III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 8 NOVEMBRE 2010

Débats AN première lecture

Deuxième séance du lundi 8 novembre 2010

Article 99

Mme la présidente. « Art. 99. - I. - Le III de l'article 234 nonies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au 6°, les mots : « , aux établissements et organismes publics qui en dépendent et aux organismes d'habitations à loyer modéré » sont remplacés par les mots : « et aux établissements et organismes publics qui en dépendent, à l'exception des offices publics de l'habitat mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation » ;

2° Au 8°, les mots : « aux sociétés d'économie mixte de construction ou ayant pour objet la rénovation urbaine ou la restauration immobilière dans le cadre d'opérations confiées par les collectivités publiques, ainsi que de ceux appartenant » sont supprimés ;

3° Il est complété par un 13° ainsi rédigé :

« 13° Des logements attribués à des personnes reconnues comme prioritaires par la commission mentionnée à l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation, au cours des cinq années suivant celle de la conclusion du bail. »

II. - L'article 234 duodecies du même code est ainsi modifié :

1° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par exception, les recettes perçues auprès des bénéficiaires des aides prévues aux articles L. 542-1 et L. 831-1 du code de la sécurité sociale et L. 351-1 du code de la construction et de l'habitation sont retenues pour les neuf dixièmes de leur montant. » ;

2° Au deuxième alinéa du III, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « troisième » et les mots : « nettes définies à l'article 29 » sont remplacés par les mots : « définies au I ».

III. - Les dispositions des I et II s'appliquent aux loyers perçus à compter du 1 er janvier 2011.

IV. - Le code de la construction et de l'habitation (partie législative) est ainsi modifié :

1° À l'article L. 452-1, il est inséré après le premier alinéa un alinéa ainsi rédigé :

« Elle contribue, dans les conditions fixées à l'article L. 452-1-2, à la mise en oeuvre de la politique du logement en matière de développement de l'offre de logement locatif social et de rénovation urbaine. »

2° Après l'article L. 452-1-1 est inséré un article L. 452-1-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 452-1-2. - Le produit de la contribution annuelle sur les revenus locatifs, due par les organismes d'habitations à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation et par les sociétés d'économie mixte mentionnées à l'article L. 481-1 du même code en application de l'article 234 nonies du code général des impôts, est affecté à la Caisse de garantie du logement locatif social et géré dans un fonds spécifique créé en son sein. Ce fonds contribue au développement de l'offre de logement locatif social.

« Une commission composée majoritairement de représentants de l'État arrête les emplois du fonds.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités de mise en oeuvre du fonds, notamment la composition de la commission mentionnée au deuxième alinéa et les règles d'adoption des décisions relatives aux concours qu'il attribue et à sa gestion. »

3° L'article L. 452-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« h) Le produit de la contribution annuelle sur les revenus locatifs mentionnée à l'article L. 452-1-2. »

V. - Au II de l'article 5 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, les mots : « de 30 millions d'euros » sont remplacés par les mots : « d'au moins 30 millions d'euros ».

VI. - À compter du 1 er janvier 2011 et jusqu'au 31 décembre 2013, par dérogation aux articles L. 442-1 et L. 445-4 du code de la construction et de l'habitation, la révision sur une année des loyers pratiqués mentionnés à l'article L. 442-1 pour les logements appartenant aux organismes mentionnés à l'article L. 411-2, ne peut excéder la variation de l'indice de référence des loyers définie au d de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. L'indice de référence des loyers à prendre en compte est celui du deuxième trimestre de l'année précédente.

Toutefois, l'autorité administrative peut, dans la limite prévue aux articles L. 442-1 et L. 445-4 du code de la construction et de l'habitation, autoriser un organisme à déroger aux dispositions de l'alinéa précédent soit dans le cadre d'un plan de redressement approuvé par la Caisse de garantie du logement locatif social, soit pour une partie du patrimoine de l'organisme ayant fait l'objet d'une réhabilitation.

Le présent VI est applicable à tous les contrats de location y compris aux contrats en cours.

La parole est à Mme Valérie Boyer, inscrite sur l'article 99.

Mme Valérie Boyer. Le dispositif de péréquation proposé par cet article présente l'avantage, par rapport à la contribution sur les revenus locatifs, de concentrer les prélèvements sur les organismes dont le bilan abrite des ressources financières thésaurisées, et qui réalisent 2,5 milliards de bénéfice net. Je rappelle que seuls seront touchés les organismes qui ont un potentiel financier très important, ce qui signifie que 29 % d'entre eux seront, dans les faits, totalement exonérés.

Dans la situation budgétaire très contrainte où nous nous trouvons, il est absolument nécessaire que toutes les parties participent aux efforts financiers. Notre responsabilité doit nous conduire à adopter un comportement réaliste : les bailleurs qui contribuent à des politiques publiques sont, d'une certaine manière, des opérateurs de l'État. Ils sont donc concernés par les efforts demandés par le Gouvernement.

L'utilisation de ces fonds aura notamment pour vocation de financer une partie du budget de l'ANRU, ce qui est extrêmement important. Quoi qu'on en dise, même si le financement de l'ANRU déborde du champ du logement social, il est absolument nécessaire que son budget lui permette de perdurer. L'Agence aura permis la mise en chantier de quelques 85 000 logements à la fin 2010, et de 130 000 au terme du programme, sans parler des réhabilitations et des résidentialisations.

Ce dispositif servira également à abonder le budget des aides à la pierre.

Avec ce qui est proposé, les crédits ANRU 2011 sont sécurisés, et les loyers sont préservés, bloqués via l'IRL, l'indice de référence des loyers.

L'ANRU n'est pas un programme isolé, bien au contraire. Avant d'être du béton, c'est surtout une intervention sur l'humain, très largement soutenue par la politique de la ville. Sans l'ANRU, une ville comme Marseille, qui porte treize conventions majeures, ne pourrait pas réaliser plus de 6 600 réhabilitations de logements ; 5 000 constructions - dont 50 % hors part sociale - ; plus de 2 500 démolitions ; 600 acquisitions-améliorations ; des réhabilitations et constructions d'équipements publics tels que des centres sociaux, des équipements sportifs, des crèches ; des créations de locaux d'activités ; des voies nouvelles pour désenclaver les quartiers ; des espaces publics créés et requalifiés. Bref, elle ne pourrait pas recoudre la ville sur la ville.

L'ANRU doit continuer à exister pour nos concitoyens les plus fragiles et pour l'ensemble des villes. Il faut qu'elle ait les moyens de poursuivre son action.

M. Alain Cacheux. Avec l'argent des autres !

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. En commission des finances, chacun en a convenu : le texte qui nous est soumis dans cet article 99, personne n'en veut. D'ailleurs, au sein du Gouvernement - des bruits ont circulé, mais je ne citerai pas de noms, monsieur le secrétaire d'État -, cette idée de taxer à hauteur de 2,5 % tous les logements HLM de plus de quinze ans a suscité beaucoup d'interrogations. Donc, l'article 99 est mort.

Il nous faut trouver 340 millions. Un amendement Carré, repris et amélioré par le Gouvernement, vise à créer un impôt progressif sur le potentiel financier. Le potentiel financier, c'est le fonds de roulement. Mais celui-ci n'a rien à voir avec la capacité contributive des organismes HLM à payer un impôt. Je mets en garde le Gouvernement au regard du risque constitutionnel qu'il prend en la matière.

Je pense que nous devons trouver ces 340 millions, et j'ai des propositions concrètes qui permettraient d'atteindre cet objectif. Nous avons déposé des amendements en ce sens. Mettre à contribution les dodus dormants, oui, mais à condition que seule une petite minorité des organismes HLM soit mise à contribution. Chers collègues de l'opposition, ne dites pas que parmi les 556 organismes HLM, il n'y a pas un seul dodu dormant ! Si vous dites cela, vous n'êtes pas crédibles.

On pourrait taxer la tranche supérieure : plus de 3 000 euros par logement. Il est peut-être possible, par ce biais, de lever entre 100 et 110 millions d'euros. C'est un ordre de grandeur. Ce sont d'ailleurs à peu près les estimations du Gouvernement pour ce qui est de la dernière tranche. Il reste qu'il faudrait encore trouver 240 millions. Pour ce faire, nous faisons trois propositions.

La première, c'est d'augmenter légèrement le droit de mutation sur les seuls logements. D'après nos calculs, le taux pourrait être de 0,15 % ou de 0,17 %. Je vous rappelle que le taux actuel est de 4,8 % : 3,6 % pour les départements et 1,2 % pour les communes. On m'objecte que ce n'est pas le moment, et que les droits de mutation sont trop élevés en France. C'est vrai. Mais nécessité fait loi.

Il y a une deuxième solution, que peu de gens ont évoquée : pourquoi n'imposerait-on pas, tout simplement, les résultats des organismes HLM ? Ils sont actuellement exonérés, parce que ce sont des services d'intérêt général, que leur statut soit celui d'une société anonyme ou d'un office HLM. Mais il ne s'agirait pas de les taxer au taux du droit commun, celui de l'impôt sur les sociétés, ce qui rapporterait 700 millions. On pourrait leur appliquer un taux beaucoup plus faible, de l'ordre d'un tiers. Il serait possible de justifier un taux dérogatoire, parce qu'il s'agit d'un service d'intérêt général : les organismes HLM ne seraient taxés qu'à un tiers de l'assiette contributive.

Il y a une troisième idée, que vous trouverez dans nos amendements : élever un peu le taux de la taxation sur les plus-values immobilières, que nous avons déjà augmenté dans la première partie de la loi de finances.

Voilà trois idées. Il peut y en avoir d'autres. Je veux simplement dire au Gouvernement : oui à l'idée de mettre à contribution les dodus dormants, mais seule une toute petite minorité des organismes devrait être concernée - une centaine, c'est-à-dire à peine le cinquième des organismes. Car c'est vrai que certains établissements ont accumulé des réserves, alors que d'autres n'ont pas les moyens de poursuivre le développement.

M. François Pupponi. Et cela rapporterait combien, les dodus dormants ?

M. Charles de Courson. Une centaine de millions. C'est raisonnable. Pour les 240 autres millions, il faut trouver une ou plusieurs ressources fiscales. Nous, au Nouveau Centre, nous en proposons trois, par voie d'amendement.

Nous allons maintenant entrer dans le vif du sujet, mais je veux dire au Gouvernement : ne nous acharnons pas avec cet impôt progressif qui toucherait 70 % des organismes HLM. Car on ne peut pas défendre la thèse que 70 % des organismes HLM sont des dodus dormants.

M. Marcel Rogemont. Il est bon de le rappeler !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, n os 148 et 161.

L'amendement n° 148 est présenté par M. Gosnat, M. Sandrier, M. Brard, Mme Amiable, M. Asensi, Mme Billard, M. Bocquet, M. Braouezec, Mme Buffet, M. Candelier, M. Chassaigne, M. Desallangre, M. Dolez, Mme Fraysse, M. Gerin, M. Gremetz, M. Lecoq, M. Muzeau, M. Daniel Paul et M. Vaxès.

Et l'amendement n° 161 est présenté par M. Le Bouillonnec, M. Brottes, M. Pupponi, M. Goldberg, M. Rogemont, M. Cacheux, M. Goua, M. Jean-Louis Dumont, M. Valax, Mme Maquet, Mme Robin-Rodrigo, M. Dumas, M. Jibrayel, M. Manscour, M. Villaumé, Mme Lepetit, Mme Darciaux, Mme Crozon et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre Gosnat, pour soutenir l'amendement n° 148.

M. Pierre Gosnat. Avec cet amendement, nous en revenons à la discussion que nous avons eue cet après-midi. Il s'agit de supprimer l'article 99 instituant une taxe de 340 millions sur les organismes HLM.

Le premier argument porte sur la forme : aucune négociation n'a été menée entre le Gouvernement et les offices quant à la mise en oeuvre de cette taxation. Il y a d'ailleurs eu une bronca assez spectaculaire à Strasbourg.

M. Marcel Rogemont. Mais le Gouvernement n'entend pas ! Il n'entend pas, parce qu'il n'écoute pas !

M. Pierre Gosnat. Les organismes HLM ont été mis devant le fait accompli, alors même que, au mois de juillet, ils négociaient leur conventionnement avec l'État. Ce projet de taxe a d'ailleurs été unanimement rejeté par tous les membres de l'USH lors de son dernier congrès. Je crois que M. Périssol avait reçu à peu près les mêmes échos que vous, à l'époque.

M. Jean-Pierre Brad. C'était à Montpellier.

M. Pierre Gosnat. À Montpellier, en effet.

Sur le fond, nous condamnons fermement cette disposition qui tend à pallier le désengagement massif de l'État du financement du logement social. Le Gouvernement agit comme il l'a fait avec le 1 %. Il ne paie plus, et il prend à Jacques pour donner à Paul, avec les résultats que l'on connaît pour l'ANRU : le non-financement du PNRU 2, la faillite possible du 1 % et une situation de cessation de paiement pour l'ANRU d'ici au second trimestre 2011. Ce sont les responsables de l'ANRU qui nous alertent sur ce point.

Il y a effectivement une carence dans le financement de la construction de logements sociaux. Elle a pour origine l'abandon par l'État de l'aide à la pierre. En 2013, les aides à la pierre ne seront plus que de 60 millions. Dès 2011, le financement de l'État pour les PLUS ne sera que de 800 euros, contre 1 000 euros l'an passé. Quant aux PLAI, ils ne seront plus financés qu'à hauteur de 10 760 euros, contre 12 000 euros en 2010. Le voilà, le coeur du problème ! Pour la période 2011-2013, cela se traduira par une diminution de 73 % du nombre de logements financés par rapport à 2010. Pour la seule région Île-de-France, ce sont 36 000 logements qui ne pourraient pas être construits.

Cette taxation affaiblit encore davantage le principe de solidarité nationale qui devrait présider à l'action gouvernementale. L'effort est donc reporté sur des acteurs extérieurs à l'État. Si celui-ci ne paie plus, quelle sera sa légitimité dans la conduite des politiques publiques en matière de logement et de politique de la ville ?

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l'article 99.

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 161.

M. Marcel Rogemont. Le débat est en cours : le Gouvernement ne sait pas encore ce qu'il doit faire. C'est le signe d'une impréparation, qui est la première raison de notre opposition à cet article.

Deuxièmement, ce prélèvement serait effectué en lieu et place du financement par l'État. Notre collègue de Courson cherchait des idées. Mais il y en a d'autres ! Avant 2005, la taxe additionnelle au droit de bail touchait les bailleurs personnes physiques, ainsi qu'un certain nombre de personnes morales. Pourquoi ne pas proposer la restauration de cette taxe ?

