AFFAIRES SOCIALES
Table des matières
Mercredi 9 juin 1999
- Présidence de M. Jean Delaneau, président -
Nomination de rapporteurs
La commission a tout d'abord désigné les rapporteurs suivants :
- Mme Annick Bocandé pour sa proposition de loi n° 356 (1998-1999) présentée également par les membres du groupe de l'Union centriste tendant à maintenir le bénéfice des allocations familiales pour le dernier enfant à charge des familles nombreuses ;
- M. Jean-Louis Lorrain pour la proposition de loi n° 396 (1998-1999) présentée par MM. Jean Arthuis, Guy Cabanel, Josselin de Rohan et Henri de Raincourt relative à la famille.
S'agissant de la proposition de loi n° 344 (1998-1999) présentée par M. Guy Fischer relative à la reconnaissance de l'état de guerre en Algérie et aux combats en Tunisie et au Maroc, M. Jean Delaneau, président, a observé que l'Assemblée nationale avait inscrit à son ordre du jour du jeudi 10 juin et éventuellement du jeudi 17 juin, trois propositions de loi ayant le même objet. Il a considéré que la commission serait amenée à examiner conjointement le texte qui lui sera transmis par l'Assemblée nationale et la proposition de loi n° 344, ainsi que, le cas échéant, les autres propositions de loi sénatoriales en instance de dépôt et qu'il convenait dans ces conditions de renvoyer ce point d'ordre du jour à une réunion ultérieure de la commission.
Proposition de loi relative à la famille - Examen du rapport
Puis, la commission a procédé à l'examen du rapport sur la proposition de loi n° 396 (1998-1999), présentée par MM. Jean Arthuis, Guy Cabanel, Josselin de Rohan et Henri de Raincourt, relative à la famille.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a rappelé que la famille était le lieu privilégié de l'éducation des enfants et de la solidarité entre les générations, et qu'elle représentait l'une des valeurs essentielles fondatrices de notre société. Il a ajouté que c'était sur elle que reposait l'avenir de la Nation.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a fait valoir que la France avait toujours souligné l'attachement qu'elle portait à la famille : le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 affirme ainsi que " la Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement " ; il précise en outre que la Nation " garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ".
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a considéré que la famille n'était pas simplement une affaire privée, mais également une affaire publique. La famille avait besoin d'être soutenue par une politique volontariste, dont témoignait par exemple la loi relative à la famille de 1994.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a constaté que l'actuel Gouvernement n'avait pas fait de la politique familiale l'une de ses priorités : le Gouvernement avait certes renoncé à la mise sous condition de ressources des allocations familiales ; mais ce recul s'était accompagné d'une nouvelle mesure très critiquable : la diminution brutale du quotient familial.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a rappelé que la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 avait été très révélatrice à cet égard : malgré le retour à l'excédent de la branche famille, les rares mesures positives avaient été financées par de nouvelles économies réalisées au détriment des familles.
Après avoir déclaré que le Gouvernement menait en réalité une politique familiale en trompe-l'oeil qui consistait essentiellement à reprendre d'une main ce qu'il donnait de l'autre, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a déploré que la France manque d'une politique familiale à la hauteur des enjeux, au moment même où la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (PACS) rendait plus fragile l'institution familiale.
Il a indiqué que la présente proposition de loi, déposée le 2 juin dernier par les quatre présidents de groupes de la majorité sénatoriale -MM. Jean Arthuis, Guy Cabanel, Henri de Raincourt et Josselin de Rohan-, visait par conséquent à donner une nouvelle impulsion à la politique familiale. Ce texte répondait ainsi au souhait exprimé par le Président de la République, le 31 mai dernier, de " replacer la famille au premier rang des priorités ", de voir la France se doter " d'une nouvelle ambition familiale " et redonner " souffle et vigueur à sa politique de la famille, une politique qui doit se traduire non par une redistribution entre familles, mais un accroissement régulier des ressources que la Nation leur consacre ".
