Mercredi 10 mai 2006
- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président. -Transports - Promotion de l'autopartage - Examen des amendements
La commission a tout d'abord procédé à l'examen des amendements aux conclusions de la commission sur la proposition de loi n° 183 (2005-2006) tendant à promouvoir l'autopartage, dont M. Roland Ries est rapporteur.
A l'article 2 (label « autopartage »), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 1 de M. Thierry Repentin.
Après l'article 5, elle a émis un avis favorable à l'amendement n° 2 rectifié de M. Roland Ries et des membres du groupe socialiste apparentés et rattachés tendant à insérer un article additionnel.
Nomination de rapporteurs
Ensuite, la commission a désigné M. Charles Revet comme rapporteur sur la proposition de résolution n° 202 (2005-2006) présentée par M. Roland Ries, au nom de la délégation pour l'Union européenne, en application de l'article 73 bis du Règlement, sur la proposition révisée de règlement du Conseil et du Parlement européen relatif aux services publics de transports de voyageurs par chemin de fer et par route (E2970).
Le délai limite pour le dépôt des amendements, auprès du secrétariat de la commission, a été fixé par la commission au lundi 15 mai 2006 à 16 h 00.
Puis, la commission a désigné M. Jean-François Le Grand, comme rapporteur sur la proposition de résolution n° 332 (2005-2006) présentée en application de l'article 73 bis du règlement, sur la proposition de règlement du Conseil relatif à la constitution d'une entreprise commune pour la réalisation du système européen de nouvelle génération pour la gestion du trafic aérien (SESAR) (E3025).
Le délai limite pour le dépôt des amendements, auprès du secrétariat de la commission, a été fixé par la commission au lundi 15 mai 2006 à 16 h 00.
Présidence conjointe de MM. Jean-Paul Emorine, président, et Jean Arthuis, président de la commission des finances. -
Engagement financier de l'Etat - Dette publique - Audition de M. Michel Pébereau, président de BNP Paribas
Enfin, conjointement avec la commission des finances, la commission a procédé à l'audition de M. Michel Pébereau, président de BNP Paribas.
Rappelant que l'intervenant avait déjà été auditionné le 29 mars dernier conjointement par les commissions des affaires sociales et des finances, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, l'a remercié de venir cette fois-ci présenter devant les commissions des affaires économiques et des finances son rapport, dont il a jugé le titre - « Rompre avec la facilité de la dette publique : pour des finances publiques au service de notre croissance économique et de notre cohésion sociale » - explicite. Anticipant une certaine unanimité sur le constat auquel il donnait lieu, il a dit s'attendre en revanche à un débat très nourri sur les suites à y donner.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, s'est également réjoui d'accueillir l'intervenant, soulignant que son audition s'inscrivait dans la continuité de celle de M. Jean Peyrelevade, réalisée le 3 mai par la commission des affaires économiques.
Se disant honoré et heureux de venir s'exprimer devant les deux commissions réunies, M. Michel Pébereau a indiqué, en préambule, que le rapport qu'il allait présenter était le fruit des travaux d'une commission pluraliste l'ayant approuvé à l'unanimité et qu'il avait été publié à la Documentation française, ainsi que sur le site du ministère de l'économie et des finances. Abordant la première de ses trois parties, établissant un constat, il a rappelé que la dette publique, s'élevant à plus de 1.100 milliards d'euros, n'avait cessé d'augmenter au cours des 25 dernières années, passant de 20 % du PIB en 1980 aux deux tiers de celui-ci actuellement, soit un quintuplement en euros courants. Il a souligné qu'au cours des dix dernières années, cette dette avait augmenté de 10,5 points de PIB, tandis que celle de tous les autres pays membres de l'Union européenne, à l'exception de l'Allemagne, où elle avait augmenté de 9,4 points du PIB suite à la réunification- s'était réduite ou stabilisée en proportion du PIB. Il a rappelé que les charges d'intérêt de la dette constituaient désormais le deuxième poste budgétaire de l'Etat, après l'Education nationale et avant la Défense, et ceci malgré le niveau actuel, historiquement bas, des taux d'intérêt. Il a souligné qu'aux côtés de cette dette financière, calculée conformément aux règles européennes, existaient d'autres engagements publics, le plus important étant celui de l'Etat vis-à-vis de ses fonctionnaires au titre de leurs retraites, qui serait évalué entre 790 et 1.000 milliards d'euros en appliquant les règles comptables du secteur privé, mais que la commission a estimé entre 390 et 470 milliards d'euros par un calcul tenant mieux compte du principe des retraites par répartition et des spécificités de l'Etat.
