D. LE DROIT À L'AUTODÉTERMINATION ET À LA SÉCESSION
D'inspiration soviétique, la Constitution éthiopienne, comme celle de l'URSS de 1977, prévoit que les régions ont un droit à l'autodétermination et à la sécession. Ce droit, fortement encadré, a trouvé dès le début du nouveau pouvoir, son application avec l'accession de l'Érythrée à l'indépendance.
« En mai 1991 le Front populaire de libération de l'Érythrée (FPLE), dirigé par M. Isaias Afwerki, avait pris en charge le contrôle de l'Érythrée. Il y installa un gouvernement provisoire qui administra l'Érythrée de façon indépendante jusqu'au moment où, du 23 au 25 avril 1993 dans un référendum libre et juste sous la surveillance de l'ONU, les Érythréens votèrent l'indépendance par une majorité écrasante. L'Érythrée fut proclamée pays indépendant le 27 avril 1993. En mai 1998, les tensions croissantes entre l'Érythrée et l'Éthiopie aboutirent à une offensive militaire érythréenne. L'Éthiopie transforma la guerre de tranchées en opération militaire intense dont la conclusion fut l'entente de cessation des hostilités du 18 juin 2000. Enfin, le 12 décembre 2000, à Alger, l'Éthiopie et l'Érythrée signèrent un accord de paix, bien que la frontière restât contestée. Pour régler paisiblement le différend, on établit une commission. Le 13 avril 2002, elle trancha en délimitant la frontière entre l'Érythrée et l'Éthiopie, mais jusqu'à maintenant, les deux pays n'ont pas réussi à s'entendre. » Source : Tom Pätz dans « Guide des pays fédéraux », article « Éthiopie » p. 245 |
Conformément à l'article 8 de la Constitution éthiopienne, « tout le pouvoir souverain réside dans les Nations, les nationalités et les peuples d'Éthiopie ». En outre, la Constitution dispose que « les droits humains et démocratiques des citoyens et des peuples doivent être respectés ».
L'Éthiopie est un pays multiculturel, pluriethnique, multilingue (avec plus de 89 langues).
L'article 39 de la Constitution éthiopienne garantit d'ailleurs expressément :
• le droit de tous les peuples, Nations et
nationalités à l'autodétermination sans condition, y
compris le droit à la sécession ;
• le droit de parler, d'écrire et de
développer leur propre langue, de développer et de promouvoir
leur propre culture et préserver son histoire ;
• le droit à l'autonomie.
Les articles 39 (3), 42 et 47 de la Constitution stipulent clairement que le droit à la sécession fait partie du droit à l'autodétermination des nations, quel que soit leur nombre, leur statut politique ou historique. La seule limitation de ce droit est que tous les organes régionaux ou locaux doivent s'acquitter de leurs fonctions et exercer leurs droits dans le cadre des principes démocratiques, de l'État de droit et en conformité avec les règles et l'esprit de la Constitution éthiopienne.
Chaque nation a la latitude d'établir son propre État régional à l'avenir. Le préambule de la Constitution souligne que « les Nations, nationalités et peuples d'Éthiopie » ont exprimé leur engagement fort à vivre ensemble « dans l'exercice total et libre de [ leur ] droit à l'autodétermination, à l'édification d'une communauté politique fondée sur l'État de droit et capable de garantir une paix durable, un ordre démocratique et l'avancement de [ leur ] développement économique et social ».
Le préambule souligne en outre que les peuples d'Éthiopie sont « pleinement conscients que leur destinée commune peut être mieux prise en charge en rectifiant les relations historiquement injustes et en continuant de promouvoir les intérêts communs ».
Chaque nation de l'Éthiopie a le droit de jouir pleinement de l'autonomie. Celle-ci se matérialise par le droit d'établir des institutions de gouvernement dans le territoire où elle habite et d'avoir une représentation équitable à la fois au niveau fédéral et fédéré.
Les gouvernements régionaux ont le droit de déterminer leur propre langue de travail, de préserver leur propre identité et d'établir leurs propres structures législatives, exécutives et judiciaires indépendantes.
Le gouvernement fédéral est dans l'obligation de respecter l'identité des Nations, des nationalités et des peuples. En conséquence, il est demandé au gouvernement de « renforcer les liens d'égalité, d'unité et de fraternité entre les personnes ». Le gouvernement doit donc apporter une assistance spéciale aux Nations, nationalités et peuples moins favorisés dans le développement économique et social. Il a le devoir de garder, au nom du peuple, les terres et autres ressources naturelles et de les libérer pour servir leurs intérêts communs. Selon ces mêmes principes, le gouvernement doit encourager la participation du peuple dans la formulation des politiques et programmes nationaux de développement et a le devoir de soutenir les initiatives de développement du peuple. 18 ( * )
* 18 Source cinquième et sixième rapport périodique (2009-2013) sur l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples en Éthiopie (avril 2014).