ALLEMAGNE
Les
fondements juridiques
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I. LE CONSEIL D'ETABLISSEMENT
1) La constitution du conseil d'établissement
Chaque
établissement autonome relevant d'une entreprise de droit privé
et employant au moins cinq salariés permanents de plus de dix-huit ans,
trois d'entre eux faisant partie de l'établissement depuis au moins six
mois, doit constituer un conseil d'établissement dont les membres sont
élus au scrutin secret. Il faut faire partie de l'établissement
depuis au moins six mois pour être éligible.
Le conseil
d'établissement se compose uniquement de représentants des
salariés
. Les candidatures sont présentées par un
vingtième des électeurs ou par les syndicats
représentés dans l'établissement.
De plus, il existe un conseil d'entreprise au niveau de l'entreprise et, le cas
échéant, un conseil de groupe, sa constitution étant
facultative.
Tous les salariés d'au moins dix-huit ans sont électeurs,
à l'exception des cadres dirigeants, dont la représentation est,
dans les établissements les plus importants, assurée par le
comité des cadres.
Le conseil d'établissement est élu pour quatre ans et sa taille
varie en fonction du nombre des salariés ayant la qualité
d'électeur. L'effectif du conseil est toujours impair, comme l'indique
le tableau ci-après :
Effectif de l'établissement |
Nombre de membres du conseil d'établissement |
|
|
Total |
Affectés à plein temps |
de 5 à 20 |
1 |
0 |
de 21 à 50 |
3 |
0 |
de 51 à 150 |
5 |
0 |
de 151 à 300 |
7 |
0 |
de 301 à 600 |
9 |
1 |
de 601 à 1.000 |
11 |
2 |
de 1.001 à 2.000 |
15 |
3 |
de 2.001 à 3.000 |
19 |
4 |
de 3.001 à 4.000 |
23 |
5 |
de 4.001 à 5.000 |
27 |
6 |
de 5.001 à 6.000 |
29 |
7 |
de 6.001 à 7.000 |
29 |
8 |
de 7.001 à 8.000 |
31 |
9 |
de 8.001 à 9.000 |
31 |
10 |
plus de 9.000 |
31 et 2 membres supplémentaires par tranche de 3.000 salariés |
10 et, au-delà de 10.000, 1 membre supplémentaire par tranche de 2.000 salariés |
Si
l'établissement emploie des ouvriers et des employés, le
collège minoritaire doit avoir un nombre minimal de représentants
dans le conseil. Pour cette raison, on procède
généralement à un vote par collège.
Malgré les prescriptions législatives, la taille de
l'établissement influe beaucoup sur l'existence du conseil. Disposent
d'un conseil d'établissement :
- 1 % des établissements comptant entre 5 et
10 salariés ;
- les deux tiers des établissements d'au moins cinquante
salariés ;
- plus de 98 % des établissements de plus de
250 salariés.
2) Le fonctionnement du conseil d'établissement
Outre la
rencontre mensuelle entre le conseil et l'employeur, qui est prévue par
la loi, le conseil se réunit à échéances
régulières, ainsi que sur demande de l'employeur ou du quart de
ses membres.
L'employeur ne participe aux réunions que si elles ont lieu à sa
demande, à moins qu'il ne soit invité.
Le conseil d'établissement convoque une fois par trimestre une
réunion de l'ensemble des salariés, au cours de laquelle il rend
compte de son activité. L'employeur participe à cette
réunion trimestrielle.
3) Le rôle du conseil d'établissement
L'article 2 de la loi de 1972 astreint le conseil
d'établissement et l'employeur à "
collaborer en toute
confiance
".
L'article 80 de la même loi définit ainsi les attributions
générales du conseil d'établissement :
- veiller à ce que les dispositions législatives,
réglementaires et conventionnelles intéressant les
salariés leur soient appliquées ;
- demander à l'employeur toute mesure utile à
l'établissement et au personnel ;
- prendre en compte les suggestions des salariés et, lorsque celles-ci
paraissent justifiées, agir auprès de l'employeur pour qu'elles
soient appliquées ;
- promouvoir l'emploi et l'intégration des handicapés, des
personnes âgées et des étrangers et, de façon
générale, de toutes les personnes nécessitant une
protection particulière.
