Service des Etudes juridiques (Septembre 2008)
ALLEMAGNE
Le droit à la connaissance de ses origines génétiques, reconnu en 1989 par la Cour constitutionnelle fédérale, empêche les donneurs de sperme (1 ( * )) de revendiquer l'anonymat. Le droit civil ne résout que partiellement les problèmes susceptibles de résulter de l'identification des donneurs, de sorte que l'établissement judiciaire de la paternité de ceux-ci n'est pas exclu. |
1) Le principe
La loi de 1990 sur la protection de l'embryon détermine le cadre juridique de la procréation médicalement assistée. De nature essentiellement pénale, elle ne règle pas tous les problèmes. Elle n'aborde notamment pas ni la question de l'anonymat du donneur ni les problèmes de droit civil liés à la procréation médicalement assistée. En effet, si cette loi prohibe le don d'ovocytes, elle n'interdit ni l'insémination artificielle ni la fécondation in vitro , qu'elles soient ou non réalisées avec un tiers donneur.
Les lacunes de la loi de 1990 sont en partie comblées par les directives de l'Ordre fédéral des médecins sur la procréation médicalement assistée.
Aucun texte ne règle la question de l'anonymat du donneur, mais la Cour constitutionnelle fédérale reconnaît depuis 1989 (2 ( * )) à toute personne le droit de connaître ses origines , c'est-à-dire sa filiation biologique. La Cour constitutionnelle fait découler ce droit de deux droits fondamentaux explicitement garantis par la Loi fondamentale : le droit à la dignité et le droit au libre épanouissement.
Le droit constitutionnel à la connaissance de ses origines est incompatible avec l'anonymat du donneur à l'égard des enfants nés grâce au don . Par conséquent, les éventuels contrats conclus entre les banques de sperme et les donneurs garantissant l'anonymat de ces derniers sont nuls.
2) La communication des informations sur les donneurs
Malgré la reconnaissance constitutionnelle du droit à la connaissance de ses origines génétiques, l'accès aux informations sur les donneurs n'est pas organisé. Il est donc rarement mis en oeuvre.
En l' absence de fichier centralisé , les personnes désireuses de connaître l'identité de leur géniteur doivent s'adresser au prestataire (médecin ou établissement hospitalier) qui a réalisé le traitement contre la stérilité dont elles sont issues. Les directives de l'Ordre fédéral des médecins sur la procréation médicalement assistée recommandent donc aux professionnels de conserver les renseignements sur les donneurs pendant trente ans . Cette durée correspond à celle prévue par la loi de 2007 sur les tissus.
3) Les conséquences sur la filiation
Le code civil tire les conséquences de la reconnaissance constitutionnelle du droit à la connaissance des origines. En effet, l'enfant conçu par procréation médicalement assistée avec tiers donneur peut contester la paternité du mari de sa mère , même si l'opération a été réalisée avec l'accord de ces derniers. Il peut le faire dans le délai de deux ans à partir du moment où il a connaissance de faits le laissant douter de la paternité qui a été établie. Dans le cas d'enfants mineurs, le point de départ du délai peut être repoussé à l'âge de la majorité si le représentant légal n'agit pas à temps.
En revanche, la loi du 9 avril 2002 sur l'amélioration des droits des enfants, entrée en vigueur le 12 avril 2002, a supprimé la possibilité qu'avaient auparavant la mère et son mari de contester cette paternité.
Après que la filiation paternelle a été contestée avec succès, rien n'empêche qu'une action en recherche de paternité établisse un lien de filiation entre le donneur et l'enfant. À la différence de la contestation de paternité, cette action peut être engagée sans limite de temps.
En pratique, aucun tribunal n'a encore reconnu la paternité d'un donneur.
Pour limiter tous les problèmes juridiques soulevés par cette situation, l'Ordre fédéral des médecins recommande aux professionnels de prévenir les bénéficiaires du don et les donneurs du fait que l'enfant peut non seulement rechercher ses origines biologiques par l'intermédiaire du médecin, qui ne peut en aucun cas s'abriter derrière le secret médical, mais aussi contester la paternité du mari de sa mère puis, le cas échéant, faire établir judiciairement celle du donneur.
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La loi ne règle pas les conséquences entraînées par l'affirmation du caractère constitutionnel du droit à la connaissance de ses origines génétiques : elle n'organise pas la communication des informations sur les donneurs et n'empêche pas que l'identification de ceux-ci ait des conséquences en matière de filiation.
* (1) Le don d'ovocytes est interdit. Le seul don de gamètes possible est donc le don de sperme.
* (2) L'affaire à l'origine de la décision rendue le 31 janvier 1989 par la Cour constitutionnelle fédérale concernait un enfant né hors mariage.