LES RÉFORMES RÉCENTES DE L'ADMINISTRATION
Cette note a été publiée dans le rapport d'information de M. Dominique de
LEGGE, sénateur , « La RGPP : un défi pour les collectivités territoriales et
les territoires », fait au nom de la Mission commune d'information sur les conséquences de la Révision générale des politiques publiques (RGPP) pour les collectivités territoriales et les services publics locaux, n° 666 (2010-2011) - tome II (auditions et annexes)- 22 juin 2011.
Ce rapport est disponible sur internet à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/notice-rapport/2010/r10-666-2-notice.html
NOTE DE SYNTHÈSE
Les pouvoirs publics anglais, canadiens, italiens et néerlandais ont, au cours de ces dernières années, mis en oeuvre des mesures de modernisation de leurs administrations dont la nature et l'avancement sont largement fonction de l'histoire et des caractères propres à chacun de ces pays. La présente note de synthèse n'a, non plus que les exemples fournis pour chacun de ces États du reste, pas vocation à l'exhaustivité. Elle souligne certains traits et illustre plusieurs des mouvements de fond qui caractérisent les transformations des administrations de quatre États d'un niveau de développement comparable à celui de la France où l'on met en oeuvre une « révision générale des politiques publiques ».
Ces réformes ont en commun de tendre à :
- améliorer l'efficacité de la dépense publique ;
- accroître le contrôle des résultats ;
- mieux valoriser les performances des services et des agents ;
- renforcer la transparence de l'action administrative en fluidifiant les relations avec les usagers ;
- et enfin alléger et optimiser les procédures administratives.
1. Amélioration de l'efficacité de la dépense publique
Des mesures traditionnelles ont été prises pour optimiser la dépense publique en diminuant les coûts, que ceux-ci résultent d'achats et de frais de personnels ou de structure.
C'est ainsi que l'Angleterre a entrepris de diminuer les dépenses résultant des marchés publics en permettant à l'État de regrouper ses commandes pour bénéficier de prix moins élevés et en renégociant certains contrats. Elle souhaite aussi, ce qui constitue une innovation, augmenter le rendement des dépenses en permettant à de nouveaux acteurs relevant du statut coopératif de dispenser des services publics à moindre coût en lieu et place des « opérateurs historiques ».
Aux Pays-Bas, la volonté de réduire les coûts de fonctionnement et les frais de structure des administrations du royaume s'est traduite par :
- la modification de l'organisation des services de conseil (limitation du nombre de leurs membres permanents au profit de membres associés, mise en commun des moyens techniques et rationalisation des procédures) ;
- l'unification des procédures de recrutement des agents publics grâce à la rédaction d'un répertoire national des emplois qui limite le nombre des fiches de postes et permet des recrutements communs d'agents quel que soit leur ministère d'affectation ;
- le rapprochement des administrations nationales au plan géographique et immobilier, avec la localisation de plusieurs ministères dans un seul immeuble.
Enfin en organisant une revue systématique des programmes dans le cadre d'un cycle quadriennal, le Canada, réaffecte au moins 5 % des dépenses des programmes les moins performants vers ceux qui ont le meilleur rendement.
2. Accroissement du contrôle des résultats
En matière de surveillance des résultats de l'action des administrations, la palette des initiatives est large avec :
- au Canada, un modèle intégré et formalisé de contrôle de gestion qui permet d'évaluer le rendement de l'action administrative et les performances opérationnelles en fonction d'une échelle commune et une gestion des ressources humaines qui rapproche, dans le cadre de la planification des emplois, le recrutement des besoins opérationnels ;
- et la systématisation de l'analyse de satisfaction des usagers dans des domaines aussi variés que les services chargés de l'emploi ou les prisons aux Pays-Bas.
La modification des modalités d'audit a, quant à elle, été entreprise, aussi bien :
- en Italie où ces structures sont remplacées dans l'ensemble des administrations de l'État et dans les collectivités locales qui le souhaitent, par des « organismes indépendant d'évaluation » de la performance ;
- qu'en Angleterre où le Gouvernement nourrit le projet de renforcer l'intervention de spécialistes de l'audit et du contrôle de gestion venus du secteur privé dans le domaine de l'audit des finances locales auparavant confié à un organisme public indépendant.