Plus précisément, le conseil d'établissement a,
d'après la loi,
trois principaux domaines d'intervention
:
les "
affaires sociales
"
, les "
questions
de personnel
"
et les "
affaires
économiques
"
. Dans chacun de ces domaines, ses pouvoirs
diffèrent.
a) Les " affaires sociales "
Le
conseil d'établissement dispose d'une compétence
générale, l'article 88 de la loi lui permettant de conclure
des accords d'établissement avec l'employeur. De plus, le conseil
d'établissement jouit du
pouvoir de codécision
pour chacun
des points énumérés à l'article 87, dans la
mesure où ni une loi ni une convention collective ne comporte de
règles spéciales :
- questions disciplinaires ;
- aménagement du temps de travail ;
- modalités de paiement des salaires ;
- organisation des congés payés ;
- contrôle des performances ;
- hygiène et sécurité ;
- gestion des oeuvres sociales ;
- attribution de logements appartenant à l'entreprise ;
- structure des salaires et méthodes de rémunération ;
- barèmes de primes et rémunérations liées aux
performances ;
- principes relatifs aux suggestions faites dans l'établissement.
Le pouvoir de codécision en matière sociale se concrétise
dans des accords d'établissement et se traduit par le fait que
l'employeur ne peut décider sans l'accord exprès du
conseil
. En cas de désaccord, seule
la commission interne de
conciliation
de l'établissement, organe paritaire
ad hoc
,
peut prendre la décision.
Les mesures prises par l'employeur en contravention avec le droit de
codécision du conseil d'établissement en matière sociale
sont inopposables aux salariés.
b) Les " questions de personnel "
L'employeur doit informer le conseil d'établissement de
toutes les décisions importantes relatives à la gestion du
personnel et concernant l'ensemble du personnel (embauches, classification,
formation...).
De plus, dans les établissements de plus de 20 salariés, le
conseil d'établissement doit être consulté avant toute
embauche et toute mutation. Il peut s'y opposer dans certains cas prévus
par la loi (par exemple si le recrutement ne respecte pas les critères
de sélection de l'entreprise ou s'il risque d'entraîner des
licenciements injustifiés). En cas d'opposition, l'affaire peut
être portée devant le juge.
Le conseil d'établissement doit être consulté avant tout
licenciement, sinon ce dernier est sans effet. Il peut s'y opposer dans
certains cas prévus par la loi (par exemple lorsque le licenciement est
contraire aux critères de sélection habituellement
utilisés ou lorsque le salarié pourrait être employé
dans un autre poste), sans que son avis lie l'employeur. L'opposition du
conseil d'établissement a pour seul effet que le salarié, dans la
mesure où il a engagé une action contre son licenciement, peut
exiger la poursuite du contrat de travail jusqu'à ce que le juge ait
pris une décision ayant acquis force de chose jugée.
Les critères de sélection éventuellement utilisés
pour l'embauche de salariés doivent être approuvés par le
conseil d'établissement. Il en va de même pour les mesures prises
en matière de formation professionnelle. Le conseil
d'établissement dispose également du droit de codécision
lorsque l'employeur modifie les conditions de travail, sans tenir compte de
l'état des connaissances et des pratiques du moment.
c) Les " affaires économiques "
Dans ce
domaine, le pouvoir du conseil d'établissement a une portée
limitée.
Dans les entreprises de plus de 100 salariés, la loi institue un
comité économique "
qui a pour rôle de
délibérer des affaires économiques avec le chef
d'entreprise et d'en informer le conseil d'établissement
".
De plus, elle prévoit, pour les établissements de plus de
20 salariés, un
droit
d'information et de
consultation
du conseil d'établissement
en cas de
transformations
de l'établissement
, c'est-à-dire les
cas suivants :
- fermeture de l'établissement ou réduction substantielle
d'activité ;
- déménagement complet ou transfert d'une grande partie de
l'activité ;
- regroupement avec d'autres établissements ;
- modifications fondamentales de l'organisation, des objectifs ou des
installations ;
- introduction de nouvelles méthodes de travail ou de nouveaux
procédés de fabrication.
L'employeur et le conseil doivent tenter de trouver un accord écrit sur
les transformations envisagées. Cet accord suppose l'élaboration
d'un plan social qui atténue les conséquences économiques
et sociales de la transformation pour les salariés. En cas de
désaccord sur l'opération de transformation ou sur le plan
social, le président de l'office régional du travail peut tenter
une médiation. Si cette médiation échoue, la commission
interne de conciliation peut trancher en dernier ressort.