D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, je vous ai posé tout à l'heure une question à laquelle vous n'avez pas répondu : à combien s'élève la niche fiscale réservée à ceux qui ont été exonérés de la taxe additionnelle au droit de bail en 2005 ? Vous avez des informations qui servent uniquement à justifier vos mesures contre les organismes HLM ! Si vous considérez que l'exonération, en 2005, de la taxe additionnelle au droit de bail ne constitue pas une niche fiscale, alors il n'y a pas non plus de « niche fiscale HLM ». Avant 2005, je rappelle que seuls les organismes HLM ne payaient pas cette taxe.

Notre collègue Valérie Boyer nous disait à l'instant que l'ANRU était préservée jusqu'en 2012. Mais, chère collègue, vous n'avez pas écouté le secrétaire d'État. Il a dit que le 1 % logement ne pourrait pas fonctionner à partir de 2012. Par quels crédits va-t-on remplacer le 1 % logement ?

Au bout du compte, vous allez taxer pour partie les subventions que versent les communes, les communautés de communes, les communautés d'agglomération, les départements et les régions aux organismes de HLM. C'est grâce à eux que, en ma qualité de président d'un organisme de HLM, je dispose de fonds propres qui me permettent de construire 500 logements par an, et qui me permettent d'avoir un PSP de qualité.

Avec cet article, vous mettez en place une solidarité horizontale, des modestes vers les modestes, alors que la solidarité doit être verticale : des plus fortunés vers les plus modestes. Pourquoi ne pas revenir sur le bouclier fiscal ? Et puisque vous cherchez de l'argent, je vous suggère une autre piste : vous avez jeté près de 3 milliards d'euros par les fenêtres avec la baisse de la TVA sur la restauration. Vous n'avez qu'à reprendre une partie de cette baisse, et vous aurez largement de quoi mener une politique ambitieuse pour le logement, qu'il s'agisse de logement privé ou public. Trois milliards de plus pour la politique du logement, cela aurait du sens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François Scellier, rapporteur spécial . La commission des finances n'a pas examiné ces deux amendements, mais elle avait examiné l'amendement n° 80, déposé par M. Garrigue, et qui avait également pour objet de supprimer l'article 99. La commission avait émis un avis défavorable, car l'amendement n° 59 de la commission des finances prévoit de supprimer la taxation de la CRL prévue dans le texte initial pour la remplacer par un dispositif de taxation de flux financiers. Donc avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.

Je souhaite préciser un point de méthode. Le Gouvernement, dans le cadre de l'article 99, avait prévu une contribution.

M. Alain Cacheux. Une taxe !

M. Marcel Rogemont. Vous voulez taxer les locataires.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. L'assiette de cette contribution portait sur la contribution des revenus locatifs. En gros, c'était une taxe sur le chiffre d'affaires à hauteur de 2,5 % du chiffre d'affaires des bailleurs sociaux.

M. Marcel Rogemont. Une contribution sur les loyers des locataires !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le chiffre d'affaires des bailleurs sociaux étant effectivement constitué des loyers, il s'agissait d'une contribution sur les revenus locatifs, comme son nom l'indique.

La commission des finances, dans le cadre des discussions que nous avons eues en préalable à l'examen de ce budget, nous a fait savoir qu'une contribution de péréquation assise sur une taxe qui touchait de la même façon l'ensemble des bailleurs sociaux, ce n'était pas une vraie péréquation. La commission des finances nous a donc proposé une autre contribution, dont l'assiette était le potentiel financier des organismes, avec une taxe progressive en fonction de ce potentiel. Le Gouvernement était favorable à cette solution. Dans ce cadre, quelques petits aménagements ont été introduits par le rapporteur par voie de sous-amendements à l'amendement qu'il avait lui-même déposé.

De son côté, le Gouvernement avait déposé un amendement qui regroupait l'ensemble du processus. Le service de la séance a découpé cet amendement en trois amendements, que vous trouvez maintenant dans la feuille jaune. En terme de méthode, nous vous proposons, après en avoir discuté avec le rapporteur, de rejeter les amendements de suppression pour que nous puissions engager la discussion sur les amendements qui vont suivre, notamment ceux du Gouvernement, qui reprennent de façon globale la proposition de la commission des finances, et les sous-amendements proposés par le rapporteur.

M. Marcel Rogemont. Vous n'avez pas répondu sur la question des niches.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Au-delà de la méthode, s'agissant du fond, le Gouvernement est favorable à un système de péréquation au sein du monde HLM.

M. Jean-Pierre Brard. On plume la volaille !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Sur notre territoire, certains bailleurs sociaux - je ne reprendrai pas le terme de « dodus dormants » qui ne me paraît pas correspondre à la réalité -...

M. Marcel Rogemont. Vous l'avez déjà utilisé plusieurs fois !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. ...ont un potentiel financier très important. Ce potentiel financier, sur quoi repose-t-il ? Sur l'histoire, tout simplement. Le patrimoine de certains bailleurs sociaux est amorti, il a été réhabilité, et aujourd'hui, il dégage des ressources très importantes dès lors qu'il n'y a plus d'emprunts à rembourser.

Certains bailleurs sociaux ne sont pas obligés de construire des logements sociaux en nombre important, car leurs territoires connaissent soit un déclin démographique, soit une vacance importante, ou bien le pourcentage de logements sociaux y est très élevé, donc les besoins de construction sont moindres.

M. Marcel Rogemont. Ce sont ceux-là que vous allez taxer ?

M. Pierre Gosnat. Ce sont des affirmations non vérifiées !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Si nous voulons construire des logements sociaux dans des territoires où la pression est très forte, par exemple en Île-de-France, à Paris,...

M. Jean-Pierre Brard. Et à Neuilly !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. ...où le délai d'attente est de huit ans contre six mois dans d'autres territoires, il nous faut organiser cette mutualisation au sein du monde HLM.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à ce principe de péréquation. C'est un modèle économique à envisager et à construire ensemble pour les années à venir.

Nous avions proposé de prendre pour assiette la CRL, mais le Gouvernement partage l'analyse de la commission des finances : ce n'est pas la bonne assiette. Nous reviendrons sur les sous-amendements présentés par les députés du groupe Nouveau Centre - je ne partage pas leur analyse, mais nous aurons le temps d'en débattre.

Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements de suppression, et favorable à la solution imaginée par la commission des finances reprise dans les amendements du Gouvernement.

M. Marcel Rogemont. Quand allez-vous répondre à la question que je vous ai posée ?

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je reviendrai, lors de la discussion de l'amendement suivant, sur le prétexte fallacieux de la contribution sur les revenus locatifs, qui est d'ailleurs à l'origine de la révolte d'une grande partie des bailleurs qui n'ont pas apprécié d'être pris pour des imbéciles.

M. Jean-Pierre Brard. La révolte précède la révolution !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je voudrais d'abord revenir sur la nécessité devant laquelle le Gouvernement prétend se trouver. Nous sommes en train de créer une nouvelle étape dans le refus de l'État d'assumer les obligations sur lesquelles il s'était pourtant engagé lors de la loi sur le renouvellement urbain, avec l'ensemble des acteurs du secteur.

Lorsque M. Borloo siégeait à votre place, monsieur le secrétaire d'État, il nous a vendu le renouvellement urbain d'une façon très simple : 6 milliards de l'État, 6 milliards des autres partenaires, dont le 1 % logement d'alors, puis les collectivités, les acteurs et le financement de la caisse des dépôts, qui feraient levier. Ceux qui ont assisté aux débats s'en souviennent. C'était cela, le contrat du renouvellement urbain.

M. Alain Cacheux. Nous en sommes loin !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Où en sommes-nous aujourd'hui ? L'État vient à peine de dépenser le premier milliard. « Action logement » sera à plus de 5 milliards dans la même période. Cela signifie que vous êtes en train de continuer ce que vous avez entamé l'année où vous avez instauré le prélèvement sur les sociétés de crédit immobilier. C'était la première étape. Vous avez imposé la réforme des crédits immobiliers moyennant le prélèvement sur des fonds des crédits immobiliers.

Puis nous en sommes venus à la deuxième étape, que tout le monde connaît : le prélèvement du 1 % logement, aujourd'hui « Action logement », alors même que deux de vos prédécesseurs avaient signé des conventions d'objectifs avec le 1 % dans lesquelles ils s'engageaient à y augmenter leur participation. Vous avez mis le couteau sous la gorge d'« Action logement ».

Monsieur le secrétaire d'État, vous assumez une situation, mais sachez que nous sommes tous persuadés que « Action logement » est en danger. Ceux qui le dirigent affirment tous les jours qu'ils perdront leur capacité à aider au financement des logements des salariés comme ils le faisaient jusqu'à présent si rien ne change.

Et puis l'année dernière, le scénario s'est poursuivi avec la loi de mobilisation pour le logement. Certains d'entre nous président l'ANRU, comme l'ANAH, et nous savions que la bosse de 1,4 milliard qui doit être payée par l'ANRU arriverait l'année prochaine.

Mme Valérie Boyer. Madame la présidente, les interventions sont limitées à deux minutes !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cette exigence a placé le Gouvernement dans l'obligation d'aller chercher les bailleurs sociaux. Mais le processus des « dodus dormants », terme utilisé par Mme Boutin, a échoué.

Monsieur le secrétaire d'État, ce que vous faites aujourd'hui, ce n'est pas de la mutualisation, ce n'est pas de la péréquation entre les organismes ; c'est du racket sur les bailleurs sociaux pour remplir les obligations que l'État s'était engagé à assumer dans ce processus de renouvellement urbain. C'est cette réalité qu'il faut affirmer ici ce soir.

Certes, j'ai été très long, mais il est compliqué de débattre sur ces sujets sans entrer dans le vif du sujet. Je sais que je peux indisposer, mais cela m'est égal. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Le vrai problème c'est que l'État, qui n'assume pas ses responsabilités, est en train de mettre en cause le dernier des partenaires qui était intact. Dans deux ans, lorsque l'on aura liquidé les crédits immobiliers, les crédits « Action logement », et les bailleurs, qui allez-vous mettre à contribution pour assurer la continuité des 6 milliards qui manquent encore pour le renouvellement urbain, plus le complément d'aide à la pierre ?

Ce sont ces questions que le groupe SRC et l'opposition dans cet hémicycle ont voulu mettre sur la table, parce que c'est cela votre politique, monsieur le secrétaire d'État. Tous les habillages et autres formules sont très en deçà de la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez préconisé, bien évidemment, le rejet des amendements de suppression.

Nous touchons à un sujet extrêmement important. Je vois deux secrétaires d'État au banc du Gouvernement. Vous, monsieur Apparu, qui fûtes il n'y a pas si longtemps député de Valmy, rappelez-vous du 20 septembre 1792 !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. L'actuel député de Valmy est dans l'hémicycle !

M. Jean-Pierre Brard. Je sais, Bruno Bourg-Broc, qui malgré des convictions que je ne partage pas est sûrement plus fidèle aux soldats de l'An II que vous ne l'êtes !

Ce 20 septembre 1792, Goethe, qui était à côté du Duc de Brunswick, avait déclaré : « De ce lieu et de ce jour date une nouvelle époque dans l'histoire du monde... » Qui se tenait en face des coalisés ? La France républicaine, en formation et en haillons, qui cria « Sus à l'ennemi » pour libérer la France de ceux qui voulaient l'envahir. Cette France se levait contre les privilèges.

Vous, aujourd'hui, que faites-vous ? Vous défendez les privilégiés, les aristocrates d'aujourd'hui, qui sont les successeurs des aristocrates d'hier !

Quant à vous, madame Amara, je peux vous dire que j'ai deux fiertés dans ma vie : fils d'ouvrier et instituteur de la république. Il faut toujours être fier de ses origines, ne jamais les trahir, ne jamais trahir ses convictions et rester toujours fidèle à sa classe !

M. Charles de la Verpillière. Là, vous manquez de classe ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Brard. Vous la trahissez aujourd'hui en soutenant une telle politique. Ne vous en déplaise, il y a deux France : celle du peuple, et celle de Sarkozy.

Je vous recommande la lecture de ce magnifique livre, Le président des riches , qui nous informe qu'à Neuilly, il y a 3 % de HLM. Et vous nous dites qu'il faut trouver de l'argent !

Avec la langue de bois que vous savez utiliser, pour mieux enfumer les auditeurs ou les téléspectateurs qui nous regardent, vous dites taxer l'assiette. Mais vous taxez les assiettes vides, ou plutôt vous taxez le peu qui reste dans ces assiettes.

Le potentiel financier des organismes consiste à faire croire que quelqu'un qui gagne deux fois le SMIC est un riche par rapport à quelqu'un qui gagne le SMIC. Les privilégiés sont dans les 28 797 résidences principales de Neuilly. Là, il y a des sous et vous n'avez pas besoin de vous baisser souvent pour ramasser beaucoup. Mais vous ne voulez pas toucher à ces gens-là.

Savez-vous ce que représente à Montreuil votre prévision d'origine de 2,5 % ? Sur une année, monsieur le secrétaire d'État, c'est 210 euros supplémentaires pour un loyer moyen.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Non !

M. Jean-Pierre Brard. Si ! Je sais de quoi je parle,...

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Moi aussi !

M. Jean-Pierre Brard. ...quand il s'agit de pauvres gens. Et je ne suis pas sûr que ce soit votre cas.

Pour un riche, 210 euros, c'est le quart du budget lunettes de soleil de l'année. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour ces gens-là, leur cité HLM, c'est le lotissement Montmorency dans le XVI e arrondissement et l'annexe de la cité HLM, c'est le Cap Nègre.

M. Charles de la Verpillière. Jaloux !

M. Jean-Pierre Brard. Mais pour un pauvre donner, au Trésor public 210 euros de plus signifie qu'il doit supprimer ses vacances. Après tout, vous leur avez promis de travailler plus pour gagner plus, alors pourquoi partiraient-ils en vacances, puisqu'il leur faut maintenant chercher du travail plus longtemps qu'avant ? Ce n'est donc pas la peine de partir en vacances. !

Je vais conclure mon propos, madame la présidente. Le fils de Valmy qu'aurait dû être aujourd'hui Benoist Apparu doit avoir dans son esprit les sans-culotte d'hier qui devraient troubler ses nuits tellement il les trahit. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je ne veux pas commenter les rétrospectives historiques, totalement fausses d'ailleurs. Vous devriez progresser, mon cher collègue, dans votre connaissance de la bataille de Valmy, vous ne tiendriez pas les mêmes propos.

D'un point de vue historique, on pourrait débattre longtemps de la bataille de Valmy.

M. Jean-Pierre Brard. Révisionniste !

M. Charles de Courson. Tout le monde, mes chers collègues, est d'accord pour soutenir l'ANRU.

Plusieurs députés du groupe SRC. Sauf l'État !