Il a indiqué que l'explosion de la dette financière ne résultait pas de circonstances exceptionnelles, telles qu'une croissance trop faible ou des taux d'intérêt trop élevés, mais de l'accumulation liée à 25 années consécutives de déficits des administrations publiques. Il a indiqué que la dette avait été un moyen pour financer un niveau de dépenses publiques (54,4 % du PIB) parmi les plus élevés des pays industrialisés, bien que le niveau des prélèvements obligatoires (44 % du PIB) soit lui-même le plus élevé de ceux des pays du G7.
Il a insisté sur le fait que cette dette n'était pas le résultat d'un effort visant à préparer l'avenir, rappelant que les investissements de l'Etat au cours des 12 dernières années, quelle qu'en soit la définition retenue, avaient été largement inférieurs au déficit budgétaire et que l'effort de l'Etat en matière de recherche ou d'enseignement supérieur avait stagné. Déplorant l'appauvrissement des administrations publiques, il a précisé que leur patrimoine net avait été divisé par trois de 1980 à 2002, passant de plus de 900 à moins de 300 milliards d'euros.
Il a souligné que la commission avait dénoncé le recours à l'endettement comme un moyen de compenser une gestion insuffisamment rigoureuse des dépenses publiques durant cette période, ajoutant que le rapport avait présenté à cet égard divers exemples significatifs. A titre d'illustration, il a cité l'augmentation de 4 à 5 millions du nombre de fonctionnaires entre 1982 et 2003, dont 300.000 fonctionnaires de l'Etat, et ce en dépit de la restriction de son périmètre d'intervention par les privatisations et la décentralisation, et malgré les gains de productivité significatifs ayant découlé des progrès technologiques et organisationnels. Pour ce qui est des collectivités territoriales, il a précisé qu'aucun jugement d'ensemble n'était possible, en raison de la faiblesse des informations globales disponibles, mais qu'on pouvait s'interroger sur les conclusions à tirer de l'augmentation de leurs dépenses de 7,9 à 11 % du PIB en 25 ans, et de l'accroissement à hauteur de 41 % du nombre de leurs fonctionnaires, ainsi que de la fréquence des observations critiques des juges des comptes.
Il a précisé qu'une première explication de cette situation résidait pour la commission dans les lourdeurs et les incohérences de notre appareil administratif, celui-ci ayant accumulé structures et interventions publiques nouvelles sans remise en cause des anciennes. Il a ajouté que si ces lourdeurs, non insurmontables selon lui, perduraient depuis 25 ans malgré la qualité des agents publics, cela provenait, pour la commission, d'un problème plus profond lié à des pratiques collectives et politiques n'incitant ni à la réforme des administrations, ni à un véritable combat contre le déficit et la dette publique, la dépense supplémentaire étant devenue la réponse systématique et souvent unique à l'ensemble des problèmes, y compris sociaux. Il a noté que l'action publique était jugée sur deux critères, le montant des moyens supplémentaires dégagés et la rapidité de leur annonce.
Il a ensuite indiqué que la commission avait considéré, dans la deuxième moitié de son rapport, que nos perspectives de croissance et de solidarité dans les années à venir dépendraient de notre volonté de restaurer une véritable capacité d'action publique.
Il a souligné que la France avait progressé depuis la fin des années 70, les Français ayant su s'adapter à l'ouverture des frontières et à une concurrence croissante au niveau des entreprises, notre pays étant, par ailleurs, venu à bout de l'inflation et de l'instabilité monétaire et ayant créé chaque année des richesses. Mais il a aussi constaté que nos performances en matière de croissance et surtout d'emploi avaient été inférieures aux attentes, avec un taux de croissance en retrait par rapport aux économies les plus dynamiques, l'exclusion du marché du travail d'une partie de la population plus importante que chez nos partenaires et un niveau de vie certes en progression, mais ayant cessé de converger vers celui des économies les plus riches.
