Colloque Sénat-UbiFrance sur les Balkans- 25 novembre 2004
Témoignages d'entreprises
I. La société Feni Industries et Silmak
Jacques NASSIEU-MAUPAS, Directeur général, Feni Industries et Silmak, Conseiller commercial et économique de la France
Je voudrais vous faire part de mon expérience de chef de PME dans le sud des Balkans, en Macédoine.
Nous produisons, dans notre première usine, 6 000 tonnes de nickel pur par an. Nous occupons le 14 ème rang mondial sur ce marché. Nous avons investi 20 millions de dollars en quatre ans et nous comptons investir 25 millions dans les deux années qui viennent. Notre deuxième usine produit du ferro-silicium. Nous avons investi 5 à 6 millions d'euros en deux ans. Nous comptons 2 500 salariés et nous travaillons au développement de nos activités dans le sud de l'Albanie.
Nous sommes un groupe d'investisseurs français. Nous avons entamé notre démarche en 2000. Quatre ans après, l'on peut dire que nous maîtrisons nos activités.
La Macédoine et l'Albanie frappent par l'exubérance de leurs populations. La liberté d'entreprendre y est réelle. Je n'avais d'ailleurs jamais rencontré jusqu'ici des conditions d'entreprise aussi agréables. Il existe un seul syndicat en Macédoine. Le code du travail compte 45 pages, celui des impôts 25 pages. Le droit des entreprises est très simple et est, dans une certaine mesure, calqué sur le nôtre. Je dois vous dire, aujourd'hui, que je me sens très fortement macédonien. J'ai trouvé là-bas une liberté d'entreprendre qui n'existe pas ailleurs à deux heures de Paris. Si vous avez envie de venir, faites-le ! Vous êtes les bienvenus.
Par ailleurs, tout va très vite dans ces pays. En l'espace de quatre ans seulement, tout a été transformé. Les gens consomment de plus en plus. Au-delà des chiffres officiels, l'existence de l'économie informelle est très vive. Elle est l'un des moteurs de l'activité. Il s'agit simplement de la cadrer et de la suivre.
Vous pouvez, vous, entreprises françaises - notamment PME - nous rejoindre. Je vous appelle même à le faire. Il fait bon vivre en Macédoine, on y est libre, on y éprouve du plaisir. Certes, il existe quelques éléments moins positifs. Je pense ainsi au secteur bancaire, qui n'est pas à la mesure des ambitions des entrepreneurs locaux et régionaux. Je pense également au risque de change, qui est lié à l'appréciation de l'euro par rapport dollar. Dans notre cas, nos exportations sont libellées en dollars, mais nous versons les salaires en euros.
Pour finir, j'observe dans les médias européens et français une propension à présenter de façon réductrice certains événements. Voilà une quinzaine de jours, une page entière du Figaro était consacrée à la Macédoine. Il y était écrit que le référendum était un tournant pour les Macédoniens et que le risque d'éclatement de la zone ne devait pas être sous-estimé. C'est une contrevérité ! Je me devais de l'affirmer haut et clair. Il n'y a pas plus de risques dans cette zone que dans d'autres.
II. Le groupe Orangina et son partenariat avec Obala Promet
Tanguy PECHON, Responsable du développement, CFPO Orangina
Nous n'investissons pas localement et nous nous appuyons exclusivement sur les structures locales. Notre logique diffère donc totalement de celle de l'intervenant précédent. Pour autant, je partage une chose avec lui, c'est son constat sur l'enthousiasme et la volonté des acteurs régionaux. Cette zone est certainement l'une des plus dynamiques en termes de développement.
Je souhaite ici vous faire part de notre expérience dans les Balkans et des atouts de cette région. La clé de notre succès est notre capacité à nous appuyer sur les structures et les intervenants de la zone. Notre histoire dans les Balkans commence en 1995, au sortir de la guerre. Nous nous sommes tout d'abord implantés en Croatie. Dès 1997, nous avons lancé des exportations vers la Bosnie, puis vers la Serbie-et-Monténégro (où nous sommes moins présents aujourd'hui), la Slovénie, la Macédoine, l'Albanie et la Bulgarie. Nous avons en outre, à compter de 2003, démarré des productions locales. Nous produisons aujourd'hui en Croatie et en Macédoine.
Nous fonctionnons suivant plusieurs schémas. Soit nous exportons avec un partenaire exclusif de produits finis dans le cadre d'une relation contractuelle ou non, soit nous produisons localement dans le cadre d'un contrat de production sous licence et de distribution exclusive. Par ailleurs, 100 % des investissements de production sont à la charge de nos partenaires. Nous n'investissons jamais dans l'outil. En revanche, nous transférons nos savoir-faire. Par ailleurs, nous effectuons un contrôle qualité permanent. Concernant le volet marketing et commercial, Orangina contribue aux dépenses en fonction des contrats.
Pour ce qui est de notre développement, nous recherchons systématiquement des solutions favorisant nos partenaires existants. Nous utilisons une plate-forme commune de livraison et de distribution. Enfin, nous nous développons de pays à pays, par « saut de puce ».
Le point clé est le choix du partenaire. Il faut, en effet, choisir le bon partenaire. Mais il faut aussi choisir des pays dont les indices économiques sont favorables. Il importe en outre d'établir une relation de confiance, que je qualifierais de confiance contrôlée.
La France est bien accueillie dans ces pays, mais elle doit se dépêcher : la concurrence est de plus en plus forte !
Je cède à présent la parole à Robert Lovric, qui est notre importateur mais aussi notre fabricant pour l'Europe du Sud-Est depuis 2003.
Robert LOVRIC, Directeur général, Obala Promet
(Robert Lovric s'est exprimé en anglais)
Je remercie UBIFrance et le Sénat pour leur accueil et l'opportunité qu'ils me donnent de m'exprimer. Je souhaite vous remettre, pour vous témoigner ma gratitude, une cravate croate. Durant longtemps, la France a été fascinée par la mode croate et le terme « à la croate » a donné naissance à « cravate ».
L'héritage de l'histoire a un poids particulier dans nos pays. Les Balkans offrent des opportunités non négligeables à la France et à son tissu économique. La Croatie représente, à mon sens, une porte d'entrée de choix à ce vaste marché. Ce pays est en effet, pour la région, un leader dans différents domaines : il fixe les tendances et est à l'avant-garde des mutations. En outre, la Croatie est une locomotive en matière d'intégration et d'adhésion à l'Union européenne. Les investissements directs étrangers ont représenté, en 2003, plus de 9,5 milliards de dollars. La majorité d'entre eux proviennent d'Autriche (24,9 %), d'Allemagne (21 %) et des Etats-Unis (16,4 %).
Obala Promet est le partenaire d'Orangina dans la région depuis 1995, date de son implantation. Il y a neuf ans, nous étions une petite usine. Nous avons crû très rapidement. Aujourd'hui, nous sommes également partenaires de Pernod Ricard, pour citer ce seul exemple. Ces partenariats constituent une opportunité réelle.
Malheureusement, le temps nous est compté. Je dois m'arrêter. Je vous remercie encore vivement pour votre invitation.