Table des matières




Mercredi 26 novembre 2003

- Présidence de M. Nicolas About, président -

PJLF 2004 - Crédits consacrés aux anciens combattants - Examen de l'article 73 bis

En remplacement de M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, empêché, M. Nicolas About, président, a présenté l'article additionnel 73 bis nouveau rattaché au budget des anciens combattants, introduit en première lecture à l'Assemblée nationale.

Il a indiqué que cet article additionnel demandait au Gouvernement de présenter un rapport sur les ressources des anciens combattants en vue de la création éventuelle d'un « statut social » de l'ancien combattant reposant sur le droit, pour chacun d'eux, à disposer de ressources au moins équivalentes au salaire minimum de croissance (SMIC).

Après avoir concédé que la situation financière et sociale précaire d'un certain nombre d'anciens combattants était incontestablement un motif de préoccupation, il s'est toutefois étonné, à l'heure où la loi portant réforme des retraites proposait de garantir à l'ensemble des retraités un niveau de pension au moins égal à 80 % du SMIC, qu'un objectif supérieur soit fixé pour les seuls anciens combattants.

Il a par ailleurs estimé que les mesures dont le rapport demandait l'examen changeraient profondément la nature de l'effort de la Nation envers les anciens combattants : on basculerait en effet d'un système reposant sur le droit à réparation et à reconnaissance vers un système d'assistance.

Il a toutefois reconnu que le système statistique actuel du secrétariat d'État aux anciens combattants n'établissait pas avec précision le nombre d'anciens combattants disposant de très faibles ressources. Il a donc estimé que le recensement des besoins demandé dans le cadre du rapport permettrait, du moins, d'informer les anciens combattants sur les aides dont ils pourraient bénéficier à travers l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) et de calibrer les moyens à accorder à ce dernier pour remplir sa mission de solidarité.

M. Jean Chérioux a fait part de sa perplexité devant la création du statut de l'ancien combattant évoqué par cet article. Il a estimé que les réserves émises par le rapporteur devrait conduire à la suppression de cet article.

M. Nicolas About, président, a reconnu la nécessité de mieux connaître la population des anciens combattants disposant de faibles ressources mais il a confirmé ses réticences à un basculement vers un système d'assistance.

MM. Guy Fischer et Gilbert Chabroux se sont inquiétés de l'évolution progressive des aides apportées aux anciens combattants vers l'assistanat. Ils ont insisté sur le fait qu'il ne fallait pas remettre en cause, sous prétexte de solidarité, la spécificité du droit à réparation.

M. Nicolas About, président, a observé que la rédaction actuelle de l'article était trop orientée car elle proposait déjà la conclusion à laquelle le Gouvernement était censé aboutir. Il a donc suggéré d'amender cet article de façon à cantonner le rapport à un simple recensement des anciens combattants et de leurs veuves disposant de ressources inférieures au SMIC.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé d'adopter l'article 73 bis nouveau ainsi amendé.

PJLF 2004 - Crédits consacrés à la solidarité - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Paul Blanc, sur le projet de loi de finances pour 2004 (crédits consacrés à la solidarité).

A titre liminaire, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a rappelé que le projet de budget pour 2004 devait être replacé dans le contexte particulier du transfert du revenu minimum d'insertion (RMI) aux départements, complété par la création du revenu minimum d'activité (RMA) et, dès 2005, par la décentralisation des fonds d'aide aux jeunes. Cette décentralisation donnait aux conseils généraux la maîtrise de l'ensemble des outils permettant d'apporter une réponse de proximité plus efficace aux situations d'exclusion sociale.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a indiqué que la charge résultant du RMI serait compensée aux départements par l'attribution d'une part du produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), équivalente aux dépenses constatées en 2003 au titre de cette allocation et du revenu de solidarité versé dans les départements d'outre-mer.

Il a signalé que, pour s'assurer de l'adéquation des dépenses aux recettes transférées, l'Assemblée nationale avait adopté un amendement tendant à prévoir l'information du Parlement sur l'évolution du coût, pour chaque département, de la gestion du RMI et de la création du RMA et qu'un bilan de ce transfert serait réalisé en 2005. Il a indiqué que le Gouvernement s'était engagé à régulariser, à cette occasion, les dépenses supplémentaires éventuelles induites par la réforme de l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

Dans le même ordre d'idée, il a mentionné la future décentralisation des établissements de formation en travail social pour 2005, en soulignant que le présent projet de budget, qui achève la rénovation de ce secteur, permettait d'envisager, dans la sérénité, leur transfert aux régions.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a donc expliqué que ces réformes modifiaient sensiblement le périmètre du budget pour 2004 et que les crédits consacrés à la solidarité s'élevaient ainsi à 9,7 milliards d'euros, contre 13 milliards l'an passé. Il a toutefois noté qu'à périmètre constant, hors RMI, ils progressaient de 2 %.

Il a reconnu que la dégradation de la situation économique avait parfois contraint le Gouvernement à faire des choix difficiles et à hiérarchiser ses priorités. Il a rejeté les objections selon lesquelles un effort financier plus substantiel aurait pu être engagé, estimant que cette option aurait conduit, faute de recettes suffisantes, soit à un saupoudrage de crédits sans stratégie globale, soit à un relèvement des prélèvements obligatoires.

Il a donc approuvé la démarche du Gouvernement consistant non pas à dépenser plus, au mépris de l'équilibre des finances publiques et, in fine, du contribuable, mais à dépenser mieux, en misant sur le partenariat entre l'État, les collectivités locales et le monde associatif, ce qui est le vrai sens de la solidarité nationale.

Il a ensuite estimé que le projet de budget pour 2004 mettait en oeuvre un programme ambitieux de lutte contre les exclusions, placé sous le signe de la proximité.

Il a indiqué que les crédits de lutte contre les exclusions, au sens strict, s'élevaient à 1,3 milliard d'euros, mais qu'il convenait d'y ajouter les crédits relatifs aux deux autres minima sociaux, l'allocation de parent isolé (API) et l'allocation aux adultes handicapés (AAH), soit 5,4 milliards d'euros, ainsi que les crédits destinés au développement social pour 302 millions d'euros : au total, près de 6,8 milliards d'euros seraient donc consacrés, en 2004, à l'intégration sociale de nos concitoyens les plus démunis, sans oublier les 5 milliards d'euros supplémentaires transférés aux départements, au titre du RMI.