M. Charles de Courson. Tout le monde connaît l'ordre de grandeur de la bosse : un bon milliard - je m'adresse à notre bouillonnant collègue Le Bouillonnec. Vous ne pouvez pas dire tout et son contraire. Vous ne pouvez à la fois dire qu'il n'y a pas assez d'argent et vouloir supprimer les 340 millions. Il faut bien les trouver.

M. Marcel Rogemont. Nous avons fait des propositions.

M. Charles de Courson. Non ! Vous n'avez pas déposé d'amendements sur les recettes que vous envisagez. On ne peut voter votre amendement, sinon il faudrait réduire de 340 millions les interventions de l'ANRU.

M. Alain Cacheux. Vous aviez promis 6 milliards et il y en a moins d'un !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. J'ai donné l'avis du Gouvernement. Je ne reviendrai pas sur la bataille de Valmy.

M. Jean-Pierre Brard. C'est dommage !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Monsieur le Bouillonec, vous avez évoqué l'avenir du 1 % logement, qui est un sujet important. La réforme de l'accession à la propriété, que vous voterez, je l'espère, la semaine prochaine, permettra pour le 1 % logement ce que l'on appelle des retours de prêts. Le financement du 1 % logement repose sur deux recettes principales : 0,45 % qui représente un peu moins de 2 milliards - un peu moins de 50 % de ses ressources - et les retours de prêts générés par les prêts accordés les années précédentes et qui font un peu plus de deux milliards d'euros, soit un peu plus de 50 % des recettes.

Certains prêts ont été transformés en subventions qui ont asséché les retours de prêts, ce qui explique les difficultés financières rencontrées aujourd'hui par le 1 % logement. Notre logique consiste à maintenir le niveau de subventions versées par le 1 % logement afin qu'il puisse conserver sa viabilité économique et, via l'accession à la propriété, à organiser de nouveau des retours de prêts pour que le modèle économique du 1 % logement puisse subsister dans les années à venir.

Après avoir partagé toutes ces informations avec l'ensemble des partenaires sociaux, nous avons, je crois, trouvé un équilibre qui se traduira très concrètement dans la négociation que nous devons engager dès le début de 2011 pour le décret d'emploi des années 2012-2013-2014 qui liera l'État au 1 % logement.

(Les amendements identiques n os 148 et 161 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements, n os 160, 151 rectifié, 149 rectifié et 150 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 160 présenté par M. Le Bouillonnec, M. Brottes, M. Pupponi, M. Goldberg, M. Rogemont, M. Cacheux, M. Goua, M. Jean-Louis Dumont, M. Valax, Mme Maquet, Mme Robin-Rodrigo, M. Dumas, M. Jibrayel, M. Manscour, M. Villaumé, Mme Lepetit, Mme Darciaux, Mme Crozon et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« Le 2° du III de l'article 234 nonies du code général des impôts est complété par les mots : « , à l'exception des locaux commerciaux dont la surface excède 1 000 mètres carrés ».

La parole est à M. Yves Le Bouillonnec, pour défendre l'amendement n° 160.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons tenu à déposer cet amendement pour placer le Gouvernement face à ses contradictions.

Je constate qu'il ne nous a été fourni aucune indication sur les conditions dans lesquelles l'État entend assumer ses obligations quant au financement à hauteur de 6 milliards des opérations de l'ANRU. Nous n'avons pas obtenu de réponse - cela se reproduit depuis plusieurs années. Nous avons engagé ces débats à l'occasion de la loi MOLLE et lorsqu'il existait déjà des dispositifs de prélèvement sur l'action logement.

Nous avons voulu déposer cet amendement pour montrer au Gouvernement qu'il faisait fausse route sur la méthode C'est par la confrontation permanente avec ceux qui pourraient en fait l'aider, parce qu'ils sont les mieux placés pour cela, qu'il provoque les difficultés. Monsieur le secrétaire d'État, la bronca que vous avez subie à Strasbourg résulte des indications que je vous ai données dans mon intervention sur le premier amendement. Les bailleurs sociaux ont eu l'impression que vous les preniez pour des imbéciles. C'est, en effet, les prendre pour des imbéciles que de décider d'un seul coup d'instaurer cette contribution, en prétendant supprimer la niche fiscale - cet argument a été utilisé jusques et y compris à Strasbourg, même s'il l'est un peu moins aujourd'hui - que constituerait l'exonération des bailleurs sociaux du paiement de la contribution sur les revenus locatifs. C'est, à notre avis, une faute parce qu'il y a là une forme de mépris à l'égard de vos interlocuteurs. Aucun d'entre nous n'ignore que la contribution sur les revenus locatifs et la succession des taxes au droit de bail et des taxes additionnels au droit de bail, qui existaient, étaient à la charge des bailleurs privés et non à celle des bailleurs sociaux. En outre, lorsqu'a été entreprise, sur trois années, la réforme compliquée de cette fiscalisation, la liste de ceux qui en étaient exonérés n'était pas négligeable. Les bailleurs sociaux ne sont pas les seuls à être exonérés de contribution sur les revenus locatifs. Aucun bailleur privé physique ne la paie. Même les bailleurs privés propriétaires dans le cadre des sociétés civiles immobilières à transparence fiscale - la plupart des SCI familiales - ne la paient pas. Et tous les bailleurs de locaux d'activités économiques, tous les magasins, les grandes surfaces sont exonérés d'une telle contribution dont les redevables se limitent à la portion congrue des loueurs professionnels et des sociétés.

Quand vous êtes allé chercher cette prétendue niche fiscale, monsieur le secrétaire d'État, vous avez alors provoqué l'indignation de ceux qui ont vu dans cette suggestion le mépris de votre démarche.

Que proposons-nous dans cet amendement ? Vous voulez de l'argent, monsieur le secrétaire d'État ? Chiche ! Taxez à la CRL tous les revenus locatifs des bâtiments des grandes surfaces de plus de mille mètres carrés. Puisque vous voulez que l'enjeu locatif soit au coeur de la stratégie sur le renouvellement urbain, fiscalisez...

M. Gérard Hamel. C'est n'importe quoi !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je suis d'accord avec vous. C'est tout autant n'importe quoi que pour les bailleurs sociaux. Rien ne justifie davantage ce que je vous propose que ce que vous nous proposez pour les bailleurs sociaux. Il n'y aucun lien entre la contribution sur les revenus locatifs, le bailleur social et la participation au financement de l'ANRU.

Monsieur le secrétaire d'État, vous auriez pu dire à l'Union des HLM : « L'État est raide ; cela fait des années que l'on pique l'argent là où on peut, mais nous allons ouvrir un débat pour savoir comment pourrait être mutualisée la participation des bailleurs sociaux, qui ont des capacités financières plus grandes, sur des territoires et notamment sur des zones tendues, là où il y a besoin de logements ». Vous n'auriez pas rencontré d'échec. Et si vous me répondez que vous l'avez fait, mais qu'ils n'ont pas voulu, je ne vous croirai pas. Je crois qu'ils n'ont pas été placés en situation de débattre avec vous. Je le regrette, car plus que le conflit qui nous oppose à cet instant, tous les acteurs portent la volonté d'aller jusqu'au bout de l'opération de renouvellement urbain. Nous sommes demandeurs, comme la plupart de nos collègues, d'une deuxième opération de renouvellement urbain, mais si nous ne sommes pas capables de finir proprement la première, nous ne sommes pas prêts de commencer à réfléchir sur la seconde.

Voilà ce que signifie cet amendement que vous allez rejeter, et vous ferez bien, car il est aussi incongru que le projet que vous mettez en place.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur Le Bouillonnec, votre amendement tombe de lui-même puisque vous voulez assujettir à une taxe ad valorem des loyers qui sont déjà assujettis à la TVA. C'est contraire à la septième directive. Cela ne tient pas la route. Retirez-le ! Je croyais que vous étiez pro-européen. Or c'est un amendement anti-européen.

M. Jean-Pierre Brard. Et alors ?

M. Charles de Courson. Vous connaissez la directive TVA, monsieur Brard ?

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François Scellier, rapporteur spécial . La commission n'a pas examiné cet amendement. J'y suis personnellement défavorable, dans la mesure où il y a un double système d'imposition, comme l'a indiqué M. de Courson, et notre collègue Yves Le Bouillonnec le sait parfaitement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Avis défavorable. J'ai trouvé les propos de M. Le Bouillonnec particulièrement intéressants sur un point. Il vient de nous dire - cela figurera au compte rendu de la séance - que le principe même de la mutualisation entre les bailleurs sociaux était un bon principe. Je vous remercie, monsieur Le Bouillonnec, de l'avoir reconnu.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n'est pas ce que j'ai dit ! Je vous ai demandé d'ouvrir un débat sur le sujet. Cela n'est pas pareil !

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. M. Jean-Yves Le Bouillonnec et un certain nombre d'entre nous demandent que le débat sur la mutualisation soit ouvert. Ce n'est pas ce que vous nous proposez dans le cadre du projet de loi de finances.

Quand on taxe des loyers pour alimenter l'ANRU, cela ne s'appelle pas de la péréquation, cela s'appelle le financement de l'ANRU - 340 millions étaient prélevés et 280 étaient pour l'ANRU. Cette année, l'ANRU a un besoin de financement de 1,2 milliard, qui sera couvert par cette taxe - nous verrons comment tout cela finit -, par la trésorerie de l'ANRU, à hauteur de 300 millions d'euros environ, et les 670 millions financés par « Action logement » dans le cadre de la convention triennale. En 2012, il faudra 1,4 milliard - je parle sous le contrôle de Gérard Hamel - et l'ANRU n'aura plus de trésorerie puisqu'elle aura été utilisée en 2011. Le 1 % logement contribue au financement de l'ANRU jusqu'en 2011. Il faut donc renégocier, sans avoir la certitude d'aboutir à un accord.

Même si vous continuez à prélever 700 millions d'euros sur « Action logement », comment financerez-vous les 700 millions d'euros manquants ?

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. J'avais posé une question sur la niche fiscale qui existe pour ceux qui payaient la taxe additionnelle sur le droit de bail en 2005 et qui ne la paient plus. Je souhaiterais en connaître le montant.

Je suis d'accord sur la mutualisation. Pour participer au conseil d'administration de la fédération des offices HLM et à l'USH, je suis bien placé pour savoir que le débat a lieu sur la mutualisation et la péréquation entre les organismes. C'est le rôle de la Caisse de garantie du logement locatif social - la CGLLS. Si le problème avait été posé en ces termes, le débat aurait été positif.

En fait, vous voulez mettre en place un dispositif de mutualisation et de péréquation pour pallier le manque de financement de l'État. Les organismes HLM n'en reviennent pas dans la mesure où ils financent déjà l'ANRU et l'aide à la pierre, puisqu'ils ont des fonds propres. Ils paient doublement avec la Caisse de garantie, puisqu'il y a deux taxes de péréquation.

M. Alain Cacheux. Quadruple peine !

M. Marcel Rogemont. Et voilà que vous voulez instaurer une autre taxation sur les locataires. Taxer les fonds propres d'un organisme HLM a forcément des répercussions sur les locataires. Cela signifie qu'il y aura moins de travaux de réhabilitation,...

Mme Jacqueline Maquet. Moins de services.

M. Marcel Rogemont. ...moins de constructions.

Vouloir faire participer les collectivités territoriales au financement du logement social en lieu et place de l'État est proprement scandaleux. Les délégations des aides à la pierre participent largement à la mise en place de ce dispositif. Du reste, les collectivités territoriales n'ont pas attendu l'État pour commencer à financer le logement social.

M. Alain Cacheux. Heureusement !

M. Marcel Rogemont. Avec votre taxation sur le potentiel financier, vous taxez en fait les subventions des collectivités territoriales. C'est intolérable. Il n'est en effet pas concevable de taxer ceux-là mêmes qui vous aident à financer l'ANRU, à construire, à réhabiliter le logement locatif public.

Les 340 millions que vous vous proposez de ponctionner sur les organismes HLM, pourquoi n'allez-vous pas les chercher autre part ? L'augmentation de la TVA sur la restauration, par exemple, serait une solution. Je vous conseille vivement d'aller chercher l'argent ailleurs que chez les organismes HLM.

En revanche, si vous voulez ouvrir un débat sur la péréquation et la mutualisation à l'intérieur des organismes HLM, faisons-le dans un climat apaisé où il ne sera pas question de « hold-up » !

M. Jean-Yves Le Bouillonec. Très bien !

(L'amendement n° 160 n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 151 rectifié présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« I. - Il est créé un prélèvement de 120 millions d'euros sur les ressources financières des organismes d'habitation à loyer modéré dont le potentiel financier par logement dépasse 3 000 euros. Son montant est réparti entre lesdits organismes au prorata de leur potentiel financier.

« II. - Le prélèvement sur le potentiel financier dû pour une année est égal au produit du nombre de logements et d'équivalents logements sur lesquels l'organisme détient un droit réel au 31 décembre de l'année précédente par une contribution moyenne par logement.

« III. - Il est institué une taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux d'immeubles et de droits immobiliers perçus par les collectivités locales sur les seuls logements et visés au 1° du 1. de l'article 1584 du code général des impôts ainsi qu'au 1° de l'article 1595 bis du même code. Son taux est fixé à 0,10 %.

« IV. - À la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article 200 B du code général des impôts, le taux : « 17 % » est remplacé par le taux : « 19 % ».

« V. - Les dispositions du présent IV s'appliquent à compter du 1 er janvier 2012. ».

L'amendement n° 149 rectifié présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« I. - Il est créé un prélèvement de 120 millions d'euros sur les ressources financières des organismes d'habitation à loyer modéré dont le potentiel financier par logement dépasse 3 000 euros. Son montant est réparti entre lesdits organismes au prorata de leur potentiel financier.

« II. - Le prélèvement sur le potentiel financier dû pour une année est égal au produit du nombre de logements et d'équivalents logements sur lesquels l'organisme détient un droit réel au 31 décembre de l'année précédente par une contribution moyenne par logement.

« III. - Il est institué une taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux d'immeubles et de droits immobiliers perçus par les collectivités locales sur les seuls logements visés au 1° du 1. de l'article 1584 du code général des impôts ainsi qu'au 1° de l'article 1595 bis du même code. Son taux est fixé à 0,17 %. »

L'amendement n° 150 rectifié présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« I. - Il est créé un prélèvement de 120 millions d'euros sur les ressources financières des organismes d'habitation à loyer modéré dont le potentiel financier par logement dépasse 3 000 euros. Son montant est réparti entre lesdits organismes au prorata de leur potentiel financier.

« II. - Le prélèvement sur le potentiel financier dû pour une année est égal au produit du nombre de logements et d'équivalents logements sur lesquels l'organisme détient un droit réel au 31 décembre de l'année précédente par une contribution moyenne par logement.

