Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

PJLF pour 2006 - Audition de M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et de M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, et de M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, sur les crédits des missions « Enseignement scolaire » et « Recherche et enseignement supérieur ».

M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord remercié M. Gilles de Robien, ministre, et M. François Goulard, ministre délégué, pour leur présence, et salué M. Henri Revol, rapporteur pour avis de la mission « Recherche et enseignement supérieur » au nom de la commission des affaires économiques.

A titre liminaire, M. Gilles de Robien a rappelé que le budget du ministère de l'éducation nationale était le premier budget de la Nation puisqu'il regroupait dans le projet de loi de finances pour 2006, 76,7 milliards d'euros de crédits, représentant une hausse de 5,5 % par rapport à l'année précédente. Il a indiqué que l'effort éducatif de la France, soit environ 4,3 % du PIB, en intégrant les dépenses des collectivités territoriales, était nettement au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE.

Il a insisté sur les deux idées directrices qui avaient présidé à la préparation de ce budget : d'une part, la préoccupation de l'avenir des jeunes, d'autre part l'utilisation efficace de l'argent public.

Il a ensuite indiqué le projet de budget de son ministère respectait deux impératifs : la promotion de l'égalité des chances et la réussite du « Pacte pour la recherche ».

S'agissant de la promotion de l'égalité des chances, M. Gilles de Robien, aestimé que l'éducation, la formation et l'instruction étaient les meilleurs remèdes contre le manque de perspectives des jeunes.

Il a rappelé que le Premier ministre avait annoncé, le mardi précédent, des mesures destinées à renforcer la promotion de l'égalité des chances dans les quartiers difficiles.

Il a ensuite détaillé l'impact de ces mesures nouvelles sur le budget 2006 de la mission « Enseignement scolaire » :

- 20 millions d'euros destinés au recrutement de 5.000 assistants pédagogiques dans 1.200 collèges situés dans les quartiers sensibles ;

- 15 millions d'euros consacrés à l'augmentation du nombre de bourses au mérite à la rentrée 2006 ;

- enfin, 5 millions d'euros supplémentaires en faveur des associations menant des actions d'aide aux devoirs ou d'aide à la réinsertion scolaire.

M. Gilles de Robien a indiqué que le vote en première délibération des crédits de la mission « Enseignement scolaire », intervenu la veille à l'Assemblée nationale, n'avait pas affecté le volume global des crédits de la mission mais la répartition interne, notamment en faveur du programme « Vie de l'élève ».

M. Gilles de Robien a ensuite évoqué l'effort national en faveur de la recherche, en soulignant que, de cet effort, dépendait le rang de la France parmi les grandes nations industrielles, mais aussi la croissance économique et le niveau des emplois.

Il a précisé que l'enseignement scolaire voyait son budget croître, à périmètre constant, de 3,65 %, ce qui était très significatif, puisque cette hausse représentait 1,9 milliard d'euros supplémentaires. Il a indiqué que cette hausse serait notamment consacrée à l'amélioration du suivi des élèves en difficulté et à la promotion du mérite.

Par ailleurs, il a expliqué que la recherche se voyait affecter 1 milliard d'euros supplémentaire pour l'année 2006, ces crédits permettant notamment de financer de nouveaux projets de recherche dans des secteurs innovants.

Il a indiqué qu'à cet effort financier très important, s'ajoutait un effort humain significatif puisque 3.000 chercheurs et enseignants chercheurs supplémentaires seraient recrutés en 2006 à savoir 1.900 dans les universités et 1.100 dans les organismes de recherche.

M. Gilles de Robien a ensuite détaillé de manière plus précise les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Il a indiqué que l'évolution des effectifs d'enseignants répondait à l'évolution démographique des populations d'élèves.

Il a constaté une situation en forme de ciseaux, résultant de l'augmentation des effectifs dans le primaire en 2006 à hauteur de 49.900 élèves, et de la diminution des effectifs du secondaire à hauteur de 42.800 élèves.

Il a ainsi annoncé la création de 1.000 postes en 2006 dans l'enseignement primaire ce qui permettrait de maintenir un taux d'encadrement de 23 élèves par classe.

Il a indiqué que, symétriquement, la baisse du nombre d'élèves dans le secondaire conduisait à ne pas remplacer 1.383 professeurs partant à la retraite. Il a souligné que 2.500 emplois auraient pu ne pas être remplacés ; mais la mise en oeuvre, en particulier, des programmes personnalisés de réussite éducative, prévus par la loi du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, nécessitait le dégagement de moyens humains.

Il a expliqué qu'il s'agissait en particulier :

- de renforcer le soutien scolaire à l'école primaire et au collège avec la généralisation à la rentrée 2006, des programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE) à tous les élèves en difficulté dans les classes de CP, de CE1, et à l'entrée en 6e ainsi qu'aux élèves redoublants ;

- de garantir la continuité de l'enseignement par la mise en oeuvre du dispositif de remplacement de courte durée ;

- d'améliorer la présence d'adultes au sein des établissements avec la consolidation des nouveaux « emplois vie scolaire » créés lors de cette rentrée. Il a précisé qu'environ 28.500 emplois de ce type seraient rémunérés en moyenne sur l'année sur les crédits du ministère, 16.500 autres « emplois vie scolaire » étant rémunérés par les collectivités territoriales.

Il a également indiqué qu'à la demande du Premier ministre, il réfléchissait à une nouvelle formule d'apprentissage pour les jeunes de 14 ans, « l'apprentissage junior ».

En conclusion, M. Gilles de Robien a marqué sa volonté d'optimiser toujours davantage la gestion des ressources humaines et a estimé que le budget 2006 marquait très clairement la priorité donnée par le gouvernement à l'éducation et à la formation des jeunes.

Il a insisté, s'agissant de la recherche, sur l'innovation majeure qu'introduisait ce projet de loi de finances, à savoir le financement de la recherche par projets. Sans remettre en cause le financement classique des universités et des organismes, le financement par projets apportait en effet, selon lui, un utile complément à notre politique de recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche a ensuite présenté la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

A titre liminaire, M. François Goulard a indiqué que la création de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » et la mise en oeuvre de la LOLF avaient eu un impact positif sur la préparation du budget, la répartition des crédits n'ayant donné lieu à aucun arbitrage de la part du Premier ministre ou du ministère des finances, ce dont il s'est tout particulièrement félicité.

Il a indiqué que les crédits de la mission progressaient à structure constante de 2,2 %, cette hausse comprenant un milliard d'euros en faveur de la recherche. Il a expliqué que cette somme se répartissait en trois parts :

- un tiers consacré au financement classique des dotations en faveur des organismes de recherche ;

- un tiers en provenance du compte d'affectation spéciale et destiné à l'Agence nationale de la recherche (240 millions d'euros) et à l'OSEO-ANVAR (40 millions d'euros) ;

- un tiers consacré à l'augmentation des dépenses fiscales.

Il a remarqué que cette répartition permettait à la fois de maintenir des financements classiques, mais aussi de soutenir le financement privé de la recherche et de mettre en place des nouveaux modes de financement tels que le financement par projet.

Il a insisté sur le caractère pluriannuel de l'effort financier réalisé par l'Etat en faveur de la recherche, cet effort passant de 20,8 milliards d'euros en 2006 à 24 milliards d'euros en 2010. Il a précisé que cet effort financier ne se faisait pas au détriment des organismes de recherche, qui voyaient leurs dotations augmenter de 3 %. S'agissant précisément de ces dotations, il a insisté sur le fait que les dernières annulations de crédits qui avaient touché les organismes de recherche résultaient de modifications fiscales techniques supprimant, notamment, l'assujettissement de ces organismes à la TVA.

Il s'est félicité de l'encouragement en faveur de la recherche en entreprise grâce à l'augmentation des dépenses fiscales qui, par rapport à 2005, connaissaient une augmentation de 340 millions d'euros, soit un total de 1,250 milliard d'euros.

S'agissant de l'emploi scientifique, il a mis en évidence l'effort réalisé en faveur des jeunes chercheurs, se traduisant notamment par la revalorisation des allocations recherche, l'augmentation des conventions industrielles par la formation et la recherche (CIFRE), la création des contrats d'insertion post-doctorant pour la recherche en entreprise (CIPRE) et la suppression des libéralités. Il a observé que les perspectives de recrutement étaient très satisfaisantes puisque d'ici à 2010, 21.000 recrutements seraient réalisés compte tenu des départs à la retraite et des créations d'emplois.

S'agissant de la valorisation de la recherche il a indiqué que les crédits dégagés en faveur du « label Carnot » permettraient de renforcer le transfert de l'innovation vers le monde industriel.