Dans cette enveloppe, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a précisé que les minima sociaux restant à la charge de l'État en représentaient encore près de 83 %. Il a indiqué que le projet de budget pour 2004 tablait sur une évolution moins rapide de ces allocations. S'agissant de l'API, la réduction des dépenses pourrait être de l'ordre de 4,4 %, en raison de la création de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) par la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2004, qui entraînera, mécaniquement, une réduction du nombre de bénéficiaires de l'API. S'agissant de l'AAH, le premier des minima sociaux à la charge de l'État, les crédits s'élèveront à 4,7 milliards d'euros, soit une progression limitée à 1,9 %, hors transfert du régime des exploitants agricoles.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a expliqué que la dotation pour l'AAH avait été calculée à partir d'un taux prévisionnel de progression du nombre de bénéficiaires de 1,26 %, très inférieur à la tendance observée depuis 1998 et qui ne correspondait pas à l'évolution spontanée de la demande. Il a considéré que, pour tenir cet objectif sans remettre en cause les conditions même d'attribution de l'allocation, deux conditions devaient être réunies : une réforme de fond des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) et un effort important en faveur de l'emploi des personnes handicapées, notamment en faveur de ceux des titulaires de l'AAH dont le taux d'incapacité se situe entre 50 et 80 %.

Il a enfin indiqué que le projet de loi de finances pour 2004 avait prévu une dotation stable de 233 millions d'euros au titre de l'aide médicale d'État (AME) mais que la dépense prévisionnelle pour 2003 dépassait déjà cette somme, puisqu'on l'estimait entre 590 et 742 millions d'euros.

Il a précisé que cette inflation des dépenses avait conduit le Gouvernement à envisager une réforme de l'AME sur quatre points : un meilleur contrôle de l'ouverture des droits, la mise en oeuvre du ticket modérateur décidé par la loi de finances rectificative pour 2002, la limitation des remboursements aux soins médicalement indispensables et enfin, la possibilité, pour les bénéficiaires de l'AME, d'accéder à la médecine de ville. Il a approuvé cette démarche, mais s'est montré réservé sur la capacité de ces mesures à contenir les dépenses d'AME. Il a donc estimé qu'une réforme de plus grande ampleur serait, à terme, nécessaire et qu'elle devrait induire une réflexion sur la prévention sanitaire à destination des migrants.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a toutefois insisté sur le fait que, malgré le poids et la rigidité des minima sociaux, le projet de budget pour 2004 parvenait à dégager les marges de manoeuvre nécessaires au financement des priorités présentées, le 25 mars 2003, dans le cadre du plan national de renforcement de la lutte contre la précarité et l'exclusion pour la période 2003-2005 : rendre effectif l'accès aux droits, renforcer l'accès au logement et améliorer l'accès aux dispositifs d'hébergement d'urgence, moderniser le dispositif d'urgence sociale et développer les actions en direction de publics précaires spécifiques. Il a indiqué qu'un milliard d'euros serait consacré à ce plan.

Il a ensuite expliqué que le projet de budget pour 2004 traduisait dans les faits ces objectifs, grâce à un effort particulier en faveur de l'hébergement d'urgence et de l'accueil des demandeurs d'asile et par un soutien important aux formations en travail social.

Il a d'abord indiqué que la nécessité d'assainir la situation budgétaire des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) avait conduit le Gouvernement à privilégier, en 2004, la mise à niveau des crédits de fonctionnement de ces établissements par rapport à la création de places nouvelles. Il a donc précisé que l'augmentation de 2,1 % des crédits serait entièrement consacrée au financement des déficits constatés les années précédentes et à la prise en compte de l'évolution de la masse salariale. Il a également rappelé qu'un décret d'avance de 13 millions d'euros avait été pris, le 13 octobre 2003, en faveur des CHRS, afin d'apurer un volume important de contentieux. Il a ensuite indiqué que l'année 2004 verrait la mise en oeuvre de la rénovation du cadre budgétaire et comptable des CHRS.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a, par ailleurs, observé que le projet de budget pour 2004 poursuivait le développement du dispositif d'accueil des étrangers en situation précaire, qui devrait subir deux influences contradictoires en 2004. D'une part, la réforme du droit d'asile devrait permettre une réduction sensible des délais d'instruction des demandes par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFRA) et, par conséquent, accélérer la rotation des personnes hébergées en centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) ; d'autre part, les besoins d'hébergement devraient s'accroître du fait de l'ouverture de ces centres aux demandeurs d'asile territorial, évalués à 28.000 personnes.

Il a donc noté, avec satisfaction, que le projet de loi de finances prévoyait la création de 1.000 places supplémentaires en centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA), pour un montant de près de 9 millions d'euros.

Il a également souligné que la réforme de l'office des migrations internationales (OMI), décidée en 2003, aboutirait, en 2004, à la création d'une agence chargée des migrations et a approuvé la rénovation engagée par le Gouvernement de l'ensemble des dispositifs d'accueil des migrants, estimant qu'il était important que la France se donne enfin les moyens d'intégrer ces populations.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a enfin indiqué que le projet de budget pour 2004 achevait la rénovation de l'appareil de formation en travail social, en vue de son transfert aux régions. Il a précisé que la dotation prévue de 133 millions d'euros, en progression de 9,1 %, permettrait de couvrir l'évolution de la masse salariale des centres en 2004, de financer l'extension en année pleine du financement des places ouvertes en 2003 et d'ouvrir 1.450 places supplémentaires à la rentrée 2004.

Il a cependant rappelé que la création de places de formation supplémentaires n'était pas suffisante pour résoudre la pénurie prévisible des travailleurs sociaux car il s'agissait ensuite de pourvoir les places créées. Il a, à cet égard, rappelé que 3.000 places de formation étaient restées vacantes en 2002. Il a donc appelé les régions, qui seront, dès 2005, responsables de ces formations, à engager un travail de communication et de promotion auprès des étudiants autour des métiers du travail social.

S'agissant des personnes handicapées, il a tenu à saluer l'augmentation budgétaire prévue pour 2004, qui permettait déjà de poser les bases de la réforme très attendue de la loi d'orientation du 30 juin 1975.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a précisé que les crédits consacrés aux personnes handicapées s'élevaient à 6,2 milliards d'euros, soit une progression de 3,2 % par rapport à 2003, et que l'effort public total en leur faveur atteignait, selon la Cour des comptes, 26 milliards d'euros.

Il a d'abord observé que, malgré l'arrivée à échéance des deux plans, quinquennal et triennal, le rythme des créations de places ne s'était pas ralenti : 3.000 places supplémentaires en centres d'aide par le travail (CAT) et 500 en ateliers protégés seraient créées, auxquelles il convenait d'ajouter 2.200 places en maison d'accueil spécialisé ou en foyer d'accueil médicalisé, financées sur des crédits assurance maladie.