Il a précisé que la France avait bénéficié, durant ces dernières années, de la vitalité de sa démographie, laquelle avait permis de compenser en partie la baisse de 23 %, entre 1970 et 2002, du nombre d'heures travaillées par habitant, la plus forte des pays de l'OCDE, à un moment où ce ratio connaissait une hausse de plus de 15 % aux Etats-Unis, bien que ce pays ait également bénéficié d'une démographie favorable. Il a déploré que la France soit en train de perdre cet avantage en raison du vieillissement de sa population, dont il résulterait, toutes choses égales par ailleurs, une baisse de la population active qui déclencherait une chute de la croissance potentielle de 2 à 1,5 % par an, ainsi que de graves déséquilibres des régimes de retraites et d'assurance maladie.
Notant qu'une inertie des politiques publiques face à cette situation entraînerait une augmentation de la dette publique à 100 % du PIB dès 2014, 130 % en 2020, 200 % en 2030, 300 % en 2040 et 400 % en 2050, il a qualifié un tel scénario « d'impossible » du fait que les prêteurs nous sanctionneraient bien avant que nous atteignions de tels niveaux d'endettement. Le scénario le plus probable était, d'après la commission, qu'une hausse des taux d'intérêt dans les prochaines années conduise les administrations publiques à perdre le contrôle de leur situation d'endettement et les marchés financiers à exiger une prise de risque plus élevée, ce qui fragiliserait notre modèle social et affecterait gravement l'ensemble de l'économie. Il a jugé que ce n'était pas en continuant d'avoir recours à l'emprunt que nous renforcerions notre croissance économique, notre niveau de vie et notre cohésion sociale, estimant que c'était au contraire en abandonnant les comportements de ces 25 dernières années que notre pays pourrait relever les défis du futur et préserver le modèle de société dynamique, fraternel et généreux auquel aspirent les Français.
Abordant enfin la dernière partie du rapport, consacrée aux recommandations, il a souligné en préambule que les vingt membres de la commission qu'il avait présidée s'étaient accordés pour considérer qu'un objectif commun devait consister en la remise en ordre des finances publiques en cinq ans, à travers la réorientation des dépenses vers les secteurs les plus utiles à la croissance, à la préparation de l'avenir et à la cohésion sociale. Il a jugé que rien ne serait plus inexact que de penser que cet objectif traduirait une vision comptable de l'action publique, mettrait en danger la qualité de nos services publics ou serait irréaliste. Bien au contraire, la remise en ordre rapide des finances publiques serait le garant de l'efficacité de notre action publique.
S'agissant des actions devant être entreprises par l'Etat, il a préconisé de s'attaquer au déficit budgétaire, s'élevant aujourd'hui à 16 % des recettes publiques, pour le ramener à l'équilibre en cinq ans, ce qui impliquerait une stabilisation de la dépense publique en euros courants. Expliquant que la réalisation d'un tel objectif imposait d'effectuer 2 % d'économies chaque année, soit 25 milliards d'euros sur cinq ans, ou encore 1,3 % du PIB, il a souligné que des pays comme la Suède et la Finlande avaient réduit leurs dépenses publiques de 10 % du PIB entre 1993 et 1998, puis stabilisé ce ratio, ce qui leur avait permis de renouer avec la croissance. Ajoutant que cet objectif impliquait également, durant la même période, une stabilisation de l'évolution des prélèvements obligatoires par rapport au PIB, et une affectation des recettes exceptionnelles au désendettement, sous réserve des dotations du Fonds de Réserve des Retraites, il a estimé qu'une utilisation des finances publiques à des fins de régulation conjoncturelle serait à nouveau possible une fois l'équilibre atteint.
