Colloque Sénat-UbiFrance sur les Balkans- 25 novembre 2004


Une sélection de secteurs porteurs

Participaient à la table ronde :

Pierre COSTE, Chef de la Mission économique à Belgrade ;

Catherine GARDAVAUD, Chef de la Mission économique à Sarajevo ;

Mirela MATA, Correspondante pour l'Albanie de la Mission économique à Rome ;

Vincent SCHNEITER, Chef de la Mission économique à Skopje ;

Véronique PASQUIER, Chef de la Mission économique à Zagreb.

I. Secteurs porteurs et marchés en développement en Serbie-et-Monténégro

Pierre COSTE

Dans un pays comme la Serbie-et-Monténégro, dont l'économie est en pleine reconstruction et en développement, la notion de « secteurs porteurs » est très largement conditionnée par la nature des financements disponibles. Ces derniers sont de trois natures :

· les financements bilatéraux (dont des financements français) et multi-latéraux, qui viennent de vous être présentés ;

· les transferts privés des Serbes qui travaillent à l'étranger (11,2 % du PIB en 2003 en Serbie-et-Monténégro), qui alimentent la demande de biens de consommation ;

· les investissements directs étrangers (1,4 milliard de dollars en 2003), notamment dans le cadre d'opérations de privatisation des grandes entreprises.

Il est à noter que l'on peut s'attendre à une réduction substantielle du déficit budgétaire et à un encadrement plus fort des crédits à la consommation, ce dès 2005.

Dans le domaine des infrastructures, quatre domaines sont prioritaires : les transports, l'électricité, l'environnement et les énergies. Ils bénéficient donc largement de financements bilatéraux ou multilatéraux. La volonté de mettre en place des partenariats public/privé s'affirme progressivement, notamment dans le secteur de l'environnement.

Le domaine des biens de consommation bénéficie principalement, pour sa part, des transferts privés. La France n'y occupe qu'une part de marché relativement faible (3 %), qui s'explique par la concurrence italienne et la faiblesse de l'offre française. Pourtant, la demande existe. Elle provient essentiellement d'une classe jeune et aisée, intéressée par les grandes marques.

Les investissements directs étrangers concernent de très nombreux secteurs, mais ont tous pour objectif et pour conséquence d'améliorer la compétitivité de l'économie. En Serbie-et-Monténégro, le secteur agricole -les fruits, par exemple- représente 23 % du PIB. La Serbie produit notamment 100 000 tonnes de framboises par an, soit le tiers de la production mondiale. Elle est également grand producteur de fruits rouges. Il y a donc lieu d'améliorer l'outil industriel de production et de transformation de base, qui est mondialement reconnu. De nombreuses sociétés, même de petite taille, sont actuellement « privatisables ». Ce secteur est donc, vous l'aurez compris, fortement porteur. Il en est de même pour le secteur laitier. Des laiteries restent d'ailleurs à vendre dans le sud et l'est du pays. D'autres secteurs sont porteurs, comme ceux des télécommunications ou des pièces pour automobiles. La liste n'est, bien entendu, pas exhaustive.

Dans le domaine de la production industrielle, qui a connu un développement notable en 2004, les secteurs porteurs sont nombreux également. Citons celui de l'industrie plastique.

Le secteur bancaire est en cours de restructuration et la privatisation des établissements bancaires se poursuit.

Le secteur des assurances peut lui aussi présenter un intérêt non négligeable. Des accords de partenariat existent déjà, d'ailleurs.

Je souhaite par ailleurs souligner la présence de cabinets juridiques étrangers et de sociétés de contrôle et de certification.

Permettez-moi encore un mot sur le secteur de la grande distribution. Il était jusqu'ici dominé par deux acteurs majeurs. Mais une restructuration est en cours.

Enfin, un secteur me paraît potentiellement important bien qu'il n'ait pas encore véritablement décollé : celui du tourisme, notamment dans le domaine de l'hôtellerie.

II. Secteurs porteurs et marchés en développement en Bosnie-Herzégovine

Catherine GARDAVAUD

Les secteurs prioritaires sont souvent les mêmes, dans les Balkans. La Bosnie, nous l'avons vu ce matin, est un pays très complexe.

L'année prochaine sera une année charnière et de grands changements. Au plan politique, elle marche vers l'adhésion à l'Union européenne mais aussi à l'Otan, via le partenariat pour la paix. Par ailleurs, si la communauté internationale est encore très présente, elle est appelée à se retirer progressivement. La force de stabilisation a, elle, déjà fortement diminué. Au plan économique, la Bosnie passera du statut de pays en sortie de crise à celui de pays en transition.

