III. RAPPORT SÉNAT N° 111 TOME III (2010-2011)
Commentaire : le présent article vise à encadrer l'exercice de l'activité professionnelle consistant à obtenir pour autrui le bénéfice de la défiscalisation des investissements productifs en outre-mer.
I. LE DROIT EXISTANT
Concernant le cadre général du dispositif de défiscalisation des investissements productifs en outre-mer, il est renvoyé au commentaire de l'article 57 quinquies du présent projet de loi.
Dans la majorité des cas, l'entreprise qui souhaite bénéficier de la défiscalisation pour financer un investissement en outre-mer fait appel à un cabinet de conseil en défiscalisation qui se charge, pour son compte, de trouver des contribuables souhaitant participer à l'investissement pour obtenir un avantage fiscal.
II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le présent article fait partie des quatre articles insérés par l'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des finances et avec l'avis favorable du Gouvernement, à la suite de la mission de contrôle sur l'application de la LODEOM réalisée par nos collègues députés Gaël Yanno et Claude Bartolone.
A. LA CRÉATION D'UN REGISTRE DES CABINETS DE CONSEIL EN DÉFISCALISATION
Le présent article propose que l'activité professionnelle consistant à obtenir pour autrui les avantages fiscaux résultant de la défiscalisation des investissements productifs en outre-mer ne puisse être exercée que par des entreprises inscrites sur un registre tenu par le représentant de l'Etat dans le département où ces entreprises ont leur siège social.
Pour pouvoir être inscrites sur ce registre, les entreprises concernées devront satisfaire aux conditions suivantes :
- justifier de l'aptitude professionnelle des dirigeants et associés ;
- être à jour de leurs obligations fiscales et sociales ;
- contracter une assurance contre les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile professionnelle ;
- présenter, pour chacun des dirigeants et associés, un bulletin n° 2 du casier judiciaire vierge de toute condamnation ;
- justifier d'une certification annuelle de leurs comptes par un commissaire aux comptes ;
- enfin, avoir signé une charte de déontologie.
Le II du présent article prévoit que les entreprises qui enfreindraient la réglementation prévue ci-dessus acquitteraient une amende égale à 50 % du montant des avantages fiscaux indûment obtenus grâce aux dispositifs de défiscalisation des investissements productifs.
Par ailleurs, le dispositif proposé prévoit que ces cabinets de conseil et défiscalisation devront , à l'instar des entreprises qui bénéficient de la défiscalisation pour leurs investissements, déclarer annuellement à l'administration fiscale les opérations qu'ils ont réalisées.
B. UNE OBLIGATION DE MISE EN CONCURRENCE
Enfin, le présent article prévoit que lorsque le bénéfice de la défiscalisation est conditionné à un agrément du ministre du budget, c'est-à-dire pour les investissements d'un montant supérieur à 250 000 euros, et que l'investissement est exploité par une société dont plus de 50 % du capital sont détenus par des personnes publiques , l'intervention éventuelle des cabinets de conseil en défiscalisation est subordonnée à leur mise en concurrence , dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Cette mise en concurrence conditionnera le bénéfice de l'avantage en impôt.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le présent article s'inscrit dans une démarche de renforcement de la transparence de la défiscalisation des investissements réalisés outre-mer. Il est novateur en ce qu'il encadre l'exercice de l'activité des professionnels de la défiscalisation .
L'enregistrement et la mise sous conditions de l'exercice de cette profession vont dans le sens d'un meilleur contrôle de la défiscalisation des investissements productifs en outre-mer et de son coût pour les finances publiques . La rémunération des cabinets en défiscalisation est en général proportionnelle au montant de la réduction d'impôt qu'ils permettent d'obtenir. D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, environ 6 % de l'avantage fiscal ainsi consenti par l'Etat servirait, in fine , à rémunérer les intermédiaires dans ces opérations. Il est donc souhaitable d'encadrer strictement l'exercice de cette profession.
Toutefois, la loi prévoit déjà, pour les conseillers en investissement financiers (CIF), une procédure d'enregistrement et des obligations à respecter pour pouvoir exercer cette profession. L'immatriculation des professionnels des services financiers a d'ailleurs été unifiée par l'article 36 de la loi de régulation bancaire et financière 1 ( * ) . Il serait préjudiciable, quelques mois après, de revenir sur cette unification en créant un dispositif d'enregistrement spécifique pour les cabinets en défiscalisation.
En outre, la majorité des cabinets exerçant des activités de conseil en défiscalisation sont en réalité des cabinets de conseil en divers investissements financiers qui, à ce titre, sont déjà soumis aux obligations des CIF . Il paraît donc plus opérationnel, pour moraliser l'exercice de l'activité de conseils en défiscalisation et favoriser le développement de cabinets de conseil sérieux et compétents, de prévoir que les entreprises exerçant une activité de conseil en défiscalisation outre-mer, qui ne seraient pas déjà soumises au statut de CIF, devront se conformer aux obligations déjà prévues pour ceux-ci et s'inscrire, comme eux, au registre unique géré par l'Organisme pour le Registre des Intermédiaires en Assurance (ORIAS) mis en place par l'article 36 précité.
Votre commission des finances vous propose un amendement en ce sens . Cet amendement maintient par ailleurs les sanctions prévues par le présent article en cas de non-respect des obligations qu'il prévoit ainsi que les règles relatives à la mise en concurrence des cabinets en défiscalisation pour les entreprises publiques faisant usage des dispositifs de défiscalisation des investissements productifs en outre-mer.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi modifié.
* 1 Loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière.