, la règle résulte de la loi :
lorsque les parents exercent conjointement l'autorité parentale, ils
choisissent le nom de l'enfant naturel selon les mêmes règles que
s'il s'agissait d'un enfant légitime. Ils décident donc si
l'enfant porte le nom du père ou celui de la mère.
Le Danemark applique également cette règle lorsque
l'autorité parentale est exercée par un seul parent : ce
dernier décide si l'enfant porte le nom de son père ou celui de
sa mère. En revanche, en Allemagne, lorsqu'un seul des parents
détient l'autorité parentale, c'est son nom qui est en principe
transmis à l'enfant.
b) Dans les autres pays, le nom de l'enfant naturel dépend de l'ordre
d'établissement des filiations maternelle et paternelle
En Belgique, en Espagne, en France et en Italie, lorsque les parents naturels
reconnaissent simultanément l'enfant, les règles de la filiation
légitime s'appliquent. L'enfant porte donc le nom du père, sauf
en Espagne où il porte un nom double. De plus, en Espagne, la
reconnaissance de paternité peut avoir lieu dans les huit jours qui
suivent la naissance sans que la mère ait la possibilité de s'y
opposer.
Dans ces quatre pays, lorsque la filiation paternelle n'est pas établie,
l'enfant porte le nom de sa mère. En Espagne, il porte alors les deux
noms de sa mère.
Lorsque la filiation paternelle est établie après la filiation
maternelle, la même règle s'applique, mais seulement en Belgique,
en France et en Italie. Cependant, en Belgique et en France, les parents
peuvent se mettre d'accord pour que l'enfant porte le nom du père. En
Italie, dans cette hypothèse, c'est le juge qui décide en
fonction de l'intérêt de l'enfant. En revanche, en Espagne, dans
la mesure où la mère ne s'y oppose pas, les noms de l'enfant sont
modifiés pour que le premier nom de l'enfant soit le premier nom du
père.
3) Dans tous les pays étudiés, l'adoption
plénière entraîne un changement de nom, à la
différence de l'adoption simple, qui permet à l'enfant
adopté de conserver son nom
a) L'adoption plénière se traduit par la transmission du nom
de l'adoptant à l'enfant adopté
Dans tous les pays sous revue, l'adoption plénière a pour
conséquence de substituer la filiation adoptive à la filiation
d'origine. L'enfant adopté cesse en principe d'appartenir à sa
famille biologique, sauf dans des cas particuliers, comme lorsqu'un
époux adopte l'enfant de son conjoint. L'adoption plénière
entraîne le changement de nom de l'adopté. Cependant, en
Allemagne, au Danemark et en Espagne, l'enfant adopté a la
possibilité de ne pas perdre le nom qu'il portait
précédemment, puisque ce nom peut, lorsque les circonstances le
justifient, être accolé au nom d'adoption.
Le nom qui est donné à l'enfant adopté varie selon que
l'adoption est réalisée par un célibataire ou par un
couple marié
(1(
*
))
.
En cas d'adoption par un couple marié, les règles relatives
à la transmission du nom à l'enfant légitime s'appliquent
et, lorsqu'un enfant est adopté par un célibataire, ce qui est
possible dans tous les pays étudiés sauf l'Italie, l'enfant
reçoit le nom de la personne qui l'adopte.
b) L'adoption simple, qui n'existe qu'en Belgique, en France et en Italie,
permet à l'enfant adopté de garder son nom
C'est en effet la règle en France et en Italie, où l'enfant
conserve son nom, mais en y ajoutant le nom de l'adoptant.
En revanche, en Belgique, l'adoption simple a les mêmes effets que
l'adoption plénière pour ce qui concerne la transmission du nom,
et l'adopté change donc en principe de nom. Cependant, le code civil
prévoit qu'il puisse conserver son nom en le faisant suivre de celui de
l'adoptant, ou de celui du mari dans le cas d'une adoption par un couple.
4) D'après la loi, le mariage n'a d'effet automatique sur le nom des
époux qu'en Allemagne, mais la pratique contredit largement cette
affirmation
a) Le code civil allemand prévoit que les époux doivent
choisir un nom de famille au moment du mariage
Lors du mariage, les conjoints décident si leur nom de famille sera
celui de la femme ou celui du mari, et l'époux dont le nom n'a pas
été retenu comme nom du couple peut continuer à porter son
propre nom, précédé ou suivi du nom du couple.
Si le couple ne choisit pas un nom de famille, chaque époux continue
à porter le nom qu'il avait avant le mariage.
b) Dans les autres pays, les époux conservent en principe leur nom
L'Espagne est le seul pays où cette règle ne souffre aucune
atténuation
Chacun des époux conserve en effet son nom, sans même
acquérir un droit d'usage du nom du conjoint.
En Angleterre et au Pays de Galles, en Belgique, au Danemark, en France et en
Italie, le mariage peut se traduire par un changement de nom, notamment pour la
femme.
En Angleterre et au Pays de Galles, chacun des époux peut conserver son
nom, prendre celui du conjoint, ou porter les deux noms reliés par un
trait d'union.
En Belgique et en France, l'épouse a le droit de porter le nom de son
mari, mais de plus en plus de femmes gardent leur nom, en y joignant
éventuellement celui de leur mari.
Le code civil italien donne à l'épouse le droit d'ajouter
à son nom celui de son mari.
Au Danemark, les époux conservent en principe leur nom, mais ils
peuvent, au moment du mariage, choisir comme nom de famille le nom de l'un
d'eux, dans la mesure où ce nom n'a pas été lui-même
acquis à l'occasion d'un précédent mariage. En pratique,
l'ajout d'un nom " intermédiaire " permet à la plupart
des époux de garder leur propre nom et d'y associer celui de leur
conjoint.
c) De façon corollaire, le divorce est, sauf en Belgique, en France
et en Italie, sans effet sur le nom des ex-conjoints
La question ne se pose pas en Espagne où le mariage est lui-même
sans effet sur le nom des conjoints.
En Allemagne, en Angleterre et au Pays de Galles, ainsi qu'au Danemark, si le
mariage s'était traduit par un changement de nom pour l'un des
époux, ce dernier peut, après le divorce, conserver le nom de son
ex-conjoint.
En Belgique, en France et en Italie, le divorce entraîne en principe la
perte du droit d'usage du nom de l'ex-conjoint. Cette règle souffre
cependant des exceptions : en France et en Italie, la femme peut conserver
l'usage du nom du mari lorsqu'elle peut justifier un intérêt
particulier pour elle-même ou pour les enfants. Il en va de même en
Belgique lorsque le mari l'y autorise, cette autorisation étant
toutefois temporaire. De plus, en France, la femme a le droit de conserver le
nom de son ex-conjoint lorsque le divorce a été demandé
par le mari.