SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (juillet 2004)
ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES
L'aide juridique a été introduite en 1949 par le Legal Aid and Advice Act , qui a remplacé les différents dispositifs antérieurs, fondés sur la charité. Le principe retenu en 1949 était celui d'une assistance aux plus démunis par des professionnels indépendants, choisis par le justiciable et rémunérés par des fonds publics. Initialement limitée à certaines matières civiles, l'aide juridique était considérée comme le « second bras du Welfare State ». Le régime de l'aide juridique s'est développé dans les années 50 et 60, notamment pour prendre en compte les besoins en matière pénale. Dans les années 70 et 80, les demandes se sont multipliées et le caractère presque automatique de l'aide a entraîné une forte augmentation des coûts. À partir du milieu des années 80, diverses mesures ont été prises pour tenter de limiter l'évolution des dépenses : relèvement des seuils d'éligibilité, augmentation de la contribution personnelle des bénéficiaires... Ainsi, la loi de 1988 sur l'aide juridique a tenté d'améliorer l'efficacité du dispositif, mais sans succès puisqu'elle n'a pas empêché le doublement des dépenses en dix ans. Devant le gonflement des coûts et la réduction du nombre des bénéficiaires, le système a été complètement réformé par la loi de 1999 sur l'accès à la justice . La plupart des dispositions de la nouvelle loi relatives à l'aide juridique sont entrées en vigueur le 1 er avril 2000. Celles qui concernent le domaine pénal sont entrées en vigueur le 2 avril 2001. Le nouveau dispositif vise à rendre la maîtrise des coûts aux pouvoirs publics, en limitant les possibilités pour les professionnels d'engager des dépenses indépendamment de tout contrôle. |
I. L'AIDE JURIDICTIONNELLE
Aussi bien en matière civile qu'en matière pénale, l'aide juridictionnelle revêt plusieurs formes.
Les principales formes d' aide juridictionnelle civile sont les suivantes :
- l'aide devant les tribunaux ( help at court ), qui correspond à l'assistance par un avocat ou par tout autre conseiller, lequel peut, lorsque la représentation par un avocat n'est pas obligatoire, prendre la parole pendant les audiences, mais sans représenter formellement son client ;
- la représentation devant les juridictions civiles ( legal representation ), qui couvre les frais engendrés à la fois par l'aide préliminaire, c'est-à-dire par l'étude des chances de succès de la procédure envisagée lorsque l'affaire est complexe et l'issue douteuse, et par la représentation proprement dite, lorsque l'affaire est portée devant les tribunaux civils ;
- l'aide familiale ( approved family help ), disponible seulement pour les questions relatives au droit de la famille et qui comprend également des éléments relevant de l'aide à l'accès à l'accès au droit, puisqu'elle fournit non seulement l'aide d'un professionnel pour qu'un accord soit obtenu puis entériné par un tribunal dans le cadre de la médiation (4 ( * )) , mais aussi des prestations d'assistance et de conseil, y compris lorsque aucune médiation formelle n'est en cours ;
- les crédits de soutien , permettant de financer des actions civiles très coûteuses du fait de la multiplicité des intervenants, en particulier des affaires relatives à des dommages corporels.
L'aide juridictionnelle pénale se compose des éléments suivants :
- l'assistance par un avocat ( advocacy assistance ), qui correspond à la préparation et la représentation dans certaines procédures (affaires disciplinaires entre les détenus et l'administration pénitentiaire, procédures préliminaires devant les magistrates' courts ...) ;
- la représentation devant les juridictions pénales ( representation ), qui couvre les frais de préparation et de représentation lorsqu'une personne est formellement mise en cause ;
- le dispositif des avocats de permanence ( duty solicitor scheme ), qui permet à toute personne de bénéficier de l'assistance d'un professionnel pendant la garde à vue et lors de la première comparution devant une magistrates' court .
1) Les bénéficiaires
a) Les conditions générales
Aucune condition d'âge ou de nationalité n'est requise. La procédure pour laquelle l'aide est souhaitée doit se dérouler en Angleterre ou au pays de Galles.
b) Les conditions de ressources
Si l'on excepte le duty solicitor scheme et l'aide à la représentation en matière pénale, l'octroi de l'aide juridictionnelle est subordonné à une double condition de revenus et de patrimoine .