Il a souligné que les autres administrations publiques devraient s'associer à l'effort de l'Etat. Concernant les collectivités territoriales, cela supposerait une stabilisation des dotations de l'Etat en euros courants prenant en compte les spécificités propres aux plus fragiles d'entre elles, l'Etat renforçant en contrepartie leur responsabilité financière en ne leur imposant plus unilatéralement des dépenses et en autorisant une augmentation progressive de leurs ressources propres, dont il a jugé le niveau actuel -50 % environ- insuffisant.
S'agissant des régimes sociaux, il a suggéré que leurs conditions d'équilibre soient désormais garanties par les décisions à prendre sur la même période de cinq ans. En ce qui concerne les retraites, le rendez-vous de 2008 devrait définir les conditions de l'ensemble des régimes, y compris les régimes spéciaux, jusqu'en 2020 au moins. Il a également préconisé le respect du retour à l'équilibre du régime général d'assurance maladie en 2009, inscrit dans la loi de financement pour 2006, et sa pérennisation par des mesures comme la garantie d'un vote de son budget à l'équilibre, l'engagement d'un rétablissement de l'équilibre d'une année sur l'autre et un mécanisme d'ajustement automatique. Déplorant le fait que 100 des 1.100 milliards d'euros de la dette de l'Etat proviennent du financement d'une partie des dépenses d'assurance maladie depuis le milieu des années 90, il y a vu un report inéquitable d'une dépense courante d'une génération sur la suivante.
Il a indiqué que pour atteindre cet objectif de remise en ordre en 5 ans des finances publiques dans des conditions satisfaisantes du point de vue de la croissance et de la cohésion sociale, il convenait de procéder à un réexamen intégral de l'efficacité des dépenses : celles de nature prioritaire, soigneusement sélectionnées, devraient être préservées, voire augmentées, la réduction automatique et uniforme des dépenses n'étant pas de bonne politique. Cela supposerait une modification des modes de travail du Parlement et du Gouvernement afin que l'efficacité de la dépense soit, plus que jamais, au centre de leurs priorités :
- pour éviter que l'empilement des dépenses continue, toute annonce de nouvelle dépense devrait préciser la ou les dépenses supprimées en contrepartie ;
- le Gouvernement devrait mettre en place un dispositif de réexamen complet des dépenses de l'Etat et de la sécurité sociale sous l'autorité du Premier Ministre, comme l'a fait avec succès le Canada, afin de les réorienter en cinq ans, en s'interrogeant sur la pertinence de chaque mission et l'adéquation des moyens humains et matériels affectés, et en utilisant l'outil que constitue la LOLF ;
- la réorganisation de l'appareil administratif serait un élément essentiel de cette démarche et le niveau des effectifs devrait tenir compte beaucoup plus qu'aujourd'hui des gains de productivité latents, du fait des progrès des technologies et de l'organisation, tout en assurant la qualité des services publics. Les départs à la retraite devraient être utilisés au maximum pour supprimer les sureffectifs, ce qui impliquerait de développer la mobilité au sein des administrations publiques et de réaliser un effort de formation, comme cela a été fait dans les grandes entreprises privées de services ;
- le Parlement devrait jouer un rôle très important dans cette réorientation des dépenses, en consacrant désormais plus de temps à leur contrôle qu'au vote du budget.
Convaincu que la mise en oeuvre de telles recommandations permettrait de dégager des marges de manoeuvre pour l'action publique propres à amortir les à-coups de la croissance et à mettre en oeuvre « l'agenda de Lisbonne », il a ajouté que la commission avait également suggéré une évaluation de l'efficacité des réglementations en même temps que des dépenses, pour s'assurer de leur cohérence, ainsi qu'une concentration des moyens publics, au lieu de leur dispersion.
