ARTICLE 91 : SUPPRESSION DE L'EXONÉRATION DE COTISATION SUR L'AVANTAGE EN NATURE DANS LES HÔTELS, CAFÉS ET RESTAURANTS (HCR)
I. TEXTE DU PROJET DE LOI
I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 241-14 est abrogé ;
2° Le V de l'article L. 241-13 est ainsi modifié :
a) Les trois premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice des dispositions du présent article est cumulable avec les déductions forfaitaires prévues à l'article L. 241-18. » ;
b) Au dernier alinéa, les mots : « à l'exception des cas prévus aux 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « à l'exception du cas prévu à l'alinéa précédent ».
II. - Le présent article s'applique aux cotisations et contributions sociales dues à compter du 1 er janvier 2011.
II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 TOME III (2010-2011) ANNEXE 45
Observations et décision de la Commission :
Cet article met un terme à la réduction applicable aux cotisations sociales des employeurs du secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR), au titre de l'obligation de nourriture de leurs salariés.
I.- L'AN DERNIER, LE GOUVERNEMENT AVAIT REFUSÉ DE TIRER TOUTES LES CONSÉQUENCES DE L'OCTROI D'UNE TVA À TAUX RÉDUIT AU SECTEUR HCR
A.- PRÉSENTÉE COMME UNE CONTREPARTIE DE LA TVA A TAUX RÉDUIT, La suppression des aides à l'emploi avait permis l'an dernier une économie de 537,8 millions d'euros
La France a obtenu en mars 2009 l'accord de ses partenaires européens pour appliquer un taux réduit de TVA sur les activités intensives en main-d'oeuvre, dont la restauration. Les États généraux de la restauration, organisés le 28 avril, ont tiré les conséquences de cet accord : il a été annoncé que, de 19,6 %, le taux de la TVA sur la restauration serait ramené à 5,5 % en métropole et à 2,1 % dans les départements d'outre-mer dès le 1 er juillet.
Un « contrat d'avenir » a été conclu entre le Gouvernement et les professionnels de la branche, qui prévoyait la réduction du taux de TVA en contrepartie d'engagements de la profession en matière d'emploi, de rémunération, de formation, de protection sociale, d'investissement et de prix. Par rapport aux objectifs annoncés, le Rapporteur spécial juge globalement décevants les résultats du secteur HCR, comme en témoigne l'encadré ci-après.
Source : Secrétariat d'État chargé du Commerce, de l'Artisanat, des Petites et moyennes entreprises, du Tourisme, des Services et de la Consommation
En conséquence, l'article 22 de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques a procédé à l'extension de l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux ventes à consommer sur place, à l'exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques.
Le coût budgétaire brut de la baisse de la TVA à 5,5 % dans la restauration a été évalué à 3 milliards d'euros. En contrepartie de cette baisse, les aides directes au secteur des hôtels-cafés-restaurants (HCR) ont été supprimées par le même article de la loi du 22 juillet 2009, à savoir :
- une aide forfaitaire de 114,40 euros par équivalent temps plein au titre des salariés au SMIC pour lesquels l'employeur s'abstient de déduire un demi-avantage en nature nourriture (SMIC hôtelier) ;
- une aide représentant une proportion de 143 euros au titre des salariés dont la rémunération est supérieure au SMIC ;
- une « aide extra » lorsque l'employeur embauche ponctuellement des personnes en plus de son effectif permanent (limitée à 540 euros par entreprise et par an à raison de 1,50 euro par heure de travail aidée) ;
- une aide au conjoint collaborateur dans les HCR qui concerne les travailleurs non salariés prenant en charge les cotisations vieillesse, invalidité et décès de leur conjoint collaborateur, égale à la moitié de la cotisation minimale annuelle.
B.- UN AUTRE DISPOSITIF DE SOUTIEN DIRECT AU SECTEUR N'AVAIT PAS ÉTÉ REMIS EN CAUSE : L'EXONÉRATION DES PLATEAUX-REPAS
Ce dispositif de soutien, institué par la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997), permet aux employeurs des personnels des hôtels, cafés et restaurants mentionnés à l'article D. 141-7 du code du travail (dans son ancienne codification) de bénéficier d'une réduction des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales dues au titre de l'avantage en nature que constituent les repas fournis à leurs salariés, ou au titre de l'indemnité compensatrice allouée aux employés.