« III. - À la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article 200 B du code général des impôts, le taux : « 17 % » est remplacé par le taux : « 22 % ».

« IV. Les dispositions du présent III s'appliquent à compter du 1 er janvier 2012. ».

La parole est à M. Charles de Courson, pour présenter ses amendements n os 151 rectifié, 149 rectifié et 150 rectifié.

M. Charles de Courson. C'est très simple : il faut trouver 340 millions.

M. Jean-Pierre Brard. Il faut prendre aux riches !

M. Charles de Courson. L'idée du Gouvernement d'instaurer un prélèvement de 340 millions sur ce que l'on appelle improprement les dodus dormants, à savoir les organismes qui ont des disponibilités qu'ils n'utilisent pas pour diverses raisons - peu de besoins dans leur secteur, parc ancien, etc. - est excessive.

Le Nouveau Centre propose donc de créer un prélèvement sur les ressources financières des organismes d'HLM dont le potentiel financier par logement dépasse 3 000 euros. Cela rapporterait une centaine de millions. Pour trouver les 240 millions restants, nous proposons trois solutions qui peuvent être combinées. Première solution : instituer une taxe sur les droits de mutation à titre onéreux dont le taux serait fixé à 0,17 %. Cette taxe porterait sur les droits de mutation à titre onéreux perçus par les collectivités locales sur les seuls logements.

À cette proposition peuvent être opposés de nombreux arguments : les taux trop élevés en France - toutes les études le montrent -, le frein à la mobilité qu'elle constituerait.

Deuxième solution : augmenter de quelques points la taxation des plus-values immobilières.

Troisième solution : créer un IS à taux très réduit sur les bénéfices des organismes HLM, qui sont exonérés parce qu'ils exercent une mission d'intérêt général - cela fera l'objet de mon sous-amendement à l'amendement du Gouvernement à venir - ou sur les produits financiers. Connaissez-vous, mes chers collègues, le montant des produits financiers des 556 organismes d'HLM ?

M. Alain Cacheux. Il est très faible !

M. Charles de Courson. Ce montant est de 330 millions d'euros par an. On me souffle qu'il s'élève en fait à 600 millions. On ne peut pas dire que tous les organismes d'HLM sont identiques.

M. Marcel Rogemont. Combien de dettes ?

M. Charles de Courson. Ce ne sont pas les mêmes qui ont des excédents et des dettes.

Il existe donc plusieurs solutions possibles autour d'un impôt sur les bénéfices ou une partie des bénéfices. Telles sont les trois pistes que le Nouveau Centre vous propose.

Le Gouvernement ne doit pas s'obstiner. Il a déjà accepté de renoncer à l'article 99, c'est un progrès. Il s'est orienté vers les dodus dormants, mais il n'y a pas 70 % de dodus dormants en France.

M. Marcel Rogemont. Arrêtez !

M. Charles de Courson. Il faut donc combiner nos propositions, voire trouver une autre solution - au Nouveau Centre, nous sommes très ouverts ! Il ne faut pas croire qu'il soit raisonnable de prélever 340 millions d'euros sur les seuls fonds de roulement des organismes d'HLM.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Valax.

M. Jacques Valax. Il est dangereux de continuer à discuter, car plus vous trouverez des moyens de substitution, plus vous justifiez le fait que cette ponction doive s'appliquer au logement social. Nous souhaitons pour notre part qu'il n'y ait aucune imposition sur le logement social.

Dans le département du Tarn dont je suis l'élu, on dénombre 375 000 habitants et 9 000 logements sociaux. La ponction que vous vous proposez de nous appliquer aura un coût de l'ordre de 700 000 euros. Au regard des sommes évoquées par les uns et les autres, cela n'est pas grand-chose, mais cela signifie que je ne pourrai pas, dans les mois qui viennent, réhabiliter près de 350 logements qui mériteraient de l'être car sur les 9 000 logements, la grande majorité - 50 à 70 % - a été construite dans les années 60.

Le département du Tarn a, après une discussion très serrée, accepté de me donner une somme de 350 000 euros pour les trois années à venir. Avec cette ponction que vous m'imposez, vous récupérerez le double de ce que me donne la collectivité territoriale. Par conséquent, nous ne pouvons, du point de vue de l'égalité, de l'équité, accepter cette ponction que vous vous proposez d'instaurer sur le logement social.

M. Charles de Courson. Vous n'avez pas lu mes amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Nous avons bien lu vos amendements, mon cher collègue, et il s'agit bien de prélever sur le logement social de quoi financer l'ANRU.

M. Charles de Courson. Non !

M. François Pupponi. Que je sache, créer un IS ou instituer une taxe sur les droits de mutation, cela revient bien à faire payer des impôts au logement social. S'agissant de l'IS, ce sont bien les bailleurs sociaux qui paieront !

Il n'est pas raisonnable de prélever sur le logement social de quoi financer l'ANRU. On encourt le risque que l'ensemble du financement du logement en France soit affecté à l'ANRU. « Action logement » ne peut quasiment financer que l'ANRU. Une partie des finances des bailleurs sociaux sera affectée à l'ANRU. Selon une règle bien établie, l'État ne peut investir dans le logement en zone urbaine sensible - ZUS - en dehors de l'ANRU. En asséchant tous les financements du logement social, on empêchera la rénovation d'un certain nombre de logements dans les ZUS ou hors ZUS. Le risque est réel que le logement social, hors ANRU et hors ZUS, ne puisse plus être financé.

Tout le monde est d'accord pour trouver 340 millions d'euros pour l'ANRU, mais ce n'est pas en asséchant le financement du logement hors ANRU que l'on y arrivera.

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Notre collègue de Courson, en ouvrant le débat, a posé la question fort intéressante de savoir s'il existe d'autres solutions pour récupérer l'argent qui manque à l'État pour financer l'ANRU. Pour ma part, je suis assez sensible à ses propositions : pourquoi pas une taxe sur les plus-values immobilières ou sur les droits de mutation.

Le problème c'est que M. de Courson commence toujours par proposer la même chose : créer un prélèvement de 120 millions d'euros sur les ressources financières des organismes d'HLM. Bien sûr, notre collègue nous dit que cela ne vise que les organismes d'HLM dont le potentiel financier par logement dépasse 3 000 euros.

C'est presque dans votre nature de centriste, monsieur de Courson, que de ne pas aller jusqu'au bout du raisonnement. (Sourires .) Dans la mesure où il faut 340 millions d'euros pour financer l'ANRU, pourquoi ne pas les trouver sur les plus-values immobilières ou les droits de mutation ? Il n'y aurait là rien de scandaleux. De toute façon, il y aura une taxation. Pour ma part, je préfère une taxation large plutôt qu'une frappant les organismes d'HLM et, par voie de conséquence, les locataires. Quels que soient la taxation, l'assiette ou le taux choisis, cela retombera sur les locataires.

M. Charles de Courson. Non.

M. Marcel Rogemont. Les plans de patrimoine et les capacités de construction seront réduits par manque de fonds propres. J'entends bien ce que vous dites sur les dodus dormants, les riches. Je veux bien admettre que certains organismes sont dans une situation exceptionnelle mais je veux des noms ! Car finalement, vous laissez entendre que nous sommes tous, bon gré, mal gré, en train de dormir sur des matelas financiers ! Ce n'est pas la réalité.

Je préside un organisme d'HLM et je peux vous dire que la plus grande partie de mes fonds propres sont des subventions émanant des collectivités territoriales. À titre d'exemple, je consacre 10 % de fonds propres pour construire un logement sur Rennes métropole. Mais lorsque je construis à l'extérieur de Rennes métropole, c'est beaucoup plus. Ce qui signifie en quelque sorte que, au bout du compte, Rennes Métropole m'aide à financer des logements situés hors de son territoire : elle me donne des fonds propres pour construire là où cela coûte plus cher, en mobilisant peu mes fonds propres.

Oui, monsieur le secrétaire d'État : je construis peut-être à Rennes avec 10 % de fonds propres seulement, mais hors de Rennes Métropole, il faut bien plus ! Et si je peux y investir davantage d'argent, c'est, je le répète, parce que Rennes Métropole m'aide là où cela coûte plus cher. Pour ce qui concerne mon organisme, Rennes Métropole fait donc preuve de solidarité envers le reste du département.

Cela montre bien que la solidarité dont nous parlons s'exerce au travers des organismes d'HLM, entre ces organismes, entre les collectivités territoriales, entre les territoires. Dès lors, laissez les choses en l'état et trouvez des solutions ailleurs, comme vous le suggérait Charles de Courson, ce qui vous évitera de taxer les organismes d'HLM.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Je veux formuler quelques remarques.

D'abord, notre situation budgétaire globale est très problématique ; nul ne peut le nier.

M. Alain Cacheux. Supprimez d'abord le bouclier fiscal !

M. Marcel Rogemont. Et la TVA sur la restauration ? Trois milliards d'euros jetés par les fenêtres !

M. Olivier Carré. Ensuite, il est un élément qui a été évoqué dans d'autres discussions, mais pas dans celle-ci, et que je souhaite rappeler en particulier à mon cher et éminent collègue Charles de Courson (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : le niveau de nos prélèvements est particulièrement élevé.

M. Alain Cacheux et . M. Marcel Rogemont Nous parlons d'un prélèvement, de toute façon !

M. Olivier Carré. Si j'ai bien compris l'orientation donnée par le Président de la République et le Premier ministre, dans le budget pour 2011, il s'agit d'abord de maîtriser les dépenses publiques, voire de les réduire,...

M. Pierre Gosnat. Cela ne va pas si mal que cela au CAC 40 !

M. Olivier Carré. ...avant d'imaginer une augmentation des prélèvements pour résoudre un problème.

M. Pierre Gosnat. Mais c'est d'un prélèvement que l'on parle !

M. Marcel Rogemont. Les 340 millions d'euros, c'est quoi ?

M. Alain Cacheux. C'est une taxe !

M. Olivier Carré. Pour ces raisons, je n'étais pas particulièrement favorable, à titre personnel, à l'article 99 dans sa rédaction initiale.

M. Alain Cacheux. Il fallait voter notre amendement !

M. Olivier Carré. Voilà pourquoi des amendements ont été déposés et la question a fait l'objet de discussions très ouvertes avec le Gouvernement.

Sur le fond, je souscris entièrement à certains des propos qui ont été tenus. Néanmoins il ne faut pas oublier le contexte conjoncturel, particulièrement critique cette année et qui le restera sans doute l'année prochaine.

M. Alain Cacheux. Vous n'avez qu'à supprimer d'abord le bouclier fiscal !

M. Olivier Carré. Deuxièmement, il faut étudier la situation des organismes d'HLM. On a parlé de l'exonération d'impôt sur les sociétés : ce sont 800 millions d'euros qui vont, en fonds propres, à l'ensemble des organismes, en fonction de leur situation particulière...

M. Alain Cacheux. Et qui ne sont pas dissimulés, eux !

M. Olivier Carré. ...et qui correspondent à 2,4 milliards d'euros de bénéfices, de résultat net - comme pour une autre entreprise -...

M. Alain Cacheux. D'excédents !

M. Olivier Carré. ...ce qui, en période de crise, est honorable, vous l'avouerez.

Je n'oublie pas que les situations sont très hétérogènes et varient selon les territoires. Ainsi que le secrétaire d'État l'a souligné, certains organismes connaissent de grandes difficultés liées au terrain, alors que d'autres, pour des raisons souvent historiques, sont dans une situation financière différente. D'où l'intérêt d'une logique de péréquation, comme on l'a rappelé à l'échelle de l'USH.

Cette idée a suscité des débats lors de l'examen de la loi Boutin, puis de la loi de finances rectificative pour 2009, mais le mécanisme de péréquation a été détourné au moyen de jeux comptables par la moitié environ des organismes, qui auraient dû nourrir le fameux fonds de péréquation géré par la CGLLS.

M. Gérard Hamel. Exactement !

M. Olivier Carré. On a donc imaginé une solution qui évite de prendre au monde HLM de l'argent qui tomberait dans l'escarcelle de l'État, de telle sorte que personne n'y retrouverait plus rien.

M. Alain Cacheux. Ben si !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ben non ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Olivier Carré. Non : il s'agit de continuer de financer les organismes les plus engagés dans les opérations ANRU par une part de fonds provenant d'autres organismes.

M. Marcel Rogemont et M. Alain Cacheux. Et non par une aide de l'État ?

M. Olivier Carré. L'argent n'est pas perdu pour le monde HLM : chaque euro du prélèvement de péréquation lui est retourné. Simplement, les organismes qui bénéficieront du prélèvement ne seront sans doute pas ceux qui lui auront été assujettis. C'est le sens même d'un fonds de péréquation.

M. Marcel Rogemont. Mais la péréquation existe déjà, avec l'ANRU et ses subventions !

M. Olivier Carré. Pourquoi ce fonds est-il géré par la CGLLS ? Cette question avait été évoquée lors de l'examen de la loi MOLLE. Certes, la CGLLS est un établissement public qui représente l'État, mais elle est aussi très proche de la famille HLM.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec et M. Marcel Rogemont. Nous les finançons !

M. Olivier Carré. Certains diraient même que ce sont plutôt des cousins qui pilotent cet organisme. On ne peut donc pas accuser l'État de turpitude lorsqu'il décide d'orienter les fonds vers cette entité.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout à l'heure, nous allons pouvoir le faire !

M. Olivier Carré. On a parlé de la bosse de l'ANRU ; c'est un état de fait prévu depuis longtemps.

J'insiste en revanche sur la conjoncture globale que connaît notre pays, et qui justifie que des financements cruciaux ne soient pas interrompus.

M. Alain Cacheux. Supprimez d'abord le bouclier fiscal !

M. Olivier Carré. On a aussi évoqué les offices du Tarn et de l'Ille-et-Vilaine ; je ne détaillerai pas les chiffres, mais les organismes dont nous avons parlé sont dans une situation qui n'a rien à voir avec celle des vôtres, qui peuvent être en difficulté.

M. Marcel Rogemont. Alors pourquoi vais-je être taxé ? Parce que je reçois des subventions des collectivités territoriales, c'est tout !

M. Olivier Carré. Il s'agit moins des subventions que des produits financiers : dans certains organismes, il y a plus de produits financiers que de subventions.

M. Marcel Rogemont. Pas chez moi !

M. Olivier Carré. Ce n'est peut-être pas le cas chez vous, mais ça l'est dans de nombreux organismes.

Il s'agit donc simplement de tendre vers ce type de rééquilibrage. Il faut étudier ces questions d'un point de vue conjoncturel, car la conjoncture est particulière.

