III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 9 NOVEMBRE 2010
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IV. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Écologie, développement et aménagement durables
Article 70
Au premier alinéa du b du II de l'article 124 de la loi de finances pour 1991 (n° 90-1168 du 29 décembre 1990), le taux : « 4,6 € » est remplacé par le taux : « 7 € ».
V. RAPPORT SÉNAT N° 111 TOME III (2010-2011) ANNEXE 10
Commentaire : le présent article propose de relever de 4,6 à 7 euros le taux plafond d'une des composantes de la taxe hydraulique, affectée à l'établissement public Voies navigables de France (VNF). Cette augmentation des ressources propres de VNF doit notamment permettre d'améliorer le financement du plan de modernisation du réseau fluvial, dans une perspective de report modal.
I. LE FINANCEMENT DE VNF
A. LA TAXE HYDRAULIQUE, PRINCIPALE RESSOURCE PROPRE DE VNF
Voies navigables de France (VNF), établissement public industriel et commercial créé par l'article 124 de la loi de finances pour 1991 1 ( * ) , est chargé de l'exploitation, de l'entretien, de la modernisation et du développement des 6 700 kilomètres de canaux et rivières aménagées et de plus de 2 000 ouvrages d'art.
Cet article, modifié par l'article 106 de la loi de
finances pour 2010
2
(
*
)
, dispose que VNF perçoit, pour assurer ses
missions, des ressources propres que sont
« des
taxes sur
les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages
hydrauliques destinés à prélever ou à
évacuer des volumes d'eau sur le domaine public fluvial
qui lui
est confié ainsi que les
redevances et droits fixes sur les
personnes publiques ou privées pour toute autre emprise
sur ce
domaine et pour tout autre usage d'une partie de
celui-ci »
3
(
*
)
.
Ces ressources désignent ce qui est communément appelé la « taxe hydraulique », dont le produit est estimé à 126,7 millions d'euros en 2010, les redevances domaniales (24,2 millions d'euros) et les péages de navigation (13,1 millions d'euros).
Elles alimentent le budget d'exploitation de VNF, initialement fixé à 218 millions d'euros en 2010. Le budget d'investissement (291 millions d'euros) est essentiellement financé par des subventions de l'Etat (59,7 millions d'euros) et de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (139,5 millions d'euros, dont 50 millions d'euros en 2010 au titre du plan de relance), la capacité d'autofinancement (51,8 millions d'euros) et des cofinancements de l'Union européenne et des collectivités territoriales (40 millions d'euros). Le budget d'exploitation et la capacité d'autofinancement des investissements de VNF sont ainsi majoritairement financés par la taxe hydraulique.
Le calcul de la « taxe hydraulique » repose sur deux éléments :
- un élément égal au produit de la superficie de l'emprise au sol des ouvrages correspondants par un taux de base en euros par mètre carré, variable en fonction de la population de la commune où est située l'emprise ;
- un élément égal, s'agissant des ouvrages hydrauliques, au produit du volume d'eau prélevable ou rejetable (capacité maximale estimée en euros par mètre cube) par les usagers, par un taux de base identique pour tous les usages, agricoles ou industriels 4 ( * ) . Le taux est compris entre 1,5 et 4,6 euros par millier de mètres cubes prélevables ou rejetables et est actuellement égal au plafond. Pour les ouvrages hydro-électriques, le calcul de la taxe comprend une part relative à la puissance en euros par kilowattheure, et son montant ne peut dépasser 3 % du chiffre d'affaires généré par l'ouvrage au cours de l'année n-1 5 ( * ) .