M. François Goulard a ensuite exposé les mesures prises en faveur des universités. Il a indiqué que les universités bénéficiaient de 1.900 emplois supplémentaires dont 1.100 pour les chercheurs. Il s'est également félicité de l'avancement des programmes en faveur du logement étudiant, c'est-à-dire la construction de 5.000 chambres chaque année ainsi que la rénovation de 7.000 chambres universitaires.

Il a enfin souligné, concernant l'investissement immobilier universitaire, qu'un financement exceptionnel de 100 millions d'euros avait été ajouté aux 573 millions d'euros initialement prévus. Par ailleurs, il a précisé que le taux d'engament des crédits relatifs à l'immobilier universitaire, dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, atteindrait 90 % à la fin de l'année 2006.

M. Jean Arthuis, président, a remercié MM. Gilles de Robien et François Goulard,pour la qualité leur présentation.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur », s'est félicité de l'effort financier engagé par l'Etat en faveur de la recherche. Il s'est interrogé sur le caractère interministériel de la mission « Recherche et enseignement supérieur », et plus particulièrement sur le pilotage et le contrôle de celle-ci. Il a expliqué ne pas trouver de différence particulière entre la présentation actuelle de la mission et l'ancien document dénommé « budget coordonné de la recherche et du développement » (BCRD).

Il a ensuite observé que l'encouragement en faveur de la recherche privée, qui s'inscrivait dans le cadre de la « stratégie de Lisbonne », constituait un changement sensible dans un système français dominé par la recherche publique. Il a approuvé la diversification des financements et notamment l'introduction des financements par projets. Il a toutefois critiqué la dispersion de la recherche française, dispersion qui, si elle devait persister, devrait s'accompagner d'une meilleure coopération entre les différents acteurs de la recherche.

En réponse, M. François Goulard a estimé que la création de la mission « Recherche et enseignement supérieur » apportait une certaine cohérence au financement de la recherche. Il a, ainsi, donné l'exemple de l'Agence nationale pour la recherche (ANR) dont les crédits concernaient plusieurs programmes de la mission. Il s'est par ailleurs félicité de la souplesse de gestion dont bénéficieraient dorénavant, grâce à la LOLF, les responsables des différents programmes. S'agissant des objectifs fixés dans le cadre de la « stratégie de Lisbonne », et plus particulièrement celui de parvenir à un montant de dépenses de recherche et développement (R&D) financé par le secteur privé équivalent à 2 % du PIB, il a souligné qu'il s'agissait plus d'une ambition que d'un objectif précis. Il a toutefois rappelé que l'incitation en faveur de la recherche privée était utile et nécessaire et que la réforme du crédit d'impôt recherche s'inscrivait bien dans cette perspective.

S'agissant de la dispersion de la recherche française, il a indiqué que le projet de loi d'orientation pour la recherche, dont le Sénat allait bientôt débattre, proposait différents dispositifs de regroupement tels que les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) ou les campus de recherche. Par ailleurs, il a ajouté que la complexité était inhérente à la recherche tant au niveau des objectifs, que de son organisation ou de sa valorisation.

M. Gilles de Robien a souhaité préciser que les différents dispositifs proposés par le projet de loi d'orientation en faveur de la recherche étaient de nature à impulser un véritable changement.

Il a, en effet, identifié quatre facteurs positifs : tout d'abord une réelle prise de conscience quant à la nécessité de changer ; ensuite l'affirmation d'un pilotage politique de la recherche accompagné de la mise en place d'un nouveau dispositif d'évaluation ; le dégagement de moyens humains et financiers importants ; et enfin des mesures de simplification telles que le passage à un contrôle a posteriori des équipes de recherche ou l'assouplissement du code des marchés.

Il a, par ailleurs, précisé que l'accueil du « Pacte pour la recherche » par les différents acteurs concernés avait été relativement satisfaisant.

En réponse à MM. Maurice Blin, rapporteur spécial, et Henri Revol, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, qui faisaient part de leurs inquiétudes quant à la possibilité de recruter 3.000 personnes dans le secteur de la recherche, M. François Goulard a observé qu'actuellement 8.000 docteurs étaient diplômés annuellement. Il a par ailleurs précisé que ce chiffre ne prenait pas en compte les diplômés des grandes écoles qui, aujourd'hui, s'orientaient peu vers la recherche et qui pouvaient donc être mobilisés.

En réponse à MM. Maurice Blin, rapporteur spécial, et Alain Lambert, qui s'interrogeaient sur l'impact du caractère public du statut d'une grande majorité de chercheurs, M. François Goulard a indiqué que le statut de droit public des enseignants chercheurs ou des chercheurs, qui coexistait par ailleurs avec des contrats de droit privé, ne possédait pas que des inconvénients. Il a notamment souligné que les chercheurs se félicitaient de pouvoir bénéficier d'une certaine sérénité quant au maintien de leur emploi.

Il a ainsi expliqué que la stabilité des équipes de recherche, favorisée en France par le caractère public d'une partie des emplois d'enseignants-chercheurs et chercheurs, était un objectif recherché par d'autres pays tel que les Etats-Unis. Il a toutefois souligné que 10 % des laboratoires de recherche français fermaient annuellement, ce qui témoignait de l'existence d'une certaine forme de sanction.

M. Henri Revol, rapporteur pour avis de la mission « Recherche enseignement supérieur » au nom de la commission des affaires économiques s'est interrogé sur la pertinence des cibles affectées aux indicateurs relatifs à la production scientifique des différents opérateurs, c'est-à-dire la part des publications de référence internationale des opérateurs dans la production scientifique française, européenne ou mondiale.

Il a en outre souhaité savoir si la coexistence des pôles de recherche d'enseignement supérieur (PRES) et des pôles de compétitivité ne prêtait pas à confusion.

M. François Goulard a précisé que les indicateurs de production scientifique ne remplaçaient pas le dispositif d'évaluation spécifique à la recherche qui allait être mis en place par la future loi d'orientation pour la recherche. Il a également expliqué que si les PRES étaient un mode de coopération entre l'enseignement supérieur et la recherche, les pôles de compétitivité étaient, quant à eux, un mode de coopération entre le monde de la recherche et le monde économique. Il a indiqué que le recoupement de ces deux structures était possible et même encouragé, mais qu'il pouvait y avoir des PRES sans pôle de compétitivité et, inversement, des pôles de compétitivité sans PRES.

En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui se demandait si les organismes de recherche pouvaient, au lieu de recruter, rémunérer une équipe de recherche extérieure, M. François Goulard a répondu que cette possibilité existait compte tenu de la fongibilité asymétrique des crédits.

Après avoir rappelé que la LOLF mettait l'accent sur les performances, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial pour la mission « Enseignement scolaire », a remarqué que les comparaisons internationales sur les compétences des élèves du primaire et du secondaire, et notamment les résultats de l'étude PISA, mettaient en évidence des résultats moyens de la part des élèves français, en particulier dans les disciplines scientifiques et dans l'apprentissage des langues. Il a observé, parallèlement, que les dépenses en faveur des élèves de l'enseignement du second degré étaient 20 % plus élevées en France par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE.

M. Gilles de Robien a effectivement reconnu que la France dépensait davantage en faveur de ses collégiens et de ses lycéens que les autres pays. Il a expliqué ce surcoût par un nombre d'heures d'enseignement très élevé par semaine mais aussi par une offre de formation qui ne cessait de s'étendre.

Il a toutefois remarqué que la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école permettait de répondre partiellement à cela. D'une part, elle avait posé le principe du « socle commun » dont la définition précise était actuellement confiée au Haut conseil de l'éducation ; d'autre part, elle avait engagé la réforme des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) en imposant l'établissement d'un cahier des charges. Ila estimé que ce cahier des charges devrait traiter des problèmes de pédagogie et d'animation, de transmission des savoirs mais aussi de la mise en place pour les futurs enseignants d'une formation des fonctionnaires de la République.

En réponse à M. Gérard Longuet, rapporteur spécial pour la mission « Enseignement scolaire », qui s'interrogeait sur la portée de la réforme de l'administration centrale du ministère de l'éducation nationale, M. Gilles de Robien a expliqué que la mise en place de trois directions générales ainsi que d'un secrétariat général à partir du 1er janvier 2006 avait été accueillie favorablement par le personnel du ministère. Il a précisé que la gestion des emplois relèverait dorénavant du directeur de l'enseignement scolaire.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial pour la mission « Enseignement scolaire », a souhaité savoir si le ministre envisageait une évolution des fonctions de directeur d'école de l'enseignement public du premier degré ou de chefs d'établissement pour l'enseignement public du second degré.