M. Jean-Louis Lorrain a relevé qu'un certain nombre de mesures concrètes avaient été évoquées par le Président de la République à l'occasion de cette déclaration et que ces mesures figuraient dans la proposition de loi.
Il a indiqué que M. Jean Delaneau, président de la commission, avait souhaité, compte tenu de l'importance de ce texte et de la diversité des aspects traités, recueillir le sentiment de M. Alain Lambert, président de la commission des finances, et de M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné que la proposition de loi répondait à trois exigences : permettre aux parents de concilier vie professionnelle et vie familiale, assurer le renouvellement des générations en aidant les familles à réaliser leur désir d'avoir un deuxième ou un troisième enfant, permettre aux familles de jouer pleinement leur rôle dans l'éducation des enfants en revalorisant la fonction parentale.
Enumérant les dispositions que comportait la proposition de loi, il a expliqué que celle-ci, après avoir réaffirmé, dans l'article premier, la place essentielle que joue la famille dans notre société, suivait six axes.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a précisé que le premier axe consistait à encourager et à faciliter l'accueil du deuxième et du troisième enfant. Il a indiqué que la proposition de loi mettait ainsi l'accent sur la nécessité de ne plus faire porter exclusivement l'effort de la politique familiale sur le troisième enfant et qu'elle visait à encourager également l'accueil du deuxième enfant, dont le coût pèse considérablement sur le niveau de vie des familles et auquel ces dernières tendent aujourd'hui à renoncer.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que l'article 2 de la proposition de loi prévoyait la création d'une allocation universelle d'accueil de l'enfant (AUAE) versée sans condition de ressources à toutes les familles à partir du deuxième enfant et dont l'objectif était de compenser le surcoût de la venue de l'enfant. Cette prestation serait versée dès la naissance et pendant les dix premiers mois de l'enfant, pour un montant de 1.000 francs par mois pour le deuxième enfant et de 2.000 francs par mois pour le troisième et les suivants.
M. Jean-Louis Lorrain a souligné que le deuxième axe de la proposition de loi visait à favoriser la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Il a indiqué que les articles 3, 4 et 5 proposaient un retour aux conditions d'attribution de l'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) en vigueur avant la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998. En application de ces articles, l'AGED serait attribuée sans condition de ressources et son montant permettrait la prise en charge intégrale des cotisations sociales payées pour l'emploi d'une personne qui garde l'enfant à domicile.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que l'article 6 créait une réduction d'impôt spécifique pour la garde d'un enfant à domicile. Cette réduction d'impôt correspondrait à 50 % des sommes versées pour la garde de l'enfant, plafonnées à 45.000 francs. Elle serait naturellement cumulable avec la réduction d'impôt qui existe déjà pour l'emploi d'une personne à domicile et qui est plafonnée au même montant.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a précisé que les articles 7 et 8 prévoyaient la création d'un congé de solidarité familiale. D'une durée d'un an sur l'ensemble de la vie professionnelle, ce congé de six mois minimum constituerait un droit pour toute personne qui en ferait la demande pour motif familial dûment justifié. M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a expliqué que ce congé pourrait être, par exemple, accordé pour motifs médicaux, en cas d'échec scolaire des enfants, de séparation ou de divorce du couple, de soutien aux personnes âgées.
Il a indiqué que l'article 9 de la proposition de loi prévoyait une extension jusqu'au sixième anniversaire de l'enfant du droit au temps partiel, aujourd'hui limité au troisième anniversaire de l'enfant.
Il a souligné que les articles 10 et 11 majoraient les droits à congés familiaux offerts aux deux parents de la moitié du temps de congé pris par les pères, dans la limite d'un an, afin d'inciter les pères à jouer un rôle plus actif dans la vie de la famille et l'éducation des enfants.
Il a ajouté que l'article 12 prévoyait que les recrutements auxquels procéderaient les entreprises pour remplacer les salariés bénéficiant d'un congé de solidarité familiale donneraient lieu à une exonération de charges sociales.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que l'article 13 de la proposition de loi prévoyait par ailleurs que les fonds d'action sociale des caisses d'allocations familiales bénéficieraient d'une dotation annuelle de l'Etat de 500 millions de francs, destinée à soutenir la mise en oeuvre d'accords d'entreprise permettant d'améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, et particulièrement la création de crèches d'entreprises.