Il a ensuite indiqué que le désir légitime des personnes handicapées de pouvoir vivre de façon autonome à domicile était désormais pris en compte par les politiques publiques, grâce au développement des services d'auxiliaires de vie et à l'achèvement du dispositif des sites pour la vie autonome.

Il s'est félicité du fait que l'intégration scolaire des enfants handicapés ait enfin été consacrée comme une mission à part entière de l'éducation nationale, celle-ci prenant dorénavant à sa charge le dispositif des auxiliaires de vie scolaire. Il a précisé que les ruptures dans les prises en charge seraient évitées, grâce au maintien, en 2004, des 1.583 postes financés par le budget des personnes handicapées.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a toutefois observé que les attentes des personnes handicapées et de leurs familles avaient changé, tant vis-à-vis des modalités de la prise en charge institutionnelle que dans le domaine de l'égalité des droits et des chances, et que cette évolution s'était traduite par la revendication d'un droit nouveau, le droit à compensation.

Après avoir rappelé la nécessité de donner un contenu concret à ce droit, grâce à une réforme de la loi d'orientation du 30 juin 1975, il a indiqué que celle-ci semblait désormais bien engagée, les axes de la future loi ayant été définis : rendre effectif l'accès à la Cité, créer les conditions financières d'une vie autonome digne et simplifier les structures administratives afin de permettre aux personnes handicapées de décider de leur choix de vie.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a enfin noté que le Premier ministre avait inscrit le droit à compensation dans une perspective nouvelle, celle de la création d'une nouvelle branche au sein de notre protection sociale, à travers la création d'une Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Il a rappelé que la commission des affaires sociales du Sénat avait largement participé à la définition de ces orientations et que l'ensemble de ses propositions avait été traduit dans une proposition de loi déposée conjointement par le président de la commission et lui-même, et cosignée par un grand nombre de commissaires, le 13 mai 2003.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a ensuite insisté sur quatre aspects prioritaires de la réforme de la loi d'orientation.

Il a d'abord rappelé son souhait de voir mise en place une véritable allocation de compensation du handicap.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a estimé que la création de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie allait incontestablement dans le bon sens, dans la mesure où celle-ci consacrerait, dès 2005, 850 millions d'euros au financement d'une prestation de compensation du handicap.

Il a remarqué que cette nouvelle prestation aurait un coût au moins équivalent à celui de l'APA et qu'elle nécessiterait des financements complémentaires. Il a donc estimé vraisemblable que la création de la caisse s'accompagne d'un transfert des sommes consacrées par les départements à l'aide compensatrice d'une tierce personne (ACTP), soit environ 600 millions d'euros, vers le financement de la nouvelle allocation.

Il a ensuite plaidé pour un rapprochement des COTOREP et des commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES) avec les futures « maisons départementales du handicap ».

Il a en effet rappelé que la compensation du handicap allait au-delà de l'attribution d'aides financières à l'acquisition de matériels adaptés ou à la rémunération d'auxiliaires de vie et qu'elle devait pouvoir inclure, selon les besoins de la personne, une orientation vers un établissement adapté, l'accès à un service d'accompagnement ou encore une mesure de protection juridique.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a donc estimé nécessaire de rapprocher les instances d'orientation des futures « maisons départementales des personnes handicapées » afin que le projet de vie de la personne puisse être apprécié dans sa globalité. Il a également fait remarquer qu'un tel rapprochement constituait une simplification administrative importante pour les bénéficiaires : dans la mesure où c'est souvent la décision de reconnaissance de ces commissions qui matérialise l'entrée dans le monde du handicap, il convient de pouvoir donner, dès ce stade, une information complète aux familles et amorcer immédiatement une démarche de compensation.

Il a ensuite insisté pour que les décrets d'application de la loi du 2 janvier 2002 soient rapidement publiés, afin de rendre effective la rénovation des établissements sociaux et médico-sociaux et la prise en compte des droits des usagers.

Il a enfin plaidé pour une adaptation des modes de prise en charge à l'évolution des attentes et des besoins de la population handicapée.

Il a d'abord demandé un développement des solutions d'accueil de jour et d'accueil temporaire, afin de permettre aux familles de pouvoir prendre des temps de repos et, comme le soulignait le rapport de la commission d'enquête sur la maltraitance des personnes handicapées, d'éviter que l'épuisement des aidants conduise à des situations de violence plus ou moins larvées.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a observé que la préservation des places d'accueil temporaire dans les établissements supposait que ceux-ci ne fonctionnent pas, comme c'est le cas actuellement avec des budgets fondés sur des taux d'occupation de 98 %.

Il a ensuite insisté sur la nécessité de développer l'insertion sociale par le logement rappelant que, pour un certain nombre de personnes handicapées, notamment handicapées mentales, vivre seul à domicile était impossible et que les solutions classiques, comme celle de l'auxiliaire de vie, étaient, en l'espèce, impraticables. Évoquant les expériences originales de résidences, doublées d'un service d'accompagnement à la vie sociale, qui existent déjà, il a estimé qu'il convenait de les encourager et de les amplifier.

Il s'est enfin inquiété du sort des personnes handicapées vieillissantes, estimant que la création de sections spécifiques au sein des établissements pour adultes handicapés constituait la solution la plus satisfaisante, car ces structures ont une meilleure connaissance des particularités du handicap. Il a rappelé que de telles sections existaient déjà mais que leur développement exigeait la suppression de la barrière d'âge à 60 ans opposée aux établissements en termes d'agrément, pour l'instant levée au cas par cas.

Il a reconnu que les avancées sur ces sujets étaient suspendues à la révision de la loi d'orientation du 30 juin 1975 et il a estimé qu'il convenait de convertir en actes les multiples propositions faites depuis deux ans, l'attente des personnes handicapées étant désormais à son comble.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a enfin souhaité, comme chaque année, et d'une façon plus particulière à la veille de l'acte II de la décentralisation, évoquer l'évolution des dépenses d'action sociale décentralisées. Il a indiqué que ces dépenses avaient connu une progression sans précédent de 12 % entre 2001 et 2002 et qu'elles atteignaient, en 2003, 15,3 milliards d'euros, soit une augmentation de 19 %. Trois facteurs expliquent cette progression spectaculaire des dépenses :

- le premier correspondant à l'évolution normale des coûts, compte tenu de l'indexation des salaires sur les prix et des créations de places réalisées, notamment dans le domaine du handicap, pour adapter l'offre de service aux besoins ;

- le deuxième est la montée en charge de l'APA qui entraîne une hausse importante des dépenses d'aide sociale en faveur des personnes âgées, désormais le premier poste de l'aide sociale départementale ;

- le dernier, plus préoccupant, correspond à une inflation du coût des prestations en établissements et services sociaux et médico-sociaux.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a estimé que ce dernier phénomène donnait une acuité particulière à la question de la maîtrise des dépenses de personnel, car celles-ci représentent les deux tiers des dépenses de fonctionnement des établissements.