Il a conclu en soulignant que la commission qu'il avait présidée était unanime à considérer que cette remise en ordre des finances publiques était indispensable non seulement pour préserver, mais surtout pour renforcer le potentiel de croissance économique et la cohésion sociale.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a vivement remercié l'intervenant pour sa contribution, dont il a estimé que le caractère lucide et courageux était propre à nourrir un débat constructif. Il s'est interrogé sur la proposition du rapport de la commission présidée par M. Michel Pébereau, de stabiliser les dotations de l'Etat aux collectivités territoriales en euros courants. Puis il a donné la parole à M. Paul Girod, en sa qualité de rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de la mission « Engagements financiers de l'Etat », précisant qu'il avait été conduit, à ce titre, à présenter son rapport de contrôle budgétaire, établi en application de la LOLF, portant sur la gestion de la dette publique, devant la Cour des Comptes. Celui-ci a estimé que la responsabilité vis-à-vis de la dette était d'ordre collectif et reposait sur les différents gouvernements s'étant succédé depuis 25 ans, quelle que soit leur orientation politique. Après avoir interrogé l'intervenant sur la présence au sein de la commission de représentants syndicaux, il a estimé que la France aurait rapidement été confrontée, en l'absence de l'euro, à des dérèglements monétaires qui l'auraient obligé à analyser plus tôt sa situation de façon lucide et à en tirer les conclusions. Enfin, faisant allusion à ses préconisations concernant la mobilité interne en crédits et personnels, il l'a questionné sur sa connaissance des divers rapports d'audit rédigés à la demande du ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, M. Jean-François Copé.
Assurant avoir pris connaissance avec grand intérêt du rapport de M. Paul Girod sur la gestion de la dette publique et n'avoir, pour cette raison, mais également du fait de la qualité des services administratifs en charge de la question, pas estimé nécessaire que ce sujet soit traité en détail dans le rapport de la commission, M. Michel Pébereau a précisé que celle-ci était composée de personnalités des milieux politiques, économiques, universitaires et médiatiques très diverses et de sensibilité fort différentes, rappelant les noms d'Alain Lambert, Didier Migaud, Christian Blanc, Philippe Herzog, Jacques Julliard, Françoise Laborde, Philippe Kourilsky, Nicole Notat, Maria Nowak, Xavier Fontanet, Edouard Michelin, Michel Camdessus, Jacques de Larosière, Pascal Lamy, Patrick Artus, Jean-Philippe Cotis ou encore Olivier Davanne ainsi que les trois directeurs du ministère des finances, Jean-Michel Charpin, Pierre Mathieu Duhamel et Xavier Musca..
A M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, qui l'interrogeait sur le point de savoir si les organisations syndicales l'avaient invité à exposer son rapport, M. Michel Pébereau a répondu avoir auditionné des représentants des grandes organisations syndicales, qui s'étaient montrés très sensibles à la problématique de la dette publique, et présenté le rapport de la commission devant le Conseil économique et social. Illustrant son propos par une référence au Canada et aux pays scandinaves, il a estimé indispensable que l'opinion publique soit mobilisée et associée aux projets de réforme par une information préalable adéquate, clé selon lui de leur succès. S'agissant de la question monétaire, il est convenu que le passage à l'euro avait pu avoir un effet anesthésiant en mettant notre pays à l'abri des crises monétaires souvent liées aux dérapages des finances publiques. Il a souligné, toutefois, que cette transition avait eu pour effet vertueux de convertir la dette publique, jadis exprimée en francs, en une monnaie forte, l'euro, et d'éviter ainsi que sa résorption par l'inflation ne se traduise par la ruine des petits épargnants, comme cela avait pu être le cas par le passé ; il a ajouté que le Pacte de stabilité et de croissance avait prévu des règles de bonne gestion budgétaire pour accompagner la création de l'euro. Pour ce qui est de la mobilité des crédits et personnels, il a vu dans la LOLF un instrument donnant des capacités d'action satisfaisantes au Parlement, pour autant que le travail préalable nécessaire soit achevé, ce qu'il a indiqué n'être pas encore le cas d'après les études de MM. Alain Lambert et Didier Migaud. Qualifiant de remarquable la capacité d'audit de l'administration, il a souligné à cet égard que l'essentiel des informations mentionnées dans le rapport de la commission en provenait.
Un très large débat s'est alors instauré.
