ARTICLE 60 OCTIES : CRÉATION D'UNE NOUVELLE COMPOSANTE DE L'IMPOSITION FORFAITAIRE SUR LES ENTREPRISES DE RÉSEAUX AFFÉRENTE AUX RÉSEAUX DE GAZ NATUREL

I. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 16 NOVEMBRE 2010

Article additionnel après l'article 60 (suite)

Mme la présidente. L'amendement n° 673 présenté par M. Michel Bouvard et M. Carrez, est ainsi libellé :

Après l'article 60, insérer l'article suivant :

I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° À l'article 1635-0 quinquies , après la référence : « 1519 H, » est insérée la référence : « 1519 HA, ».

2° Après l'article 1519 H, il est inséré un article 1519 HA ainsi rédigé :

« Art. 1519 HA. - I. - L'imposition forfaitaire mentionnée à l'article 1635-0 quinquies s'applique aux installations de gaz naturel liquéfié, aux stockages souterrains de gaz naturel, aux canalisations de transport de gaz naturel, aux stations de compression du réseau de transport de gaz naturel et aux canalisations de transport d'autres hydrocarbures.

« II. - L'imposition forfaitaire est due chaque année par l'exploitant des installations, ouvrages et canalisations au 31 décembre de l'année d'imposition.

« III. - Le montant de l'imposition forfaitaire est fixé à :

« - 2 500 000 euros par installation de gaz naturel liquéfié dont les tarifs d'utilisation sont fixés en application de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie ;

« - 500 000 euros par site de stockage souterrain de gaz naturel dont les capacités sont soumises aux dispositions des article 30-2 à 30-4 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée ;

« - 500 euros par kilomètre de canalisation de transport de gaz naturel appartenant à un réseau dont les tarifs d'utilisation sont fixés en application de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée ;

« -100 000 euros par station de compression utilisée pour le fonctionnement d'un réseau dont les tarifs d'utilisation sont fixés en application de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée ;

« - 500 euros par kilomètre de canalisation de transport d'autres hydrocarbures.

« IV. - Le redevable de la taxe déclare, au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1 er mai de l'année d'imposition, les ouvrages, les installations et le nombre de kilomètre de canalisations exploitées par commune et par département.

« Le contrôle, le recouvrement, le contentieux, les garanties, sûretés et privilèges sont régis comme en matière de cotisation foncière des entreprises. »

3° Au e) du A du I de l'article 1641 dans sa rédaction en vigueur au 1 er janvier 2011, après la référence : « 1519 H, » est insérée la référence : « 1519 HA, ».

4° Après le 13° du I de l'article 1379 dans sa rédaction en vigueur au 1 er janvier 2011, il est inséré un 13° bis ainsi rédigé :

« 13° bis La composante de l'imposition forfaitaire sur les réseaux relative aux installations de gaz naturel liquéfié, aux stockages souterrains de gaz naturel et aux stations de compression du réseau de transport de gaz naturel et la moitié de la composante de l'imposition forfaitaire sur les réseaux relative aux canalisations de transport de gaz naturel et d'autres hydrocarbures, prévue à l'article 1519 HA ».

5° Au premier alinéa du I et à la fin du deuxième alinéa du V de l'article 1379-0 bis dans sa rédaction en vigueur au 1 er janvier 2011, les mots : « et 1519 H » sont remplacés par les mots : « , 1519 H et 1519 HA ».

6° Après le 5° du I de l'article 1586 dans sa rédaction en vigueur au 1 er janvier 2011, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 5° bis La moitié de la composante de l'imposition forfaitaire relative aux canalisations de transport de gaz naturel et d'autres hydrocarbures prévue à l'article 1519 HA. »

7° Après le e) du I bis de l'article 1609 nonies C dans sa rédaction en vigueur au 1 er janvier 2011, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« f) aux installations de gaz naturel liquéfié, aux stockages souterrains de gaz naturel, aux canalisations de transport de gaz naturel, aux stations de compression du réseau de transport de gaz naturel et aux canalisations de transport d'autres hydrocarbures prévue à l'article 1519 HA. ».

II. - Pour les impositions établies au titre de 2010, les déclarations prévues au IV de l'article 1519 HA sont réalisées par les redevables de la taxe au plus tard le 1 er mars 2011.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Cet amendement, que j'ai déposé avec le rapporteur général, vise à créer une nouvelle composante de l'IFER due par les exploitants de terminaux méthaniers, de stockages de gaz naturel, de stations de compression et de canalisations des réseaux de transport d'autres hydrocarbures, oléoducs et gazoducs.

L'objectif est double. Le premier vise les terminaux méthaniers, les centres de stockage et les stations de compression. Il est conforme à la logique des IFER qui consiste à limiter les gains des entreprises les exploitant dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, et à maintenir un retour pour les collectivités locales d'implantation.

Le second concerne les canalisations et vise à compenser les contraintes qu'elles génèrent puisque l'évolution des normes de sécurité implique la nécessité pour les collectivités, dès lors qu'elles veulent utiliser des terrains à proximité de ces canalisations, d'effectuer des travaux de protection qui sont à leur charge.