La Bosnie a élaboré, en 2004, une stratégie de développement à moyen terme, en coordination avec les différentes institutions du pays. Ce programme vise à développer le secteur privé, à assainir l'économie et à réduire la pauvreté. Il s'accompagne d'un programme d'investissement public, qui prévoit près de 1 milliard d'euros d'investissements pour les années 2004-2006. La Bosnie n'étant pas un pays riche, tous les projets seront financés à hauteur de 67 % par des crédits, essentiellement externes. L'autofinancement n'en représentera qu'une part infime (1 %).

Plusieurs grands secteurs prioritaires ont été identifiés :

· les infrastructures (318 millions d'euros seront investis dans les deux prochaines années) ;

· l'énergie (167,6 millions d'euros d'investissements dans les deux prochaines années) ;

· la gestion de l'eau et l'environnement (217 millions d'euros d'investissements pour les deux prochaines années) ;

· le renforcement institutionnel (87,8 millions d'euros pour les deux prochaines années)

· ou encore l'agriculture et les forêts, l'industrie et le tourisme.

Il est à noter que la Bosnie est autosuffisante en matière d'énergie, voire légèrement exportatrice. Elle entend développer cet avantage en produisant un excédent pouvant être exporté et commercialisé lors de pics de consommation. Dans le secteur agricole, la Bosnie est en revanche entièrement tributaire des exportations -exception faite de la pomme de terre.

Tout est à faire dans ce pays, qui est certes difficile, mais qui est en voie de stabilisation. Il faut donc que nous soyons les premiers et que nous occupions le terrain avant les autres.

III. Secteurs porteurs et marchés en développement en Albanie

Mirela MATA

L'Albanie est un petit pays, qui occupe une surface de 28 748 kilomètres carrés et compte 3,144 millions d'habitants. Sa capitale est Tirana.

L'économie albanaise, on l'a dit ce matin, a gravement souffert de l'isolement du pays pendant longtemps, mais aujourd'hui, ses indicateurs se redressent, avec quelques taux intéressants de nature à redonner confiance : le taux de croissance s'établit à 6 % en 2003, l'inflation est de l'ordre de 2 à 4 %. Entre 2000 et 2004, les importations et les exportations ont quasiment doublé. Le déficit représente 22 % du PIB. Il devrait être de 21,8 % en 2004.

Le flux des investissements directs étrangers est en progression, mais il demeure faible. Il s'explique en grande partie par la privatisation d'entreprises stratégiques, comme la Savings Bank tout récemment. Au total, 87 % de ces investissements sont réalisés avec les pays de l'Union européenne, en particulier l'Italie et la Grèce.

Le secteur agricole et agro-industriel est encore un secteur clé de l'économie. Nos points forts sont l'huile d'olive et la transformation de viande. L'Albanie reste fortement importatrice de produits agricoles et alimentaires.

Dans l'industrie, l'Albanie structure ses implantations autour de quatre parcs industriels, dont l'un est axé sur la métallurgie et la sidérurgie. Plusieurs secteurs sont en forte expansion : la confection, la filière bois et ameublement, la sidérurgie et la métallurgie.

Le secteur minier énergétique et extractif a de quoi attirer les investisseurs. L'Albanie dispose d'importantes ressources en minerais ou encore en calcaires marbrés et pierres décoratives. Nous avons en outre d'importantes réserves en pétrole et en gaz.

Aujourd'hui, 95 % de l'électricité produite est d'origine hydroélectrique et plusieurs projets sont en cours dans ce domaine. Sur le long terme, l'implication des bailleurs de fonds sera forte.

Dans le domaine des transports maritimes et ferroviaires, l'Albanie compte quatre ports qui devraient être mis en concession à long terme. Le secteur ferroviaire est encore très peu développé. Pour ce qui est des transports routiers, les infrastructures sont en mauvais état et le parc automobile enregistre toujours une forte croissance. 61 % du trafic est assuré par les transports publics.

D'autres secteurs porteurs méritent d'être cités :

· les télécommunications (la privatisation de l'unique opérateur fixe est en cours ; l'intensité concurrentielle du secteur de la téléphonie mobile devrait s'accroître à terme, avec l'arrivée d'un troisième opérateur) ;

· la poste (un secteur concentré - 10 sociétés et la poste albanaise - qui est en voie de modernisation) ;

· le secteur bancaire et financier (le secteur bancaire est presque entièrement privatisé, mais la diffusion des services bancaires reste lente) ; le marché des assurances, lui, est encore peu consolidé et développé ;

· le secteur du tourisme (au-delà des atouts naturels du pays, les services d'accueil restent bien inférieurs aux standards internationaux, mais cette situation devrait évoluer, ce secteur étant considéré comme stratégique par le gouvernement).