Il a observé qu'après plusieurs années de modération salariale forcée pour cause de réduction du temps de travail, les dépenses de personnel repartaient à la hausse, sans que le poids des 35 heures ait pour autant été entièrement digéré : ainsi, la sortie des aides Aubry II, qui avaient un caractère temporaire, n'a pas été anticipée dans la construction des budgets des établissements et représente un besoin de financement de l'ordre de 260 millions d'euros.

Il a précisé que les engagements conventionnels pour la période 2003-2006 s'élevaient déjà à 375 millions d'euros, soit une augmentation de 2,2 % de la masse salariale des établissements, avant même toute négociation sur la valeur du point, et alors que plusieurs accords restaient encore en attente d'agrément.

Il a souligné la fréquence des avis négatifs donnés par la commission nationale d'agrément, le plus souvent faute de pouvoir évaluer précisément l'impact financier des accords qui lui sont soumis. Il a donc estimé nécessaire d'améliorer l'information des partenaires sociaux sur la marge de manoeuvre dont ils disposent dans la négociation collective.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a ensuite indiqué que l'année 2004 serait celle de la rénovation du cadre budgétaire et comptable des établissements sociaux et médico-sociaux et que ce nouveau cadre s'appuyait sur une volonté de renforcer la responsabilité des gestionnaires, grâce à une nouvelle procédure contradictoire de fixation des budgets et à des enveloppes de financement opposables. Il a également précisé que les établissements pourraient, par convention, obtenir des perspectives de financement pluriannuelles. Il a estimé que cette modernisation, en suspens depuis deux ans, permettrait de donner des perspectives financières claires, tant aux établissements qu'aux financeurs.

Au total, il a estimé que, même si des choix avaient dû être faits pour hiérarchiser les priorités, le projet de budget pour 2004 relevait un défi qu'on aurait pu dire impossible : financer des chantiers nouveaux, malgré une situation économique et budgétaire tendue. C'est la raison pour laquelle il a proposé de donner un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la solidarité pour 2004.

M. Jean Chérioux s'est ému de la situation des personnes handicapées vieillissantes. Il a confirmé le fait que la limite d'âge à 60 ans opposée aux établissements en matière d'agrément était un obstacle au maintien des personnes vieillissantes dans leur établissement. Il a, en revanche, estimé que les personnes handicapées vieillissantes dépendantes pouvaient être accueillies en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Il a insisté pour que l'accent soit mis sur la création de places pour enfants et adultes polyhandicapées dans le cadre des ouvertures de maisons d'accueil spécialisé (MAS) et de foyers d'accueil médicalisé (FAM).

Mme Sylvie Desmarescaux s'est inquiétée du retard pris pour la réforme de la loi d'orientation du 30 juin 1975. Elle a rappelé que les familles étaient contraintes à un parcours du combattant inadmissible pour obtenir une place en établissement, le simple traitement de leur dossier par les COTOREP pouvant atteindre neuf mois. Elle a estimé que ces délais étaient contraires au respect de la personne handicapée.

M. Louis Souvet a tenu à rappeler le rôle des associations qui, les premières, ont pris les mesures du vieillissement de la population handicapée et développé des structures adaptées. Il a rendu hommage au travail des ateliers protégés qui constituent un outil trop souvent oublié en faveur de l'insertion professionnelle des personnes handicapées. S'agissant des CHRS, il a déploré la faiblesse des prix de journée attribués à ces établissements.

M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur le caractère suffisant de la remise à niveau de la dotation des CHRS pour apurer les dettes des exercices antérieurs à 2004. Il a précisé, par ailleurs, que le projet de loi du Gouvernement sur le handicap ne serait finalement pas déposé le 10 décembre mais qu'il ferait l'objet, à cette date, d'une simple communication en Conseil des ministres. En conséquence, il a proposé de commencer à procéder aux auditions sur la réforme de la loi d'orientation du 30 juin 1975 dès maintenant, sur la base de cette communication et de la proposition de loi de la commission.

M. Guy Fischer a souligné que le rapport de M. Paul Blanc laissait en suspens de nombreux points d'interrogation. Il s'est déclaré opposé au transfert du RMI aux départements estimant que cette réforme avait été mal préparée et que la création du RMA conduisait, de fait, à un démantèlement du SMIC. Il s'est ému du nombre de réformes amorcées simultanément par le Gouvernement et il a déclaré qu'il serait impossible de mener de front tous ces chantiers.

Il a concédé que le projet de budget pour 2004 réalisait un effort en faveur des CHRS mais il a mis en doute la capacité du Gouvernement à rattraper, en un an, les retards accumulés.

M. Nicolas About, président, s'est déclaré scandalisé de la désinvolture des inspections académiques, face aux familles qui demandent l'attribution d'une auxiliaire de vie scolaire pour leur enfant handicapé. Il a dénoncé le fait que ces familles, conduites à recruter elles-mêmes un auxiliaire de vie scolaire, se voient par la suite opposer des conditions de diplôme pour leur refuser l'attribution d'une aide financière au poste.

M. Alain Vasselle a remarqué que les crédits consacrés à l'AAH étaient une fois de plus sous-estimés. Il a rappelé que le montant de cette allocation ne permettait pas à ces bénéficiaires de faire face à l'ensemble de leurs besoins vitaux et notamment à la prise en charge de leurs frais médicaux. Il a déploré que l'accès à la CMU leur soit, le plus souvent, refusé. Il a enfin fait part de sa perplexité face à la création d'une nouvelle branche de protection sociale consacrée à la perte d'autonomie, estimant qu'il convenait de ne pas mélanger dépendance liée à l'âge et handicap.

M. André Lardeux a plaidé pour le développement de solutions d'accueil diversifiées pour les personnes handicapées vieillissantes. Il a estimé que la première urgence était la création de places supplémentaires en MAS. Il a déploré le fait que les inspections académiques n'associent pas davantage les départements au développement des unités pédagogiques d'intégration (UPI).

S'agissant de l'action sociale décentralisée, il a précisé que sur les 15 milliards d'euros consacrés par les départements à ces actions, 10 milliards d'euros concernaient des dépenses de personnel. Il a expliqué que de nombreuses maisons de retraite étaient obligées, pour faire face à l'augmentation de leur masse salariale, d'augmenter leur prix de journée dans des proportions telles que les familles préféraient reprendre chez elles leurs parents âgés.