Les modalités de cette réduction sont désormais codifiées à l'article L.241-14 du code de la sécurité sociale. Celle-ci est égale à 28 % du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 du code du travail, soit 0,93 euro par repas fourni ou indemnisé pour la période du 1 er juillet 2009 au 30 juin 2010.
L'avantage en nature repas est comptabilisé selon des modalités spécifiques favorables au secteur HCR : son montant était de 3,31 euros par repas en 2010, contre 4,35 euros pour les autres secteurs. En application du V de l'article L. 241-13 du même code, la mesure n'est pas cumulable avec des taux spécifiques des assiettes ou des montants forfaitaires de cotisations, avec une autre exonération de cotisation patronale de sécurité sociale, à l'exception notable de la réduction générale de cotisations patronales de sécurité sociale. Le Rapporteur spécial souligne que cette particularité peut aboutir à une double exonération, ce qui paraît pour le moins fâcheux.
La redondance de cette mesure de soutien avait justifié sa remise en cause l'an dernier et motivé le dépôt d'un amendement de suppression adopté à l'unanimité par la commission des Finances mais rejeté par l'Assemblée, compte tenu de l'avis défavorable du Gouvernement. L'idée semble depuis - dans un contexte budgétaire marqué par la rigueur - avoir fait son chemin.
II.- L'ÉCONOMIE ATTENDUE GRÂCE À CETTE MESURE DE SUPPRESSION DEMEURE FAIBLE AU REGARD DU COÛT DE L'ABAISSEMENT DU TAUX DE TVA POUR LE SECTEUR HCR
A.- CONTRAIREMENT À LA MESURE TVA QUI CONSTITUE UNE MOINDRE RECETTE, CETTE MESURE D'EXONÉRATION DOIT FAIRE L'OBJET D'UNE COMPENSATION PAR L'ÉTAT
Selon les données de l'ACOSS, 533 700 salariés bénéficiaient en 2010 de cette exonération pour 93 800 établissements déclarants. L'exonération représente en moyenne une diminution des coûts salariaux mensuels de 24 euros.
La mesure faisait l'objet d'une compensation aux organismes de Sécurité sociale des pertes de recettes correspondantes, grâce à l'inscription de crédits sur le programme n° 103 de la mission Travail et emploi . Son coût était couvert par des crédits inscrits pour un montant de 150 millions d'euros en LFI 2009 et 2010, pour une consommation (fin 2009) de 158,4 millions d'euros.
B.- CEPENDANT L'ÉCONOMIE À ATTENDRE DU PRÉSENT ARTICLE EST DÉCEVANTE
Une éventuelle suppression entraînerait pour l'État une économie de 121 millions d'euros en 2011, du fait d'un reliquat important (40,42 millions d'euros) de compensation à verser au titre de 2010, puis de 166 millions d'euros à l'horizon 2012.
Ces montants paraissent bien modestes au Rapporteur spécial, comparés au coût de 3,13 milliards d'euros de l'abaissement du taux de TVA dans le secteur. Néanmoins, il soutiendra le principe de cette suppression et l'adoption du présent article.
L' alinéa 1 (I) abroge l'article L. 241-14 du code de la sécurité sociale, qui prévoit la réduction de cotisations sociales et en organise les modalités.
En outre, les alinéas 2 à 4 (1° du II) procèdent à une réécriture du V de l'article L. 241-13 afin de mettre fin à la possibilité de cumuler cette exonération avec d'autres, devenue sans objet. L' alinéa 5 (2° du II) prévoit une mesure de coordination au même article.
L' alinéa 6, enfin, ajouté à la demande du Conseil d'État, fixe les modalités d'entrée en vigueur du présent article, en renvoyant celle-ci au 1 er janvier 2011. Toute ambiguïté quant à l'application de cet article entre la publication de la loi de finances et la fin de l'année 2010 est ainsi levée.
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La Commission adopte l'article 91 sans modification .