Italie
Le régime applicable à l'équivalent des monuments historiques est fixé par le code des biens culturels et du paysage qui résulte du décret législatif 5 ( * ) n° 42 du 22 janvier 2004.
1. Sommaire
La première partie de ce texte est consacrée aux dispositions générales et la seconde aux « Biens culturels » (beni culturali) . Cette seconde partie se divise elle-même en deux titres respectivement consacrés à la protection des biens culturels, d'une part, ainsi qu'à leur utilisation et à leur valorisation, d'autre part.
Le sommaire du code des biens culturels et du paysage se présente comme suit.
Sommaire du décret législatif n° 42 du 22 janvier 2004 portant code des biens culturels et du paysage
Première partie :
Art. 1 - Principes Art. 2 - Patrimoine culturel Art. 3 - Protection du patrimoine culturel Art. 4 - Attributions de l'État en matière de protection du patrimoine culturel Art. 5 - Coopération des régions et des autres collectivités territoriales en matière de protection du patrimoine culturel Art. 6 - Valorisation du patrimoine culturel Art. 7 - Missions de valorisation du patrimoine culturel Art. 8 - Régions et provinces à autonomie spéciale Art. 9 - Biens culturels d'intérêt religieux Seconde partie : Biens culturels Titre I : Protection Chapitre 1 : Objet de la protection Art. 10 - Biens culturels Art. 11 - Des choses soumises à des mesures de protection particulières Art. 12 - Vérification de l'intérêt culturel Art. 13 - Déclaration de l'intérêt culturel Art. 14 - Procédure de déclaration Art. 15 - Notification de la déclaration Art. 16 - Recours administratif contre la déclaration Art. 17 - Inventaire Art. 18 - Surveillance Art. 19 - Contrôle Art. 20 - Interventions prohibées Art. 21 - Interventions soumises à autorisation
Art. 23 - Procédure de construction simplifiée Art. 24 - Interventions sur les biens publics Art. 25 - Conférences de services Art. 26 - Évaluation de l'impact environnemental Art. 27 - Situations d'urgence Art. 28 - Mesures conservatoires et préventives Section 2 : Mesures de conservation Art. 29 - Conservation Art. 30 - Obligations de conservation Art. 31 - Interventions de conservation volontaires Art. 32 - Interventions de conservation imposées Art. 33 - Procédure d'exécution des interventions de conservation imposées Art. 34 - Coût des interventions de conservation imposées Art. 35 - Intervention financière du ministère Art. 36 - Versement de la contribution publique Art. 37 - Bonification d'intérêts Art. 38 - Accès du public aux biens culturels Art. 39 - Interventions conservatoires sur des biens de l'État Art. 40 - Interventions conservatoires sur des biens des régions et des autres collectivités territoriales [...]
Section 3 : Autres formes
Art. 45 - Prescriptions de protection indirecte Art. 46 - Procédure de protection indirecte Art. 47 - Notification des prescriptions de protection indirecte et recours administratif [...] Art. 49 - Affiches et panneaux publicitaires Art. 50 - Démembrement des biens culturels [...] Art. 52 - Exercice du commerce dans des zones de valeur culturelle et dans des locaux historiques traditionnels
Chapitre 4 : Circulation
Section 1 : Aliénation et autres modes de transmission Art. 53 - Biens du domaine culturel Art. 54 - Biens inaliénables Art. 55 - Aliénabilité des biens immeubles appartenant au domaine culturel, autorisation [...] Section 2 : Préemption Art. 58 - Échange Art. 59 - Communication des transferts de propriété Art. 60 - Acquisition par préemption [...] Chapitre 5 : Circulation au niveau international [...] Chapitre 6 : Inventions et découvertes [...] Titre II : Jouissance et valorisation Chapitre 1 : Jouissance des biens culturels Section 1 : Principes généraux Art. 101 - Instituts et lieux de culture Art. 102 - Jouissance des instituts et lieux de culture publics Art. 103 - Accès aux instituts et aux lieux de culture Art. 104 - Jouissance des biens culturels privés Art. 105 - Droit d'usage et jouissance du public Art. 106 - Usage individuel des biens culturels [...]