Evoquant le troisième axe de la proposition de loi, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné que celui-ci avait pour objet l'allégement et l'enrichissement des rythmes scolaires. Il a indiqué que l'article 14 prévoyait la généralisation, dans les écoles primaires, de l'allégement et l'enrichissement des rythmes scolaires, sur la base d'une semaine de cinq jours, en réservant une demi-journée quotidienne aux disciplines dites de la sensibilité (éveil à la nature, travaux manuels, sports, activités artistiques...).
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné que le quatrième axe de la proposition de loi consistait en l'aide aux grands enfants.
Il a observé que l'article 15 instaurait un prêt à taux zéro pour les jeunes de 18 à 25 ans, afin de les aider à la réalisation d'un projet professionnel, prêt accordé par les établissements de crédit auxquels la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) verserait une subvention destinée à compenser l'absence d'intérêt. Il a précisé que ce prêt serait attribué pour financer un cursus d'études ou de formation, un projet professionnel ou une création d'entreprise.
M. Jean-Louis Lorrain a expliqué que l'article 16 facilitait la transmission anticipée du patrimoine en prévoyant une exonération fiscale particulière en cas de donation des grands-parents à leurs petits-enfants âgés de 16 à 30 ans, sous la forme d'un abattement de 200.000 francs sur la part de chacun des petits-enfants pour la perception des droits de mutation à titre gratuit.
Evoquant le cinquième axe de la proposition de loi, relatif à la compensation de l'effort financier des familles, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné que l'article 17 revenait sur l'abaissement du plafond du quotient familial voté par l'Assemblée nationale dans la loi de finances pour 1999 et qu'il prévoyait par conséquent que la réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial ne pourrait excéder 16.380 francs, contre 11.000 francs aujourd'hui.
M. Jean-Louis Lorrain a ajouté que les articles 18 et 19 visaient à garantir l'évolution des prestations familiales. Il a indiqué que l'article 18 procédait au rattrapage de revalorisation des prestations familiales au titre de l'année 1999 : celles-ci n'avaient été revalorisées que de 0,71 % au 1er janvier 1999 alors que les retraites avaient été parallèlement revalorisées de 1,2 %, soit l'équivalent de l'évolution prévisionnelle des prix. Il a précisé que l'article 18 prévoyait par conséquent une revalorisation supplémentaire des prestations familiales de 0,49 % en 1999.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que l'article 19 érigeait en principe que les prestations familiales seraient revalorisées chaque année à un taux qui ne pouvait être inférieur au taux de revalorisation des retraites du régime général.
Il a enfin exposé le sixième et dernier axe de la proposition de loi qui tend à garantir les ressources de la branche famille.
Il a expliqué que l'article 20 reconduisait pour cinq ans, du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003, une disposition figurant dans la loi relative à la famille de 1994 relative à la garantie de ressources dont bénéficie la branche famille.
Il a indiqué que l'article 21 prévoyait que la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (ARS), décidée chaque année par le Gouvernement, ne pouvait être mise à la charge de la branche famille et que cet article réaffirmait donc le principe selon lequel la majoration de l'ARS devait être intégralement financée par le budget de l'Etat, qui rembourse son montant à la branche famille.
M. Jean-Louis Lorrain a enfin précisé que l'article 22 constituait le gage financier de la proposition de loi : il prévoyait que les dépenses supplémentaires résultant de l'adoption de cette dernière seraient compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs (art. 575 et 575 A du code général des impôts) dont le produit serait affecté à la branche famille.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a considéré que, par la diversité des thèmes abordés et l'ampleur des mesures proposées, cette proposition de loi se voulait à l'évidence un projet cohérent, ambitieux et porteur d'espoir pour les familles. Il a jugé qu'il n'était pas abusif de dire que ce texte s'apparentait par bien des aspects à une " nouvelle loi famille ".