Les plafonds diffèrent selon la nature de l'aide sollicitée . À défaut de présenter les différents barèmes, on peut indiquer qu'un revenu net disponible (c'est-à-dire déduction faite des charges incompressibles) inférieur à 200 £ (soit environ 300 €) par semaine et un patrimoine net (c'est-à-dire déduction faite du logement et de tous les objets nécessaires au fonctionnement du foyer) inférieur à 3 000 £ (soit environ 4 400 €) excluent en principe toute aide. Cependant, les barèmes sont appliqués avec souplesse : plus la procédure risque d'être coûteuse, plus les revenus qui excluent le bénéfice de l'aide sont élevés.
Pour faciliter l'accès à la justice aux personnes que les critères financiers excluent du bénéfice de l'aide juridictionnelle, la loi de 1999 a modifié les dispositions applicables aux honoraires conditionnels, afin de favoriser leur utilisation . Dans toutes les affaires, sauf celles qui ont trait au droit de la famille, le client et son avocat peuvent s'entendre pour faire dépendre les honoraires de l'issue de la procédure : ils conviennent d'un montant minimal et du fait qu'un supplément d'honoraires est dû en cas de succès.
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L'aide partielle
En matière civile, l'aide juridictionnelle fonctionne généralement (5 ( * )) comme une avance : en cas de succès de la procédure, le bénéficiaire de l'aide doit reverser à la Legal Services Commission , qui est l'agence responsable de l'organisation de l'aide juridique, les fonds publics qui ont été consacrés à son affaire . Cette règle s'applique non seulement aux dommages et intérêts obtenus par le titulaire de l'aide, mais aussi aux biens. Ainsi, à l'issue d'une procédure de divorce, celui qui, grâce à l'aide juridictionnelle, obtient le maintien dans le logement familial, doit rembourser le montant de l'aide qui lui a été fournie. En revanche, la règle ne s'applique pas lorsque la procédure a permis l'obtention d'une pension alimentaire.
De plus, les bénéficiaires de l'aide à la représentation devant les juridictions civiles et de l'aide familiale doivent fournir une contribution personnelle en contrepartie de l'aide fournie. Cette contribution varie en fonction du revenu net disponible :
Revenu net disponible |
Contribution mensuelle |
entre 268 et 393 £ |
un quart de la fraction du revenu qui excède 263 £ |
entre 394 et 522 £ |
32,50 £ plus un tiers de la fraction qui excède 393 £ |
entre 523 et 707 £ |
75,5 £ plus la moitié de la fraction qui excède 522 £ |
La contribution personnelle peut être calculée en fonction du patrimoine disponible lorsque le titulaire de l'aide a des revenus très limités, mais détient un patrimoine qui n'est pas négligeable, bien qu'il ne l'exclue pas du bénéfice de l'aide.
La contribution personnelle est prise en compte lorsque le bénéficiaire de l'aide reverse de l'argent à la Legal Services Commission.
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L'aide totale
Le plus souvent, l'aide juridictionnelle en matière pénale est fournie sans contrepartie.
2) La procédure
La demande d'aide est adressée soit au professionnel dont le concours est requis soit au bureau régional de la Legal Services Commission . En règle générale, le demandeur s'adresse à un professionnel qui, le cas échéant, saisit la Legal Services Commission.
Pour l'aide devant les tribunaux, le professionnel consulté peut décider seul de l'octroi de l'aide, pour autant que les frais ainsi engagés ne dépassent pas 500 £ (soit environ 750 €). En cas de refus, la décision peut faire l'objet d'un recours devant le bureau régional de la Legal Services Commission. Pour les autres formes d'aide, c'est ce dernier qui prend la décision, laquelle peut être contestée. Selon qu'elle se fonde ou non sur des critères financiers, la décision de refus est contestée devant le directeur régional de la Legal Services Commission ou devant une instance indépendante ad hoc composée d'avocats.
En matière civile, l'octroi de l'aide n'est plus seulement subordonné au respect des critères financiers , mais également à l'examen du bien-fondé de la demande. En effet, afin de limiter les dépenses publiques engendrées par l'aide juridictionnelle, la Legal Services Commission a, en accord avec le ministre compétent, élaboré un code précisant les conditions d'attribution de l'aide. Ce document cherche à établir des critères aussi souples que possible afin, d'une part, de prendre en compte les particularités de chaque cas et, d'autre part, de limiter les dépenses publiques, car le budget annuel ne peut pas être dépassé.