Chapitre 2 : Principes
Art. 111 - Activité de valorisation Art. 112 - Valorisation des biens culturels publics Art. 113 - Valorisation des biens culturels privés Art. 114 - Niveaux de qualité de la valorisation Art. 115 - Modalités de gestion Art. 116 - Protection des biens attribués ou concédés Art. 117 - Services au public Art. 118 - Promotion des activités d'étude et de recherche Art. 119 - Diffusion de la connaissance sur le patrimoine culturel Art. 120 - Sponsorisation des biens culturels Art. 121 - Accords avec des fondations bancaires [...]
Titre III : Normes transitoires
[...] Troisième partie : Biens paysagers [...] Quatrième partie : Sanctions [...] |
1. 2. Contenu
• Principes
En vertu du premier article de ce texte, « La République protège et valorise le patrimoine culturel » dont « la protection et la valorisation concourent à préserver la mémoire de la communauté nationale et de son territoire et à promouvoir le développement de la culture. »
• Définition du patrimoine culturel
Le « patrimoine culturel » (patrimonio culturale) se compose des biens culturels et des biens paysagers. Sont des biens culturels les choses immeubles et meubles qui présentent un intérêt artistique, historique, archéologique, ethnoanthropologique, archivistique et bibliographique ainsi que les autres choses définies par la loi telles que des éléments qui ont une valeur en termes de civilisation (quali testimonianze aventi valore di civiltà) (article 2).
Constituent de plein droit des biens culturels les biens meubles et immeubles appartenant à l'État, aux régions, aux collectivités territoriales ainsi qu'à d'autres personnes publiques ou assimilées en vertu de la loi (Église), qui « présentent un intérêt artistique, historique, archéologique ou ethnoanthropologique » ainsi que : les collections des musées, les archives publiques, les collections de livres des bibliothèques, y compris, notamment, les villas, parcs et jardins ayant un intérêt artistique ou historique, les places publiques, rues et espaces urbains ouverts et les architectures rurales témoignant de l'économie rurale traditionnelle (article 10).
Sont soumis à des dispositions de protection particulière : les fresques, blasons, graffitis, pierres, inscriptions et autre éléments décoratifs des édifices, les ateliers d'artistes, les zones publiques où est susceptible de se dérouler le commerce ambulant, les moyens de transport de plus de 75 ans et les vestiges de la Première guerre mondiale (article 11).
Constituent des biens culturels du fait d'une « déclaration » des pouvoirs publics les biens qui n'appartiennent pas à des personnes publiques tels que :
- les biens privés, meubles et immeubles, dotés d'un intérêt artistique, historique, archéologique et ethnoanthropologique « particulièrement important » ;
- les archives privées ayant « un intérêt historique particulièrement important » ;
- les collections de livres dotées d'un « intérêt culturel exceptionnel » ;
- les biens meubles et immeubles qui ont « un intérêt particulièrement important à cause de leurs liens avec l'histoire politique ou militaire, avec la littérature, l'art, la science, la technique, l'industrie et la culture en général ou qui constituent un témoignage de l'identité ou de l'histoire des institutions publiques, collectives ou religieuses » ;
- et les collections d'intérêt « exceptionnel ».
• Compétence en matière de protection du patrimoine culturel
La compétence de droit commun en matière de protection relève du ministère pour les biens et les activités culturels qui peut cependant conclure des accords avec les régions afin que celles-ci exercent cette compétence. Les autres collectivités locales coopèrent également à la protection du patrimoine (articles 3, 4 et 5).
• Valorisation du patrimoine culturel
La valorisation du patrimoine consiste dans « l'exercice des fonctions et dans la réglementation des activités qui tendent à promouvoir la connaissance du patrimoine culturel et à en assurer les meilleures conditions d'utilisation publique pour promouvoir le développement de la culture. Elle comprend la promotion et le soutien aux actions de conservation et la requalification des immeubles dégradés. Elle doit être compatible avec la protection de ces biens (article 6).
• Reconnaissance et déclaration de l'intérêt culturel
Les services du ministère chargé des biens culturels s'assurent du caractère artistique, historique, archéologique et ethnoanthropologique des biens concernés sur la base des directives (indirizzi) qu'il établit afin de permettre une évaluation uniforme de la valeur de ceux-ci.