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a constaté que tout ceci avait naturellement un coût, estimé par les auteurs de la proposition de loi à 8,75 milliards par an. Il a considéré, pour sa part, que le coût réel de cette proposition de loi serait sans doute supérieur à ce chiffre.
Soulignant qu'il était cependant des coûts que notre pays se devait d'assumer, il a déclaré que la politique familiale n'était pas un coût pour la collectivité, mais un investissement indispensable pour l'avenir de la Nation.
Il a considéré que l'amélioration de la situation financière de la branche famille -qui devrait connaître des excédents croissants dans les prochaines années : + 2,3 milliards en 1999, + 4,8 milliards en 2000 et + 8,3 milliards en 2001- permettrait de dégager les marges de manoeuvre nécessaires au financement de l'" ardente obligation " que constituait une politique familiale ambitieuse.
Concluant son propos, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné qu'il ne proposerait, sur cette proposition de loi, sous réserve naturellement des observations que seraient amenés à formuler les présidents des commissions des finances et des affaires culturelles, que des modifications mineures tendant à rectifier des erreurs matérielles ou à améliorer la rédaction de certaines dispositions.
M. Jean Chérioux a considéré que cette proposition de loi s'inscrivait dans la droite ligne de la loi de 1994 relative à la famille et des positions maintes fois rappelées de la majorité sénatoriale sur la famille. Rappelant que l'actuel Gouvernement n'avait pris aucune mesure positive en faveur des familles depuis 1997, il a jugé que la proposition de loi témoignait du souci permanent du Sénat d'améliorer le sort des familles.
M. Gilbert Chabroux a souligné qu'il n'avait pu prendre connaissance de ce texte que la veille et a indiqué qu'il n'était pas surpris que la majorité sénatoriale ait souhaité se faire l'écho de la récente déclaration du Président de la République sur la famille.
Il a considéré que la proposition de loi était un texte idéologique qui privilégiait les familles aux revenus élevés. Il a affirmé que ce texte comportait avant tout des dispositions financières et laissait de côté de nombreux aspects de la politique familiale, tels que les équipements collectifs, les mesures éducatives ou l'aménagement des conditions de travail.
Il a déclaré qu'il ne pouvait partager l'orientation d'ensemble de ce texte, même si celui-ci pouvait comporter par ailleurs certaines dispositions intéressantes.
Après avoir déploré la précipitation avec laquelle le Sénat examinait la proposition de loi, Mme Nicole Borvo a considéré que ce texte privilégiait avant tout les familles aisées. Elle a souligné qu'elle ne partageait pas la conception de la famille de la majorité sénatoriale et a regretté que la proposition de loi ne comporte aucune disposition pour le premier enfant. Après avoir évoqué la finalité nataliste de la proposition de loi, elle a constaté que ce texte encourageait la garde à domicile aux dépens des modes de garde collectifs et se traduisait par de nouvelles exonérations de charges et de nouvelles réductions d'impôts. Soulignant que ce texte ne permettrait pas un véritable débat sur ce que devrait être la politique familiale, Mme Nicole Borvo a déclaré que la philosophie de cette proposition de loi ne convenait absolument pas au groupe communiste républicain et citoyen.
M. Claude Huriet a fait valoir que la proposition de loi s'inscrivait dans la continuité de la réflexion sénatoriale sur la famille. Il a souligné la très grande cohérence de ce texte qui n'opérait pas de distinction entre les familles. Evoquant la mise sous condition de ressources de certaines prestations familiales, il a rappelé que le supplément familial de traitement des fonctionnaires n'était pas versé sous condition de ressources. Il a souligné qu'une politique familiale devait avoir également une finalité nataliste et a apporté son entier soutien à la proposition de loi.
M. Philippe Nogrix a rappelé que le premier lien social était précisément le lien familial. Après avoir dénoncé l'absence de toute mesure favorable aux familles depuis l'arrivée du Gouvernement de M. Lionel Jospin, il s'est félicité de cette proposition de loi qui tenait compte des évolutions de la société. Il a particulièrement approuvé les mesures relatives aux congés parentaux et aux grands enfants. Il a également mis l'accent sur le rôle essentiel que jouaient les grands-parents dans la solidarité familiale.