II. LA PARTICIPATION AU CONSEIL DE SURVEILLANCE DES SOCIETES DE CAPITAUX
Connue sous le nom de cogestion ( Mitbestimmung ), la participation des salariés au conseil de surveillance est applicable aux sociétés de capitaux , c'est-à-dire aux sociétés par actions, aux SARL et aux sociétés en commandite par actions, les plus importantes. Le conseil de surveillance choisit les membres du directoire et contrôle son activité. Les décisions exigeant l'approbation du conseil de surveillance varient en fonction des statuts de chaque société.
1) Dans les entreprises minières et sidérurgiques de plus de 1.000 salariés
Aux
termes de la loi du 21 mai 1951, complétée par celle du
7 août 1956,
la composition du conseil de surveillance est
presque paritaire
. Il se compose en effet de 11 membres
(1(
*
))
:
- cinq représentants des salariés, dont deux sont
désignés par les conseils d'établissement parmi les
employés de l'entreprise et trois par les organisations syndicales les
plus représentatives ;
- cinq représentants des actionnaires ;
- un onzième membre neutre, choisi par les dix autres membres du conseil
de surveillance. Sa candidature doit recueillir l'assentiment d'au moins trois
représentants des salariés et de trois représentants des
actionnaires. En cas de désaccord, il est prévu une
procédure complexe de désignation (comité de conciliation,
cour d'appel...).
Dans les entreprises relevant de la loi de 1951, le directoire comporte un
"
directeur du travail
", chargé des questions
sociales et qui ne peut être désigné ni être
révoqué sans l'accord de la majorité des
représentants des salariés au conseil de surveillance.
Ce régime concerne une vingtaine d'entreprises employant environ
400.000 salariés.
2) Dans les entreprises de plus de 2.000 salariés
La loi
du 4 mai 1976 a instauré le
paritarisme du conseil de
surveillance en donnant cependant un avantage aux actionnaires.
L'effectif du conseil de surveillance varie en fonction de celui de
l'entreprise selon les indications du tableau ci-après :
Effectif de l'entreprise |
Effectif du conseil de surveillance |
Nombre de représentants des salariés |
de 2.000 à 10.000 salariés |
12 |
6, dont 2 représentants des syndicats |
de 10.000 à 20.000 salariés |
16 |
8, dont 2 représentants des syndicats |
plus de 20.000 salariés |
20 |
10, dont 3 représentants des syndicats |
Parmi
les représentants des salariés, il doit y avoir au moins un
représentant des cadres dirigeants. De plus, le président du
conseil de surveillance, qui doit être élu avec les deux tiers des
voix, dispose de deux voix en cas d'égalité, sans que cette
règle ne s'applique au vice-président lorsque le président
est empêché.
Enfin, lorsque la majorité des deux tiers, nécessaire à
l'élection du président, n'est pas atteinte, ce dernier est
élu par les seuls représentants des actionnaires, tandis que ceux
des salariés élisent le vice-président.
Ces différentes dispositions assurent donc, en dernier ressort, la
prééminence des actionnaires
.
Ce régime concerne environ 500 entreprises employant
quatre millions de salariés.
3) Dans les entreprises comprenant entre 500 et 2.000 salariés
Les
articles non abrogés de la loi de 1952 sur l'organisation interne de
l'entreprise continuent à s'appliquer à ces entreprises.
Les représentants des salariés
constituent
un
tiers des membres du conseil de surveillance
. Par leur faiblesse
numérique, les représentants des salariés ne peuvent
guère influencer les décisions du conseil de surveillance.
Le nombre total des membres du conseil de surveillance résulte des
règles du droit des sociétés pour les
sociétés par actions, et des statuts ou d'une décision de
l'assemblée pour les autres sociétés.
Lorsque le conseil de surveillance comporte plusieurs représentants des
salariés, il doit y avoir au moins un représentant des ouvriers
et un représentant des employés.
* *
*
De façon générale, le pouvoir d'intervention des salariés se trouve renforcé par des organisations syndicales puissantes et par la pratique des négociations préalables entre partenaires sociaux.