M. Gilles de Robien a indiqué avoir engagé les négociations avec le réseau des directeurs d'école, et expliqué aux chefs d'établissement du second degré que la mise en place du dispositif de remplacement de courte durée était l'occasion pour eux de manifester leurs capacités de management.

En réponse à M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire », qui s'interrogeait sur la part des professeurs sans élèves et notamment les surnombres disciplinaires, M. Gilles de Robien a souligné que des efforts de gestion étaient entrepris, et notamment que le taux d'occupation des professeurs remplaçants avait augmenté de 12 points en trois ans. Il a ajouté qu'il avait demandé aux recteurs de lui fournir d'ici à la fin de l'année des objectifs chiffrés en termes de retour d'un plus grand nombre de professeurs devant les élèves. Il a également précisé que dorénavant les emplois mis à disposition des associations seraient transformés en position de détachement, cette modification étant compensée, à due concurrence, par une subvention financière aux dites associations.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial pour la mission « Enseignement scolaire », a ensuite constaté que si l'enseignement technique agricole connaissait des performances très satisfaisantes en termes de réussite des élèves, cet enseignement faisait face à des problèmes de moyens. A cet égard, il se demandait dans quelle mesure le caractère interministériel de la mission pouvait opérer.

M. Gilles de Robien a indiqué que les difficultés auxquelles faisait face l'enseignement technique agricole et plus particulièrement les maisons familiales rurales, avaient fait l'objet d'un accord entre le ministère de l'agriculture et le ministère de l'éducation nationale à l'occasion des débats à l'Assemblée nationale, sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », le lundi 14 novembre 2005. Il a ainsi précisé que sur les 15 millions d'euros requis, 8 millions d'euros avaient été transférés du programme « Enseignement scolaire public du second degré » au programme « Enseignement technique agricole ».

En réponse à M. Jacques Baudot, qui s'interrogeait sur le nombre des établissements scolaires qui avaient été touchés par les récents événements ayant eu lieu dans les banlieues, M. Gilles de Robien a observé que les dégradations des établissements scolaires étaient plus ou moins importantes selon les cas, et que moins de cinq établissements avaient été très touchés, c'est-à-dire avaient nécessité le déplacement des élèves dans d'autres bâtiments. Il s'est félicité de la mobilisation et de l'esprit civique des personnels qui ont souvent assuré des veilles dans les écoles et les collèges afin de prévenir les incidents.

M. Marc Massion a déclaré ne pas voir figurer de mesures en faveur de l'égalité des chances dans les crédits présentés par le ministre. Il s'est alarmé quant à la suppression de classes d'intégration scolaire (CLIS) alors même que ces classes accueillaient des publics très en difficulté. Il s'est, en outre, inquiété des moyens octroyés aux zones difficiles, qui regroupaient des publics, tels que les enfants de nomades, de demandeurs d'asile ou de populations immigrées.

A cet égard, Mme Nicole Bricq a ajouté qu'une étude de l'INSEE publiée en septembre 2005 avait mis en évidence que le surcoût lié aux zones d'éducation prioritaire était à peine de 8 %.

S'interrogeant également sur l'affectation des moyens en zone d'éducation prioritaire, M. Roger Karoutchi a souhaité savoir s'il n'était pas nécessaire de revoir le principe de ces zones, tout en soulignant que l'enseignement ne pouvait être tenu responsable de tous les problèmes rencontrés par les élèves et qu'il était par ailleurs nécessaire de s'interroger sur la définition des missions de l'enseignement.

En réponse, M. Gilles de Robien a souligné que 5 millions d'euros supplémentaires allaient être octroyés aux associations qui travaillaient dans les quartiers difficiles et il a indiqué que le recrutement supplémentaire de 5.000 assistants pédagogiques annoncé par le Premier ministre était destiné aux collèges difficiles. Il a précisé qu'il n'y avait pas de projets de fermeture de classes d'intégration scolaire.

Il a estimé que le concept de zone d'éducation prioritaire relevait d'une « bonne idée », mais que le dispositif nécessitait peut être d'être revu, notamment sur les questions de la concentration des moyens, de la formation des enseignants, et du contenu des programmes. Il a enfin rappelé que la mise en oeuvre des programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE), prévus par la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005, permettrait une meilleure prise en charge des élèves en difficulté.

En réponse à M. Serge Dassault qui s'interrogeait sur les décharges des directeurs d'école ainsi que sur la mise en place d'une formation civique au sein de l'école primaire, M. Gilles de Robien a répondu qu'il avait engagé des négociations sur ce point. Après avoir souligné qu'un nouveau système d'information était entré en vigueur et devait a priori soulager la tâche des directeurs d'école, il a précisé que, l'extension du système de décharge horaire à tous les directeurs représentant un surcoût de 6.000 emplois, d'autres solutions pouvaient être trouvées.

M. Alain Lambert a regretté, notamment au regard de la LOLF, que le débat restât concentré sur les moyens et non les objectifs. Il a relevé que les objectifs fixés dans le cadre de la « stratégie de Lisbonne » étaient des objectifs de moyens et qu'un exercice intéressant, mais certes théorique, pouvait être de traduire ces moyens en objectifs de performance, ce qui améliorerait la lisibilité de la stratégie du gouvernement.

S'agissant de la traduction des moyens fixés par la « stratégie de Lisbonne », M. François Goulard a souligné que certains domaines de recherche se prêtaient particulièrement bien à ce genre d'exercice, comme, par exemple les recherches médicales, mais que dans d'autres domaines les retombées des recherches étaient plus difficiles à identifier, notamment dans la mesure où elles pouvaient ne pas être immédiates. Il a souligné que des recherches purement académiques étaient nécessaires. Il a notamment cité M. Yves Chauvin, prix Nobel de chimie, pour ses recherches relatives à la catalyse de la réaction de métathèse des oléfines.

En réponse à M. Serge Dassault qui s'interrogeait sur le soutien à la recherche en entreprise, M. François Goulard a indiqué que celle-ci était favorisée, notamment, par la réforme du crédit d'impôt-recherche, l'action de l'Agence de l'innovation industrielle, ainsi que par la constitution de pôles de compétitivité dans la mesure où les recherches effectuées par une entreprise dans le cadre desdits pôles pouvaient bénéficier d'exonérations fiscales. Il a également cité l'augmentation du nombre des contrats des conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) et la création des contrats d'insertion post-doctorants pour la recherche en entreprise (CIPRE).

PJLF 2006 - Mission : Enseignement scolaire - Vote sur les crédits de la mission

La commission s'est prononcée sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » qui avait été précédemment réservés.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial pour la mission « Enseignement scolaire », a tout d'abord fait part de ses interrogations quant au coût élevé de l'enseignement secondaire comparé aux autres pays européens, et à la nécessité de restructurer l'offre tout comme d'optimiser les moyens. Il a également posé la question de savoir si les enfants âgés de moins de deux ans devaient être accueillis au sein du système scolaire.

M. Jean Arthuis, président, a estimé que l'accueil de ces enfants relevait davantage de la politique familiale que de l'obligation scolaire.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur », a remarqué que l'avantage procuré par la scolarisation précoce des enfants de moins de 3 ans n'était toutefois certainement pas sans conséquence positive sur le maintien d'un taux de natalité satisfaisant en France.

M. Henri Torre a souhaité que le ministère prenne position sur cette question et fixe une limite d'âge précise.

M. Jean Arthuis, président, a ensuite observé que le nombre de professeurs surdisciplinaires n'avait pas diminué, alors que M. Luc Ferry, alors ministre de l'éducation nationale, s'était engagé devant la commission des finances il y a deux ans à réduire ce nombre. Il a donc proposé, au vu des indicateurs figurant déjà dans le bleu budgétaire, de réduire les crédits de la mission consacrée à la rémunération de ces personnels, afin d'accélérer le mouvement de résorption desdits sureffectifs en cours.

A l'issue de ce débat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » et adopté un amendement tendant à réduire de 20 millions d'euros les crédits du programme « Enseignement public du second degré ».

PJLF pour 2006 - Mission « Outre-mer » - Examen du rapport spécial

Enfin, la commission a examiné le rapport spécial de M. Henri Torre, rapporteur spécial, sur la mission « Outre-mer ».