M. Philippe Adnot s'est félicité de ce que le rapport de la commission présidée par M. Michel Pébereau permette à un large public de prendre connaissance de la situation des finances publiques. Il s'est cependant inquiété des perspectives de mise en oeuvre des préconisations du rapport. Il a jugé, pour le regretter, que le rapport était excessivement défavorable aux collectivités territoriales, en particulier aux départements.
M. Jean-Jacques Jégou a indiqué qu'il avait « honte », en tant que parlementaire, de la situation actuelle des finances publiques. Il a néanmoins rappelé que la LOLF résultait d'une initiative parlementaire, et a considéré que cela montrait que le Parlement pouvait inciter le gouvernement à la vertu budgétaire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a estimé que la LOLF pouvait être un instrument efficace de maîtrise de la dépense publique.
Mme Nicole Bricq a craint que les finances publiques ne soient pas un enjeu essentiel de la campagne pour l'élection présidentielle de 2007. Elle a estimé que le déficit des administrations publiques provenait, en grande partie, de l'augmentation des prestations sociales, et que le rapport de la commission présidée par M. Michel Pébereau avait trop tendance à présenter l'Etat et les collectivités territoriales comme les seuls responsables du déficit. Elle a considéré que les problèmes posés par la dette publique étaient essentiellement d'ordre budgétaire, l'augmentation de la charge de la dette empêchant d'autres dépenses publiques. Elle a estimé que si, en période de croissance économique forte, l'augmentation des recettes publiques devait être affectée au désendettement, cela impliquait que l'opposition parlementaire ne demande pas au gouvernement en place de « rendre l'argent aux Français », comme cela s'était produit à l'occasion de l'affaire dite de la « cagnotte » en 1999. Elle s'est interrogée, en outre, sur la pertinence de la notion de « dette publique implicite », se demandant si la prise en compte des engagements relatifs aux retraites n'obligeait pas, par cohérence, à prendre également en compte d'autres dépenses prévisibles, comme le renouvellement des infrastructures, ou certaines dépenses de santé.
M. François Fortassin a considéré que, les collectivités territoriales étant peu endettées, leur rôle dans l'endettement global des administrations publiques devait être relativisé. Il a estimé que l'Etat n'était pas forcément plus efficace que les collectivités territoriales en matière d'investissement. Il a jugé que le déficit des administrations publiques provenait, en grande partie, de l'instauration d'allégements de fiscalité non compensés.
Mme Marie-France Beaufils a approuvé ce dernier point de vue. Elle s'est interrogée sur la capacité de la LOLF à permettre la réduction des dépenses inefficaces. Elle a considéré, à cet égard, que les exonérations de charges sociales n'étaient pas suffisamment évaluées. Elle a jugé que si l'exemple des collectivités territoriales montrait que l'équilibre budgétaire n'empêchait pas de répondre au mieux aux besoins de la population, cela impliquait que les transferts de compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales soient accompagnés des transferts de ressources correspondants.
M. Aymeri de Montesquiou s'est interrogé sur les perspectives de mise en oeuvre du rapport de la commission présidée par M. Michel Pébereau. Il a proposé de fiscaliser les prestations sociales, afin d'accroître leur effet redistributif en faveur des personnes à faibles revenus.
Mme Odette Herviaux a rappelé que, si la France était l'un des pays qui avait le plus réduit le nombre d'heures travaillées ces dernières années, elle était également l'un de ceux dont la productivité apparente par heure de travail était la plus élevée. Elle a considéré que l'allongement de la période d'activité des travailleurs permettrait de mieux financer la protection sociale.
M. Claude Saunier s'est demandé s'il convenait de se fixer, comme le proposait le rapport, un délai de 5 ans pour résorber le déficit public. Il a, en effet, estimé que, dans certains domaines, comme les dépenses liées à l'obésité, sur lesquelles il avait présenté un rapport d'information au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (n° 185, 2004-2005), des mesures devraient être prises au-delà de ce délai.
