II. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Article 60 quinquies (nouveau)
I. - Le deuxième alinéa du III de l'article 1519 H du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les services de radiodiffusion sonore qui ne constituent pas un réseau de diffusion à caractère national au sens du b du 4° de l'article 41-3 de la même loi bénéficient d'une franchise d'imposition forfaitaire sur les soixante premières stations radioélectriques dont ils disposent. »
II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l'État, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
III. RAPPORT SÉNAT N° 111 TOME III (2010-2011)
Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale, propose de mettre en place une franchise d'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) pour les soixante premières stations radioélectriques dont disposent les services qui ne constituent pas un réseau de diffusion à vocation nationale, soit les éditeurs de radios indépendantes à vocation locale, régionale ou thématique.
I. L'IFER SUR LES STATIONS RADIOÉLECTRIQUES
A. LE CHAMP DE L'IMPOSITION
Parmi les huit composantes 1 ( * ) de l'IFER prévue à l'article 1635 0 quinquies du code général des impôts, l'article 1519 H du même code prévoit une imposition des stations ou antennes radioélectriques , qui sont des dispositifs permettant d'émettre ou de capter les ondes électro-magnétiques selon diverses fréquences. Une station peut ainsi être composée de plusieurs émetteurs ou récepteurs, et plusieurs stations exploitées par des opérateurs de téléphonie différents peuvent être situées au même endroit.
Les stations radioélectriques doivent être déclarées à l'Agence nationale des fréquences (ANFR) ou être soumises à son accord ou avis, selon la nature et la puissance de l'installation. On distingue ainsi trois catégories de stations parmi les 127 000 autorisées en février 2010 2 ( * ) :
- les antennes-relais de la téléphonie mobile (stations de base et faisceaux hertziens associés) ;
- la radiodiffusion , soit les émetteurs de télévision et de radio en modulation de fréquence, ondes courtes ou moyennes et en numérique ;
- les autres stations , qui comprennent notamment les réseaux radioélectriques privés et les radars de météorologie.
Le champ de l'IFER est défini par le I de l'article 1519 H et porte sur les stations réglementées dont la puissance impose un avis, un accord ou une déclaration à l'ANFR, ce qui exclut donc les stations de radio amateur . Sont également exonérées d'IFER les stations appartenant aux réseaux et installations mentionnés au 1° de l'article L. 33 et aux articles L. 33-2 et L. 33-3 du code de postes et des communications électroniques, soit :
- les installations de l'Etat établies pour les besoins de la défense nationale ou de la sécurité publique, ou utilisant des fréquences ou des bandes de fréquence attribuées par le Premier ministre à une administration (1° de l'article L. 33) ;
- les réseaux indépendants (article L. 33-2), soit, aux termes de l'article L. 32 du même code, les « réseaux réservés à l'usage d'une ou plusieurs personnes constituant un groupe fermé d'utilisateurs, en vue d'échanger des communications internes au sein de ce groupe » ;
- les installations radioélectriques n'utilisant pas des fréquences spécifiquement assignées à leur utilisateur, telles que les bornes Wifi (1° de l'article L. 33-3 du même code) ;
- et les installations radioélectriques de « brouillage », qui permettent de rendre inopérants, tant pour l'émission que pour la réception, les téléphones mobiles ou appareils de communications électroniques mobiles de tous types dans l'enceinte des salles de spectacles, des établissements pénitentiaires et de certains établissements affectés aux besoins de la défense et de la sécurité nationale (2° à 4° de l'article L. 33-3).
Les stations de télévision et de radiodiffusion relevant de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ont en revanche été insérées dans le champ, lors de l'examen au Sénat, à l'initiative de notre collègue Albéric de Montgolfier.
Au total, environ 85 000 stations radioélectriques étaient dans le champ de l'IFER au 1 er janvier 2010, dont la grande majorité sont détenues par des opérateurs de téléphonie mobile.
B. L'ASSIETTE, LE TARIF ET LES OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DU REDEVABLE
Le II de l'article 1519 H définit le redevable de l'IFER comme la personne qui en dispose pour les besoins de son activité professionnelle - elle peut donc en être propriétaire ou locataire - au 1 er janvier de l'année d'imposition.
Le III fixe le tarif à 1 530 euros par station, qu'elle soit ou non en service 3 ( * ) . Lorsque plusieurs personnes disposent d'une même station, le montant de l'IFER applicable est divisé par le nombre de ces personnes.
Un traitement de faveur est prévu par le III pour les stations ayant fait l'objet d'un avis, d'un accord ou d'une déclaration à l'ANFR à compter du 1 er janvier 2010 et assurant la couverture par un réseau de radiocommunications mobiles des « zones blanches » de téléphonie mobile (évaluées par l'ARCEP à 0,18 % de la population et 2,3 % du territoire), dans le cadre du programme national d'extension de la couverture du territoire. Le tarif est ainsi réduit de moitié , soit 765 euros, pour les stations assurant la couverture de ces zones, définies par voie réglementaire.
De même, il est prévu une exonération pour les stations ayant fait l'objet d'un avis, d'un accord ou d'une déclaration à l'ANFR et destinées à desservir les zones blanches de haut débit terrestre . Enfin le tarif est réduit à 220 euros pour les stations de télévision et de radiodiffusion relevant de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, précitée.
L'IFER repose donc avant tout sur les antennes du réseau « classique » de téléphonie mobile.