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a rappelé que chaque année l'examen des crédits de l'outre-mer était l'occasion de dresser un panorama général des questions relatives aux départements et collectivités d'outre mer. Il a indiqué que cet exercice était simplifié cette année par la nouvelle présentation budgétaire issue de la LOLF, qui offrait une plus grande clarté et une meilleure visibilité des crédits du ministère.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a tout d'abord fait remarquer que les crédits de cette mission ne représentaient qu'un peu plus de 16 % de l'effort de l'Etat en direction des départements et collectivités. En conséquence, les dépenses de l'Etat en outre-mer s'élevaient à 11 milliards d'euros, auxquels il fallait ajouter 2,5 milliards de dépenses fiscales, la mission « Outre-mer » s'élevant pour sa part à environ 1,9milliard d'euros. Il a précisé que, pour autant, les actions qui étaient regroupées dans la mission suivaient une certaine logique, et qu'elles étaient les leviers les plus spécifiques aux départements et collectivités, notamment les crédits consacrés à l'emploi et au logement.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a ajouté que le ministère s'était bien approprié la LOLF. Il a indiqué que la mission était ainsi divisée en trois programmes :

- « Emploi outre-mer », qui regroupait de manière pertinente les mesures structurelles et conjoncturelles en faveur de l'emploi, notamment les contrats aidés et les exonérations de charges, insistant particulièrement sur les crédits du service militaire adapté (SMA), dispositif, géré par le ministère de la défense, qui donnait d'excellents résultats en outre-mer et qui allait être développé en métropole sous le nom de « contrat de volontariat pour l'insertion ».

- « Conditions de vie outre-mer », programme « pluridisciplinaire », qui comportait notamment deux actions extrêmement intéressantes, l'une consacrée au logement et l'autre consacrée à la continuité territoriale ;

- « Insertion et valorisation de l'outre-mer », programme « hybride » regroupant les fonctions de support et d'administration centrale, et des dotations versées en libre emploi aux collectivités, avec au premier rang la dotation globale de développement économique (DGDE) de la Polynésie française, pour 152 millions d'euros en 2006.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a jugé nécessaire de vérifier, lors de l'examen de la loi de règlement, si toutes les possibilités offertes par la LOLF, notamment la fongibilité des crédits, permettaient de mieux utiliser les enveloppes allouées à l'emploi et au logement, les deux secteurs les plus sensibles et sur lesquels la valeur ajoutée apportée par le ministère était la plus intéressante.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a cependant émis trois remarques afin de nuancer l'appréciation globalement positive portée sur la mission.

Il a noté que, si des améliorations avaient été perceptibles dans l'information au Parlement, en termes de délais des réponses aux questionnaires parlementaires, certaines des réponses n'apportaient qu'une contribution modeste à une bonne présentation des crédits, le « bleu » présentant un très grand nombre de coquilles, ce qui ne mettait cependant pas en doute la sincérité du budget.

Il a constaté que certains secteurs gagneraient à disposer d'indicateurs mieux élaborés et plus complets. Prenant l'exemple du logement, auquel 270 millions d'euros de crédits de paiement étaient consacrés, il a relevé que cette action du programme « conditions de vie outre-mer » ne permettait pas de savoir quelle était la proportion de logements insalubres, cette information étant pourtant disponible, pas plus que les besoins de logements sociaux et les moyens consacrés. Il a insisté sur ce point, indiquant que dans ce domaine, la possibilité de faire « basculer », par exemple, des crédits du logement social vers la réhabilitation, en fonction des besoins locaux, pouvait offrir de vraies possibilités.

S'agissant des dépenses fiscales, il a relevé qu'elles étaient en progression de 6 %, avec 2,5 milliards d'euros en 2006, ce qui démontrait l'attractivité des dispositions adoptées lors de l'examen de la loi de programme du 21 juillet 2003, la plus forte hausse étant constatée sur les dispositifs de défiscalisation au titre de l'impôt sur le revenu. Il a souligné qu'une évaluation de l'impact de ces mesures était prévue en 2006, avec l'ensemble des exonérations de charges. S'il s'est réjoui de voir les investissements affluer en outre-mer, il a indiqué qu'il fallait être particulièrement attentif à l'impact réel de ces mesures, soulignant que leur intérêt était de créer des emplois.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a évoqué les suites du contrôle budgétaire qu'il avait mené en Nouvelle-Calédonie en application de l'article 57 de la LOLF. Il a rappelé que les dépenses fiscales pourraient s'élever à plus de 400 millions de dollars, sans compter les sommes déjà versées et la garantie publique qui pourrait être présentée dans le cadre de la loi de finances rectificative. Il a indiqué qu'une décision ferme devait être prise avant le 31 décembre 2005 quant à la construction de l'usine du nord. Il a précisé qu'au mois d'octobre 2005, la société INCO, qui construisait l'usine dans le sud, avait annoncé le lancement d'une OPA amicale sur la société Falconbridge, qui devait réaliser l'usine du nord, en partenariat avec une entreprise locale.

Il a estimé que cette OPA présentait un grand avantage, la structure du capital de Falconbridge étant une source d'inquiétude, alors que la société INCO était reconnue et solide financièrement. Il s'est cependant inquiété d'une part, de savoir dans quelles conditions pourrait être prise la décision de construire l'usine avant le 31 décembre 2005, date limite fixée par les accords de Bercy du 1er juillet 1998, alors que l'OPA ne pourrait être finalisée que dans le courant du mois de janvier 2006, et d'autre part, de la manière dont allaient s'organiser sur le territoire les relations entre les autorités et une société qui posséderait deux usines de cette importance.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a alors rappelé le contenu des articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances qui concernaient l'outre-mer :

- l'article 61 qui limitait les niches fiscales, relevant que l'outre-mer bénéficiait d'un plafond spécifique et avantageux ;

- l'article 73 qui visait à supprimer les exonérations de charges à partir d'un certain niveau de salaire, relevant que cet article aurait logiquement dû être rattaché à la mission « Outre-mer ».

Il a indiqué que, sur ces deux articles, le Premier ministre avait annoncé qu'ils seraient modifiés par l'Assemblée nationale lors de l'examen des articles de la seconde partie non rattachés. Il a constaté, à ce propos, que les réformes en outre-mer posaient des difficultés spécifiques, déplorant que les évaluations de l'impact de certaines mesures qui avaient été remises au Parlement n'aient, pour leur part, pas eu de suite. A propos des articles 61 et 73, il a considéré que si l'Etat devait tenir sa parole, conformément au contenu de la loi de programme de 2003, il conviendrait d'examiner avec beaucoup d'attention les conclusions de l'évaluation qui serait effectuée en 2006, notant à ce propos qu'une même logique d'efficacité devrait conduire à admettre les conclusions du rapport de l'INSEE sur les compléments de rémunérations, remis en 2004, et à lancer la plus large concertation possible afin de réformer ce système.

M. Henri Torre, rapporteur spécial, a rappelé les quatre points qu'il avait déjà évoqués l'an passé lors de l'examen de la loi de finances pour 2005 :

- les compléments de rémunération pour les fonctionnaires en poste en outre-mer ;

- les congés bonifiés dont bénéficiaient les fonctionnaires d'origine ultra-marine prenant leurs congés dans leur département d'origine ;

- la TVA « non perçue remboursée » qui constituait de fait une mesure de soutien, d'un montant de 90 millions d'euros ;

- l'indemnité temporaire, qui était destinée aux fonctionnaires de l'Etat prenant leur retraite à la Réunion ou dans certaines collectivités d'outre-mer.

Il a regretté qu'aucune proposition n'ait été formulée sur l'un de ces points. Il a rappelé le caractère sensible des réformes en outre-mer, et les réactions très fortes qu'elles suscitaient. Il a déclaré que les besoins en outre-mer étaient considérables et réels, notamment pour le logement et pour l'emploi. Il a déploré que ces besoins, et de manière plus large l'image même de l'outre-mer, soient affectés par des survivances choquantes du passé, comme cette indemnité temporaire. Il a noté qu'il ne s'agissait pas de réformer « contre » l'outre-mer, mais bien pour l'outre-mer, afin de permettre un développement durable et réel de ces départements et collectivités.

M. Jean Arthuis, président, a félicité le rapporteur spécial pour la qualité de son analyse, qu'il a jugée « sans concession ».

A l'invitation de M. Henri Torre, rapporteur spécial, la commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer ».

Mercredi 16 novembre 2005

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

PJLF 2006 - Examen des articles de la première partie

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a rappelé que les dispositions fiscales les plus emblématiques du projet de loi de finances pour 2006 seraient examinées en seconde partie.

M. Jean Arthuis, président, a précisé que l'examen des articles non rattachés de la seconde partie commencerait en séance publique le samedi 10 décembre au matin.

La commission a adopté sans modification l'article premier relatif à l'autorisation de percevoir les impôts existants et l'article 2 relatif à l'actualisation du barème de l'impôt sur le revenu pour 2005.