Mme Gisèle Printz a considéré que la multiplication de dispositions financières favorables aux familles n'avaient pas d'incidence sur la natalité.
M. Alain Gournac a rappelé que les familles avaient été victimes de la politique menées par le Gouvernement et qu'elles se sentaient aujourd'hui mal aimées et abandonnées. Il a considéré qu'il était par conséquent nécessaire de leur faire parvenir un signal fort de l'engagement de la collectivité en leur faveur. Il a jugé qu'une nouvelle organisation du temps scolaire était nécessaire et que le législateur devait se préoccuper de la situation des jeunes de 16 à 25 ans qui constituaient une charge particulièrement importante pour les familles. Il a qualifié de choquants les allers et retours législatifs qui avaient caractérisé les conditions d'attribution des allocations familiales et a regretté que la diminution de l'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) ait favorisé le développement du travail au noir. Il s'est félicité que la proposition de loi reconnaisse et valorise le rôle du père dans la famille.
M. Francis Giraud a considéré qu'une politique familiale ambitieuse constituait un devoir national. Il a rappelé l'importance du lien familial dans une société de plus en plus déstructurée. Il a fait valoir que toute politique familiale était forcément nataliste dans la mesure où la structure familiale avait précisément pour finalité la conception et l'éducation des enfants. Aussi a-t-il affirmé qu'il était favorable à une politique résolument nataliste.
M. Alain Vasselle a formulé un double constat. Il a tout d'abord observé que notre pays n'assurait plus le renouvellement des générations, ce qui se traduirait à l'avenir par des déséquilibres démographiques de nos systèmes de retraite. Il a également relevé que les familles nombreuses, comportant plus de trois enfants, étaient aujourd'hui de plus en plus rares. Il a considéré que cette situation provenait à la fois d'une certaine peur du lendemain dans un contexte économique difficile et de la diminution du niveau de vie qu'entraînait la naissance des enfants. Il a rappelé à cet égard que le rapport de MM. Thelot et Villac sur la politique familiale avait démontré qu'une famille de quatre enfants devait avoir un revenu de 24.000 francs par mois pour disposer du pouvoir d'achat d'un homme marié, sans enfant, rémunéré au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). Il a constaté que les familles avec deux salaires avaient été particulièrement pénalisées par la politique gouvernementale de diminution du quotient familial et de mise sous condition de ressources des allocations familiales. Il a souhaité une politique familiale en direction de toutes les familles et pas uniquement en direction des familles les plus nécessiteuses.
M. Claude Domeizel a jugé que la proposition de loi avait une connotation nataliste évidente. Il a souligné que le débat sur cette proposition de loi ne pouvait se résumer à un affrontement entre ceux qui étaient pour la famille et ceux qui lui étaient opposés.
En réponse aux différents orateurs, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a confirmé que la proposition de loi s'inscrivait dans la continuité de la loi famille de 1994. Il a souligné que ce texte ne comportait pas de dimension idéologique et favorisait toutes les familles, y compris les familles monoparentales. Il a fait valoir que la proposition de loi couvrait un champ très large et comportait des dispositions qui n'avaient rien de financier. Il a considéré que la politique familiale devrait être globale et que les questions de droit de la famille ou d'éducation relevaient du domaine de compétence d'autres commissions permanentes du Sénat.
M. Jean Delaneau, président, a fait valoir que tous les sénateurs portaient le même attachement à la famille, même s'ils pouvaient avoir, parallèlement, des conceptions différentes de la politique familiale. Evoquant la question des jeunes adultes, il a rappelé qu'il avait déposé, en 1986, une proposition de loi instituant un livret d'épargne destiné à assurer le financement des études des enfants.
La commission a ensuite examiné les articles de la proposition de loi.
Elle a adopté l'article premier (rôle de la famille dans notre société) dans le texte de la proposition de loi.