En outre - je l'ai dit à la tribune -il faudra concevoir un système beaucoup plus général qui remette toutes les pendules à l'heure. Nous avons mentionné l'État, les collectivités ; je rappelle également, indépendamment du 1 %, le rôle des fonds d'épargne. Tous ces apports au financement du logement social devront être abordés l'année prochaine.

M. Alain Cacheux. Évidemment !

M. Olivier Carré. Ainsi, l'État, qui, par l'intermédiaire notamment de l'impôt sur les sociétés ou de la TVA, concourt directement et massivement au financement du logement social, devrait se cantonner à ce rôle. À nous d'imaginer ensemble des modes de gouvernance adaptés à des types de financement raisonnables.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Cacheux.

M. Alain Cacheux. D'abord, j'aimerais entendre l'avis du secrétaire d'État sur les amendements de M. de Courson,...

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Je vais vous le donner, rassurez-vous, mais seulement quand on me le demandera !

M. Alain Cacheux. ...notamment lorsque celui-ci propose de remplacer une grande part du prélèvement sur les organismes d'HLM par une taxation plus forte sur les plus-values immobilières dans le parc privé ou par un ajustement des droits de mutation payés sur ce même parc privé.

Ensuite, monsieur le secrétaire d'État, vous avez évoqué certains organismes d'HLM qui ont construit il y a fort longtemps, si bien que leur parc est amorti, même lorsqu'ils ont procédé depuis lors à une réhabilitation. Toutefois nombre d'organismes d'HLM ne parviennent à l'équilibre que grâce au parc ancien, qui dégage un excédent d'exploitation, ce qui compense le fait que le financement des constructions plus récentes est structurellement déficitaire ; il en est ainsi de constructions réalisées grâce à des PLA. Leur équilibre est donc atteint au sein d'un patrimoine.

En outre, je suis quelque peu surpris de l'idée que se fait le Gouvernement de la solidarité territoriale. Je croyais qu'il appartenait à l'État d'assurer l'équilibre territorial. Or, en taxant certains organismes, vous visez des bassins d'habitat où, pour des raisons diverses, les constructions ont été peu nombreuses, où le potentiel financier est plus important. Ainsi, on finance la construction de logements locatifs sociaux dans certains bassins industriels en crise ; ce pourrait être en région parisienne par exemple à Neuilly. Pourquoi pas, si la commune se décidait enfin à le faire ?

Parler des organismes, c'est parler des locataires, puisque 95 % des recettes des premiers proviennent des loyers payés par les seconds. Ce sont donc les locataires, lesquels vivent souvent des situations difficiles, qui financeraient la construction dans certaines zones tendues. Je le répète : je croyais pourtant que l'État était responsable de l'équité territoriale.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Cela fait deux fois qu'il s'exprime sur les mêmes amendements !

M. Alain Cacheux. Ne mettez pas en cause la présidence, monsieur le secrétaire d'État ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Merci, madame la présidente, de nous permettre de prolonger quelque peu ce débat, qui n'avait pas encore eu lieu. Nous poussons jusqu'à son terme l'examen des questions qui se posent ; ensuite, à chacun de prendre ses responsabilités dans les circonstances actuelles.

Tout d'abord, la CGLLS est l'instrument par excellence de la mutualisation et du partage des risques. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État , et M. François Scellier, rapporteur spécial . C'est bien pour cela que nous l'utilisons !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Elle est alimentée par les organismes et sert à ceux d'entre eux qui connaissent le plus de difficultés ; le mien en a bénéficié, comme d'autres. Or, monsieur le secrétaire d'État, vous en usez avec cet instrument d'une manière qui n'est pas très aimable. (Sourires.) Nous nous sommes souri tout à l'heure ; mais, comme ce ne sont pas les organismes qui signent les arrêtés, j'ai l'impression que vous nous préparez une petite affaire, que nous évoquerons plus tard.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Pas le moins du monde !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Quoi qu'il en soit, la caisse de garantie est un instrument de mutualisation. Peut-être cet instrument doit-il être encore amélioré.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C'est ce que nous allons faire tout à l'heure !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pourquoi pas, à condition que ce ne soit pas vous qui signez, monsieur le secrétaire d'État ? Or les arrêtés sont signés par vous, et c'est ce qui posera problème tout à l'heure. (M. le secrétaire d'État rit.)

Nous en débattrons sans doute à propos des amendements que vous avez déposés.

Je rappelle qu'il y a 12 milliards d'euros dans les caisses des organismes, dont un peu moins de 6 milliards qu'il faut absolument conserver, car ils servent à la restitution des dépôts de garantie des locataires et constituent une provision en vue d'importantes réparations.

M. Alain Cacheux. Qu'il faut bien faire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il reste donc environ 6 milliards de fonds disponibles. Or les organismes investissent 8 milliards d'euros par an, soit 2 milliards de plus.

M. Alain Cacheux. Eh oui !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le secrétaire d'État, vous compariez cette situation à celle des sociétés qui n'ont pas de tels actifs ; mais elles n'investissent pas non plus dans de telles proportions.

M. Alain Cacheux. Évidemment !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'investissement global des organismes est de 8 milliards supérieur aux capacités de l'instant. Je cite les chiffres publiés par l'union des HLM à l'occasion du présent débat.

Par ailleurs, les offices sont endettés à hauteur de 80 milliards d'euros, selon la même source.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Cela me rassure !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je répète 80 milliards ! Il ne faudrait pas aller trop loin.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Et la valeur du patrimoine, c'est 200 milliards ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je me permets de vous signaler que les opérations en question sont largement garanties, puisque les emprunts de ces organismes sont tous adossés à la garantie des collectivités locales, condition nécessaire pour accéder aux prêts de la Caisse des dépôts. Au lieu de les quereller sur leur capacité financière, vous devriez donc chercher à développer l'investissement de certains d'entre eux.

En outre, il a été souligné que les organismes ne paient pas l'impôt sur les sociétés ; ils ne partagent pas leurs bénéfices. De plus, d'autres pistes ont été évoquées, au-delà même du cadre dans lequel nous débattons. Ainsi de l'opération ICADE : même si son déroulement a obéi à des critères sérieux, n'était-elle pas l'occasion de dégager des fonds, monsieur le secrétaire d'État ?

M. Marcel Rogemont. Eh oui !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Lorsque ICADE a revendu un patrimoine qui avait été financé par l'action publique, était-il opportun de lui abandonner la totalité de la plus-value réalisée ? Il ne s'agit pas de prélever tout et n'importe quoi, car ICADE doit pouvoir continuer de travailler ; mais n'aurait-il pas fallu mettre cette opération à profit ?

Puisqu'il faut apporter une contribution à l'ANRU, pourquoi ne pas se tourner vers les villes qui ne respectent pas du tout leurs obligations et ne font pas les efforts nécessaires pour répondre à la demande de logements sociaux ?

M. Alain Cacheux. Voilà ! La loi a dix ans !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je ne parle pas de celles qui n'atteignent pas le seuil de 20 %, mais de celles qui ne font pas assez d'efforts.

Ce sont des pistes. Si vous vous y engagiez, nous agirions en commun pour sauver l'ANRU, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit. Or ces aspects n'ont pas été abordés. Au contraire, il y a eu une totale improvisation. Votre projet initial a fait l'unanimité contre lui, et nous allons recourir à des stratégies. En somme, c'est l'absence de débat avec les acteurs qui est à l'origine de la confusion dans laquelle nous sommes.

Du même coup, monsieur le secrétaire d'État, elle va empêcher le Gouvernement d'aborder, l'année prochaine, les questions de fond qui se posent à notre collègue M. Hamel s'agissant de l'ANRU. Le problème de ce qui se passera en 2012 n'est pas réglé.

Qu'allez-vous vous faire l'année prochaine ?

Mme Valérie Boyer. C'est insupportable, madame la présidente !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il y aura toujours un manque d'environ 400 millions d'euros alors que le montage du projet aura eu lieu.

Mme Laure de La Raudière. Vous pourriez tout de même dire la même chose en plus court !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. François Scellier rapporteur spécial . Ces trois amendements n'ont pas été examinés par la commission des finances. À titre personnel, j'y suis défavorable dans la mesure où la commission a estimé que le dispositif de taxation par la CRL devait être remplacé par celui du potentiel fiscal.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. L'avis du Gouvernement est également défavorable.

Le principe que nous souhaitons établir repose sur une mutualisation au sein du monde HLM, sur une péréquation. Elle consiste en une contribution, dont la recette, de 340 millions, est ensuite reversée à ce même monde HLM.

Le système que vous organisez à travers vos amendements n'a rien à voir. Vous proposez une recette de 120 millions d'euros provenant du monde HLM - pour des raisons techniques, il s'agirait plutôt de 67 millions mais nous n'allons pas chipoter pour 60 millions -, et les 220 millions restants proviendraient d'une taxation sur l'accession à la propriété, au bénéfice du monde HLM.

M. Alain Cacheux. Il s'agit avant tout de limiter le racket sur les HLM !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ce n'est pas du tout le même principe. Nous souhaitons établir une contribution fondée sur une mutualisation, au sein du monde HLM, dont le produit, 340 millions, lui est reversé, à travers la CGLLS et non par le budget de l'État, comme vient de l'indiquer Olivier Carré.

Nous sommes défavorables à ce que, au sein de la politique du logement, soient organisés des transferts de dispositifs relevant de l'accession à la propriété vers le logement social. Or, en ayant recours aux droits de mutation à titre onéreux et aux plus-values, vous taxeriez l'accession à la propriété au bénéfice du logement social.

Je considère qu'une politique du logement équilibrée doit être une politique de l'État oeuvrant en faveur des trois outils de production dont nous disposons - le logement social, l'accession à la propriété et le secteur locatif libre - au lieu d'organiser des transferts financiers entre ceux-ci.

De mon point de vue, l'accession à la propriété n'a pas à participer à la péréquation entre organismes d'HLM que nous évoquions.

Enfin, je vous rappelle, monsieur de Courson, que le Centre d'analyse stratégique a annoncé, il y a quinze jours, que le principal frein à l'accession à la propriété était le droit de mutation. Au moment où nous lançons une réforme de l'accession à la propriété, je ne suis donc pas convaincu qu'il soit absolument indispensable d'en rajouter en matière de droits de mutation.

M. Marcel Rogemont. Et les plus-values immobilières ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ce sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable aux trois amendements de Charles de Courson. Pour les mêmes raisons, je serai défavorable aux sous-amendements qu'il présentera à l'amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi, mais pour deux minutes et pas plus. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Valérie Boyer. Enfin !

M. François Pupponi. Le Gouvernement vient de refuser les financements proposés par M. de Courson, mais je rappelle que Jean-Yves Le Bouillonnec a présenté deux autres sources de financement.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Présentez des amendements, alors !

M. François Pupponi. Nous pouvons aussi sous-amender.

L'une fait suite à la vente du patrimoine d'ICADE intervenue en 2010.

L'autre repose sur la taxe payée par les communes n'ayant pas 20 % de logements sociaux. Elle a actuellement un produit de 70 millions d'euros ; il suffirait de la tripler.

M. Marcel Rogemont. Voilà une bonne proposition !

M. François Pupponi. Il ne serait en effet pas injuste que les communes n'atteignant pas ce seuil participent au financement des logements sociaux dans les communes les plus défavorisées au regard de l'ANRU. Cela n'aurait rien de choquant dès lors qu'il importe d'établir une péréquation. Nous vous en proposons une où ce ne sont pas les bailleurs sociaux qui paient, mais les communes n'ayant pas 20 % de logements sociaux.

Mme Laure de La Raudière. Merci, vous avez su faire court !

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, je me félicite que le débat progresse. Réfléchir plutôt que de s'envoyer des horions, voilà qui est bien. Tout le monde reconnaît qu'il faut trouver 340 millions et je me réjouis que nous recherchions ensemble des solutions au lieu d'échanger des arguments qui ne tiennent pas debout.

Monsieur le secrétaire d'État, dans la nouvelle version de l'amendement gouvernemental, vous proposez de taxer 70 % des organismes d'HLM, et non 75 % comme le suggère la commission. Toutefois, vous aurez beau faire, vous ne pourrez pas expliquer que 70 % des organismes HLM ne gèrent pas correctement leurs ressources. Ce n'est pas possible !

C'est la raison pour laquelle j'essaie de cibler les dispositions sur les organismes d'HLM - au nombre d'une centaine au maximum - dont le fonds de roulement par logement dépasse 3 000 euros.

Si vous avez d'autres solutions, je suis prêt à les examiner. Si vous voulez concentrer encore la mesure, pourquoi ne pas établir une taxation partielle sur les produits financiers des HLM par le biais de l'impôt sur les sociétés ? J'avais un chiffre de 300 à 350 millions d'euros ; vous me dites qu'il s'agit plutôt de 600 millions. Pour la recette de 240 millions que nous recherchons, nous pourrions retenir un taux d'imposition sur les sociétés proche de celui du droit commun, assis uniquement sur les produits financiers.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ce serait 100 % des organismes d'HLM alors !

M. Charles de Courson. Les organismes d'HLM ayant des produits financiers ont, pour partie, des fonds disponibles.

M. Alain Cacheux. Cela veut dire surtout qu'ils ont de la trésorerie.

M. Charles de Courson. Bref, je me félicite que le représentant du Gouvernement abandonne de lui-même le texte initial du Gouvernement. Il ne tenait pas la route, tout le monde en est d'accord.

Ce deuxième essai consistant à taxer 70 % des organismes au lieu de 100 % est moins mauvais mais plus que perfectible car il ne paraît pas équilibré.

En outre, je précise à mon collègue Olivier Carré que la solution retenue, qu'il s'agisse de celle du Gouvernement ou de celle de la commission, reposera, quelle qu'elle soit, sur des prélèvements obligatoires.

Enfin, j'insiste sur la nécessité de trouver une solution durable. Il ne s'agit pas seulement de retenir une solution pour 2011 car la bosse s'étale sur trois années. La recette doit être pérenne sinon, l'année prochaine, monsieur le secrétaire d'État, vous serez de nouveau à la peine pour chercher un autre financement.

Pensez-vous que le système proposé soit pérenne ? Peut-on vraiment maintenir un prélèvement de 340 millions d'euros sur le potentiel financier ? Non.

Pour notre part, nous avons essayé de faire preuve d'imagination en prévoyant une solution durable.

Maintenant, à vous de choisir, mes chers collègues.

(Les amendements n os 151 rectifié, 149 rectifié et 150 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n os 224 rectifié et 59, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 224 rectifié fait l'objet de plusieurs sous-amendements, n os 300, 301, 302, 303.

L'amendement n° 224 rectifié présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Substituer aux alinéas 1 à 10 les vingt-et-un alinéas suivants :

« I. - L'article L. 423-14 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :

« 1° Au premier alinéa, l'année : « 2010 » est remplacée par l'année : « 2011 » et après le mot : « sur », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : « leur potentiel financier ».

