B. VINGT ANNEES D'INDEPENDANCE
1. Dix années de relative stabilité politique marquées par une prépondérance anglophone
De son
indépendance en 1980 jusqu'en 1991, le Vanuatu est dirigé par le
Vanuaaku Pati dont le Chef, Walter LINI, est le Premier ministre.
Au nom du "socialisme mélanésien", le gouvernement du Vanuatu
voulut placer officiellement le pays dans le mouvement des non-alignés,
favorisant les intérêts anglophones, se rapprochant ponctuellement
du bloc soviétique et de la Libye.
Les relations avec la France furent souvent tendues : différend en 1983
pour les îlots Matthew et Hunter revendiqués par les Vanuatais qui
y ont débarqué, essais nucléaires français. Par
ailleurs, le Vanuatu a soutenu le mouvement indépendantiste de
Nouvelle-Calédonie, particulièrement entre 1984 et 1988. Deux
ambassadeurs français ont été expulsés en 1981 et
en 1987.
2. L'alternance depuis 1991 et le retour à une francophonie relative
En 1991,
une majorité francophone revient au pouvoir sous la conduite de l'UPM
(Union des partis modérés) principalement francophone avec Maxime
CARLOT-KORMAN, Premier ministre, actuellement Ministre des Terres. Une
coopération importante est renouée entre la France et le Vanuatu
sur les plans commercial et culturel. La proximité de la
Nouvelle-Calédonie favorise ces échanges.
Cependant les dix années passées sous gouvernement anglophone ont
conduit les élites à suivre des études en anglais, ce qui
est un frein à l'égalité du bilinguisme. Par ailleurs, la
langue véhiculaire du pays, le bishlamar, est un dérivé
phonétique de la langue anglaise, favorisant l'apprentissage de la
langue anglaise.
Cette alternance a été suivie d'une période
d'instabilité à partir de 1995, l'UPM connaissant des divisions
internes entre partisans de M. CARLOT-KORMAN et ceux de S. VOHOR au
détriment des francophones.
De 1996 à mars 1998, Serge VOHOR, s'alliant avec Walter LINI, devient
Premier ministre. Plusieurs crises politiques interviennent : tentative de coup
de force de la "Vanuatu mobile Force" en octobre 1996, émeutes en
janvier 1998 à la suite d'un scandale financier concernant la Caisse de
prévoyance du Vanuatu.
En mars 1998, le Vanuaaku Pati (essentiellement anglophone) reprend le pouvoir
(18 sièges sur 52). Donald KALPOKAS devient Premier ministre. Un
programme de réforme globale (PRG), élaboré par la Banque
asiatique du développement (BAD), et lancé, en vue notamment de
rassurer les bailleurs de fonds et les investisseurs. Il s'intéresse
à tous les aspects de l'économie dans le but, pour l'an 2002, de
renforcer les institutions, d'atteindre les objectifs de bonne gouvernance et
d'organiser les réformes et restructurations du secteur public. Il
cherche également à opérer des ajustements structurels de
l'économie et de promouvoir une croissance durable par la promotion du
secteur privé. La mise en oeuvre et les mesures qui s'ensuivent :
introduction d'une TVA de 12,5 %, abaissement des barrières
douanières, réduction des effectifs de la fonction publique,
désengagement de l'Etat du secteur industriel, développent un
sentiment d'insatisfaction vis-à-vis de la majorité parlementaire
et des experts étrangers, notamment australiens. L'opposition revient au
pouvoir lors des élections partielles du 31 août 1999,
provoquées par le décès de Walter LINI et l'invalidation
de résultats électoraux.
3. L'instabilité politique actuelle
Des
divergences au sein du Vanuaaku Pati (remplacement de Donald KALPOKAS par
Edward NATAPEI à la tête du parti) et de l'UPM (deux factions
dirigées par Willie JIMMY et par Serge VOHOR) conduisant ce parti
à figurer à la fois dans la majorité et dans l'opposition,
ont conduit à la démission du Premier ministre.
Un gouvernement de coalition de cinq partis (PNU-MPP-UPM-John Frum-PRV) est mis
en place le 31 novembre 1999, dirigé par Barak SOPE. Ce gouvernement est
aussi fragile que le précédent : les partis qui le composent ont
des intérêts divergents, le Premier ministre n'est pas le chef du
parti le plus important de la coalition, et l'UPM est toujours divisé.
Le programme gouvernemental est rendu difficilement applicable en raison des
rapports de force existant au sein du Parlement. Favorable quand il
était dans l'opposition au Programme de Réforme global, Barak
SOPE estime à présent qu'il apporte trop de contraintes et qu'il
en gardera ce qui est bon et "se débarrassera de ce qui ne lui convient
pas". Traduisant ses déclarations par des actes, il a fait voter par le
parlement une loi redonnant au gouvernement pleine autorité sur les
nominations aux emplois publics.
En ouvrant le séminaire de l'Assemblée Parlementaire de la
Francophonie qui s'est déroulé à Port-Vila du 17 au 19
avril 2000 sur le thème « Démocratie et bonne
gouvernance », l'Honorable Serge Vohor RIALUTH, Ministre des affaires
étrangères, posait la question suivante :
« Pour tout gouvernement qui se met en place aujourd'hui au
Vanuatu, la question qui se pose immédiatement est : Comment
retenir les députés du côté du Gouvernement ?
Comment faire en sorte qu'un ou deux députés ne changent pas de
camp pour renverser un Gouvernement ? Ces changements nuisent au
développement à cause de la confusion au sein de l'appareil
gouvernemental et de l'absence de confiance des investisseurs locaux et
étrangers. »