La procédure d'examen de la « déclaration d'intérêt culturel » (dichiarazione dell'interesse culturale) est mise en oeuvre par le chef des services déconcentrés de l'État (soprintendente) compétent, le cas échéant sur demande motivée de la région ou de tout autre collectivité territoriale qui y a intérêt. Celui-ci informe les propriétaires et les met en demeure de présenter leurs observations dans les trente jours. Si la procédure concerne un ensemble immobilier, les communes en sont informées. Le propriétaire est, quant à lui, informé de la décision du chef des services déconcentrés de l'État portant déclaration d'intérêt culturel. Celle-ci peut faire l'objet d'un recours gracieux devant le ministre qui dispose de quatre-vingt-dix jours pour rendre sa décision (articles 14, 15 et 16).
• Inventaire
Les biens ayant bénéficié d'une déclaration d'intérêt culturel font l'objet d'un inventaire établi à l'initiative du ministre, avec le concours des régions et des collectivités territoriales (article 17).
• Surveillance
La surveillance de ces biens relève du ministère des biens culturels, par l'intermédiaire du chef des services déconcentrés, qui peut procéder à des visites sur place, moyennant un préavis de cinq jours, sauf cas d'urgence.
• Interdiction d'endommager un bien culturel et autorisations
Les biens culturels ne peuvent être détruits, détériorés, endommagés, utilisés à des fins non conformes à leur caractère historique ou artistique ou de nature à porter préjudice à leur conservation (article 20).
Sans l'autorisation du chef des services extérieurs de l'État, il est interdit de procéder au prélèvement de fresques, blasons, graffitis, pierres, inscriptions et de niches, qu'ils soient ou non exposés à la vue du public (article 50).
• Procédure d'autorisation pour les opérations de construction
L'enlèvement, la démolition et l'exécution de travaux sur les biens culturels sont soumis à l'obtention d'une autorisation délivrée par le chef des services déconcentrés dans les 120 jours de la réception de la demande. Ce délai est interrompu, si les services de l'État demandent des éléments complémentaires, jusqu'à réception de ceux-ci. À l'issue du délai, le pétitionnaire peut mettre l'administration en demeure de réaliser les travaux dans les 30 jours au terme desquels il peut y procéder par lui-même, conformément à l'article 21 bis de la loi n° 1034 du 6 décembre 1971 (article 22).
Pour les opérations réalisées sur des biens publics, tiennent lieu d'autorisation aussi bien :
- un accord conclu entre le ministère et la personne publique concernée (article 24) ;
- que l'accord communiqué à l'occasion de la conférence des services (conferenza di servizi) 6 ( * ) dans une déclaration motivée dont fait foi le procès-verbal de cette conférence (article 25).
Des interventions destinées à la conservation de l'immeuble peuvent être réalisées en cas d'urgence absolue, sous réserve d'en informer le chef des services extérieurs de l'État (article 27).
Si les opérations autorisées nécessitent également une autorisation d'urbanisme, on peut recourir à la denuncia di inizio attività 7 ( * ) , sorte de « déclaration de travaux » dans les cas prévus par la loi. Le pétitionnaire transmet alors à la commune l'autorisation obtenue et le projet qu'il compte mener à bien (article 23).
• Conservation
La conservation du patrimoine culturel, qui passe par des mesures de prévention, d'entretien et de restauration, constitue une obligation tant pour les personnes publiques que pour les personnes privées qui en sont propriétaires, possesseures ou détentrices (articles 29 et 30).
Le ministère peut, après l'avoir mis en mesure de présenter ses observations, imposer au propriétaire, possesseur ou détenteur de procéder, à ses frais, aux opérations nécessaires pour garantir la conservation du bien. Il peut toutefois contribuer en tout ou partie aux dépenses engagées, si celles-ci sont d'une « importance particulière » ou si les travaux sont réalisés sur un bien à l'usage du public. La contribution de l'État peut revêtir la forme d'une subvention ou du paiement d'intérêts à une institution de crédit au titre de biens qui sont ouverts au public (articles 31 et 36).
• Mesures de protection indirecte
Le ministre peut déterminer les distances, les mesures et les autres règles tendant à éviter que soit mise à mal l'intégrité des biens culturels immobiliers, ou qu'en soit endommagée la perspective ou la lumière, ou encore qu'en soient altérés la situation environnementale et le décor. Immédiatement exécutoires, les mesures prises par le ministre sont intégrées par les collectivités territoriales dans leurs documents d'urbanisme (article 45).
La préparation des mesures de protection indirecte est portée à la connaissance du ou des propriétaires intéressés par voie de notification, de publication ou par toute forme de publicité appropriée. La commune est également avertie lorsque la procédure concerne un immeuble (article 46).