De façon générale, l'octroi de l'aide dépend de l'évaluation comparée de la valeur du litige et des perspectives de succès de la procédure envisagée . Moins la première est élevée, plus les perspectives de succès doivent être importantes pour que l'aide soit accordée. Toutefois, l'aide doit être attribuée indépendamment de toute analyse coûts-avantages lorsque le litige revêt un caractère prioritaire (protection de l'enfance, violences conjugales, liberté individuelle...).
En matière pénale , l'octroi de l'aide est seulement lié au sérieux de la demande, qui est présumé pour les affaires portées devant la Crown Court (6 ( * )) , car le coût des vérifications a été considéré comme excessif. En revanche, pour les affaires portées devant les magistrates' courts , un examen préalable est effectué.
3) Le champ d'application
Aucune aide juridictionnelle ne peut être fournie dans les domaines suivants :
- dommages corporels autres que ceux relevant de la responsabilité médicale ;
- diffamation ;
- droit des sociétés et, de façon générale, questions relatives à la conduite d'une entreprise, quelle que soit sa taille ;
- problèmes de voisinage.
Les litiges qui ne sont pas traités par les juridictions stricto sensu , mais par des organismes para-juridictionnels ( tribunals ), comme les différends relatifs au droit du travail, sont exclus du champ d'application de l'aide juridictionnelle, à moins qu'ils ne soulèvent des questions importantes. C'est par exemple le cas des questions relatives à la protection de l'enfance et des litiges en droit du travail examinés en appel.
4) Les caractéristiques de l'aide
a) La nature de l'aide
L'aide juridictionnelle peut revêtir différentes formes, aussi bien en matière civile que pénale. Elle consiste toujours en la prise en charge des frais engendrés par la participation d'un professionnel à une procédure, qu'il s'agisse d'un avocat ou d'un médiateur.
b) Le choix et l'indemnisation de l'avocat
Même si les bénéficiaires de l'aide ont la possibilité de choisir entre plusieurs avocats, leur choix n'est pas totalement libre. En effet, le système d'agrément, qui avait été introduit en 1994 (7 ( * )) , a été durci. Désormais, les professionnels habilités à travailler dans le cadre de l'aide juridictionnelle doivent satisfaire aux critères fixés par la Legal Services Commission et sont liés à dette dernière par contrat . Le nombre des professionnels participant à l'aide juridictionnelle est ainsi passé de 11 000 à 5 500. La contractualisation doit permettre à la Legal Services Commission de contrôler les coûts et d'assurer aux bénéficiaires de l'aide juridictionnelle des prestations de qualité.
En matière pénale, depuis le 1 er août 2001 et à titre expérimental pour quatre années, le Criminal Defense Service (qui gère l'aide juridique dans le domaine pénal) emploie également des salariés chargés de la défense des bénéficiaires de l'aide juridictionnelle.
La nouvelle loi a également réformé le mode de rémunération des avocats qui travaillent dans le cadre de l'aide juridictionnelle. Traditionnellement, ils percevaient une somme calculée en fonction du temps passé. Désormais, le montant des frais susceptibles d'être engagés est limité, des barèmes prévoyant, pour chaque type d'affaires, le montant des honoraires. Pour les affaires auxquelles ne correspond pas de barème, les avocats concluent des contrats préalables, qui déterminent notamment le temps nécessaire .
* (4) La médiation constitue, avec l'arbitrage et la conciliation, l'une des formes extrajudiciaires de résolution des conflits. Elle fait intervenir un médiateur, qui aide les parties à obtenir un accord acceptable.
* (5) Il existe quelques exceptions à cette règle générale, notamment en droit de la famille.
* (6) La Crown Court est la juridiction pénale qui juge les infractions les plus graves.
* (7) Auparavant, le choix était totalement libre : les personnes qui remplissaient les critères requis pour bénéficier de l'aide juridictionnelle pouvaient consulter n'importe quel professionnel. Ce dernier obtenait le paiement de ses honoraires par le Fonds pour l'aide juridique.