Mme Françoise Henneron a fait valoir que la prise en charge du salaire d'un auxiliaire de vie scolaire était une charge très lourde pour les petites communes rurales.

Évoquant la question de l'accueil de jour, Mme Gisèle Printz s'est prononcée en faveur du développement des structures, aujourd'hui expérimentales, de haltes-garderies, permettant aux familles de prendre des temps de repos.

Répondant à l'ensemble des intervenants, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a précisé que les crédits ouverts dans le cadre de l'ONDAM 2004 seraient consacrés pour l'essentiel à des créations de places pour enfants et adultes polyhandicapés ou autistes. Il a indiqué que les délais entre les autorisations données par les comités régionaux d'organisation sociale et médico-sociale (CROSMS) et l'ouverture réelle des établissements pouvaient être de plus d'un an et demi, ce qui conduisait à des retards importants dans les créations de places. Il a également observé que de nombreuses associations voyaient leur projet rejeté car les crédits nécessaires à leur financement n'étaient pas délégués assez rapidement aux directions départementales de l'action sanitaire et sociale (DDASS).

Il a rappelé combien il était important d'améliorer le soutien de l'État aux ateliers protégés afin de sauvegarder leur compétitivité et d'éviter que les entreprises ne préfèrent sous-traiter à l'étranger.

Il a précisé que le décret d'avance du 13 octobre 2003 avait permis d'apurer les dettes des CHRS et que, par conséquent, la mesure nouvelle prévue dans le projet de budget 2004 serait suffisante pour absorber l'augmentation de la masse salariale de ces établissements.

Il a indiqué que les titulaires de l'AAH étaient effectivement exclus de la CMU du fait d'un plafond de ressources légèrement supérieur à celui de ce dispositif. Il a indiqué qu'il avait d'ores et déjà attiré l'attention du ministre sur cette situation inadmissible.

Il s'est également déclaré réservé sur la création d'un cinquième risque estimant qu'à la différence du handicap, la dépendance liée à l'âge était un risque assurable.

Il a reconnu qu'un effort substantiel devait être fait pour améliorer l'insertion professionnelle des personnes handicapées titulaires d'un taux d'incapacité entre 50 et 80 % et que seul cet effort permettrait de garantir une réduction des dépenses d'AAH. Il a estimé qu'en matière d'insertion professionnelle, les expériences innovantes, telles que l'encouragement à la création et à la reprise d'activité, devaient être encouragées.

Il a enfin souhaité une revalorisation de l'image des professions sociales afin d'inciter un plus grand nombre d'étudiants à se diriger vers ces formations.

A l'issue de ce débat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la solidarité pour 2004.

PJLF 2004 - Crédits consacrés à la santé - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Gilbert Barbier, sur le projet de loi de finances pour 2004 (crédits consacrés à la santé).

A titre liminaire, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué que les crédits du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées progressaient de 1,4 %, à périmètre constant, pour atteindre 9,6 milliards d'euros, et intégraient les crédits de gestion des politiques sanitaires et sociales, cogérés avec le ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Il a précisé que, hors minima sociaux, les crédits disponibles augmentaient de 0,9 % pour financer, en particulier, la santé publique, le plan de lutte contre le cancer et la remise à niveau des subventions aux agences sanitaires, progression qui, dans un contexte budgétaire fortement contraint, témoignait de l'intérêt que le Gouvernement portait au domaine de la santé.

Il a estimé, par ailleurs, que le présent budget devait être replacé dans l'environnement plus large dans lequel évoluait le secteur de la santé, ce qui conduisait à prendre en compte les projets de loi relatif aux responsabilités locales et relatif à la politique de santé publique, tous deux en cours d'adoption par le Parlement, ainsi que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a souligné que la volonté gouvernementale de mettre en cohérence les actions de santé publique et de prévention apparaissait clairement dans l'agrégat « santé publique et sécurité sanitaire » du projet de budget, doté de 322 millions d'euros pour 2004. Celui-ci incluait notamment un programme intitulé « santé publique et prévention » pour 189 millions d'euros, qui se présentait comme l'ébauche d'un futur « projet annuel de performance » qui, à terme, devait intégrer les dépenses de sécurité sanitaire.

Il a précisé que les objectifs de ce programme avaient été déterminés en fonction de l'état sanitaire de la France, notamment au regard du déséquilibre qui existait entre les dépenses engagées au titre de la prévention (3,6 milliards d'euros par an) et celles consacrées aux soins curatifs (154,4 milliards d'euros). Ces objectifs étaient au nombre de quatre : diminuer la « mortalité évitable » ; améliorer la qualité de vie des personnes malades et lutter contre les incapacités ; réduire les inégalités d'accès à la prévention ; renforcer les connaissances disponibles en santé publique et leur diffusion en améliorant les systèmes d'information et en favorisant la recherche et la formation en santé publique.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a apporté son soutien au plan de mobilisation contre le cancer, annoncé par le Président de la République le 24 mars dernier, et s'est réjoui de l'étape décisive franchie dès 2004 avec la généralisation du programme de dépistage organisé du cancer du sein et la création de l'Institut national du cancer. Il a précisé que ce plan bénéficiait de 59 millions d'euros de dotations, dont 18 millions d'euros au titre des mesures nouvelles.

Indiquant que 27 millions d'euros seraient consacrés, en 2004, à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, il a ajouté qu'une nouvelle impulsion serait également donnée à l'action de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, à laquelle 38 millions d'euros seraient alloués dans le cadre d'un plan quinquennal mis en oeuvre en 2004.

Rappelant que notre système de sécurité sanitaire avait été durement éprouvé, en 2003, par l'épidémie du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et les conséquences de l'épisode caniculaire de l'été, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a estimé qu'il était nécessaire de renforcer la cohérence et l'efficacité des systèmes d'alerte et de prévention, en coordination avec la sécurité civile.

Il a signalé que la politique de veille et de sécurité sanitaires s'appuyait sur l'action de six agences nationales spécialisées par secteur, qui se partageaient une dotation budgétaire de 95 millions d'euros.

