Clôture

Jean-Jacques HYEST ,
Président de la commission des Lois

Mesdames et Messieurs, je voudrais saluer la grande qualité des interventions qui ont marqué ce colloque et souligner l'intérêt de croiser les regards de tous sur une question de droit qui concerne très étroitement le quotidien de nos concitoyens.

Les versions successives de l'article 121-3 du Code pénal traduisent certainement la difficulté de trouver le bon équilibre dans la répression des délits non intentionnels. S'il faut éviter une répression excessive, il importe également de se garder d'une dépénalisation qui déresponsabiliserait les acteurs sociaux dans des domaines comme la sécurité routière, les accidents du travail, la santé publique ou l'environnement.

Les objectifs recherchés par le législateur de 2000 paraissent atteints grâce, en particulier, à la rédaction du dernier alinéa de l'article 121-3 du Code pénal et la référence à la notion de faute caractérisée. Si un accident se produit, la responsabilité pénale ne sera engagée, dans la plupart des cas, que si le décideur était préalablement et personnellement alerté de l'existence d'un risque, notions bien connues des juristes. En revanche, la nouvelle rédaction de l'article 121-3 du Code pénal n'a pas diminué la répression dans certains domaines comme les accidents du travail.

Les dispositions actuelles donnent satisfaction. Faut-il pour autant conclure sur un statu quo législatif dans le domaine des délits non intentionnels ? Il est vrai que des affaires récentes, d'un grand retentissement médiatique, se sont traduites par des relaxes en l'absence de lien de causalité entre les comportements fautifs et les dommages constatés, suscitant un sentiment justifié d'incompréhension chez les victimes. Le droit pénal n'est pas sans réponse face à de telles sanctions mais la peine encourue apparaît modeste au regard de la gravité de certains comportements et les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité pénale sont très difficiles. La référence au caractère délibéré de la violation de l'obligation de sécurité ou de prudence est fondamentale et constitue un garde-fou contre l'extension déraisonnable de la répression.

Deux aspects du dispositif méritent cependant réflexion. Ne faut-il pas prendre en compte les violations aux obligations fixées par « les règlements » et non par « un règlement » donné ? Serait-il envisageable de lever l'exigence tenant à l'exposition directe à un dommage lorsque celui-ci concerne potentiellement un grand nombre de personnes ?

Si une évolution de la législation devait s'imposer, elle devrait être inspirée par la recherche de l'équilibre le plus satisfaisant entre le souci d'équité et la répression. Je pense qu'intégrer le principe de précaution dans notre Code pénal représenterait un danger absolu.

Je ne saurais conclure sans remercier chaleureusement le Président du Sénat, le Premier Président et le Procurer général de la Cour de Cassation avec lesquels ce colloque a été organisé. Je voudrais dire également ma gratitude à Pierre Fauchon, dont la réflexion ne cesse d'être un aiguillon pour permettre d'améliorer notre droit.