A l'article 2 bis (nouveau) relatif à la prorogation de deux ans de l'abattement de 50 % sur les bénéfices agricoles réalisés par les jeunes agriculteurs et les signataires d'un contrat d'agriculture durable, après les interventions de MM. Jean-Pierre Masseret, Henri de Raincourt, Michel Charasse et de Mme Nicole Bricq, elle a adopté un amendement visant à pérenniser l'abattement de 50 % sur les bénéfices imposables des jeunes agriculteurs et à supprimer la prorogation de cet abattement pour les signataires d'un contrat d'agriculture durable.

Puis la commission a adopté sans modification l'article 2 ter (nouveau) relatif au relèvement du seuil de comptabilisation des recettes accessoires, issues d'activités commerciales et non commerciales, pour la détermination du bénéfice agricole, l'article 2 quater (nouveau) ouvrant de nouvelles possibilités de règlement des dons aux partis politiques et l'article 3 portant amélioration de la prime pour l'emploi.

Après les interventions de MM. Jean-Pierre Masseret, Michel Mercier, Henri de Raincourt et Michel Charasse, elle a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 3 tendant à la fiscalisation des intérêts des plans d'épargne logement (PEL) de plus de dix ans, et donné mandat au rapporteur général pour en parfaire, le cas échéant, la rédaction.

La commission a adopté sans modification l'article 4 relatif à la réduction de dix à six ans du délai du rappel fiscal des donations antérieures et l'article 5 relatif à l'aménagement du régime des réductions de droits applicables aux donations.

A l'article 6 instaurant un abattement en faveur des transmissions à titre gratuit entre frères et soeurs ainsi que des donations consenties au profit des neveux et nièces, après les interventions de MM. Aymeri de Montesquiou etMichel Charasse, elle a adopté un amendement prévoyant un abattement spécifique de 5.000 euros pour les arrière-petits-enfants.

La commission a adopté sans modification l'article 7 relatif au crédit d'impôt en faveur de la mobilité des chômeurs et l'article 8 relatif à l'allègement des revenus fonciers suite à une mobilité professionnelle.

A l'article 9 relatif à l'allègement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties supportée par les exploitants agricoles, après les interventions de MM. Michel Mercier et Henri de Raincourt, elle a adopté à l'unanimité, moins deux abstentions, un amendement visant à supprimer cet article.

Après les interventions de MM. Michel Mercier et Michel Charasse, la commission a alors décidé de réserver son vote sur l'article 10 relatif à la suppression de la taxe différentielle sur les véhicules terrestres à moteur qui est compensée par une modification du tarif et du champ d'application de la taxe sur les véhicules de sociétés.

La commission a adopté sans modification l'article 11 relatif à la limitation de la déduction, au plan fiscal, des dotations aux amortissements et des loyers concernant les véhicules les plus polluants.

Après les interventions de MM. Serge Dassault, Jean-Jacques Jégou, Michel Mercier et Paul Girod, ainsi que de Mmes Nicole Bricq et Fabienne Keller, la commission a alors décidé de réserver son vote sur l'article 12 relatif à la création d'une taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation applicable aux véhicules à forte émission de CO2.

La commission a ensuite adopté sans modification l'article 13 relatif à l'aménagement du régime fiscal privilégié des biocarburants ainsi que du régime de la taxe générale sur les activités polluantes relative aux carburants et l'article 13 bis (nouveau) relatif à la modification du champ d'application de la réduction de la taxe intérieure de consommation au profit de l'alcool éthylique non dénaturé.

Puis elle a adopté un amendement tendant à supprimer l'article 13 ter (nouveau) relatif à la modification du champ d'application de la réduction de la taxe intérieure de consommation au profit des unités de production d'alcool éthylique.

A l'article 14 relatif à la réforme de l'imposition forfaitaire annuelle (IFA), après les interventions de MM. Michel Mercier, Jean-Jacques Jégou etMarc Massion, elle a adopté un amendement tendant à modifier le barème pour relever le seuil d'imposition applicable aux PME.

La commission a adopté sans modification l'article 15 relatif au renforcement du caractère incitatif du crédit d'impôt recherche, l'article 16 relatif à l'imposition des intérêts capitalisés rémunérant les sommes transférées hors de France lors d'émission de titres subordonnés à durée indéterminée (TSDI) et l'article 16 bis (nouveau) modifiant le régime du crédit d'impôt pour les dépenses de production d'oeuvres cinématographiques et d'oeuvres audiovisuelles.

A l'article 17 relatif au plafonnement des provisions pour dépréciation des titres de participation et des immeubles de placement en fonction des plus-values latentes, après les interventions de MM. Serge Dassault, Yves Fréville etMichel Charasse, elle a adopté un amendement tendant à préciser la méthode de valorisation des titres de participation de sociétés cotées.

Après les interventions de MM. Serge Dassault et Eric Doligé, à l'article 17 bis (nouveau) relatif à l'exonération partielle d'ISF des parts détenues dans leur entreprise par les salariés et les anciens salariés retraités, la commission a adopté trois amendements de précision.

Elle a ensuite adopté deux amendements portant articles additionnels après l'article 17 bis (nouveau). Le premier de ces deux amendements tend à raccourcir de dix à six ans le délai de reprise en matière de droits d'enregistrement et d'impôt de solidarité sur la fortune. Après les interventions de MM. Serge Dassault, Alain Lambert, Michel Charasse et Yann Gaillard, la commission a adopté un second amendement tendant à relever de 20 % à 30 % l'abattement applicable à la valeur de la résidence principale en matière d'impôt de solidarité sur la fortune.

La commission a maintenu la suppression de l'article 18 relatif au financement de l'apprentissage et adopté sans modification l'article 19 relatif à l'alignement des taux de l'intérêt de retard et des intérêts moratoires et l'article 20 concernant la budgétisation du compte de tiers « tabac ».

Après l'intervention de M. Michel Charasse, elle a adopté à l'unanimité un amendement tendant à supprimer l'article 20 bis (nouveau) relatif au relèvement du plafond de ressources ouvrant droit au prêt à taux zéro.

La commission a adopté sans modification l'article 20 ter (nouveau) relatif au taux de TVA applicable aux bonbons de chocolat et l'article 20 quater (nouveau) apportant des précisions quant à l'application de l'impôt de bourse à certaines valeurs mobilières indexées.

La commission a ensuite décidé de réserver son vote sur l'article 21 relatif au reversement des disponibilités du Fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (FGAS) et au transfert à l'Etat de la gestion directe de la garantie qu'il accorde aux prêts de l'accession sociale.

A l'article 22 relatif au montant et à la répartition du prélèvement de solidarité pour l'eau, après les interventions de Mme Fabienne Keller et de MM. Jean-Jacques Jégou etMichel Charasse, elle a adopté un amendement visant à réduire de moitié le montant du prélèvement de solidarité pour l'eau prévu en 2006, en vue de permettre au gouvernement d'expliquer sa politique en la matière.

La commission a adopté sans modification l'article 23 relatif à la reconduction du contrat de croissance et de solidarité.

La commission a décidé de réserver son vote sur l'article 24 relatif à la réforme de la dotation globale d'équipement des départements.

Puis la commission a adopté sans modification l'article 25 relatif à l'affectation de la régularisation au titre de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour 2004 des communes et de leurs groupements, l'article 26 relatif à la compensation financière, pour 2006, des transferts de compétences aux régions, l'article 27 relatif à la compensation financière en 2006 des transferts de compétences aux départements, l'article 28 relatif aux règles d'éligibilité, d'affectation et de reversement, applicables au Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), l'article 29 concernant l'évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités territoriales, l'article 30 portant suppression des comptes d'affectation spéciale existant, en 2006, l'article 31 relatif à la suppression des comptes de prêts et comptes d'avances existant en 2005 et à la création des comptes de concours financiers et tendant enfin à diverses modifications relatives aux comptes de commerce et aux comptes d'opérations monétaires existants.

La commission a ensuite adopté l'article 32 relatif à la création du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier », l'article 33 relatif à la création du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat », l'article 34 portant création du compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », l'article 35 relatif à la création du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale », l'article 36 concernant la création du compte d'affectation spéciale « Pensions », l'article 37 relatif à la création du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » et l'article 38 relatif à l'affectation de recettes au profit d'un établissement public chargé du développement du sport.

A l'article 39 relatif à la création du compte de commerce « Couverture des risques financiers de l'Etat », après les interventions de MM. Gérard Longuet, Yves Fréville et Paul Girod, elle a adopté un amendement de coordination.

La commission a adopté sans modification l'article 40 relatif aux dispositions relatives aux affectations.

