B. UNE POLITIQUE D'IMMIGRATION PLUS SÉLECTIVE
1. Les réticences de l'opinion publique australienne à l'égard de l'immigration asiatique
Depuis
une quinzaine d'années, le consensus sur la politique d'immigration a
ainsi été remis en cause par différents secteurs de la
population australienne.
Un courant néo-malthusien, principalement représenté par
les experts et les scientifiques, prônant la stabilisation voire la
réduction de la population au nom de préoccupations
environnementales ou de qualité de vie a fait son apparition. La
montée du chômage pendant cette période a également
fait réapparaître la tentation
« protectionniste », notamment chez les syndicats, dont les
soucis ont été pris en compte puisque
l'immigration a
fortement diminué pendant les périodes de ralentissement
économique.
En sens inverse, le Premier Ministre du Victoria, Jeff Kennett, et le Business
council of Australia, qui regroupe les grosses entreprises, ont plaidé
en faveur d'un accroissement sensible, voire un doublement de l'immigration de
travailleurs qualifiés pour stimuler l'économie et donner
à l'Australie l'envergure dont elle manque sur la scène
internationale.
Ce point de vue est, semble-t-il, loin d'exprimer les vues de la
majorité puisque, d'après un sondage effectué en juin
1996, 88 % des personnes interrogées estimaient que l'Australie
accueillait trop d'immigrés asiatiques. Les deux tiers
considéraient le nombre d'immigrants trop important et 61 % d'entre
elles pensaient que le nombre de personnes sélectionnées pour le
regroupement familial devrait être réduit.
Les réticences de l'Australien moyen à l'égard de
l'immigration, en particulier asiatique, ont trouvé un écho lors
de la création en 1997 par Pauline Hanson du parti One Nation (Une seule
nation). Le parti One Nation est ouvertement raciste, xénophobe et
demande l'arrêt de l'immigration. Ses arguments sont classiques :
les immigrants sont mieux traités que les Australiens de souche, ils
volent le travail des Australiens, coûtent cher au contribuable, etc. Le
parti de Pauline Hanson a créé la surprise en remportant 11
sièges lors des élections du Queensland en juin 1998 et en
atteignant des scores parfois supérieurs à 30 % des voix
dans certaines circonscriptions lors des élections
fédérales d'octobre 1999.
Même si les statistiques montrent que le « péril
jaune » est très surévalué, le gouvernement de
coalition libérale-nationale, élu en octobre 1996, est pleinement
conscient de cette nouvelle sensibilité de l'opinion publique
australienne et en a tenu compte dans la mise en oeuvre de sa politique
d'immigration.
2. Une politique d'immigration plus restrictive et plus sélective
Les
immigrants arrivent chaque année au titre du programme humanitaire ou au
titre du programme d'immigration. Ce dernier est établi chaque
année après consultation des Etats, des syndicats et des
représentants des différentes communautés ethniques, et
comprend deux grandes catégories : le regroupement familial et les
travailleurs qualifiés. Des quotas globaux et par catégorie sont
fixés chaque année : en 1998-99 celui du programme
humanitaire était de 12.000 personnes, celui du programme d'immigration
de 68.000 personnes, soit un total de 80.000 personnes, en réduction par
rapport au niveau du début des années 90.
Outre cette limitation des quotas en dépit d'une économie en
phase de croissance soutenue, le Gouvernement a pris des mesures pour
sélectionner la population la plus favorable pour l'économie
australienne.
La part du regroupement
familial
- plus coûteux
pour le contribuable australien car concernant en général des
personnes inactives mais bénéficiant de prestations
sociales - dans le programme d'immigration
a été
réduite, passant de 70 % en 1995-96 à 47 % en
1997-98
. La communauté la plus touchée par cette mesure a
été la communauté asiatique qui utilisait largement le
regroupement familial. La catégorie des « travailleurs
qualifiés » a été en revanche favorisée
car elle concerne des immigrants qualifiés ou des hommes d'affaires
créateurs d'entreprises peu susceptibles de rencontrer des
problèmes d'adaptation et dont on attend un effet positif dans les
secteurs-clé de l'économie australienne.
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L'Australie dispose à l'évidence d'atouts
considérables pour affronter les défis du
XXI
ème
siècle. Elle souffre cependant d'un handicap de
taille : sa faible démographie. Sa population, qui ne
dépasse pas les 20 millions d'habitants, reste très
insuffisante par rapport à l'immensité de son territoire et
surtout à l'effort qu'elle devra fournir pour être humainement
présente face à une Asie surpeuplée qui l'écrase de
sa masse.
L'Australie est ainsi confrontée aujourd'hui à un dilemme :
le développement de son économie risque de la contraindre
à s'ouvrir davantage à une immigration qui désormais
viendrait d'Asie. L'Australie se veut multiculturelle : comment progresser
davantage dans cette voie sans remettre en question son identité ?