Lors de la séance du 22 mai 1876, le duc d'Audiffret-Pasquier, président du Sénat, donne la parole au plus illustre de ses collègues, Victor Hugo, pour qu'il présente son "projet de loi" d'amnistie.
A cet instant, Victor Hugo sait que, la semaine précédante, pendant 4 jours - du 16 au 19 mai-, la Chambre des députés, majoritairement républicaine, a largement rejeté 5 propositions de même inspiration et de différents auteurs. Il connaît également le rapport du sénateur Auguste Paris sur sa proposition, qui s'achève sur une demande de rejet de son texte.
Pour tenter de convaincre ses collègues et plus encore pour prendre date dans l'histoire, Victor Hugo va préparer minutieusement son intervention, la corriger de sa main jusqu'au dernier moment.
C'est ce manuscrit qui vous est proposé. Il fait partie des trésors de la Bibliothèque du Sénat qui a souhaité le faire numériser afin qu'il soit accessible à tous.
Le document est composé du texte de la proposition de loi et de celui de l'intervention de Victor Hugo. Ce dernier est d'une autre main mais les nombreuses corrections, adjonctions et modifications ont bien été effectuées par Victor Hugo lui-même.
Malgré son éloquence, Victor Hugo ne convainc que 10 de ses collègues (les cosignataires - dont Victor Schoelcher et Auguste Scheurer-Kestner -, Pomel (d'Oran) et Lelièvre (d'Alger). Les autres sénateurs votent contre l'adoption de la proposition.
Le peuple de Paris, au contraire, lui est acquis. Juliette Drouet, sa maitresse, lui écrira, le 23 mai 1876 : "Si le public avait pu voter, l'amnistie était proclamée d'emblée et tu aurais été porté en triomphe pour l'avoir si généreusement et si superbement demandée. Mais il faudra bien que, bon gré, mal gré, ce tas de féroces imbéciles en arrive là...".
Ce sera chose faite avec l'adoption de la loi d'amnistie du 11 juillet 1880.