Le IV de l'article 1519 H fixe les obligations déclaratives du redevable, qui doit déclarer le nombre de stations radioélectriques par commune et par département au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1 er mai de l'année d'imposition. Ces obligations sont cohérentes avec le champ des bénéficiaires de l'IFER, qui sont les communes ou EPCI pour les deux tiers du produit, et les départements pour le tiers .
Le produit brut attendu de cette imposition en 2010 était de 134 millions d'euros , soit un « taux de reprise » des deux tiers, inférieur au taux moyen de reprise pour l'ensemble des composantes de l'IFER. Cette différence était justifiée par le fait que le nombre de stations est très variable d'un opérateur à l'autre, ce qui implique de fixer le tarif de l'IFER à un niveau suffisamment bas pour éviter qu'un opérateur devienne perdant net à l'issue de la réforme.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Avec l'avis défavorable du Gouvernement qui en a sollicité le retrait, le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général, et de plusieurs députés de groupes politiques divers. Il complète le deuxième alinéa du III de l'article 1519 H, précité, afin d'introduire une franchise d'IFER sur les soixante premières stations dont disposent les éditeurs de radios indépendantes à vocation locale, régionale ou thématique . Le gage prévu par le II a cependant été maintenu.
Les services de radiodiffusion sonore ainsi visés sont ceux « qui ne constituent pas un réseau de diffusion à caractère national ». Aux termes du b ) du 4° de l'article 41-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, précitée, un réseau national est « tout réseau qui dessert une zone dont la population recensée est supérieure à 30 millions d'habitants ».
Cette exonération partielle est motivée par le fait que les PME qui éditent et diffusent ces services radiophoniques indépendants, autorisés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), participent à l'animation radiophonique et à la communication de proximité dans des zones isolées. Surtout, leur modèle économique diffère de celui des réseaux à caractère national puisque ces services font peu ou pas appel aux diffuseurs professionnels et recourent à l' « auto-diffusion ». Alors que dans le cas des principales radios nationales, ce sont les diffuseurs professionnels qui supportent l'IFER, les radios indépendantes la supportent seules, et leur besoin en nombre de stations radioélectriques est d'autant plus élevé que la population est moins dense et plus difficile à atteindre.
Selon nos collègues députés, la charge de l'IFER pourrait donc conduire certaines de ces radios à diminuer leur nombre de stations radioélectriques, en commençant par les zones les moins peuplées, ce qui ne conduirait à créer une nouvelle « fracture radiophonique » dans la couverture du territoire.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre rapporteur général constate que le champ d'application de cette franchise d'IFER est large , compte tenu de sa définition par exclusion (tous les services qui ne constituent pas un réseau de diffusion à caractère national). Il couvre ainsi les services privés de radiodiffusion relevant des catégories A, B et C selon la typologie du CSA, soit :
- les services associatifs éligibles au Fonds de soutien à l'expression radiophonique (catégorie A) ;
- les services locaux ou régionaux indépendants et ne diffusant pas de programme national identifié (catégorie B) ;
- les services locaux ou régionaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale (catégorie C), dans la mesure où ces services sont diffusés par des opérateurs dont la zone de desserte couvre une population n'excédant pas six millions d'habitants, et où la diffusion d'un réseau thématique national n'intervient qu'à titre complémentaire.
Votre rapporteur général conçoit bien les spécificités du modèle économique de ces services, qui n'externalisent pas la diffusion, et rappelle que l'esprit de la réforme de la taxe professionnelle (TP) est de maintenir un champ constant de redevables . Il apparaît néanmoins que la majorité des radiodiffuseurs concernés n'acquittaient pas la cotisation minimale de TP puisqu'ils se situaient sous le seuil de 7,6 millions d'euros de chiffre d'affaires. L'IFER pourrait donc dans ce cas constituer une surimposition.
Aujourd'hui, un certain nombre de radios locales ne sont cependant pas redevables de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, dès lors que leur chiffre d'affaires est inférieur à 500 000 euros. De même, les radios associatives de la catégorie A ne sont soumises à l'IFER que si elles exercent une activité lucrative à titre principal et disposent des stations pour les besoins de leur activité professionnelle.
Afin de simplifier les formalités du dispositif et de mieux appréhender l'étendue de la radiodiffusion dans l'assujettissement à l'IFER, votre rapporteur général vous propose de prévoir un seuil d'entrée dans l'imposition plutôt qu'une franchise , selon le même seuil de 60 stations. Les radiodiffuseurs seraient ainsi assujettis à l'IFER sur l'intégralité de leur parc dès lors qu'il est supérieur ou égal à 61 stations.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
* 1 Soit l'imposition des installations éoliennes et hydrauliques, des installations photovoltaïques, des centrales nucléaires ou thermiques à flamme, des transformateurs électriques, des stations radioélectriques, des répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre, du matériel roulant de la SNCF et du matériel roulant de la RATP utilisé pour le transport de voyageurs en Ile-de-France.
* 2 Dont 48 600 stations de radiotéléphonie utilisant du GSM 900 ou du GSM 1800 et 30 000 stations utilisant de l'UMTS ou du Wimax.
* 3 La mise en service peut intervenir plusieurs mois ou années après l'accord de l'ANFR, le temps par exemple que la couverture soit jugée suffisamment étendue par l'opérateur.