Avec la nouvelle imposition que nous proposons, 30 millions d'euros environ pourraient être répartis au sein du bloc communal pour la composante terminaux méthaniers, centres de stockage et stations de compression, et à parité entre le bloc communal et les départements pour le volet canalisation.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . M. Bouvard a très bien présenté le dossier. Je voudrais rassurer le ministre : ce nouvel IFER viendra en diminution de la dotation budgétaire apportée par l'État. Ce sera donc une économie budgétaire pour l'État.

Je rappelle par ailleurs que des IFER ont été créés sur tous les réseaux - réseau pétrolier, d'électricité, SNCF -, sauf sur les réseaux de gaz. J'ai été invité dans plusieurs assemblées départementales de maires, à propos de la réforme de la taxe professionnelle. J'ai le souvenir que dans l'Ain, on m'a demandé s'il était normal que les aires de stockage de gaz ne fassent l'objet d'aucun IFER. À l'évidence, non.

Cet amendement tend donc à réparer un oubli et une injustice car c'est ainsi que la situation est vécue par nombre de maires.

Dernier exemple, enfin, les terminaux méthaniers, qui sont au nombre d'une demi-douzaine en France. Il n'est pas logique que ces investissements très lourds, qui représentent de vraies contraintes pour les communes, ne produisent aucun IFER alors que la centrale thermique, qui pourra être située à côté, en produira un.

Voilà toutes les raisons pour lesquelles il nous paraît intéressant de créer cet IFER.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Eric Besson, ministre. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement pour trois raisons.

D'abord, la réforme de la taxe professionnelle répond à l'objectif recherché avec la suppression de l'assiette correspondant aux biens et équipements mobiliers, les EBM, de rétablir la compétitivité des entreprises en supprimant un impôt unique en Europe qui pesait spécifiquement sur l'outil de production. À cet égard, celle-ci réduit sensiblement la charge fiscale des entreprises particulièrement pour les PME et les secteurs industriels.

Ensuite, elle permet un renforcement des liens entre les entreprises et les territoires de leur implantation avec l'instauration de l'IFER. L'IFER a été créé afin, d'une part, de limiter le gain résultant de cette réforme pour les entreprises de réseau dont l'activité n'est pas soumise aux risques de délocalisation - énergie, télécommunications, transport ferroviaire - et, d'autre part, de continuer à procurer des recettes fiscales aux territoires accueillant des équipements de réseau.

Dans un rapport récent, l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'administration ont proposé en matière d'IFER les ajustements nécessaires dans les cas où il a été constaté de manière immédiate que l'instauration de cette imposition engendrerait des difficultés ou des effets non souhaités sur la situation des entreprises des secteurs concernés ou collectivités bénéficiaires.

Ces ajustements, monsieur Bouvard, sont donc prévus dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 actuellement soumis à votre examen. Hormis ces ajustements, il n'apparaît pas souhaitable d'étendre le champ d'application de cette imposition à d'autres catégories d'équipement sans expertise préalable des conséquences qui en découleraient pour le secteur économique concerné.

Au bénéfice de ces précisions, je vous suggère, monsieur le député, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j'émets un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. L'amendement s'applique-t-il aussi aux oléoducs et gazoducs militaires ?

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Non, il ne s'appliquerait qu'aux entreprises qui en disposent pour leur usage professionnel.

Monsieur le ministre, puisque vous parlez d'étude d'impact, permettez-moi de citer quelques chiffres. L'IFER SNCF, c'est 400 millions d'euros ; l'IFER EDF, 1 milliard d'euros : celui que nous vous proposons représentera 35 millions d'euros et sera payé par Total et GDF Suez. (Exclamations sur divers bancs.)

M. François Pupponi. Il faut leur demander plus !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Pour en revenir à l'exemple des terminaux méthaniers, j'ai rencontré récemment M. Granié, président du SAN de Fos où un terminal méthanier est en projet. Sachez que cela représente 900 millions d'euros d'investissement et que l'entreprise sera heureuse d'apporter une petite contribution pour faire passer son projet à Fos. L'IFER que nous proposons est donc aussi dans l'intérêt des entreprises.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. À l'évidence, la disposition ne concerne pas des entreprises présentant un risque de délocalisation. Elle permettra en revanche de faire face aux vraies contraintes qui pèsent sur les collectivités locales qui acceptent ce type d'implantation ou qui se voient traversées par des infrastructures de cet ordre - normes de sécurité, périmètre Seveso... Ainsi, la présence d'une école dans un périmètre Seveso implique des protections supplémentaires et entraîne donc un surcoût pour les collectivités. Il n'est pas anormal qu'elles bénéficient d'un retour.

En outre, cet amendement permettra d'éviter un effet d'aubaine pour les entreprises visées qui n'ont aucune raison de gagner quoi que ce soit dans la réforme de la TP. Celle-ci ne doit concerner que les industries exportatrices qui sont en compétition internationale, les PME, et certainement pas Total, par exemple.

M. François Pupponi. Très bien !

(L'amendement n° 673 est adopté.)