3. Valorisation des performances des services et des agents
La valorisation des performances s'avère une préoccupation commune aux quatre États.
Elle se traduit tout d'abord par des innovations en Angleterre, avec la création des « obligations à impact social », ces titres financiers qui ne seront remboursés à des investisseurs privés que si les résultats attendus en matière de politiques sociales sont réellement atteints, et par une spécificité propre à l'Italie, où l'on a créé une autorité administrative indépendante nationale chargée de diffuser la « culture de l'évaluation » dans toutes les administrations publiques et d'en préciser les modalités.
Elle se caractérise, ensuite, par des initiatives communes dans le domaine des rémunérations de tout ou partie des agents publics puisque l'on envisage de modifier le système de rétribution des dirigeants des administrations afin d'y inclure une partie variable en fonction des résultats, aussi bien Outre-Manche qu'au-delà des Alpes où les administrations doivent publier leurs objectifs et leurs résultats afin que l'on puisse mesurer leurs performances.
Ces mesures se doublent, en Italie, de la possibilité de verser des rémunérations aux agents publics en fonction des gains de productivité du service auquel ils participent (l'Angleterre a le même projet) ou, à terme, de calculer leur rémunération au mérite (encore que la crise économique ait mis à mal les projets en la matière).
4. Renforcement de la transparence et fluidification des contacts avec les usagers
La « transparence » constitue un « point de passage obligé » des mots d'ordre des politiques de modernisation de l'administration des quatre pays. Elle concerne la publication sur internet :
- des rétributions, aussi bien en Angleterre (rémunération les plus importantes des agents publics) qu'en Italie (montant des primes versées au titre des performances) ;
- des « plans d'affaire » ( business plans ) des administrations (Angleterre) et des objectifs et des résultats qu'elles obtiennent (Italie) ;
- des dépenses et contrats les plus importants (Angleterre et Canada) ;
- ou encore des données quantitatives relatives à l'administration auxquelles les usagers ont, ipso facto, un accès total (Angleterre, Canada et Italie).
Les pouvoirs publics sont, à l'évidence, conscients de la nécessité d'améliorer les relations avec les usagers qu'il s'agisse de :
- lancer une consultation nationale sur les mesures de réforme de l'administration (Angleterre, Canada et Italie) ;
- organiser un service public national unifié sous la forme d'un « guichet unique » pour le traitement des demandes de renseignement des administrés (Angleterre, Canada, Italie et Pays-Bas) ;
- ou encore de créer un site unique pour l'ensemble des ministères (Pays-Bas).
L'initiative de l'Italie, qui a ouvert à ses administrés la faculté de mettre en cause la responsabilité des gestionnaires de services publics lorsque ceux-ci sont défectueux semble cependant, quant à elle, faire figure d'exception.
5. Allégement et optimisation des procédures
L'allègement des procédures et des contrôles s'allie enfin à la volonté affichée de mieux « calibrer » l'ampleur des procédures avec leur objectif.
On note ainsi que des efforts pour alléger les procédures en :
- limitant les formalités administratives pesant sur les entreprises qui « doublonnent » et en multipliant les « guichets uniques » (Canada et Pays-Bas) ;
- laissant aux administrés, dans les questions mineures, la possibilité de recourir à la certification sur l'honneur, de sorte que l'administration effectue avant tout des contrôles a posteriori (Italie) ;
- élargissant le domaine de l'autorisation tacite de l'administration (Pays-Bas) ;
- unifiant les procédures pour permettre à plusieurs administrations d'examiner un même dossier simultanément (Pays-Bas, Italie) ;
- diffusant, un modèle unique d'arrêté relatif au régime des subventions, établi avec la collaboration des associations représentant les communes (Pays-Bas) ;
- et en renforçant le « ciblage » des contrôles pour améliorer leur efficacité dans le même État.
LES RÉFORMES RÉCENTES DE L'ADMINISTRATION