A l'article 41 relatif au financement des allègements généraux de cotisations sociales patronales par le transfert de recettes fiscales à la sécurité sociale, après les interventions de MM. Jean-Jacques Jégou etMichel Charasse, elle a adopté un amendement ayant pour objet de substituer une fraction de TVA aux taxes et impôts affectés au régime de sécurité sociale, en compensation du transfert de financement des mesures d'allègement de cotisations sociales.

A l'article 42 relatif aux mesures modifiant la répartition du droit de consommation du droit sur les tabacs et d'autres recettes fiscales, elle a adopté un amendement de coordination.

La commission a ensuite adopté sans modification l'article 43 relatif à l'affectation de la taxe intérieure sur les consommations de gaz naturel à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'article 44 portant affectation au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres d'une partie du droit de francisation et de navigation, l'article 45 relatif à l'affectation, à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), du produit du droit de timbre perçu pour la validation du permis de chasser et l'article 46 concernant l'aménagement du régime de la taxe d'aviation civile.

Puis la commission a adopté l'article 47 relatif à l'affectation de recettes à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), l'article 48 relatif à la création d'une société de valorisation des biens immobiliers de Réseau ferré de France (RFF), l'article 49 relatif au transfert à l'Etat des droits et obligations afférents à la gestion du Réseau de recherches sur les technologies pétrolières et gazières (RTPG), l'article 50, précédemment examiné par la commission lors de sa réunion du 3 novembre 2005, relatif à l'évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes ainsi que l'article 51 relatif à l'équilibre général du budget.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2006 ainsi modifiée.

PJLF 2006 - Mission « Relations avec les collectivités territoriales », compte spécial « Avances aux collectivités territoriales » et articles 82 à 85 - Examen du rapport spécial

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a examiné le rapport spécial de M. Michel Mercier, rapporteur spécial, sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (RCT), le compte spécial « Avances aux collectivités territoriales » (ACT) et les articles 82 à 85 rattachés.

M. Michel Mercier a estimé que la mission et le compte spécial précités ne permettaient pas de se faire une idée des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Il a rappelé que les crédits de la mission RCT étaient de seulement 2,9 milliards d'euros, contre 13,3 milliards d'euros pour le programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » de la mission « Remboursements et dégrèvements », et 47,3 milliards d'euros pour le prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités territoriales, qui, en tant que prélèvement sur recettes, ne pouvait faire l'objet d'une mission, mais figurait en première partie (article 29) du projet de loi de finances.

Il a indiqué que la mission RCT comprenait quatre programmes, eux-mêmes organisés autour de dix budgets opérationnels de programme :

- le programme 119 « Concours financiers aux communes et groupements de communes » (724 millions d'euros) ;

- le programme 120 « Concours financiers aux départements » (771 millions d'euros) ;

- le programme 121 « Concours financiers aux régions » (1,4 milliard d'euros) ;

- le programme 122 « Concours spécifiques et administration » (25 millions d'euros).

M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a considéré que la LOLF pouvait difficilement s'appliquer à la mission RCT, de même qu'aux autres concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales, l'Etat ayant peu de liberté en matière de répartition des dotations, cette répartition obéissant généralement à des critères fixés par la loi. Il a souligné, à cet égard, que l'Etat n'avait aucun pouvoir de décision pour 80 % des crédits de la mission RCT.

Il a jugé que l'essentiel des dispositions du projet de loi de finances pour 2006 relatives aux finances locales ne figuraient pas dans la mission RCT, mais dans ses articles 23, 24, 58 et 67, relatifs respectivement à la reconduction du contrat de croissance et de solidarité, à la réforme de la dotation globale d'équipement (DGE) des départements, au « bouclier fiscal » et à la réforme de la taxe professionnelle. Il a précisé que ces dispositions feraient l'objet des débats sur les recettes des collectivités territoriales du mardi 29 novembre 2005, à l'exception des articles 58 et 67 précités, figurant dans la seconde partie du projet de loi de finances, dont la discussion stricto sensu aurait lieu à partir du samedi 10 décembre 2005.

Il a considéré que les relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales traversaient une période difficile, les transferts de compétences prévus par la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité et la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales n'ayant pas été compensés de manière satisfaisante. Il a jugé, en outre, que la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées aurait un coût élevé pour les départements, et a estimé que le Sénat en était en partie responsable.

Il a considéré qu'au total, les départements étaient la catégorie de collectivités territoriales dont la situation financière était la plus difficile, leurs dépenses consistant, de plus en plus, en la mise en oeuvre de dispositifs nationaux dans le domaine social, et leur autonomie fiscale étant de plus en plus faible. Il a estimé que l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) devrait être prise en charge à hauteur d'au moins 50 % par l'Etat, soulignant à cet égard que dans le département du Rhône, le nombre d'allocataires de l'APA augmentait de 200 personnes par mois, ce qui en portait désormais le nombre total à 20.000, et suscitait en 2005 un coût net de 55 millions d'euros. Il a déploré que la compensation du revenu minimum d'insertion (RMI) ait été inférieure de 453 millions d'euros en 2004 aux dépenses des départements, et rappelé à cet égard que M. Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, s'était engagé, le 7 mars 2005, à ce que l'Etat finance le coût exact de la dépense, y compris le décalage constaté par les départements au titre de l'année 2004. Il a déploré qu'il ne soit pas prévu de rendre cette compensation pérenne, ni de compenser le décalage observé en 2005, qu'il a jugé compris entre 800 millions d'euros et un milliard d'euros. Il s'est inquiété du fait que les négociations actuellement en cours au sujet de l'assurance-chômage puissent se traduire par des dépenses supplémentaires pour les départements. En ce qui concerne la prestation de compensation du handicap (PCH), il a rappelé que la décision d'attribution serait prise par une « commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées », et indiqué que dans le cas du département du Rhône, 44.000 dossiers devraient être prochainement examinés, ce qui constituait une charge considérable.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a considéré que les départements n'avaient pas les ressources nécessaires pour financer ces nouvelles charges. Il a déploré qu'ils n'aient aucun contrôle sur les ressources concernées : contributions de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) au financement de l'APA et à la PCH, fraction de tarif de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) destinée à compenser le transfert du RMI. Il a considéré que le produit des droits de mutation à titre onéreux allait devenir moins dynamique du fait du tassement, voire du retournement, du marché de l'immobilier, et rappelé que le gouvernement, pour des raisons techniques et d'équité, avait renoncé à permettre aux départements de moduler le taux de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA) contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur. Il a en outre estimé que la réforme du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée prévue par l'article 67 du projet de loi de finances pour 2006 allait fortement réduire l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. Il a considéré qu'en conséquence, les départements n'auraient d'autre choix que d'augmenter les taux de taxe d'habitation et de taxe foncière sur les propriétés bâties, impôts dont il a déploré l'inéquité.

Il a considéré que le Sénat, de par sa fonction de représentant des collectivités territoriales de la République, devait se saisir de la question du financement, par les départements, de leurs nouvelles compétences. Il a en outre proposé que soit appliqué un « moratoire » d'une année sur la mise en oeuvre des transferts ou extensions de compétences. Il a indiqué son intention de faire recenser sur une année tous les textes, généralement réglementaires ou infra-réglementaires, augmentant les dépenses des départements.

Il a néanmoins proposé à la commission d'adopter sans modification les crédits de la mission RCT et du compte spécial ACT, ainsi que les articles 82 à 85, rattachés à la mission RCT.

Un large débat s'est ouvert.

M. Jean Arthuis, président, a félicité le rapporteur spécial pour la qualité de son intervention, et considéré que l'insuffisance de la compensation des transferts de compétences aux départements pourrait se reporter, par contagion, sur les autres catégories de collectivités territoriales. Il a estimé que la question des charges des départements ne pouvait être dissociée de celle, plus globale, des charges de l'ensemble des administrations publiques.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a considéré que l'article 24 du projet de loi de finances pour 2006, qui réformait la dotation globale d'équipement (DGE) des départements, partait d'une bonne idée, puisqu'il s'agissait de mettre fin à un « saupoudrage » inefficace. Il a cependant déploré que cette réforme ne soit qu'imparfaitement compensée, puisqu'aux 35 millions d'euros non compensés en 2006 s'ajouteraient, les années suivantes, les 98,4 millions d'euros ne devant l'être qu'en 2006. Au sujet de la réforme de la taxe professionnelle prévue par l'article 67 du projet de loi de finances, il a jugé nécessaire que la commission dispose de simulations nominatives par collectivité, et que le dispositif soit modifié afin que les collectivités territoriales dont la bonne gestion permettait de faibles taux d'imposition ne soient pas pénalisées. Il a affirmé qu'il ne se voyait pas voter un projet de loi de finances comprenant de telles dispositions. Il a jugé que le gouvernement aurait dû plus clairement indiquer que l'objectif de l'article 24 précité était d'effectuer des économies, et considéré, faisant référence à un récent rapport de la Cour des comptes, que les établissements publics de coopération intercommunale étaient parfois la source de dépenses injustifiées.