« 2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Le prélèvement dû au titre d'une année ne peut pas dépasser un montant égal au produit d'une partie des ressources comptabilisées au titre de l'exercice précédent par un taux défini pour chaque organisme. Les ressources prises en compte dans ce calcul sont les loyers et redevances, définis par les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 452-4, appelés au cours du dernier exercice clos, et les produits financiers. Pour chaque organisme, le taux est de 8 %. Le cas échéant, il est minoré par le taux de croissance moyen sur les cinq derniers exercices du nombre de logements sur lesquels l'organisme détient un droit réel, à l'exception des logements acquis auprès d'un autre organisme d'habitations à loyer modéré. »

« 3° La deuxième phrase du troisième alinéa est ainsi modifiée :

« a) Les mots : « à l'exception du capital souscrit appelé non versé, », « à l'exclusion des subventions à recevoir » et « et pour risques et charges » sont supprimés ;

« b) Après le mot : « réserves », sont insérés les mots : « à l'exception de la part des plus-values nettes sur cessions immobilières correspondant aux ventes de l'année de logements à des particuliers » ;

« c) Après le mot : « an », sont insérés les mots : « à l'origine » ;

« d) Après le mot : « intérêts », sont insérés les mots : « courus, à l'exception des intérêts » ;

« 4° Le quatrième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le prélèvement sur le potentiel financier dû pour une année est égal au produit du nombre de logements au sens des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 452-4 sur lesquels l'organisme détient un droit réel au 31 décembre de l'année précédente par une contribution moyenne par logement.

« La contribution moyenne par logement résulte de l'application à la moyenne des potentiels financiers par logement des cinq exercices précédents du barème progressif par tranche suivant :

• «

• Tranches du potentiel
financier par logement

• Taux de
contribution

• • < 1 000 euros

• 0 %

• • De 1 000 à 1 500 euros

• 4 %

• • De 1 500 à 2 000 euros

• 8 %

• • De 2 000 à 3 000 euros

• 12 %

• • > 3 000 euros

• 16 %

« Le potentiel financier par logement de chacun des cinq exercices précédents est obtenu en divisant le potentiel financier au 31 décembre de l'exercice par le nombre de logements au sens des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 452-4 sur lesquels l'organisme détient un droit réel à la même date. ».

« 5° À la première phrase du cinquième alinéa, les mots : « 30 novembre de chaque année » sont remplacés par les mots : « 31 août de l'année au titre de laquelle le prélèvement est dû ».

« 6° Au sixième alinéa, les mots : « de prévention ou » sont supprimés et la phrase est complétée par les mots : « ou en a bénéficié dans les cinq années précédant cette date ».

« 7° Après le mot : « pénalité », la fin de la deuxième phrase du septième alinéa est ainsi rédigée : « égale à 50 % des droits éludés par logement dans la limite de 300 € par logement au sens des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 452-4 sur lesquels l'organisme détient un droit réel au 31 décembre de l'année précédente. »

« 8° Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Un organisme d'habitation à loyer modéré ou une société d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux qui contrôle de manière exclusive ou conjointe, dans les conditions prévues par l'article L. 233-16 du code de commerce, un ou plusieurs organismes ou sociétés peut opter, avec leur accord, pour une détermination consolidée du potentiel financier par logement. Cette option est valable pour une période de cinq ans.

« Le résultat consolidé est obtenu en faisant la somme algébrique des ressources, des emplois et des logements de chaque organisme ou société.

« Chaque membre du groupe est redevable de la contribution calculée en multipliant le nombre de logements des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 452-4 du présent code sur lesquels il détient un droit réel par le potentiel financier par logement du groupe. »

Le sous-amendement n° 300 présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Abelin, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

À l'alinéa 7, supprimer les mots :

« , à l'exclusion des subventions à recevoir ».

Sous-amendement n° 301 présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Abelin, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

I. - Rédiger ainsi la dernière colonne du tableau de l'alinéa 14 :

• Taux de
contribution

• 0 %

• 0 %

• 0 %

• 0 %

• 16 %

II. - Après l'alinéa 14, insérer l'alinéa suivant :

« L'ensemble des organismes d'habitations à loyer modéré est assujetti au tiers des taux de droit commun de l'impôt sur les sociétés ».

Sous-amendement n° 302 présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Abelin, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

I. - Rédiger ainsi la dernière colonne du tableau de l'alinéa 14 :

• Taux de
contribution

• 0 %

• 0 %

• 0 %

• 0 %

• 16 %

II. - Après l'alinéa 14, insérer l'alinéa suivant :

« Il est institué une taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux d'immeubles et de droits immobiliers perçus par les collectivités locales sur les seuls logements et visés au 1° du 1. de l'article 1584 du code général des impôts ainsi qu'au 1° de l'article 1595 bis du même code. Son taux est fixé à 0,15 %. ».

Le sous-amendement n° 303 présenté par M. de Courson, M. Benoit, M. Abelin, M. Salles et M. Lagarde, est ainsi libellé :

I. - Rédiger ainsi la dernière colonne du tableau de l'alinéa 14 :

• «

• Taux de
contribution

• • 0 %

• • 0 %

• • 0 %

• • 0 %

• • 16 %

II - Compléter cet amendement par les deux alinéas suivants :

« II. - À la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article 200 B du code général des impôts, le taux : « 16 % » est remplacé par le taux : « 22,80 % ».

« III. - Les dispositions du présent II s'appliquent à compter du 1 er janvier 2012. »

L'amendement n° 59 présenté par M. Scellier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Substituer aux alinéas 1 à 10 les quatorze alinéas suivants :

« I. - L'article L. 423-14 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :

« 1° Au premier alinéa, l'année : « 2010 » est remplacée par l'année : « 2011 » et après le mot : « sur », la fin du même alinéa est ainsi rédigée : « leur potentiel financier » ;

« 2° Le deuxième alinéa est supprimé ;

« 3° La deuxième phrase du troisième alinéa est ainsi modifiée :

« a) Les mots : « à l'exception du capital souscrit appelé non versé », « à l'exclusion des subventions à recevoir », « et pour risques et charges » sont supprimés ;

« b) Après le mot : « intérêts », sont insérés les mots : « courus, à l'exception des intérêts » ;

« 4° Le quatrième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le prélèvement sur le potentiel financier dû pour une année est égal au produit du nombre de logements et d'équivalents logements sur lesquels l'organisme détient un droit réel au 31 décembre de l'année précédente par une contribution moyenne par logement.

« La contribution moyenne par logement résulte de l'application à la moyenne des potentiels financiers par logement des cinq exercices précédents du barème progressif par tranche suivant :

• Tranches du potentiel
financier par logement

• Taux de
contribution

• < 1 000 euros

• 0 %

• De 1 000 à 1 500 euros

• 4 %

• De 1 500 à 2 000 euros

• 8 %

• De 2 000 à 3 000 euros

• 12 %

• > 3 000 euros

• 16 %

« Le potentiel financier par logement de chacun des cinq exercices précédents est obtenu en divisant le potentiel financier au 31 décembre de l'exercice par le nombre de logements et d'équivalents logements sur lesquels l'organisme détient un droit réel à la même date. » ;

« 5° À la première phrase du cinquième alinéa, la date : « 30 novembre » est remplacée par la date : « 31 août » ;

« 6° Au sixième alinéa, les mots « de prévention ou » sont supprimés ;

« 7° Après le mot : « locatif », la fin de la deuxième phrase du septième alinéa est ainsi rédigée : « sur lesquels ils détiennent un droit réel ».

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour présenter l'amendement n° 224.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Je serai bref, madame la présidente, puisque j'ai déjà présenté la préconisation du Gouvernement. Il s'agit d'une contribution assise sur le potentiel financier des bailleurs sociaux, taxe progressive dont le taux varie suivant les tranches de potentiel par logement : à moins de 1 000 euros, il y a exonération ; entre 1 000 et 1 500 euros, le taux de contribution est de 4 % et va jusqu'à 16 %, au-delà de 3 000 euros.

Le Gouvernement a repris la proposition de la commission dans une rédaction globale, en intégrant certaines propositions issues des sous-amendements. Nous avons ainsi sorti la vente HLM de l'assiette car il ne nous semblait pas logique de la taxer alors que nous souhaitons l'encourager.

Par ailleurs, nous avons établi un plafonnement. Il nous paraissait en effet important d'éviter une contribution trop élevée pour certains bailleurs, à la suite notamment d'une proposition d'Olivier Carré. Les simulations informatiques auxquelles nous avons procédé montaient jusqu'à 13 % du chiffre d'affaires pour certains bailleurs sociaux, ce qui nous est apparu comme un taux confiscatoire. Nous avons donc préconisé une limitation à 8 % au maximum pour les organismes ayant un potentiel financier très fort. Pour aboutir aux 340 millions évoqués, nous avons eu l'idée d'augmenter la deuxième contribution au bénéfice de la CGLLS au titre, cette fois-ci, de l'autofinancement.

Deux autres amendements complémentaires seront examinés dans quelques instants, mais ils reposent sur la même stratégie globale, qui correspond aux amendements présentés par la commission des finances.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n° 59.

M. François Scellier, rapporteur spécial . Lorsque nous avons décidé de proposer cet amendement, adopté par la commission des finances, c'était dans un objectif précis. Nous estimions en effet que l'article 99 reposait sur un dispositif trop homogène qui ne tenait pas compte de la diversité des situations financières.

L'amendement est fondé sur le renforcement du prélèvement assis sur le potentiel financier des organismes d'HLM, avec progressivité de la contribution par application d'un barème.

Il s'agissait également pour nous de créer une véritable mutualisation entre organismes bénéficiant d'un parc amorti et ceux ayant besoin de développer leur parc pour répondre aux besoins.

À ce propos, j'indique à nos collègues de l'opposition qu'ils ne sont pas les seuls à savoir ce qu'est la réalité du monde HLM. Ce n'est pas parce que nous siégeons de l'autre côté de l'hémicycle que nous n'en connaissons pas les difficultés. C'est même la raison pour laquelle, nous avions, dès le début, indiqué au secrétaire d'État que la proposition du Gouvernement ne nous convenait pas.

Nous avons cherché la proposition la plus susceptible de répondre à l'objectif d'une meilleure mutualisation. Les échos qui nous sont revenus depuis l'adoption de l'amendement en commission des finances, y compris de la part de collègues de notre sensibilité politique, ont bien montré qu'un véritable besoin de mutualisation se faisait sentir. Des organismes, bien gérés, se trouvent sur un territoire n'ayant plus besoin de logements sociaux et disposent de finances dans une situation merveilleuse. Or il s'agit d'argent public et il n'y a pas de raison qu'il ne soit pas mis à la disposition d'autres organismes pour répondre à leurs besoins. Dans le Val d'Oise, monsieur Pupponi, on sait ce que sont les besoins de l'office départemental.

Toutes ces raisons nous ont conduits à proposer cet amendement, adopté par la commission des finances. Il nous est toutefois apparu tout à fait perfectible. Jean-Yves Le Bouillonnec ou Marcel Rogemont, je ne sais plus, a souligné que nous aurions dû rencontrer des représentants de l'USH. Sachez que c'est ce que nous avons fait.

M. Marcel Rogemont. Entre deux portes !

M. François Scellier, rapporteur spécial . Nous avons cherché à aboutir à une mutualisation qui soit moins imparfaite que celle que nous proposions.

Cela dit, nous sommes prêts à retirer l'amendement de la commission des finances dans la mesure où l'amendement du Gouvernement reprend pour l'essentiel ce que nous avions prévu en atténuant la rigueur du prélèvement, selon les modalités exposées par le ministre.

(L'amendement n° 59 est retiré.)

Mme la présidente. L'amendement étant retiré, monsieur Scellier, pourriez-vous nous donner l'avis de la commission sur l'amendement du Gouvernement ?

M. François Scellier, rapporteur . Nous sommes par conséquent favorables à l'amendement du Gouvernement qui a pour mérite de régler certains problèmes qui restaient pendants dans celui de la commission.

Mme Valérie Boyer. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson pour présenter les sous-amendements n os 300, 301, 302 et 303.

M. Charles de Courson. Le sous-amendement n° 300 tend à exclure les subventions à recevoir de l'assiette.

M. Marcel Rogemont. C'est le minimum !

M. Charles de Courson. D'abord, dans la comptabilité des HLM, ces subventions ne représentent que des espoirs.

M. Marcel Rogemont. Exactement !

M. Charles de Courson. Les organismes ne reçoivent pas toujours le montant qu'ils ont inscrit et sont alors contraints de le réajuster.

Ensuite, il ne faut pas décourager les aides des tiers, notamment des collectivités territoriales.

M. Marcel Rogemont. Et voilà !

M. Charles de Courson. Le texte du Gouvernement demande donc à être peaufiné de manière à sortir ces subventions du calcul du fonds de roulement.

Les autres sous-amendements tendent à modifient le texte du Gouvernement en ne taxant que la tranche dite supérieure à 16 % de ceux qui ont des fonds de roulement très élevés, c'est-à-dire plus de 3 000 euros par logement.

Le sous-amendement n° 301 apporterait un complément par un impôt sur les bénéfices égal au tiers du droit commun. Cette piste, beaucoup ont pensé qu'elle se heurtait au problème du statut des organismes d'HLM, qui sont des SIG au sens du droit communautaire. Or, dès lors qu'on leur applique un taux super réduit, puisque c'est le taux de droit commun réduit des deux tiers, on peut continuer à défendre la thèse que l'essentiel des organismes d'HLM ont une activité de SIG.

M. Alain Cacheux. Ce sera le début de la fin !

M. Charles de Courson. Le sous-amendement n° 302 poursuit la même idée, mais le complément d'une centaine de millions provient d'une augmentation de 0,15 % des DMTO, d'après nos calculs, uniquement sur la partie logement. Leur taux passerait ainsi de 4,80 % à 4,95 %.

Quant au sous-amendement n° 303, il consiste à porter le taux de taxation des plus-values immobilières de 16 % à 22,80 %, ce qui représente une augmentation considérable de 6,80 %.

Bien entendu, ces propositions sont lancées pour animer le débat. Il est toujours possible de les combiner. J'invite vraiment le Gouvernement à ne pas persister dans son erreur. Il a déjà renoncé à en faire une, c'est bien, mais la deuxième solution qu'il préconise n'est pas encore équilibrée.

Selon le secrétaire d'État, le logement social doit financer le logement social. Or je rappelle qu'il n'y a de logement social que parce qu'il y a des aides de l'État essentiellement.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Bien sûr.