Les mesures de protection indirecte, une fois prises, sont communiquées au propriétaire, possesseur ou détenteur par l'intermédiaire de la commune ou par lettre recommandée avec accusé de réception. Elles sont transcrites dans le registre immobilier. Le recours juridictionnel contre ces mesures est dépourvu d'effet suspensif (article 47).
• Affiches et panneaux publicitaires
L'apposition ou l'affichage de panneaux ou de tout autre moyen publicitaire est interdit sur les édifices et dans les zones ayant le caractère de bien culturel, sauf dans le cas où, ne portant préjudice ni à l'aspect, ni au décor, ni à l'utilisation publique du bien, ils sont autorisés par le chef des services extérieurs de l'État. Dans les rues situées aux alentours du bien culturel, l'affichage publicitaire est interdit, hormis celui ayant trait à la circulation routière, sous réserve de l'avis favorable du chef des services extérieurs de l'État 8 ( * ) en ce qui concerne la compatibilité de l'emplacement ou de la typologie du médium publicitaire, eu égard à l'aspect, au décor, et à l'utilisation publique du bien (article 49).
L'autorisation d'apposer un affichage publicitaire sur des échafaudages, pendant la durée des travaux, est délivrée par le chef des services extérieurs de l'État qui évalue leur compatibilité avec le caractère historique ou artistique du bien (article 49).
• Exercice du commerce dans des zones de valeur culturelle et dans des locaux historiques traditionnels
Les communes déterminent, après avoir entendu le chef des services extérieurs de l'État, les zones publiques dotées d'une valeur archéologique, historique, artistique ou paysagère dans lesquelles elles peuvent soumettre le commerce à des interdictions ou à des conditions particulières.
Les communes déterminent aussi les espaces dans lesquels se déroulent des activités d'artisanat traditionnel « reconnues comme l'expression de l'identité culturelle collective » au sens des conventions de l'UNESCO, afin d'en assurer la promotion et la sauvegarde dans le respect de la liberté du commerce.
Les services extérieurs de l'État déterminent les règles destinées à interdire les usages publics qui ne relèvent pas de la concession en ce qui concerne les activités ambulantes dépourvues d'emplacement et celles qui se déroulent sur des emplacements (article 52).
• Classement des zones où sont situés des biens culturels
Outre les musées, les bibliothèques et les archives, les biens culturels se distribuent entre :
- les aires archéologiques, « sites caractérisés par la présence de restes de nature fossile ou d'objets ou de structures préhistoriques ou antiques » ;
- les parcs archéologiques, « zones caractérisées par des découvertes archéologiques et de biens historiques, de nature paysagère ou environnementale, équipées comme un musée de plein air » ;
- et les complexes monumentaux, « ensembles formés de plusieurs constructions d'époques différentes qui ont acquis, avec le temps, en tant qu'ensemble, une importance artistique, historique ou ethnoanthropologique autonome ».
L'État, les régions et les collectivités locales assurent l'utilisation des biens présents dans ces diverses zones, sous réserve du respect des dispositions concernant les biens culturels.
• Valorisation des biens culturels
La valorisation des biens culturels peut revêtir une forme publique ou privée.
* 5 Les décrets législatifs (decreti legislativi) italiens pris en vertu d'une loi d'habilitation, constituent une forme de législation déléguée qui a des points communs avec les « ordonnances » dont le régime résulte de l'article 38 de la Constitution française du 4 octobre 1958.
* 6 Cette conférence est composée des membres des différentes administrations sur un sujet d'intérêt commun, v. les articles 14 et suivants du décret-loi (decreto legge) n° 241 du 7 août 1990, portant nouvelles dispositions en matière de procédure administrative et de droit d'accès aux documents administratifs.
* 7 Décret du Président de la République n° 380, texte unique des dispositions législatives et règlementaires en matière d'urbanisme, articles 22 à 23 bis .
* 8 Aux termes de l'article 16 du décret du Président de la République n° 233 du 26 novembre 2007 portant réorganisation du ministère chargé des biens et des activités culturels, les organes déconcentrés de ce ministère sont respectivement : les directions régionales pour les biens culturels et paysagers, les surintendances (pour les biens archéologiques, pour les biens architecturaux et paysagers, pour les biens historiques, artistiques et ethnoanthropologiques), les surintendances archivistiques, les archives d'État, les bibliothèques d'État et les musées.