Outre la création de trente-cinq postes supplémentaires, à répartir entre ces agences, pour leur assurer une meilleure capacité d'analyse et de réaction, il a indiqué que plusieurs mesures devraient être prises en 2004 : la création éventuelle de l'Agence de biomédecine, prévue par le projet de loi relatif à la bioéthique ; la redéfinition des compétences attribuées à l'Institut national de veille sanitaire, qui figure parmi les dispositions du projet de loi relatif à la politique de santé publique, ainsi que l'octroi des nouvelles compétences attribuées à l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

Sans nier l'utilité de ces mesures, il a observé qu'elles n'apportaient toutefois qu'une réponse limitée au problème de la sécurité sanitaire, en esquivant notamment la question de la rationalisation des compétences des agences.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué les points essentiels de l'agrégat « offre de soins et accès aux soins », doté de 1,2 milliard d'euros pour 2004, dont 957 millions d'euros affectés à la seule couverture maladie universelle.

Rappelant que la politique en matière d'offre de soins était très largement financée par la sécurité sociale, notamment au moyen de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM), il a indiqué que l'État ne jouait plus qu'un rôle de régulation en s'assurant de la bonne répartition de l'offre de soins sur tout le territoire et en finançant les agences régionales de l'hospitalisation (ARH).

Il a précisé que les crédits des ARH, soit 19,2 millions d'euros en 2004, avaient été renforcés pour leur permettre de faire face aux missions nouvelles que leur avait assignées, d'une part, la loi visant à simplifier le droit, en matière de transfert des pouvoirs de police du ministre de la santé au directeur de l'ARH et de nouvelles compétences en matière de planification sanitaire, d'autre part, le plan « Hôpital 2007 », qui fixait leurs priorités pour les cinq années à venir, et enfin la loi de financement pour 2004 pour la mise en oeuvre de la tarification à l'activité.

Il a considéré que ces mesures illustraient la nouvelle organisation de notre système de santé, qui multipliait les cofinancements et rationalisait les interventions respectives de l'État, de l'assurance maladie, des collectivités territoriales et des autres opérateurs, et dans laquelle l'État conservait un rôle de maîtrise d'oeuvre et de maîtrise d'ouvrage.

Concernant enfin les professions de santé, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué que 28 millions d'euros seraient affectés, en 2004, au subventionnement des instituts et écoles privées de formation des professionnels paramédicaux et rappelé que les instituts publics étaient financés par l'assurance maladie dans le cadre de la dotation globale versée aux établissements publics de santé.

Il a ajouté que les crédits destinés aux bourses des étudiants des formations paramédicales et de sages-femmes bénéficiaient également d'une augmentation et s'élevaient à près de 67 millions d'euros. Ils permettront de financer 20.142 bourses en 2004 et de prendre en compte la hausse de 13 % du quota des élèves infirmiers. Il a estimé que cette mesure constituait un préalable utile au transfert de ces formations aux régions, la décentralisation de cette compétence étant prévue par le projet de loi relatif aux responsabilités locales.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a enfin achevé la présentation du présent projet de budget de la santé par la présentation des deux articles rattachés :

- l'article 81 concernant les ressources propres de l'Association française de sécurité sanitaire et des produits de santé (AFSSAPS) et proposant cinq majorations de ressources, justifiées par l'élargissement des missions de l'Agence, pour un montant évalué à 15 millions d'euros ;

- l'article 82 prévoyant, d'une part, la mise en place d'un forfait unifié de prise en charge des dépenses de couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) relevant d'une caisse d'assurance maladie ou d'un organisme complémentaire, d'autre part, l'allocation, par le fonds de financement de la CMUC aux régimes obligatoires, d'une dotation par bénéficiaire d'un montant égal à la déduction accordée aux organismes complémentaires.

M. Michel Esneu a déploré la faiblesse des crédits consacrés à la prévention par rapport à ceux alloués aux actions curatives, alors même que l'alcool et le tabac constituaient deux fléaux pour la jeunesse et devaient, à ce titre, faire l'objet d'une information préventive, notamment à l'occasion de la visite médicale scolaire.

M. Alain Vasselle s'est inquiété de l'absence de définition claire des périmètres d'action respectifs de l'État et de l'assurance maladie, en particulier dans les domaines de la prévention et, depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, en matière de lutte contre la toxicomanie et d'interruption volontaire de grossesse. Il a déploré le caractère mouvant de ces périmètres, au gré des nécessités de la loi de finances, qui ne permettait pas une visibilité satisfaisante des actions menées en matière de santé publique et s'est interrogé sur la réflexion que le Sénat pourrait conduire sur cette question, en amont des conclusions du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

Il a ensuite demandé à M. Gilbert Barbier si les bourses en faveur des étudiants des formations paramédicales seraient prises en charge par les régions, dans le cadre de la décentralisation, et si la formation médicale continue ne tendait pas progressivement à être financée par l'assurance maladie.

Concernant la question des transferts de compétences, il a enfin souligné que tout transfert de charges devait être compensé par un transfert équivalent de ressources et que ce principe devait constituer un pilier essentiel de la future réforme de l'assurance maladie.

M. Louis Souvet s'est interrogé sur la définition de la « mortalité évitable », pour savoir si cette notion intégrait les décès liés à la canicule, ce qui aurait pour conséquence d'étudier l'organisation des institutions d'accueil des personnes âgées.

M. Serge Franchis a estimé que les fumeurs qui souhaitaient arrêter leur consommation de tabac, notamment en raison de l'augmentation des prix, devaient être aidés à le faire, ce qui pourrait justifier le remboursement des produits de substitution.

M. Guy Fischer a rappelé que si 59 millions d'euros étaient bien destinés, dans le présent projet de budget, au plan de lutte contre le cancer, l'assurance maladie y contribuait, pour sa part, à hauteur de 100 millions d'euros. Il a estimé que les transferts à l'assurance maladie constituaient une charge trop importante, compte tenu de ses difficultés financières actuelles.

Il a enfin déploré que le transfert de la médecine scolaire aux départements, dont le Gouvernement avait abandonné l'idée au printemps dernier, soit finalement opéré par la voie d'un amendement au projet de loi relatif aux responsabilités locales.

M. Bernard Cazeau a abondé dans le sens des critiques portées aux transferts incessants de charges entre l'État et l'assurance maladie.

Concernant la prévention, il a déploré la faible participation financière de l'État à ces campagnes, alors que la prévention permettait des économies importantes, en dépistant en amont des cancers aux traitements coûteux, et qu'elle évitait aussi des drames humains.

M. Nicolas About, président, a estimé, à cet égard, qu'il fallait rester prudent sur la question de la prévention. En effet, la prévention atteint sa limite lorsque, intervenant à un stade trop précoce, elle peut conduire à des interventions qui n'auraient pas été justifiées par l'évolution réelle de la maladie. Il a ainsi rappelé que, dans 50 % des cas, des cancers du sein étaient opérés sans justification médicale, correspondant ainsi à des « faux positifs » du dépistage.