M. Charles de Courson. Le Gouvernement n'a pas tort en indiquant que les organismes ne sont pas propriétaires de ces biens de mainmorte, comme on dirait en droit du Moyen-Âge, que sont les logements.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Nous sommes d'accord.

M. Charles de Courson. Que l'État demande un effort à ceux qui ont accumulé des excédents excessifs au regard de leurs besoins, c'est fondé. D'ailleurs, M. Rogemont, très élégamment, l'a reconnu, contrairement à M. Le Bouillonnec qui reste trop bouillonnant.

M. Marcel Rogemont. Vous, vous ne l'êtes pas assez !

M. Charles de Courson. Vous êtes en bonne voie pour devenir raisonnable, monsieur Rogemont. (Sourires.)

M. Marcel Rogemont. C'est la troisième voie !

M. Charles de Courson. Reste à fixer le niveau de la barrière. À 3 000 euros par logement, un peu moins de 100 organismes sur 550 seraient concernés, ce qui me paraît tout à fait raisonnable.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ces sous-amendements ?

M. François Scellier , rapporteur spécial . Le rapporteur a donné un avis favorable personnel à l'amendement du Gouvernement qui lui semblait présenter un certain équilibre. Dans ces conditions, j'émets un avis défavorable aux sous-amendements présentés par M. de Courson.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Les augmentations de taxation des plus-values immobilières et de DMTO reviennent à opérer un transfert de l'accession à la propriété vers le logement social. J'y suis totalement défavorable.

Les deux autres sous-amendements reprennent les trois amendements que l'Assemblée a rejetés tout à l'heure, à deux nuances près : la préconisation concernant l'impôt sur les sociétés et la sortie de l'assiette des subventions à recevoir.

S'agissant de l'IS, vous êtes, me semble-t-il, en contradiction avec l'argumentaire que vous développiez tout à l'heure, monsieur de Courson. Selon vous, la contribution que nous proposons prend à 70 % des organismes, ce que vous jugez de trop. Or vous proposez un assujettissement à l'IS qui, à 16 %, toucherait 100 % des organismes.

M. Alain Cacheux. Ils ne sont pas tous bénéficiaires.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Vous élargissez donc potentiellement, en fonction de leurs bénéfices, bien évidemment, le nombre des contributeurs.

Je suis fondamentalement défavorable au retrait des subventions à recevoir de l'assiette taxable. Dans le potentiel financier des organismes figure l'ensemble de leurs ressources à long terme. Les subventions en font partie.

M. Marcel Rogemont. Elles en sont sorties dans la loi MOLLE !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Si vous les sortez, pourquoi ne pas sortir les loyers et tout le reste ?

M. Pierre Gosnat. Qui vous dit qu'il y aura les mêmes subventions les années suivantes ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Pour reprendre une observation d'Oliver Carré, si nous avions poussé les choses, nous aurions dû prendre le potentiel financier à terminaison pour avoir l'analyse économique la plus fine qui soit. Malheureusement, sur le plan comptable, on ne sait pas le faire. Les subventions à recevoir sont bien des éléments du potentiel financier à long terme des bailleurs sociaux, et il n'y a pas de raison de les exonérer.

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Le débat se déroule de façon sympathique et agréable mais sur la base de quelle étude d'impact toutes ces propositions ont-elles été construites, monsieur le secrétaire d'État ?

M. Alain Cacheux. C'est l'improvisation !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Elle est à disposition.

M. Marcel Rogemont. Vous nous le dites maintenant ; c'est un peu facile ! Il faudrait peut-être que je demande une suspension de séance pour l'étudier.

M. Alain Cacheux. Oui, suspension !

M. Marcel Rougemont. Nous sommes contraints de vous croire sur parole. Je le dis net et clair, ce n'est pas une façon de travailler sur des questions aussi difficiles.

Je relève, dans l'exposé sommaire, que le dispositif s'appuie sur le prélèvement sur les « dodus-dormants » mis en place par la loi du 25 mars 2009. Encore une fois, vous laissez accroire que les organismes d'HLM sont « pétés de thunes » Désolé, ce n'est pas la réalité et je trouve cela scandaleux. Ces « dodus-dormants » n'ont pas fait l'objet d'étude d'impact. On ne sait ni de qui ni de quoi l'on parle, mais on leur jette l'anathème devant tout le monde.

M. de Courson parle d'or à propos des subventions à recevoir. D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, dans la loi MOLLE, sont-elles incluses dans le calcul du potentiel financier des organismes ? Je vous le dis : non !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Et cela a rapporté zéro !

M. Marcel Rougemont. La contribution complémentaire à la CGLLS ne rapporte rien pour une autre raison, dont nous pourrons discuter si vous le voulez.

M. Olivier Carré. Laquelle ?

M. Marcel Rougemont. Pas maintenant, je n'ai pas fait mon étude d'impact à l'appui de ce que j'aurais à vous dire !

M. de Courson, donc, a raison d'estimer que les subventions à recevoir ne peuvent pas figurer dans le potentiel financier. Comme vous le disiez, ce sont éventuellement des fonds propres pour demain. Vous allez donc taxer aujourd'hui les fonds propres à recevoir éventuellement demain. Ce n'est pas normal.

Vous prétendez attendre 340 millions aujourd'hui. Et demain, combien ? Qui décidera ? Si j'ai bien compris, ce que je trouve scandaleux - Jean-Yves Le Bouillonnec a déjà levé un coin de voile sur la perfidie de vos intentions -, vous allez déposer dans quelques instants un amendement laissant entendre qu'au moins une partie de ce hold-up sur les organismes d'HLM sera opérée par arrêté, sans débat ici.

M. Yves Censi. On se calme !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le Parlement ne fait pas de hold-up : il vote une loi !

M. Marcel Rougemont. Le Parlement ne fait pas de hold-up : il l'organise.

J'attends votre réponse : combien sera perçu l'année prochaine, en 2012, en 2013, lorsqu'il n'y aura plus assez d'argent avec le 1 % logement pour financer ? Lorsque vous mettrez encore moins d'argent pour le logement locatif public ? Demain, vous allez pomper allègrement les fonds propres des HLM pour les recycler à votre guise, à la place des financements de l'État, dans les organismes d'HLM.

Alors, demain, combien, qui décidera, qui paiera ? Faire payer le monde HLM à la place de l'État est tout simplement scandaleux.

Quant à l'impôt sur les sociétés que notre collègue évoquait...

Mme Laure de La Raudière et Mme Valérie Boyer. Cela suffit !

M. Marcel Rougemont. Je peux répondre à M. de Courson, tout de même ! Voilà maintenant qu'on veut m'interrompre !

Mme la présidente. Terminez rapidement, cher collègue. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Marcel Rougemont. Je vous remercie, madame la présidente.

Mme Valérie Boyer. À quoi sert le règlement ?

M. Marcel Rougemont. Le problème majeur des organismes d'HLM pour l'impôt sur les sociétés, tient au fait que la plupart d'entre eux ne distribuent pas de dividendes. L'impôt sur les sociétés a vocation à s'appliquer aux entreprises dites normales, pas aux organismes d'HLM.

Voilà ce que je voulais souligner, et je répète que j'attends les études d'impact et des réponses très précises pour demain.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Gosnat.

M. Pierre Gosnat. Nous assistons, depuis quelques minutes, au bricolage en direct de la position du Gouvernement, de celle du président de la commission et de la proposition de M. de Courson. Néanmoins nous restons dans la même logique : on tape toujours dans la caisse des organismes d'HLM pour assurer le désengagement de l'État.

Peut-être que 70 % ou 75 % des organismes seront taxés au lieu de 100 %. Peut-être que les offices seront moins taxés que les ESH. Quand bien même, une simulation pour l'office départemental du Val-de-Marne, Valophis, aboutit à une taxation d'à peu près 10 millions. Est-ce un organisme riche qui roule sur l'or ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr que non !

M. Pierre Gosnat. Ne doit-il pas faire face à des problèmes considérables dans notre département, comme d'autres d'ailleurs ? J'ai entendu notre collègue Jean-Pierre Abelin émettre quelques réserves au regard de projections faites sur sa région et je pense que nous pourrions tous le faire.

D'une façon générale, la taxation proposée est totalement inadéquate, car elle aura les mêmes conséquences que la contribution sur les revenus locatifs, à savoir moins de constructions, moins d'entretien, moins de crédits pour la mise aux normes des bâtiments.

Selon votre logique, les bailleurs sociaux reposeraient sur des tas d'or. Or les offices connaissent plutôt beaucoup de difficultés.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ils seront exonérés !

M. Pierre Gosnat. Je pense notamment à l'office HLM d'Ivry.

Ceux qui n'ont pas eu la possibilité de construire des logements pendant plusieurs années sont un peu moins endettés et ont un peu de trésorerie. Cela étant, j'aimerais savoir combien d'offices sont soumis actuellement à un plan de redressement.

Vous allez dessaisir les offices de leur capacité de construire, de réhabiliter des logements. En fait, vous êtes en train de détruire totalement le mouvement social HLM.

M. Alain Cacheux. C'est leur objectif !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ce que vous dites est totalement ridicule, monsieur Gosnat !

M. Pierre Gosnat. Beaucoup de députés, de gauche, comme de droite, connaissent la même réalité que moi, s'agissant des offices HLM. Sans les villes qui ont financé massivement les réhabilitations de logements viales PALULOS qui n'existent plus maintenant et qui ont équilibré le budget des offices d'HLM, ces organismes n'existeraient plus.

Mme Valérie Boyer. Cela fait des heures que vous répétez la même chose !

M. Pierre Gosnat. Je sais que vous souhaitez parvenir à une concentration très forte des organismes d'HLM et en détruire quelques centaines. Nous ne pourrons pas vous suivre.

Ces organismes ne sont pas si riches que cela puisque vous leur conseillez de vendre des logements pour équilibrer leurs budgets et d'appliquer des surloyers. Vous voulez vous désengager totalement, faire en sorte qu'une partie du mouvement du logement social disparaisse au bénéfice du secteur privé. C'est cela la réalité aujourd'hui. C'est la France des propriétaires dont on parle.

M. Alain Cacheux. Très bien !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. N'importe quoi !

M. René-Paul Victoria. Madame la présidente, je demande la parole...

(Les sous-amendements n os 300, 301, 302 et 303, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 224...

M. René-Paul Victoria. Madame la présidente, je demande la parole.

Mme la présidente. Mais le vote est commencé !

M. René-Paul Victoria. Vous avez dit, madame la présidente, que l'on mettait d'abord en discussion les sous-amendements puis l'amendement du Gouvernement. Comme je n'étais pas intéressé par les sous-amendements, j'ai attendu la discussion sur l'amendement.

Mme la présidente. Vous avez la parole, monsieur Victoria.

M. René-Paul Victoria. Monsieur le secrétaire d'État, cet après-midi, j'ai évoqué la question des bailleurs sociaux ultramarins. Vous m'avez répondu, à juste titre, que, compte tenu de la situation spécifique de l'outre-mer, les bailleurs seront exonérés de la contribution. Je souhaite que vous me réaffirmiez que tel sera bien le cas.

Pour ma part, je voterai l'amendement n° 224 rectifié.

Mme la présidente. Monsieur Victoria, j'avais indiqué que l'amendement et les sous-amendements seraient discutés en même temps. Cela dit, il était normal que vous repreniez la parole, car vous avez soulevé un point important.

(L'amendement n° 224 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n os 267 et 60 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 267 présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Substituer aux alinéas 14 à 19 les cinq alinéas suivants :

« 2° Après la référence : « L. 423-14 », la fin de l'article L. 452-1-1 est ainsi rédigée : « et de la fraction mentionnée au quatrième alinéa de l'article L. 452-4-1. Ce fonds contribue au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d'habitation à loyer modéré et aux sociétés d'économie mixte, ainsi qu'à la rénovation urbaine.

« Une commission composée majoritairement de représentants de l'État arrête les emplois du fonds.

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités de mise en oeuvre du fonds, notamment la composition et le fonctionnement de la commission. »

« 3° Après le troisième alinéa de l'article L. 452-4-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Une fraction de ce montant, déterminée par le même arrêté, alimente le fonds prévu à l'article L. 452-1-1. » ».

II. - En conséquence, à l'alinéa 13, substituer à la référence :

« L. 452-1-2 »

la référence :

« L. 452-1-1 ».

L'amendement n° 60 rectifié présenté par M. Scellier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances et M. Carré, est ainsi libellé :

I. - Substituer aux alinéas 14 à 19 les cinq alinéas suivants :

« 2° L'article L. 452-1-1 est ainsi modifié :

« 1° La dernière phrase est ainsi rédigée : « Ce fonds contribue au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d'habitation à loyer modéré et aux sociétés d'économie mixte, ainsi qu'à la rénovation urbaine. » ;

« 2° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Une commission composée majoritairement de représentants de l'État arrête les emplois du fonds.

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités de mise en oeuvre du fonds, notamment la composition et le fonctionnement de la commission. ».

II. - En conséquence, à l'alinéa 13, substituer à la référence :

« L. 452-1-2 »,

la référence :

« L. 452-1-1 ».

L'amendement n° 60 fait l'objet du sous-amendement n° 226 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Après l'alinéa 6, insérer les deux alinéas suivants :

« 3° Après le troisième alinéa de l'article L. 452-4-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Une fraction de ce montant, déterminée par le même arrêté, alimente le fonds prévu à l'article L. 452-1-1. » »

Monsieur Scellier, retirez-vous l'amendement n° 60 rectifié ?

M. François Scellier, rapporteur spécial . Oui, madame la présidente !

(L'amendement n° 60 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 267.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. J'ai présenté en même temps les amendements n os 224 rectifié, 267 et 268, qui forment un ensemble.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous voterons contre l'amendement n° 267.

J'appelle en effet l'attention de l'Assemblée sur le fait que, à l'occasion de l'examen de cet amendement, le Gouvernement introduit subrepticement la modification des conditions dans lesquelles sont utilisés les fonds de la CGLLS.

M. Pierre Gosnat. Exactement !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur Scellier, je vous tiendrai à l'écart de la critique que je vais formuler à l'encontre de l'amendement n° 267, car votre amendement n'était pas tout à fait le même.

Le Gouvernement introduit une disposition qui lui donne le début de la fabrication de la clé pour que les choses continuent dans l'avenir. C'est, en effet, par arrêté que le Gouvernement va ordonner l'utilisation des fonds de la CGLLS et la répartition entre les organismes et le renouvellement urbain. Voilà une bien mauvaise manière de procéder.

M. Alain Cacheux. Une de plus !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est pourquoi je souhaiterais que le Gouvernement se rallie à l'amendement de M. Scellier.