Un décret du 20 août 1991 6 ( * ) , modifié par un décret du 23 décembre 2004 7 ( * ) , fixe, dans le cadre des plafonds prévus par la loi, les taux de la taxe hydraulique par catégorie d'usagers. Ils sont les suivants :
Taux de la taxe hydraulique applicables par catégorie d'usager
Ouvrages |
Eléments de calcul |
Taux en vigueur par catégorie d'usage |
Abattements |
|||
Usage |
Commune < 2 000 hab. |
Commune de 2 000 à 100 000 hab. |
Commune > 100 000 hab. |
|||
Hydrauliques |
Emprise en euros / m² |
Agricole |
1,15 |
50 % si emprise de
|
||
Plafond |
1,52 |
|||||
Autres |
1,15 |
11,2 |
22,5 |
|||
Plafond |
1,52 |
15,24 |
30,49 |
|||
Volume en euros / m 3 |
Tous usages |
0,0046 (4,6 euros par millier de m 3 ) |
94 % pour usage agricole, 10 % pour usage industriel |
|||
Hydro-électriques |
Emprise en euros / m² |
Centrales |
1,15 |
11,5 |
22,5 |
50 % si emprise de
|
Plafond |
1,52 |
15,24 |
30,49 |
|||
Puissance en euros / kw |
Centrales |
8,67 |
10 % |
|||
Plafond |
18,29 |
Source : évaluation préalable des articles du projet de loi de finances pour 2011
B. DES RESSOURCES PROPRES INSUFFISANTES POUR MENER À BIEN LE PLAN DE MODERNISATION DES VOIES NAVIGABLES
Les ressources propres de VNF apparaissent aujourd'hui insuffisantes :
- d'une part, il est nécessaire d'améliorer la tarification de l'usage de la ressource aquatique prélevée ou rejetée , de manière à permettre le maintien en condition opérationnelle et le financement de la modernisation des aménagements sécurisant les plans d'eau utilisés à de multiples fonctions de prélèvement ou de rejet : approvisionnement en eau, irrigation agricole, refroidissement des centrales et alimentation des processus industriels ;
- d'autre part, il convient de répondre à l'objectif de report modal du transport de fret vers les modes alternatifs à la route défini par le Parlement dans le cadre de la loi « Grenelle I 8 ( * ) ». L'article 11 de cette loi prévoit ainsi que le transport fluvial devra contribuer à accroître la part des transports non-routiers et non-aériens de 14 % à 25 % à l'horizon 2022. Cet article prévoit également que le réseau fluvial, et en particulier le réseau à grand gabarit, fera l'objet d'un plan de restauration et de modernisation . Ce plan est en cours de mise en oeuvre et l'augmentation des investissements y afférents fait partie des axes de l'actuel contrat de performance (avenant pour 2009 reconduit en 2010) et du futur contrat pour 2010-2013, qui a pris du retard mais devrait être finalisé d'ici la fin de l'année 2010.
Afin de garantir des ressources stables et pérennes à VNF pour remettre en état, moderniser et développer le réseau des voies navigables, plusieurs options étaient possibles : augmenter les dotations budgétaires de l'Etat, le rendement de la taxe hydraulique ou les autres ressources de fonctionnement de VNF (redevance domaniale et péages), ou développer de nouvelles ressources par valorisation du domaine public et du potentiel hydro-électrique des voies navigables.
Le choix d'un relèvement du taux de la taxe hydraulique est apparu comme le plus pertinent pour les raisons suivantes :
- une hausse des concours de l'Etat n'est guère recevable dans un contexte de maîtrise stricte de ses dépenses ;
- une hausse trop brutale et rapide des autres ressources de fonctionnement, qui ne représentent actuellement que 30 % des recettes de VNF, et en particulier des péages, risquerait de fragiliser la compétitivité du transport fluvial et l'objectif de report modal vers la voie d'eau ;
- le développement de ressources nouvelles ne constitue pas un modèle économique permettant de dégager à court terme des recettes suffisantes pour couvrir les besoins. Si les taux de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques n'atteignent pas aujourd'hui le plafond législatif, leur relèvement au plafond n'apporterait à VNF qu'une recette très limitée, de l'ordre de quelques dizaines de milliers d'euros ;
- l'augmentation du rendement de la taxe hydraulique permet de mobiliser des recettes complémentaires de la part des utilisateurs de la ressource aquatique gérée par VNF. Elle est d'une ampleur compatible avec les enjeux de modernisation et de développement de la voie d'eau. Elle constitue surtout une contrepartie économique légitime à la gestion hydraulique assurée par VNF , qui permet aux usagers (agriculteurs, industriels, services d'eaux publiques) de bénéficier d'un approvisionnement en eau stable et adapté à leurs activités.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article propose de relever, dans le premier alinéa du b ) du II de l'article 124 de la loi de finances pour 1991, précité, le plafond du taux de la taxe hydraulique applicable aux volumes prélevables ou rejetables. Il passe ainsi de 4,6 euros à 7 euros .