IV. Secteurs porteurs et marchés en développement en Macédoine

Vincent SCHNEITER

La Macédoine est l'un des plus petits pays d'Europe, avec 2 millions d'habitants et 25 000 kilomètres carrés. Son industrialisation a été retardée par des obstacles historiques, mais il dispose de véritables atouts, au titre desquels sa position géographique stratégique.

Ce pays compte de nombreuses mines et dispose de ressources hydrauliques. L'agriculture assure une bonne partie des exportations. L'industrie textile est bien développée.

Pour l'heure, les principaux investissements étrangers proviennent de Grèce.

Après la crise interethnique de 2001, la situation s'est largement redressée, en grande partie grâce à l'aide internationale et à la signature d'accords, notamment avec le FMI. Une candidature d'adhésion à l'Union économique a été officiellement déposée cette année.

Le gouvernement table sur les investissements directs étrangers. Pour l'heure, le stock n'est que de 1 milliard de dollars, ce qui est un niveau relativement faible pour la région et pour les pays en transition en règle générale. Ces investissements couvrent à peu près tous les secteurs. Les conditions d'investissement sont considérées comme les plus favorables offertes dans les Balkans. La fiscalité sur les bénéfices, pour citer ce seul exemple, est de 15 %. Il existe déjà quelques zones franches et le pays a passé de nombreux accords de libre-échange.

Nous regrettons la lenteur des réformes. Nombre d'entre elles ont été réalisées sous forme de privatisations ou de restructurations. Mais il reste beaucoup à faire pour améliorer l'environnement des affaires et l'attractivité du pays pour les investissements.

Sur le plan politique, le référendum du 7 novembre dernier a été un échec - c'est-à-dire un succès du Gouvernement -même si ce dernier se trouve remis en cause dans la mesure où le Premier ministre a démissionné le 15 novembre. Quoi qu'il en soit, le futur Premier ministre devrait continuer à conduire un gouvernement de coalition.

Les importations françaises concernent majoritairement le secteur automobile. Elles représentent une très faible part dans les biens de consommation. Les implantations d'entreprises françaises sont peu nombreuses mais importantes dans le secteur de la métallurgie. Les productions des deux usines franco-macédoniennes de ce secteur sont entièrement exportées (mais pas en France) et représentent 9 % de la valeur des exportations totales.

De manière globale, la France pourrait très certainement améliorer sa part de marché. De fait, il existe de véritables lacunes à combler, notamment dans le secteur des biens de consommation, dans le domaine agroalimentaire ou dans celui des équipements ou encore de l'énergie. Les opportunités sont réelles, les compétiteurs sont rares et les coûts encore peu élevés.

V. Secteurs porteurs et marchés en développement en Croatie

Véronique PASQUIER

Je parlerai de « divine surprise » et de « dominos positifs », ce qui est somme toute agréable ! La Croatie ne pose pas de grave problème à l'Union européenne, ni en termes de PIB ni en termes de population. Sa marche vers l'Union européenne devrait donc être soutenable, tant du point de vue du poids des populations que de celui des revenus.

Les indicateurs macroéconomiques sont bons, à l'exception de celui de la dette extérieure. L'année dernière, la Banque centrale a pris des mesures pour limiter le crédit. Nos exportations devraient en pâtir quelque peu.

Cela a été dit, toutes les recommandations des institutions de la communauté internationale sont coordonnées et claires : il faut réduire les dépenses et améliorer l'environnement des affaires. Depuis dix ans, les investissements directs étrangers en Croatie ont surtout concerné le secteur des services. Pour en citer un exemple, la quasi-totalité des banques ont été privatisées - la dernière d'entre elles devrait l'être très prochainement.

La Croatie estime qu'elle sera prête à entrer dans l'Union européenne dès 2007, même si elle a conscience que l'Union ne sera pas nécessairement prête à l'accueillir à cette date.

Les échanges extérieurs, qui étaient le principal point noir jusqu'à l'année dernière, se portent mieux. La France est un partenaire modeste de la Croatie (6 % des échanges), mais elle se situe juste derrière les partenaires régionaux. La France occupe également une place fort modeste du point de vue des exportations. Pour autant, les exportations françaises enregistrent une très forte croissance, en particulier dans le secteur des biens d'équipement.

Je ne crois pas tellement à la notion de secteur porteur, pour ma part. Travailler en Croatie nécessite une grande persévérance. Moyennant quoi, toutes les entreprises qui s'y implantent, dans quelque domaine que ce soit, réussissent. Je citerai toutefois plusieurs secteurs intéressants : les services, le tourisme (dont de nombreux créneaux ne sont pas exploités), les télécommunications, l'électronique et l'informatique, la petite industrie de précision, les secteurs traditionnels (bois, cuir, textile) et la distribution. La plupart des acteurs allemands, autrichiens et slovènes sont présents dans le secteur de la distribution. Nous espérons grandement la venue de Décathlon dans notre région.

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