Rappelant que le système de santé français produisait d'excellents résultats, bien qu'il consacre peu de moyens à la prévention, il a souhaité que celle-ci ne soit pas érigée en nouveau dogme de la santé publique. Sans méconnaître l'utilité de la prévention, il a estimé que les différentes actions menées dans ce domaine devaient impérativement faire l'objet d'une évaluation, en termes de résultats médicaux et de définition des groupes de patients à risque.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a affirmé qu'il ne devait pas y avoir de confusion entre la prévention, qui s'appliquait à des sujets sains et constituait une action de santé publique, par exemple en matière de lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, et le dépistage précoce, qui était un acte médical à l'égard de sujets potentiellement malades, et relevait donc de l'assurance maladie. Il a considéré que le projet de loi relatif à la santé publique et la future réforme de l'assurance maladie pourraient fixer plus clairement la limite entre les deux notions et qu'il convenait impérativement de préciser aussi les périmètres d'actions respectifs de l'État et de l'assurance maladie.

Il a ensuite indiqué que la notion de « mortalité évitable » pouvait s'appliquer aussi aux décès liés aux accidents de la route et à la consommation de drogues licites ou illicites, mais qu'elle ne concernait pas ceux consécutifs à la canicule.

Il a confirmé que les bourses d'étudiants en formations paramédicales seraient bien transférées à la charge des régions et a précisé que M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, avait souhaité qu'une réflexion soit engagée sur l'opportunité du remboursement éventuel des substituts nicotiniques aux jeunes souhaitant cesser de fumer. Concernant le plan cancer, il a enfin indiqué que la part financée par l'État devrait normalement passer de 20 à 40 % à compter de 2006.

La commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la santé dans le projet de loi de finances pour 2004.

PJLF pour 2004 - Crédits consacrés au BAPSA - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Marc Juilhard, sur le projet de loi de finances pour 2004 (crédits consacrés au budget annexe des prestations sociales agricoles).

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a considéré que l'année 2004 sera marquée, à la fois, par une grande continuité et par une mutation fondamentale, puisque le BAPSA sera remplacé par un Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA), qui reprendra ses missions, ses financements et une large partie de son mode de fonctionnement.

Il a estimé que le cycle qui prenait ainsi fin avait vu la protection sociale des non-salariés agricoles connaître une évolution aussi importante que celle que le monde agricole avait vécue.

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a indiqué que si le projet de BAPSA ne présentait pas, cette année, de « mesure phare », il prenait néanmoins en compte deux réformes majeures et récentes, ardemment souhaitées par le monde agricole : la mise en oeuvre de la retraite complémentaire obligatoire et la mensualisation prochaine, dès janvier 2004, des retraites de base.

Il a considéré que la transformation du BAPSA en FFIPSA ne devait pas être ressentie avec crainte, mais plutôt perçue comme une opportunité, à la condition que l'identité même de la protection sociale agricole soit garantie, ce que le débat budgétaire permettait d'éclairer. Il fournira, en effet, l'occasion de procéder à l'analyse traditionnelle des grandes orientations financières et sociales, mais au-delà, d'établir un bilan sur longue période de la protection sociale agricole et de présenter les contours et la problématique du futur FFIPSA.

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a estimé que l'exécution du BAPSA en 2003 devrait, comme les années précédentes, être déficitaire et se traduire par un besoin de financement d'environ 260 millions d'euros. Ce résultat est imputable à la dérive des dépenses d'assurance maladie qui affecte, d'ailleurs, l'ensemble des régimes sociaux et qui s'explique par la forte proportion de personnes âgées dans le régime des exploitants agricoles.

Il a indiqué que le projet de BAPSA pour 2004 avait été établi sur la base d'une hausse modérée des recettes, de 2,6 %, et qu'il prévoyait de remplacer l'actuelle ressource provenant de la TVA par une fraction des droits de consommation sur les tabacs. Ce changement majeur porte sur une masse financière correspondant à plus du tiers des recettes.

Pour ce qui concerne les dépenses, il a précisé que les prestations familiales s'inscrivaient en légère diminution, tandis que les dépenses d'assurance vieillesse continuaient d'augmenter. Par ailleurs, si la hausse des dépenses maladie était limitée à 1 % par rapport à l'exécution prévue en 2003, elle atteignait 5 % par rapport à la loi de finances initiale, ce qui obligera à réduire les dépenses de 170 millions d'euros par rapport à leur évolution spontanée.

Il a jugé qu'au-delà même de la conjoncture budgétaire et financière difficile dans laquelle il a été élaboré, le projet de BAPSA pour 2004 était marqué, sur le plan humain, par l'impact des intempéries, de la sécheresse et de la canicule. Ce contexte rendait d'autant plus difficile l'acceptation des deux ajustements prévus pour accroître les recettes : l'augmentation de la cotisation minimum de solidarité et le passage de 400 à 600 SMIC horaires de l'assiette minimum de cotisations.

Il a observé, en effet, que l'évolution du revenu agricole cette année risquait d'être défavorable et que l'impact de la sécheresse sera considérable, puisque l'estimation des organisations syndicales établit à 4 milliards d'euros le total des pertes causées par les intempéries de cet été.

C'est pourquoi M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a déclaré que le projet de BAPSA pour 2004 demandait à être précisé sur plusieurs points.

Il a d'abord estimé que le remplacement de la recette tirée de la TVA, aujourd'hui peu dynamique en raison de la conjoncture, par une fraction de la taxe sur les tabacs représentait un avantage à court terme. Il a néanmoins considéré qu'il faudra, à l'avenir, veiller à ce que la protection sociale agricole ne pâtisse pas d'une éventuelle baisse de rendement de celle-ci, liée à une diminution parallèle de la consommation.

S'agissant de la prise en charge des intempéries, il a rappelé que le BAPSA n'intervenait que dans le cadre de la ligne consacrée aux agriculteurs en difficulté, car l'indemnisation faisait principalement appel à d'autres instruments : le budget de l'État, le fonds national de garantie des calamités agricoles et l'action de la MSA.

En ce qui concerne la montée en charge de la retraite complémentaire obligatoire, il a considéré que les 140 millions d'euros correspondant à la participation de l'État concrétisaient les engagements de celui-ci, mais qu'ils pourraient s'avérer inférieurs de 28 millions d'euros au besoin de financement de l'année 2004.

Il a d'ailleurs précisé que la subvention d'équilibre versée par l'État au BAPSA avait été ramenée à zéro en 2004, grâce au remplacement de la recette TVA, la ligne budgétaire étant néanmoins maintenue, et qu'elle pourrait être abondée en temps que de besoin.