Sous réserve d'une modification rédactionnelle, elle a adopté l'article 2 (création de l'allocation universelle d'accueil de l'enfant) dans le texte de la proposition de loi.
La commission a adopté l'article 3 (suppression de la condition de ressources pour l'attribution de l'AGED) dans le texte de la proposition de loi.
Sous réserve d'une modification rédactionnelle, elle a adopté l'article 4 (prise en charge intégrale par l'AGED des cotisations sociales) dans le texte de la proposition de loi.
Elle a adopté les articles 5 (disposition de coordination), 6 (réduction d'impôt pour la garde d'un enfant à domicile), 7 (modification d'un intitulé) dans le texte de la proposition de loi.
A l'article 8 (création du congé de solidarité familiale), la commission a supprimé la disposition prévoyant que le salarié ne pouvait bénéficier que d'un an de congé de solidarité familiale sur l'ensemble de sa vie professionnelle. Elle a adopté cet article ainsi rédigé.
Elle a adopté l'article 9 (extension jusqu'au sixième anniversaire de l'enfant du droit au temps partiel) en modifiant sa présentation formelle.
Sous réserve de modifications formelles, elle a adopté les articles 10 (majoration des droits à congés familiaux), 11 (majoration de droits à congé de solidarité familiale) et 12 (exonération de charges sociales pour les recrutements destinés à remplacer les salariés en congé de solidarité familiale) dans le texte de la proposition de loi.
A l'article 13 (dotation de l'Etat aux fonds d'action sociale des caisses d'allocations familiales), la commission a prévu que cette dotation serait fixée chaque année en loi de finances. Elle a adopté cet article ainsi rédigé.
Elle a adopté les articles 14 (généralisation de l'allégement et de l'enrichissement des rythmes scolaires dans les écoles primaires), 15 (prêt à taux zéro pour les jeunes de 18 à 25 ans), 16 (abattement de 200.000 francs sur la part des petits-enfants âgés de 16 à 30 ans en cas de donation des grands-parents) et 17 (augmentation du plafond du quotient familial) dans le texte de la proposition de loi.
Sous réserve de la rectification d'une erreur matérielle, la commission a adopté l'article 18 (revalorisation des prestations familiales en 1999) dans le texte de la proposition de loi.
Sous réserve d'une modification rédactionnelle, elle a adopté l'article 19 (modalités de revalorisation des prestations familiales) dans le texte de la proposition de loi.
Elle a adopté les articles 20 (garantie de ressources de la branche famille) et 21 (prise en charge par le budget de l'Etat de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire) dans le texte de la proposition de loi.
A l'article 22 (compensation financière de la proposition de loi), elle a adopté une rédaction prévoyant que les pertes de recettes pour l'Etat résultant de la présente loi seraient compensées par une augmentation à due concurrence des droits sur les tabacs. Le rapporteur a rappelé à cet égard que les dépenses supplémentaires à la charge de la branche famille pouvaient être financées grâce aux excédents de cette branche prévus à compter de 2000 ; il a par ailleurs formulé le voeu que les diminutions d'impôt que comportait la proposition de loi soient financées par des économies budgétaires, la majoration du droit sur les tabacs n'étant mentionnée qu'au regard de la procédure parlementaire.
La commission a enfin adopté l'ensemble de la proposition de loi.
Contrôle de l'application des lois - Loi d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail - Communication
Puis, la commission a entendu une communication de M. Jean Delaneau, président.
M. Jean Delaneau, président, a fait le point sur les déplacements dans les entreprises de M. Louis Souvet dans le cadre de la préparation de sa communication devant la commission sur l'application de la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail. Il a fait part de son souhait et de celui de M. Louis Souvet que d'autres membres de la commission puissent participer à ces déplacements.
Missions d'information à l'étranger - Communication
Puis il a rappelé que le bureau de la commission avait envisagé deux missions d'information dont il avait saisi M. le Président du Sénat : l'une en Guyane fin juillet et l'autre en Espagne au cours de la troisième semaine de septembre.