C. DES RÉPONSES IMMÉDIATES À APPORTER

1. Faire pleinement respecter le cadre de protection défini

Une première réponse à apporter au « signal d'alarme » déclenché par la mission de l'UNESCO est de renforcer, sur le terrain, la mise en oeuvre du PSMV dans la ville de Luang Prabang, en s'assurant que le périmètre de protection du site est véritablement respecté.

Seule une implication réelle des autorités locales laos et de la population, et une nouvelle mobilisation de la Maison du patrimoine, qui a été jusqu'à présent la cheville ouvrière dans l'application au jour le jour des règlementations, permettra de respecter pleinement ce périmètre de protection.

Lors de sa mission, votre délégation a pu constater que la ville de Luang Prabang comptait de nombreux petits chantiers qu'il était parfois difficile de surveiller mais pour lesquels il fallait en réalité une attention constante. Les constructions hôtelières ne sont pas seules en cause. La rénovation voire l'extension des monastères doit être accompagnée par les conseils de la Maison du Patrimoine, pour ne pas se faire au détriment de la qualité des sites.

Au-delà de cette réaffirmation de la règle, l'enjeu est la création d'une « zone-tampon » entre la ville protégée de Luang Prabang (dont le périmètre est vaste) et les nouveaux districts. Il va de soi que le niveau de protection ne pourra être le même, mais un certain contrôle des activités devrait être développé. En effet, une extension anarchique des districts entourant Luang Prabang, y compris avec la construction d'hôtels de grande capacité, aurait inévitablement des effets négatifs sur la ville elle-même, avec le risque d'afflux de touristes sans commune mesure avec le respect du climat de la ville.

2. Mieux prendre en compte le « patrimoine vivant »

Le Laos est un pays d'une très grande richesse et diversité culturelle. Il comprend ainsi 75 ethnies, et 3 ethnies sont représentées à Luang Prabang., ville qui s'insère dans une région essentiellement rurale, avec un patrimoine particulier, un grand nombre de mythes et de traditions.

La vie culturelle du Laos est restée fidèle à des valeurs traditionnelles. Elle s'exprime notamment pas une forte pratique du bouddhisme et une très large participation populaire aux fêtes lunaires qui y sont rattachées : le nouvel an (Pi Mai), la fête des pirogues, la fête des fusées, la fête des bougies etc. Les bacci sont une autre particularité remarquable : il s'agit de cérémonies organisées par les habitants dans leurs demeures pour les évènements de la vie (naissance, décès, mariage, arrivée ou départ d'un invité ou d'un membre de la famille, évènements officiels).

Il est important de préserver ces traditions qui forment le mode de vie des habitants et, dans une ville royale et monastique comme Luang Prabang, de conserver une présence monastique importante.

Or, il existe de réelles inquiétudes sur l'impact du tourisme sur la vie et la culture vivante de Luang Prabang. La question de la protection du site contre le tourisme de masse fait partie des recommandations du rapport commandé par l'UNESCO. Si aujourd'hui la ville se tourne davantage vers le tourisme de luxe avec notamment la construction d'un important hôtel de luxe en son coeur, de nombreuses « guest houses » ouvrent régulièrement dans la ville, et selon toutes vraisemblances le nombre de touristes devrait croître dans les années à venir.

Si la protection du patrimoine architectural de la ville est nécessaire, le véritable danger vient désormais des attaques que le tourisme peut produire sur le « patrimoine vivant » du pays. Il ne faut pas seulement protéger les immeubles mais aussi le mode de vie des habitants. La vie de la population a considérablement changé dans le centre ville, avec davantage de commerce, d'activités (marché de nuit) et les bonzes ressentent très fortement le changement dans l'atmosphère de la ville, quand ils ne sont pas eux-mêmes l'objet de curiosité des touristes.

Ainsi, la quête de la matinée par les bonzes, moment particulièrement important, doit être respectée par les touristes. Certains hôtels commencent à informer leurs clients de ces traditions et des comportements à adopter à l'égard des bonzes, mais ces efforts se révèlent encore insuffisants.

Il serait possible, afin de mieux veiller au patrimoine vivant de la ville de Luang Prabang, d'encourager davantage les associations culturelles et la transmission du patrimoine. Votre délégation a ainsi pu assister à la réunion d'une association locale de musique et de chants traditionnels.

Enfin, si de nouvelles infrastructures d'importance sont construites, tel un aéroport d'une capacité plus importante, le risque existe d'un déséquilibre grandissant entre le flux touristiques et la quiétude de la ville de Luang Prabang, qui fait aujourd'hui encore son charme particulier.

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