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a alors présenté le nouveau FFIPSA, appelé à remplacer le BAPSA en 2004, avant de dresser le bilan sur longue période de la protection sociale des exploitants agricoles.

Il a rappelé que, plus de quarante ans après la création du BAPSA, la situation des exploitants agricoles s'était considérablement rapprochée de celle des autres assurés sociaux, tandis que le niveau des cotisations apparaît désormais proche, sinon équivalent. Quatre réformes majeures ont accéléré cette harmonisation : la revalorisation des petites retraites entre 1994 et 2002, la création de la RCO en 2002, la réforme des accidents du travail en 2001 et la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, qui prévoit notamment la mensualisation des retraites de base.

Il a indiqué que le BAPSA était le premier bénéficiaire du système de compensation généralisée institué en 1974 et qu'il disposait chaque année de 5,7 milliards d'euros transférés par les autres régimes. Il a justifié cette situation par la démographie très particulière du BAPSA, marqué par un âge moyen élevé des exploitants, une diminution régulière des cotisants actifs et un rapport entre le nombre de cotisants et celui des bénéficiaires très défavorable pour l'assurance vieillesse.

Il a ajouté qu'au-delà de ces facteurs démographiques, il convenait surtout de prendre en compte le fait que l'agriculture représentait le secteur économique ayant connu la mutation la plus importante depuis la Libération. Il a déclaré que, grâce au niveau très bas des prix agricoles, l'agriculture avait, en quelque sorte, « distribué » ses gains de productivité au reste de l'économie et qu'il était légitime que cet effort soit compensé par la Nation.

Il a expliqué le remplacement du BAPSA par le FFIPSA par trois raisons principales : la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, qui exigeait cette transformation au 1er janvier 2006, d'une part, la mensualisation, au 1er janvier 2004, des retraites agricoles de base d'autre part, et la nécessaire amélioration du BAPSA lui-même, dont le cadre était désormais ancien et perfectible, enfin.

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a ensuite affirmé que les difficultés financières et budgétaires actuelles ne devaient pas empêcher de réfléchir, dès aujourd'hui, aux perspectives d'avenir de la protection sociale agricole.

Il a souligné, à ce titre, que certaines catégories d'exploitants agricoles, comme les aides familiaux ou les conjoints, auront besoin d'une action de rattrapage par rapport aux autres assurés sociaux, notamment en matière d'assurance vieillesse, où un écart continue d'exister à leur détriment.

Il a observé que, face à ces besoins encore peu ou mal satisfaits, la baisse de la population agricole offrait des marges de manoeuvre, comme cela avait été le cas lors de la revalorisation des retraites agricoles conduite entre 1994 et 2002.

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a précisé que le FFIPSA, créé par l'article 23 du projet de loi de finances pour 2004, reprenait pratiquement les dépenses et les recettes du BAPSA. Ce fonds sera, de la même manière, un instrument purement financier, permettant de garantir, sous la responsabilité de l'État, le versement des prestations, ce dont témoigne son conseil d'administration, qui sera composé de représentants de l'État, et son conseil de surveillance, qui sera présidé par un parlementaire. Sur le plan financier, il a fait observé que, contrairement au BAPSA, le FFIPSA pourra recourir à des recettes non permanentes et donc à l'emprunt.

Il a souligné que les débats à l'Assemblée nationale avaient déjà permis d'obtenir des assurances pour ce qui concerne le contenu du futur débat parlementaire, notamment la confirmation des conditions d'équilibre du régime et le rôle du ministère de l'agriculture dans le nouveau dispositif. Pour sa part, il a annoncé qu'il attendait du débat, qui s'ouvrira prochainement au Sénat, des précisions sur la mise en oeuvre de la LOLF, en matière de protection sociale agricole, et sur la confirmation de la création d'un programme qui lui sera spécifiquement consacré dans le budget du ministère de l'agriculture.

Sous le bénéfice de ces observations, M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a invité la commission à émettre un avis favorable à l'adoption du projet de BAPSA pour 2004.

M. Serge Franchis a demandé si le projet de BAPSA pour 2004 prenait en compte la participation de l'État au titre de la retraite complémentaire obligatoire (RCO). Il s'est également interrogé sur l'évolution de l'objectif de retraite fixé, en cumulant la retraite de base et complémentaire, à 75 % du SMIC net.

M. Michel Esneu s'est félicité que le remplacement du BAPSA par le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) ne conduise pas remettre en cause la tenue d'un débat parlementaire. Il a également salué le rôle et l'action de la Mutualité sociale agricole (MSA).

M. Alain Vasselle a considéré qu'il serait utile que les services du ministère de l'agriculture réalisent une étude tendant à vérifier la corrélation entre l'évolution du revenu des agriculteurs et celle du produit des cotisations agricoles. Il s'est interrogé sur la prise en compte de l'impact des intempéries lors de l'évaluation des recettes de cotisations dans le projet de BAPSA pour 2004. Il a également demandé si le Gouvernement avait apporté des précisions sur la pérennité du soutien financier de l'État à la protection sociale agricole. Revenant sur le remplacement de la recette reposant sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) par les droits sur les tabacs, il a fait valoir la fragilité de certaines estimations portant sur le niveau prévisionnel des recettes.

M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a confirmé que la participation de l'État au financement de la RCO se trouvait bien intégrée au BAPSA. Il a également estimé qu'il était nécessaire que les exploitants agricoles bénéficient, à l'avenir, de la garantie offerte par l'« objectif de retraite » que la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a fixé à 85 % du SMIC net, contre 75 % pour la RCO.

Comme M. Michel Esneu, il a insisté sur la nécessité de conserver un véritable débat parlementaire, après la disparition du BAPSA, et rendu hommage à l'action de la MSA.

En réponse à M. Alain Vasselle, M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis, a précisé qu'il était trop tôt pour disposer d'indications fiables sur les revenus agricoles de cette année, mais que les répercussions d'une éventuelle baisse du produit des cotisations ne se feraient pas sentir avant 2005. Il a rappelé que beaucoup d'exploitants agricoles avaient fait le choix d'une assiette de cotisation reposant sur la moyenne des revenus des trois dernières années.

S'agissant du maintien du soutien financier de l'État à la protection sociale agricole, il a rappelé que la subvention d'équilibre était, certes, ramenée à zéro dans le projet de BAPSA pour 2004, mais qu'elle ferait l'objet d'un abondement si cela apparaissait nécessaire en cours d'exercice.

A l'issue de ce débat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au budget annexe des prestations sociales agricoles inscrits dans le projet de loi de finances pour 2004.