« Ne laissez pas les vagues de la mer nous séparer désormais et les années que vous avez passées avec nous devenir un souvenir »

Khalil Gibran

(Poète libanais)

Mesdames, Messieurs,

Du 5 au 9 avril dernier, une délégation composée de sept membres du groupe d'amitié France-Liban s'est rendue officiellement au Liban, ceci pour la première fois depuis 1987.

Des raisons de sécurité, dans un premier temps, puis l'absence de correspondants institutionnels au sein de l'Assemblée libanaise, nous avaient en effet amenés à différer une telle visite.

Grâce à la volonté des autorités libanaises et, en particulier, à M. Nabih Berry, Président de la Chambre des Députés, le groupe dispose aujourd'hui d'interlocuteurs au niveau du Parlement, un groupe d'amitié Liban-France ayant été récemment créé.

M. Mohammed Abdel-Hamid Beydoun, qui en assure la présidence, et ses collègues, ont d'ailleurs exprimé leur désir de voir les contacts se renforcer et les échanges s'intensifier, et nous nous en félicitons.

Si notre groupe souhaitait ardemment nouer des relations avec les représentants élus de ce pays ami, notre visite était donc également très attendue par nos collègues libanais.

Outre les députés, la délégation a eu aussi le privilège de rencontrer les plus hautes autorités de l'État, en premier lieu le Président de la République, M. Elias Hraoui, le président du Conseil des ministres, M. Rafic Hariri, le président de la Chambre des Députés, M. Nabih Berry, mais également le patriarche maronite d'Antioche et de tout l'Orient, Mgr Sfeir.

Souhaitant avoir une vue d'ensemble de la situation au Liban et en dépit de la brièveté de sa visite, la délégation -après une journée passée à Beyrouth- s'est rendue dans le Sud, puis dans le Nord et dans l'Est du pays. Elle y a rencontré des représentants de différentes régions, notamment Mme Bahia Hariri, député de Saida, président de la Commission de l'éducation de la Chambre des Députés, M. Minkara, maire de Tripoli, et M. Georges Kassarji, député de Zahlé.

Elle a également beaucoup apprécié les rencontres organisées avec des représentants des milieux économiques, avec les acteurs de la coopération linguistique française au Liban, avec le recteur et les doyens de l'Université Saint-Joseph, ainsi que des étudiants du Nord-Liban à Tripoli.

L'ensemble de ces entretiens furent particulièrement cordiaux et riches d'enseignements, au moment où l'actualité soulevait deux problèmes de la plus haute importance : la proposition formulée par Israël de se retirer du Sud-Liban sous conditions et la préparation des élections municipales (pour la première fois depuis 1963...) et présidentielles.

Outre la situation politique du pays, la délégation s'est intéressée, d'une part, à sa situation économique caractérisée par l'ampleur des efforts de reconstruction et, d'autre part, à la coopération culturelle entre la France et le Liban, pays où le français reste considéré comme la première langue de culture mais traverse une période difficile en raison de l'avancée importante de l'anglais.

La délégation a choisi de concentrer les développements du présent rapport sur ces différents points, plutôt que de procéder à une présentation exhaustive de l'histoire institutionnelle, politique et économique du pays, que la parution des excellents rapports de notre commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (en février 1996) et de notre commission des Lois (en octobre 1996) aurait rendu inutilement redondante.

La délégation tient à adresser ses plus vifs remerciements à Son Excellence M. Daniel Jouanneau, Ambassadeur de France au Liban, et à ses services -en particulier à M. Antoine Sivan, Conseiller à l'ambassade, et à M. Jean-François Desmazières, Conseiller culturel, scientifique et de coopération-, pour l'aide qu'ils lui ont apportée dans la préparation et la conduite de cette mission. La délégation se félicite enfin de la possibilité qui lui a été offerte de visiter la « Résidence des Pins », quelques jours avant son inauguration par le Président de la République française, et dont la qualité de la restauration est tout à fait remarquable.

I. UN CONTEXTE POLITIQUE RICHE EN ÉVÉNEMENTS

La situation politique du Liban au moment où la délégation s'y est rendue était caractérisée par deux événements majeurs : l'un, concernant la scène régionale, l'autre, le paysage politique et institutionnel intérieur.

A. SUR LA SCÈNE RÉGIONALE : LA PROPOSITION ISRAÉLIENNE DE RETRAIT CONDITIONNEL DU SUD-LIBAN

1. Le Sud-Liban est toujours le théâtre d'affrontements fréquents

Les forces armées israéliennes, assistées de l'armée du Liban-Sud (ALS) -composée de Libanais originaires de cette zone-, sont présentes le long de la frontière Nord d'Israël depuis 1985. Cette « zone de sécurité » pour Israël s'étend sur 800 km 2 . Elle est le lieu d'affrontements entre ces armées et la Résistance, c'est-à-dire le Hezbollah et, dans une moindre mesure, le mouvement Amal.

Le Hezbollah est la seule milice qui n'ait pas été désarmée, car il symbolise la résistance à Israël qui, après avoir combattu au Liban pour empêcher les Palestiniens d'attaquer son propre territoire, est devenu un occupant sur 8 % du sol libanais.

Á l'occasion de sa visite du nouveau lycée franco-libanais de Habbouch, à quelques kilomètres de la frontière, la délégation a pu prendre conscience de la réalité de la guérilla qui oppose ces adversaires et provoque chaque année en moyenne une quarantaine de morts de part et d'autre. Les habitants de cette région vivent quotidiennement au son des canons.

Il faut toutefois souligner l'accalmie qu'a permis la mise en place en août 1996 -sur l'initiative de la France- du Groupe de surveillance, dont notre pays assure à l'heure actuelle la présidence.

La délégation a tenu à déposer une gerbe sur les tombes des victimes du drame de Cana, où le 18 avril 1996, 105 civils libanais -dont de nombreux enfants- sont tombés sous les feux de l'artillerie israélienne alors même qu'ils s'étaient réfugiés dans une enceinte de la FINUL.

Rappelons que les militaires de la FINUL (4.500 hommes, dont 250 Français) ont reçu mandat -par les résolutions 425 et 426 du Conseil de Sécurité- de « confirmer le retrait des forces israéliennes et de rétablir la paix et la sécurité » .

Si cette force n'a pas pu remplir ce mandat, elle limite cependant, par sa présence, l'intensité des combats et joue, en outre, un rôle humanitaire important à l'égard des populations qui vivent dans cette zone de conflit.

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