Le taux effectif de la taxe sera calibré par décret pour atteindre un rendement en année pleine de 30 millions d'euros à compter de 2011.
* *
*
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Vos rapporteurs spéciaux approuvent le principe de ce relèvement d'un des plafonds de la taxe hydraulique, dont il est escompté trois types de conséquences bénéfiques :
- permettre à VNF d'accroître ses investissements de modernisation d'ouvrages 9 ( * ) qui, au-delà de leur fonction pour la navigation, ont une fonction hydraulique nécessaire à la croissance et à l'activité des redevables de cette taxe, par exemple pour l'approvisionnement et la qualité de l'eau, l'irrigation agricole, le refroidissement des centrales et l'alimentation des processus industriels ;
- l'augmentation des investissements de VNF peut exercer un impact favorable sur le secteur de l'ingénierie et des travaux publics, mais également une incidence pérenne sur la compétitivité du transport fluvial et des voies navigables grâce à la modernisation et à la fiabilisation du réseau ;
- un impact positif sur l'environnement puisque la taxe constitue une contrepartie aux interventions de VNF : mise en sécurité des ouvrages hydrauliques, rénovation et reconstruction des barrages qui permettent le maintien de la ligne d'eau et du bon état écologique de l'eau, mise en oeuvre des prescriptions sur la continuité environnementale des cours d'eau classés (ouvrages de franchissement piscicole). En outre, la politique d'investissement de VNF est nettement orientée vers les projets favorisant le report modal, principalement à destination du réseau fluvial à grand gabarit.
Le principal redevable de la taxe est EDF , à hauteur d'environ 70 %, mais le relèvement du taux devrait avoir un faible impact sur le chiffre d'affaires pris en compte. Les autres contributeurs de la taxe (industriels, gestionnaires d'eaux publiques, agriculteurs) seront quant à eux affectés dans une proportion moindre.
Décision de la commission : votre commission des finances vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 1 Loi n° 90-1168 du 29 décembre 1990. VNF a succédé à l'établissement public créé par l'article 67 de la loi du 27 février 1912 portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1912.
* 2 Qui a exonéré de la taxe hydraulique les centrales d'énergie frigorifique, compte tenu des qualités environnementales associées à ce processus de refroidissement.
* 3 En sont exonérés les ouvrages hydroélectriques concédés et leurs ouvrages et équipements annexes.
* 4 Seul le coefficient d'abattement varie en fonction des usages.
* 5 En outre, le montant de la taxe est réduit de moitié durant les dix années suivant la mise en exploitation de l'ouvrage.
* 6 Décret n° 91-797 du 20 août 1991 relatif aux recettes instituées au profit de Voies navigables de France par l'article 124 de la loi de finances pour 1991.
* 7 Décret n° 2004-1425 du 23 décembre 2004 relatif aux recettes instituées au profit de Voies navigables de France et modifiant le décret n° 91-797 du 20 août 1991.
* 8 Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
* 9 Il est ainsi prévu d'investir 660 millions d'euros en 2010-2013 pour la remise en état et la modernisation du réseau.