M. Paul Raoult a considéré que si les parlementaires étaient favorables au principe de la maîtrise des dépenses publiques, ils l'étaient souvent moins aux mesures concrètes qui pouvaient être proposées à cette fin. Il a estimé que le Parlement devait être mieux informé sur le coût des exonérations fiscales, tant en prévision qu'en exécution. Il s'est demandé si la France pouvait s'inspirer de la consolidation budgétaire effectuée par la Nouvelle-Zélande de 2000 à 2003. Il a considéré que certaines réglementations, un nombre excessif de communes, et les mauvaises conditions de développement de l'intercommunalité, suscitaient des dépenses publiques inutiles. Il a en outre craint que l'euro ne soit durablement surévalué. Il a parlé d'une « économie de rentiers ».
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a considéré que ce dernier point pourrait faire l'objet d'une audition du gouverneur de la Banque de France.
M. Serge Dassault a exprimé son total accord avec les points de vue exprimés par M. Paul Raoult. Il a déploré que la dette serve à financer des dépenses de fonctionnement, et a considéré que les exonérations de charges sociales liées aux 35 heures devaient être supprimées. Il a rappelé que l'ensemble des exonérations de charges sociales correspondaient à près de la moitié du déficit public. Il a estimé qu'il convenait de changer de politique budgétaire dès 2007.
M. Philippe Dominati s'est interrogé sur les perspectives de mise en oeuvre du rapport de la commission présidée par M. Michel Pébereau. Il s'est demandé, en outre, s'il était envisageable de réduire les prélèvements obligatoires afin de soutenir la croissance.
M. Maurice Blin a considéré qu'il incombait maintenant au pouvoir politique de mettre en oeuvre les préconisations du rapport. Il a considéré, pour le déplorer, que les Français avaient tendance à rejeter toute préoccupation d'ordre comptable.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, s'est interrogé sur la question des cofinancements de l'Etat et des collectivités territoriales, et sur les perspectives d'évolution de la fiscalité locale.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a craint que les enjeux financiers ne soient absents de la campagne pour la prochaine élection présidentielle.
En réponse, M. Michel Pébereau a rappelé que la commission qu'il avait présidée ne préconisait aucun niveau particulier de prélèvements obligatoires, considérant qu'il s'agissait là d'un choix politique. Il a indiqué que la commission recommandait, en revanche, que les dépenses publiques soient fixées à un niveau compatible avec le niveau de ces prélèvements pour maîtriser dette et déficit publics et que l'efficacité de ces dépenses soit systématiquement recherchée. Il a estimé que la stabilité du taux de prélèvements obligatoires depuis le milieu des années 1980 semblait témoigner d'une préférence plus ou moins implicite des français pour sa non augmentation, et que la concurrence entre les territoires nationaux pour attirer activités et emplois devait conduire à une grande sélectivité dans le choix des impôts à éventuellement augmenter. En réponse à Mme Nicole Bricq, il a jugé que les engagements de l'Etat en matière de retraites de nos fonctionnaires ne constituaient pas des dépenses probables, mais bien des créances des retraités et futurs retraités sur l'Etat, au même titre qu'un bon du Trésor constituait une créance sur ce dernier. Il a souligné que le rapport de la commission ne prenait en compte, à ce titre, que les retraites des fonctionnaires de l'Etat, et non celles des fonctionnaires des collectivités territoriales et des hôpitaux, qui posent aussi un problème, mais de nature différente. Il a rappelé, par ailleurs, que l'augmentation de la dette publique provenait, pour l'essentiel, non du déficit des administrations sociales, mais de celui de l'Etat. Il a jugé que le problème posé par la dette publique n'était pas tant son niveau que sa forte augmentation sans lien avec un effort structuré en faveur de la croissance et de la préparation de l'avenir, et ses perspectives très préoccupantes d'évolution dans les années à venir. En réponse à M. Philippe Adnot, il a considéré que si le rapport apportait au débat peu d'éléments nouveaux, il avait l'avantage de présenter une synthèse. Il s'est déclaré particulièrement attaché à l'idée selon laquelle tout responsable politique annonçant une dépense nouvelle devrait indiquer la dépense ancienne qu'il prévoyait de supprimer. Il a jugé qu'en matière de dépenses publiques, les