M. Henri de Raincourt a déclaré partager les analyses du rapporteur spécial, en particulier sur la situation financière des départements, et a approuvé sa proposition que le Sénat se saisisse de la question du financement des nouvelles compétences des départements. Il a considéré que les articles 24 et 67 précités du projet de loi de finances pour 2006, relatifs respectivement à la réforme de la DGE des départements et de la taxe professionnelle, devraient être modifiés afin de ne pas déstabiliser les finances des collectivités territoriales.

M. Jean Arthuis, président, a estimé que tout supplément de dépenses décidé par l'Etat devait être financé par l'Etat.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a souligné la difficulté d'appliquer la LOLF à la mission RCT. En ce qui concernait l'article 24 précité, il a annoncé son intention d'obtenir une meilleure compensation de la réforme de la DGE des départements. Il a considéré que ce qui importait n'était pas tant la répartition des charges entre les différentes catégories d'administrations publiques que les charges globales des administrations publiques. Il a jugé nécessaire que la commission approfondisse la question des ressources et des charges des départements. En ce qui concernait l'article 67 précité, il a estimé que la commission devait disposer de simulations nominatives. Il a considéré, comme le rapporteur spécial, que la réforme du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée ne devait pas pénaliser les collectivités territoriales qui avaient peu augmenté leurs taux ces dernières années, et a indiqué son intention de proposer des dispositions en ce sens.

M. Yves Fréville a estimé que la réforme de la DGF réalisée par les lois de finances initiales pour 2004 et 2005 ne permettait pas de réduire suffisamment rapidement la part des anciennes dotations de péréquation, fondues depuis longtemps dans la DGF, et ayant évolué jusqu'en 2004 comme la dotation forfaitaire, alors même que leur existence n'était plus justifiée. Au sujet de la réforme de la taxe professionnelle, il a considéré que les collectivités qu'il convenait d'aider étaient non celles à faible taux, mais celles à faible potentiel financier.

M. Gérard Miquel a considéré, pour le déplorer, que les transferts de compétences aux départements et les dispositions du projet de loi de finances pour 2006 allaient contraindre les départements à accroître les taux d'imposition au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe d'habitation.

M. Michel Moreigne a considéré que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre étaient générateurs d'inégalités devant l'impôt, parce qu'ils appliquaient un taux unique à des bases différentes d'une commune à l'autre. Il s'est inquiété des conséquences des articles 24 et 67 précités, réformant respectivement la DGE des départements et la taxe professionnelle.

M. François Marc a indiqué qu'il ne pensait pas suivre la proposition du rapporteur spécial de voter les crédits de la mission RCT, à cause d'un problème de confiance, et de la nécessité dans laquelle se trouvaient les collectivités territoriales d'augmenter les taux des impôts reposant sur les ménages. Il a estimé que les positions de la commission en matière de finances locales s'appuyaient insuffisamment sur des simulations. Il a considéré que le gouvernement avait trop tendance à tenir un discours de culpabilisation des élus locaux, en particulier en ce qui concernait l'augmentation par les régions des taux d'imposition. Enfin, il a jugé que les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale devaient être élus au suffrage universel.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité de ce qu'un an après qu'il l'ait demandé, le Sénat soit sur le point de se doter d'une base de données relative aux finances locales, en particulier grâce à l'implication de M. Philippe Dallier, membre de l'observatoire de la décentralisation.

Après avoir regretté que le projet annuel de performance de la mission RCT ne permette pas de se faire une idée complète des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales, Mme Marie-France Beaufils s'est inquiétée des conséquences sur les établissements publics de coopération intercommunale de la réforme de la taxe professionnelle proposée par l'article 67 du projet de loi de finances, et de l'insuffisance de la compensation des transferts de compétences opérés en faveur des départements.

M. Jean-Claude Frécon s'est inquiété des conséquences sur les collectivités territoriales des articles 58, 61 et 67 du projet de loi de finances pour 2006, relatifs respectivement au « bouclier fiscal », au plafonnement des « niches » fiscales et à la réforme de la taxe professionnelle. Il a jugé nécessaire de réviser les valeurs locatives cadastrales. Il a déploré que l'article 82 du projet de loi de finances pour 2006 propose de créer, au sein de la dotation de développement rural (DDR), une seconde part réservée aux communes.

M. Michel Charasse a considéré que l'ensemble des concours de l'Etat aux collectivités territoriales devait faire partie d'une mission unique. Il a approuvé la proposition de M. Henri de Raincourt, soutenue par M. Philippe Marini, rapporteur général, que la commission se saisisse de la question du financement des nouvelles compétences des départements. Il s'est inquiété de la diminution en 2004 de la part des ressources propres dans les ressources des collectivités territoriales, considérant que cet écart allait vraisemblablement se creuser en 2005 et en 2006. Il a jugé, comme M. Jean Arthuis, président, que le déficit des administrations publiques devait être perçu de manière globale, et a approuvé l'idée de « moratoire » des transferts et extensions de compétences avancée par M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Il a jugé que les établissements publics de coopération intercommunale réalisaient souvent des dépenses injustifiées.

A l'issue de ce débat, la commission adécidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte spécial du Trésor « Avances aux collectivités territoriales », ainsi que sur les articles 82 à 85 rattachés, jusqu'à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, prévue pour le mardi 22 novembre 2005.

PJLF pour 2006 - Audition de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer

Puis la commission a procédé à l'audition de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, a indiqué que l'ensemble des crédits programmés pour les missions gérées par le ministère de l'équipement s'élevait à 17 milliards d'euros pour 2006, soit une progression de 5,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005. Il a souligné l'importance de cet effort public et précisé que les moyens nouveaux mis en oeuvre dans le cadre de la mission « Transports » seraient consacrés à 4 objectifs ambitieux : la réalisation de grands projets d'infrastructure, l'amélioration de la sécurité dans les transports, la mise en cohérence du secteur avec l'impératif du développement durable et la poursuite des réformes du ministère.

S'agissant des infrastructures, M. Dominique Perben a souligné que l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) était désormais l'outil principal de leur financement. Les moyens de l'agence comprendront, comme l'année précédente, les redevances domaniales, et seront complétés en 2006 par le produit de la taxe d'aménagement du territoire, une partie du produit des amendes des radars automatiques, soit un montant de 770 millions d'euros de recettes pérennes, et une subvention budgétaire de près de 400 millions d'euros. L'attribution d'une partie des recettes de privatisation des sociétés d'autoroute permettra ainsi à l'AFITF de disposer d'un budget de 2 milliards d'euros en 2006, contre 1,1 milliard d'euros en 2005. L'AFITF aura pour priorité l'amélioration du taux de réalisation des contrats de plan Etat-Régions (CPER) et l'accélération de la mise en oeuvre des grands projets définis par le Comité interministériel d'aménagement du territoire (CIAT) de décembre 2003.

M. Dominique Perben a souligné que, dans ce cadre, 30 millions d'euros seraient consacrés à la mise en place des partenariats publics-privés.

Sur le deuxième objectif relatif à la sécurité dans les transports, il a observé qu'il concernerait l'ensemble des modes de transport et, en particulier, le réaménagement des tunnels routiers de la région parisienne, la mise en place de 500 nouveaux radars sur les routes, l'augmentation du nombre des contrôles sur les compagnies aériennes et les avions, le renforcement du maillage des stations de Météo-France, et le lancement d'un plan de régénération du réseau ferroviaire. Il a enfin précisé qu'une de ses priorités serait, en 2006, la réorganisation des services déconcentrés de son ministère après celle de l'administration centrale intervenue en 2005.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a constaté que depuis 2003, le ministère de l'équipement avait réalisé des efforts significatifs d'adaptation de ses effectifs contribuant ainsi activement à la réforme de l'Etat. Il a noté qu'en raison des perspectives ouvertes par la privatisation des sociétés d'autoroutes, ce ministère retrouvait dans sa politique d'investissement des marges de manoeuvre qui pourraient être utilisées pour le réajustement de la part de l'Etat dans les CPER. Il a interrogé le ministre sur les perspectives nouvelles des grands investissements d'infrastructure, et en particulier, sur le projet de canal Seine-Nord-Europe qui devrait faire l'objet d'un contrat de partenariat public-privé.

