De 1871 à 1875, plusieurs propositions d’amnisties partielles sont déposées sur le bureau de l'Assemblée nationale.
Le mercredi 13 septembre 1871, Henri Brisson et 47 cosignataires (MM. Schoelcher, Scheurer-Kestner, Louis Blanc, E. Quinet, Gambetta ...) déposent une proposition n°651 "ayant pour objet d'accorder une amnistie aux individus condamnés ou poursuivis pour crimes et délits politiques commis tant à Paris que dans les départements, depuis une année". Le même jour, il présente sa proposition en séance publique et en demande l'urgence, qui est rejetée (Journal officiel, p3442 et 3443). Au bout de plusieurs mois, la commission d'initiative parlementaire chargée de l'examiner considère que les 21610 non lieux et les 203 acquittements équivalent à l'amnistie demandée.
Le 19 décembre 1871, Edmond Dehault de Pressensé - qui sera sénateur inamovible de 1883 à 1891 - et plusieurs de ses collègues déposent une proposition d'amnistie n°730 "concernant les individus poursuivis ou condamnés à la suite de l'insurrection du 18 mars 1871, qui n'ont pas dépassé le grade de sous-officiers et qui ne sont accusés d'aucun crime de droit commun ou d'aucun fait déterminé dans ladite insurrection". Elle vise essentiellement les gardes nationaux et demande leur remise en liberté. Le mercredi 31 janvier 1872, Louis La Caze, au nom de la 8e commission d'initiative parlementaire, dépose un rapport sommaire n°868 qui conclut à la prise en considération de cette proposition (Journal officiel du 1er février 1872, p. 721). Le jeudi 8 février 1872, l'Assemblée nationale met aux voix les conclusions de la commission qui sont adoptées (Journal officiel du 9 février 1872, p.941).
Un projet de loi n°893 ayant pour objet de désigner les lieux de déportation est présenté le 15 février 1872. Il fait l'objet d'un rapport n°1000 présenté le 16 mars par M. Turquet puis adopté le 23 mars 1872. La loi est promulguée le 3 avril suivant (p2314). Elle sera complétée par des décrets les 31 mai 1872 (Journal officiel du 1er juin 1872, p3658), 25 mars 1873 et 10 mars 1877.
Le 16 juillet 1872, M. Dupayre, rapporteur, dépose sur le bureau de l’Assemblée nationale un rapport n°1318 sur la proposition de M. de Pressensé et de plusieurs de ses collègues, sur les mesures à prendre vis-à-vis de diverses catégories d’individus poursuivis ou condamnées à la suite de l’insurrection du 18 mars, et sur la proposition d’amnistie déposée par M. Henri Brisson et 47 de ses collègues, proposition convertie par ses auteurs en amendement à la proposition de M. de Pressensé. La commission conclut au rejet des deux propositions. A la suite de la demande de déclaration d’urgence présentée par Louis Blanc, un débat s’engage en séance publique sur la question de savoir si le temps de la clémence était arrivé. Le rapporteur souhaitant entendre l’opinion du Gouvernement, c’est Adolphe Thiers, président de la République, qui lui répond : « Lorsque la justice aura fait son œuvre, et elle est près de l’achever, ce jour-là je comprendrai que la question soit soulevée… mais elle ne l’a pas encore complètement terminée ». La demande de déclaration d'urgence de Louis Blanc est rejetée (Journal officiel du 17 juillet 1872, p4867).
Un projet de loi n°1185 ayant pour objet de régler la condition des déportés à la Nouvelle-Calédonie est présenté le 30 mai 1872. Après un premier rapport n°1363 présenté le 26 juillet par M. le vicomte d'Haussonville puis un rapport supplémentaire n°1654 du même auteur, le 11 mars 1873, le projet de loi est adopté le 25 mars 1873 et promulgué le 28 mars 1873.
Le 20 mai 1874, un rapport supplémentaire n°2392 est déposé par M. Emile Carron, sur la proposition de loi de M. de Pressensé et de six de ses collègues, "sur les mesures à prendre vis-à-vis de diverses catégories d'individus poursuivis ou condamnés à la suite de l'insurrection du 18 mars". Les Tables générales des impressions parlementaires rédigées au bureau des procès-verbaux précisent que l'Assemblée nationale n'a pas statué sur cette proposition.
Le 20 décembre 1875, Alfred Naquet et quatre cosignataires déposent une proposition relative à l'amnistie pour les "auteurs de tous les crimes et délits politiques commis depuis le 4 septembre 1870". Le même jour, il présente sa proposition en séance publique et en demande l'urgence. Le vote sur la clôture de la discusion étant indécis, le vif débat se poursuit. Il s'achève sur l'adoption d'une question préalable qui clôt le débat (Journal officiel du 21 décembre 1875, p10605 à 10609).
La Chambre des députés, élue le 8 mars 1876 et majoritairement républicaine, discute pendant 4 jours, du 16 au 19 mai 1876, et rejette à une large majorité cinq propositions d'amnistie déposées par M. F.-V. Rapsail et plusieurs de ses collègues, M. Margue et plusieurs de ses collègues, M. Rouvier, M. Allain-Targe et par M. Marcou. Elles avaient été soutenues notamment par Georges Clemenceau.
Le dépôt de la proposition de loi de Victor Hugo est daté du 21 mars 1876. Le débat au Sénat intervient donc la semaine qui suit le débat de la Chambre des députés.
Il faut attendre le 3 mars 1879 pour qu’une première loi d'amnistie partielle soit promulguée. Il s'agit d'une « grâce amnistiante » accordée aux « condamnés pour faits relatifs aux insurrections de 1871... qui ont été ou seront libérés ou qui ont été et seront graciés par le Président de la République dans le délai de trois mois après la promulgation de la présente loi». Les meneurs du mouvement en sont exclus.
La loi d’amnistie générale sera enfin promulguée le 11 juillet 1880. C’est au cours des débats de cette loi qu’intervient Léon Gambetta. Président de la Chambre, il soutient le texte du Gouvernement et interpelle ses collègues le 21 juin 1880 : « Quand donc me débarrasserez-vous de ce haillon de guerre civile ?... Il faut que vous fermiez le livre de vos dix années, que vous mettiez la pierre tumulaire de l’oubli sur tous les crimes et tous les vestiges de la Commune, enfin que vous disiez à tous… qu’il n’y a qu’une France et qu’une République. »
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Sources
Journal officiel de la République française
Tables générales des impressions de l'Assemblée nationale par ordre de numéros et par ordre alphabétique de matière, rédigées au bureau des procès-verbaux
Dictionnaire des parlementaires français, publié sous la direction de MM. Adolphe Robert et Gaston Cougny.