revendications des groupes de pression de toute nature avaient trop tendance à prévaloir sur l'intérêt général. Il a précisé que ni le rapport de la commission qu'il avait présidée, ni aucun pré-rapport, ne préconisait la suppression des départements, mais que le rapport s'inquiétait de l'empilement des structures, déplorant en particulier que le développement de l'intercommunalité ne se soit pas systématiquement accompagné d'une réduction des moyens des communes correspondant compétences transférées. En réponse à M. Jean-Jacques Jégou, il a considéré, pour le déplorer, que les pratiques politiques et collectives d'une génération de Français étaient responsables de l'augmentation de la dette publique. En réponse à M. Paul Raoult, il a considéré que l'impact financier des réglementations devait faire l'objet d'une évaluation systématique, comme cela devait être désormais le cas pour les règlements européens. Il a jugé que les dépenses fiscales devaient elles aussi, être mieux évaluées en termes d'efficacité. Il a indiqué que l'exemple néo-zélandais, très éclairant, avait bien été étudié par les rapporteurs mais n'avait pas été mentionné dans le rapport, ce pays étant considéré comme « ultra-libéral » par une partie de l'opinion. En réponse à M. François Fortassin, il a considéré qu'il était difficile de comparer l'efficacité des investissements de l'Etat et des collectivités territoriales. En réponse à Mme Marie-France Beaufils, il a estimé que la LOLF permettrait de mieux maîtriser la dépense publique. Il a considéré que si les exonérations de cotisations sociales patronales liées à l'augmentation du SMIC coûtaient 20 milliards d'euros, leur suppression provoquerait, selon les études économiques dont il avait eu connaissance, environ 300.000 chômeurs supplémentaires. En réponse à Mme Odette Herviaux, il a souligné que le haut niveau de la productivité par heure de travail en France n'empêchait pas que, toutes choses égales par ailleurs, une politique moins « malthusienne » aurait permis une progression plus dynamique du nombre d'heures travaillées, et donc une croissance économique supérieure.
Mme Nicole Bricq a considéré que cela aurait impliqué que les entreprises ne licencient pas massivement les salariés de plus de cinquante ans.
En réponse à M. Claude Saunier, M. Michel Pébereau a estimé que si la maîtrise des dépenses de santé supposait la mise en oeuvre de mesures au-delà d'un délai de cinq ans, la détermination d'un tel délai pour la résorption du déficit public présentait le double avantage de fixer un objectif à moyen terme et de faciliter la mise en oeuvre ultérieure de telles mesures. En réponse à M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, il a considéré que la part de la fiscalité locale dans les recettes des collectivités territoriales devait être accrue, afin de responsabiliser davantage les habitants des collectivités territoriales en matière de dépenses publiques. En réponse à M. Maurice Blin et M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, il a estimé qu'il était indispensable de convaincre l'opinion de la nécessité de réduire les déficits et la dette publics. Il a jugé que les élus locaux pouvaient jouer un rôle important à cet égard. Il a indiqué que l'Institut de l'entreprise, groupe de réflexion indépendant rassemblant des hommes et des femmes d'entreprises, avait prévu d'interpeller les candidats à la prochaine élection présidentielle sur leur programme en matière de finances publiques. Il a considéré que les finances publiques étaient un enjeu essentiel du débat démocratique, rappelant que les démocraties britannique et française trouvaient en partie leur origine dans la reconnaissance par Jean sans Terre, en 1215, du droit de consentir à l'impôt au « Conseil des vassaux du royaume », et dans la réunion des Etats généraux de 1789, qui devait permettre la levée d'impôts supplémentaires.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a félicité, de nouveau, M. Michel Pébereau pour la qualité de ses propos. Dans le cadre de la revalorisation par la LOLF de la loi de règlement, il a proposé qu'au mois de juin 2006, une semaine soit consacrée à l'audition conjointe de ministres, par la commission des finances et les commissions permanentes intéressées, sur leur exécution budgétaire 2005. Il a proposé, par ailleurs, de se rendre devant chaque commission permanente, afin d'exposer les nouveaux enjeux de la loi de règlement. Il a par ailleurs considéré que le Parlement devait, par nature, être critique vis-à-vis du Gouvernement.