Avec cette disposition, le Gouvernement introduit une nouveauté qui entame directement le caractère paritaire de l'organisme. Même si l'État a toujours été là en veille, y compris dans les contingences de la MIILOS, la règle selon laquelle le débat était ouvert a toujours prévalu. Si un ministre peut indiquer demain, par arrêté, de quelle manière les fonds collectés sont répartis entre les organismes bailleurs - en quelque sorte, l'aide à la pierre - et la rénovation urbaine, alors, on ouvre la boîte de Pandore, la CGLLS servant exclusivement, à terme, à appliquer les décisions du Gouvernement, quel qu'il soit d'ailleurs. Ce n'est pas acceptable, car la CGLLS est constituée de fonds qui servent d'instruments de garantie à l'ensemble des bailleurs sociaux et que nombre d'entre nous ont déjà eu à apprécier.

Les deux amendements ne sont donc pas les mêmes, le Gouvernement précisant que : « Une fraction de ce montant, déterminée par ce même arrêté, alimente le fonds prévu à l'article L. 452-1-1. ». Ce processus sera très mal vécu par les bailleurs sociaux. On devrait être attentif à ne pas continuer à faire ce que j'estime être de la provocation si l'on n'est pas dans la capacité de débattre avec eux.

Mes chers collègues, il ne faut pas voter cette petite bizarrerie, qui sera lourde de conséquences.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Monsieur Le Bouillonnec, l'amendement n° 267 est légèrement différent de l'amendement n° 60 rectifié de la commission des finances, puisqu'il réintègre la partie de financement complémentaire que j'ai évoquée précédemment sur l'autofinancement.

Comme je l'ai déjà indiqué, avec l'amendement n° 224 rectifié qui vient d'être adopté, nous fixons un taux maximum correspondant à 8 % du chiffre d'affaires des bailleurs sociaux, le produit de ce prélèvement étant estimé à 260 millions d'euros.

Avec l'amendement n° 267, le Gouvernement se donne la possibilité de décider, par arrêté - ce qui ne change rien du tout par rapport au droit actuel puisque cela existe déjà, contrairement à ce que vous dites, monsieur Le Bouillonnec -, d'une deuxième contribution basée sur la part autofinancement des organismes de logement social. Je vous rappelle que deux contributions sont d'ores et déjà versées à la CGLLS. La première est assise sur les loyers et la seconde compte elle-même deux parts, une part autofinancement et une part nombre de logements.

Pour répondre à l'objectif initial du Gouvernement de mettre en place une péréquation à hauteur de 340 millions d'euros, nous vous proposons d'agir sur la part autofinancement des organismes de logement social. Cela vous montre que nous avons écouté le Parlement, notamment Charles de Courson, puisque, sur les 340 millions attendus, 260 millions proviendront d'une taxe, le reste étant récupéré toujours sur le monde HLM, mais vial'autofinancement.

M. Alain Cacheux. Vous récupérez autrement !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. On taxe d'un côté sur le flux des recettes, de l'autre sur la richesse accumulée par les bailleurs sociaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le secrétaire d'État, vous venez de confirmer que le Gouvernement pourra, par arrêté,...

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C'est déjà le cas !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ...continuer à maintenir et à faire modifier la contribution des bailleurs.

Cela signifie que le système que nous mettons en place pourra être changé, et que la décision appartiendra au Gouvernement. Celui-ci pourra donc augmenter à sa guise le prélèvement sur la deuxième contribution.

Mes chers collègues, en votant cet amendement, nous donnons un premier tour de canif à la pérennisation d'un dispositif et nous rendons service au président de l'ANRU qu'est M. Hamel, mais de mauvaise manière.

(L'amendement n° 267 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, n os 268 et 61 rectifié.

L'amendement n° 268 est présenté par le Gouvernement0

Et l'amendement n° 61 rectifié est présenté par M. Scellier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances et M. Carré.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

À la dernière phrase de l'alinéa 21, substituer au mot :

« deuxième »

le mot :

« troisième ».

Monsieur le secrétaire d'État a déjà présenté l'amendement n° 268.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l'amendement n° 61 rectifié.

M. François Scellier, rapporteur spécial . Il s'agit à nouveau d'un démembrement de l'amendement initial. Nous retirons notre amendement étant donné que le Gouvernement présente le même.

(L'amendement n° 61 rectifié est retiré.)

(L'amendement n° 268 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, n os 146 et 159.

L'amendement n° 146 est présenté par M. Gosnat, M. Sandrier, M. Brard, Mme Amiable, M. Asensi, Mme Billard, M. Bocquet, M. Braouezec, Mme Buffet, M. Candelier, M. Chassaigne, M. Desallangre, M. Dolez, Mme Fraysse, M. Gerin, M. Gremetz, M. Lecoq, M. Muzeau, M. Daniel Paul et M. Vaxès.

Et l'amendement n° 159 est présenté par M. Le Bouillonnec, M. Brottes, M. Pupponi, M. Goldberg, M. Rogemont, M. Cacheux, M. Goua, M. Jean-Louis Dumont, M. Valax, Mme Maquet, Mme Robin-Rodrigo, M. Dumas, M. Jibrayel, M. Manscour, M. Villaumé, Mme Lepetit, Mme Darciaux, Mme Crozon et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« VII. - Au premier alinéa de l'article L. 445-1 du code de la construction et de l'habitation, la date : « 31 décembre 2010 » est remplacée par la date : « 1 er juillet 2011 ».

« VIII. - Après le mot : « années », la fin du deuxième alinéa du II bis de l'article 1388 bis du code général des impôts est ainsi rédigée : « 2011 à 2013 sous réserve de la signature de la convention d'utilité sociale avant le 1 er juillet 2011 ».

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 146 de M. Pierre Gosnat et de ses collègues.

M. Jean-Pierre Brard. La grande famille Gosnat, madame la présidente ! Avec notre collègue, c'est la troisième génération, après Venise Gosnat, puis Georges Gosnat, qui assura la réputation de notre collègue Gantier, auquel il attribua le titre de « Gantier des pétroles » qui lui est resté tout le temps qu'il a siégé à l'Assemblée. Mais ce n'est pas le sujet !

Cet amendement vise à repousser de six mois la signature par les organismes d'HLM des conventions d'utilité sociale. Ces conventions, instituées par la loi MOLLE, fixent les objectifs en matière de gestion du parc locatif des organismes, notamment par la détermination des volumes de vente du patrimoine HLM, mais aussi en termes de construction.

Or ces conventions, qui doivent être signées avant le 31 décembre 2010, ont été, pour la grande majorité d'entre elles, négociées avant l'annonce de la création d'une nouvelle taxe sur les offices, quelle que soit la façon dont celle-ci doit évoluer. Rappelons que cette taxe amputera globalement de 20 % les capacités d'autofinancement des organismes d'HLM. Son impact sera donc conséquent.

Il ne suffira pas d'imposer aux bailleurs sociaux d'accroître leurs ventes de logements pour compenser le milliard ainsi ponctionné. Vous le savez bien, les résultats de la vente des HLM - nous nous en réjouissons - sont bien en deçà de vos attentes, pour la simple raison que les locataires du parc social n'ont pas les moyens d'accéder à la propriété. Votre PTZ Plus, avec des conditions préférentielles pour les locataires achetant leur appartement HLM, n'y changera rien. Quand une famille vivant en HLM veut accéder à la propriété, ce n'est pas nécessairement là où elle est locataire. Par ailleurs, la vente d'un logement HLM a pour effet immédiat de retirer une unité du parc social.

J'en reviens à la question du conventionnement.

À cet égard nous sommes fermement opposés à la signature obligatoire de ces conventions, que nous avons combattues lors des discussions sur la loi MOLLE. Elles sont le collier que passe le Gouvernement au cou des offices, avec l'idée d'imposer sa politique de surloyer.

Nous proposons cependant un amendement de repli permettant aux offices de renégocier leur conventionnement pendant encore six mois. Cela nous semble être une proposition de nature à faire consensus, ce qui témoignerait d'une bonne volonté de la part du Gouvernement. Après avoir réservé l'essentiel de vos capacités d'écoute aux demandes des privilégiés, entendez un peu ceux qui parlent au nom des gens qui ne peuvent espérer un logement décent en dehors du parc social !

M. Pierre Gosnat. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 159.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous allons achever notre discussion alors que, sur certains territoires, le débat n'a pas encore commencé avec l'État : les conventions ont été préparées par les organismes, souvent adoptées par les conseils d'administration ; elles ont été transférées mais n'ont pas abouti.

Il serait absolument anormal que les organismes poursuivent la négociation de ces conventions d'utilité sociale en ignorant les conséquences du dispositif législatif qui sera adopté avec la loi de finances en fin d'année. Nous proposons donc un report de six mois pour leur permettre d'intégrer les conséquences qui résulteront de l'application des dispositifs, quels qu'ils soient.

La seconde partie de l'amendement est simplement la conséquence de la première concernant l'abattement de 30 % lié à la signature des CUCS et qui ne serait pas applicable s'il était maintenant au 31 décembre.

Il serait de bon aloi de permettre au moins aux organismes de refondre leurs argumentaires avant de signer.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François Scellier, rapporteur . L'objet de ces amendements a été clairement exposé par nos collègues. Ils n'ont pas été présentés en commission des finances mais, à titre personnel, j'émets un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis favorable. Ce que l'Assemblée est en train de voter ce soir modifie en effet l'équilibre des CUS ou peut en tout en cas avoir des conséquences sur elles. Il nous paraît donc logique de prolonger le délai de leur signature de six mois.

Je profite de ma dernière intervention ce soir pour souligner que, contrairement à ce que les députés de l'opposition ont pu prétendre, il ne s'agit pas d'un combat entre le Gouvernement et le monde HLM.

M. Alain Cacheux. Si !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Nous sommes en train d'essayer de monter, avec le monde HLM, un nouveau modèle économique. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Marcel Rogemont. Dans lequel vous ne financez plus rien !

M. Yves Censi. Laissez-le parler !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ce nouveau modèle repose sur la mutualisation au sein du monde HLM. Si, en accord avec ce dernier, nous avons souhaité regarder comment pousser à la constitution de groupes HLM, si nous avons accepté l'idée d'élargir la possibilité des prêts participatifs, c'est justement pour organiser la mutualisation.

M. Marcel Rogemont. C'est un écran de fumée !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Je sais qu'il arrive parfois, en politique, qu'on se lance des noms d'oiseau, que l'on caricature, comme cela a été le cas avec les propos selon lesquels nous voudrions tuer le monde HLM et réduire à néant le logement social en France. La réalité est évidemment tout autre. Le Gouvernement sait qu'il a un partenariat stratégique avec le monde HLM et les collectivités locales, sans lequel nous n'arriverions pas à construire les logements sociaux dont la France a besoin.

M. jean-Yves Le Bouillonnec. Qu'est-ce que serait si ce n'était pas le cas !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Nous considérons simplement, eu égard à la situation des finances publiques, que nous devons examiner les moyens de créer de la valeur au sein du monde HLM. La vente HLM en fait partie ; la mutualisation est également une réponse possible. À nous d'être suffisamment intelligents et fins pour que cette mutualisation soit au bénéfice de ceux pour qui nous travaillons et que nous avons trop tendance à oublier : les demandeurs de logements sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Nous nous réjouissons évidemment que notre amendement soit accepté. Je n'ai qu'un regret, monsieur le secrétaire d'État, c'est que ce soit, comme vous l'avez dit, votre dernière intervention.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Du moins pour ce soir !

M. Jean-Pierre Brard. Je souhaite qu'elle soit suivie d'autres car nous pouvons considérer que cette acceptation est le début, comme dirait Bruno Bourg-Broc, de la rédemption. (Sourires.)

M. Alain Cacheux. C'est vraiment le tout début !

M. Jean-Pierre Brard. Après avoir tout refusé, que vous acceptiez enfin de faire un pas dans la bonne voie, c'est peut-être pour vous le chemin de Damas qui commence, mais vous êtes surtout en train de gravir la colonne de Valmy dans le bon sens, après avoir été du côté des coalisés !

Vous avez raison : il ne s'agit pas d'un combat, mais plutôt d'une lutte au corps à corps entre ceux qui représentent les privilégiés et ceux que nous défendons. C'est à mains nues que nous y allons, parce que nous n'avons que cela, avec la force de nos convictions.

M. Yves Censi. Et vous n'êtes pas nombreux !

M. Jean-Pierre Brard. C'est vrai, monsieur Censi. Néanmoins la valeur ne dépend pas du nombre mais de la force des idées, ne vous en déplaise.

Vous pouvez, monsieur le secrétaire d'État, habiller votre politique de toute la logorrhée, de tout le verbiage que vous voulez, « partenariat stratégique » et autre ; il reste la pénurie de logements sociaux et le poids de la quittance à l'arrivée.

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. En acceptant le report de la signature des conventions d'utilité sociale, le secrétaire d'État reconnaît de fait que, par le texte qu'il demande à l'Assemblée de voter, en circonscrivant le débat uniquement aux organismes d'HLM et à la péréquation, il cherche en réalité à enfumer le débat, car son seul but est de remplacer le financement de l'État par la ponction des locataires.

Il reconnaît que ce texte de loi perturbe l'organisation des offices d'HLM. L'un des plus grands dangers encourus par ces derniers tient à l'instabilité institutionnelle et financière créée par le Gouvernement : les règles du jeu sont changées en permanence ! Or un organisme d'HLM met en place un plan de patrimoine sur quinze ou vingt ans, et les dossiers de l'ANRU ne portent pas non plus sur deux ou trois ans, mais sur un temps bien plus long.

Il est difficile de signer des conventions d'utilité sociale dans la mesure où elles réservent toutes les contraintes aux organismes d'HLM tandis que l'État se dégage quasiment de tout engagement. Vous vous accordez le pouvoir de choisir, par arrêté, les montants de tels ou tels prélèvements.

Vous venez fort opportunément d'accepter le report que nous demandions. Il valait mieux ! J'aurais voulu voir, autrement, le résultat au 31 décembre : le nombre d'organismes d'HLM n'ayant pas signé de convention aurait été suffisamment élevé pour poser un véritable problème au Gouvernement.

M. Olivier Carré. Et les abattements ?

M. Marcel Rogemont . Le Gouvernement serait-il allé jusqu'à les supprimer ? Chiche !

Nous avons participé à ce débat en présentant d'autres solutions, mais vous essayez seulement de faire croire au public non averti que le débat se passe entre les organismes d'HLM et l'État, et que vous n'êtes pas là que pour pallier l'insuffisance des crédits d'État pour le logement social.

(Les amendements identiques n os 146 et 159 sont adoptés.)

(L'article 99, amendé, est adopté.)

Mme la présidente. Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à la ville et au logement.

Voir les débats sur l'ensemble de la mission « Ville et logement » :

- 8 novembre 2010 ;

- 8 novembre 2010 (suite).