M. Dominique Perben a répondu que le projet de canal Seine-Nord-Europe avait été retenu par le CIAT de décembre 2003, et que les études avaient été lancées en novembre 2004. Il a indiqué que le dossier d'avant-projet serait remis dans le courant du premier semestre 2006 et que la déclaration d'utilité publique pourrait intervenir en 2007. Il a confirmé la volonté forte du gouvernement d'avancer sur la mise en oeuvre de ce projet.

M. Alain Lambert, rapporteur spécial de la mission « Transports », s'est félicité de la collaboration qui s'est instaurée avec le ministère de l'équipement, ainsi que de l'attachement de ses services aux objectifs de transparence et de performance. Il a interrogé le ministre sur le calendrier de la privatisation des autoroutes, sur l'évolution de la procédure de transfert partiel du capital de la Société nationale corse méditerranée (SNCM) et sur les objectifs qu'il retenait pour l'exécution du volet routier des CPER d'ici à la fin 2006. Il s'est également enquis de son avis quant à une éventuelle unification des systèmes de gestion de la dette de l'Etat, de Réseau ferré de France (RFF) et de la SNCF.

En réponse à ces interrogations, M. Dominique Perben a indiqué que les décisions d'attribution relatives à la privatisation des sociétés d'autoroutes seraient prises d'ici à la fin de l'année 2005. Il a précisé, que pour les CPER, son objectif était d'atteindre un taux d'exécution, fin 2006, de 76,5 % sur le volet routier, entre 63 % et 64 % sur les autres volets et de 64 % sur le transport collectif en Ile-de-France. Compte tenu d'une réelle « sur-programmation », il a considéré que cet objectif était ambitieux. S'agissant de la SNCM, après avoir rappelé qu'il avait effectué cinq déplacements sur place, il a observé que l'entreprise avait repris un fonctionnement normal, que le processus de transfert partiel de propriété était enclenché. Il a souligné la nécessité de « tenir les délais » pour éviter un risque de rebondissement social. Il a fait remarquer que le gouvernement, face à l'incompréhension des salariés, avait toujours agi avec la volonté de sauver l'entreprise en assainissant durablement sa situation.

S'agissant de la dette de RFF et de la SNCF, M. Dominique Perben s'est déclaré favorable à l'engagement d'une réflexion avec la commission des finances sur des évolutions futures. Il a indiqué, après les observations de MM. Jean Arthuis, président, et Alain Lambert, rapporteur spécial, sur le différentiel de dix points entre le coût de la gestion de la dette de l'Etat et celle de la SNCF, qu'un rapport sur la gestion du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD) serait remis avant le 30 juin 2006.

En ce qui concerne les partenariats public-privé, il a souligné que le choix des opérations qui en bénéficieront avait été effectué de manière à privilégier des investissements lourds, attendus depuis longtemps, et que les financements classiques n'étaient pas en mesure d'assurer. Il a précisé que ces partenariats concerneraient 12 projets routiers, 6 projets ferroviaires et l'aéroport de Nantes. Il a indiqué enfin que le projet d'autoroute de la mer en Atlantique, qui sera financé dans le cadre d'un partenariat, recevait désormais un accueil favorable de l'Espagne.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la mission « Transports » a souligné l'excellence des rapports entretenus avec la DGAC et les services du ministère de l'équipement. Il s'est inquiété de l'effet de l'institution de la taxe de solidarité sur le secteur aérien compte tenu de la concurrence y régnant ainsi que des projets de développement d'Aéroports de Paris (ADP) et d'Air France.

M. Dominique Perben a répondu que le gouvernement était très attentif à l'évolution des taxes dans le domaine aérien et, en particulier, aux effets de la taxe de solidarité dont trois pays ont actuellement décidé la mise en place : la France, la Grande-Bretagne et le Chili. Il a fait observer qu'un des problèmes lié à la mondialisation du transport aérien était l'incapacité de certains pays à assurer la régulation des compagnies qui sont immatriculées sur leur sol. Il a également évoqué les décisions prises récemment, à son initiative, au niveau français et qui comprennent : l'augmentation de 20 % des contrôles « SAFA » (safety assessment of foreign aircraft - évaluation de la sécurité des aéronefs étrangers), alors que la France effectue déjà le tiers des contrôles réalisés sur l'espace européen, l'obligation pour les agences de voyages de préciser à leurs clients l'identité des compagnies assurant les vols, et la publication sur Internet d'une liste noire des compagnies.

M. Dominique Perben a indiqué qu'il avait présenté un mémorandum au Conseil des transports de l'Union européenne en octobre 2005. Les propositions présentées consistent à retenir les mêmes critères pour tous les pays de l'Union européenne, à disposer d'une liste commune de sociétés interdites, à appliquer les règles de la transparence des listes noires d'ici à la fin 2005 dans l'ensemble de l'Union européenne, et à améliorer la coopération au sein de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

M. Maurice Blin a souhaité savoir si la liste des projets de contournement de ville était limitative. Il s'est interrogé aussi sur l'actualité de la question du rééquilibrage des modes de transport et a demandé au ministre des précisions quant aux projets européens prioritaires en matière d'infrastructures et de grands travaux.

M. Eric Doligé s'est inquiété des incidences du transfert du patrimoine routier sur le budget des départements. Il a indiqué avoir reçu, dans son département, des modèles de délibération, tendant à l'inscription de dépenses d'entretien sur le réseau routier national transféré, sans aucune justification de la part des services de l'équipement. Il a regretté, par ailleurs, le retard pris dans la réalisation des CPER.

M. Roger Karoutchi a remercié le ministre pour la part qu'il avait prise dans la résolution de la crise liée au transfert du Syndicat des transports de l'Ile-de-France (STIF) à la région. Il a observé que les contrats de plan pour les transports collectifs en Ile-de-France donnaient lieu à des dérapages de coût et représentaient un montant global de travaux de 9 milliards d'euros qu'il a jugé irréaliste et irréalisable. Il a donc interrogé le ministre sur les perspectives de réforme du système actuel de contrat de plan. S'agissant de la SNCF, il a constaté qu'une cinquième grève était d'ores et déjà programmée et s'est inquiété de l'opportunité d'un texte établissant le service minimum ainsi que de l'extension d'un système de service garanti, au delà de la seule région Ile-de-France.

M. Roger Besse a constaté que le transfert des personnels des directions départementales de l'équipement avait eu pour conséquence, dans son département, une concentration des subdivisions dans les sous-préfectures.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur les effets concrets sur l'activité de l'AFITF de la réduction de crédits de 30 millions d'euros votée par l'Assemblée nationale. Il a également demandé quelle serait la date de publication du décret transférant une partie des routes nationales aux départements, et a estimé que trop d'ouvertures simultanées de chantiers ralentissaient leur réalisation.

En réponse aux différents intervenants, M. Dominique Perben a indiqué que 94 projets au total avaient été actés et confirmés par les comités interministériels d'aménagement du territoire. Rappelant que le rapport entre le transport par route et les autres modes de transport s'établissait actuellement à 85 % contre 15 %, alors que les crédits de l'AFITF étaient répartis à égalité entre les modes de transport, il en a conclu qu'il existait une évidente volonté de rééquilibrage. Il a souligné qu'il avait demandé à RFF et à la SNCF d'amplifier leurs efforts en ce sens par la réalisation de l'autoroute ferroviaire Luxembourg-Perpignan. Il a estimé que les opérateurs de transports et les chargeurs devaient avoir à leur disposition un choix d'infrastructures fiables et performantes. S'appuyant sur l'exemple du chantier du tunnel du Saint-Gothard en Suisse, il a relevé la fragilité extrême des infrastructures de l'arc alpin qui reposent actuellement sur trois points de passage seulement : Vintimille, le tunnel du Fréjus et celui du Mont-Blanc.

Il a estimé, qu'au niveau européen, deux types de pays existaient : les uns de transit - souvent favorables à l'eurovignette, et les autres périphériques. Dans ce cadre, la prise de conscience de l'opinion publique, désormais attentive à la qualité d'un système de transport respectueux du cadre de vie, prendrait sûrement bientôt en France l'ampleur qu'elle a prise dans d'autres pays européens.

Il a souligné, à cet égard, que le transport combiné bénéficiait d'une progression de 50 % de ses crédits en 2006 et qu'il s'était attaché à lancer l'étude de nouveaux modes de transport comme le « meroutage ».

M. Dominique Perben a indiqué que le décret transférant les routes nationales serait publié dans les tout prochains jours et que les arrêtés préfectoraux de transfert interviendraient avant la fin de l'année. Il a rappelé que les inscriptions budgétaires des dépenses dans les budgets départementaux auraient leur contrepartie dans la dotation générale de décentralisation au premier trimestre 2006. Il a précisé que le transfert des personnels n'aurait pas lieu en même temps que celui des routes et qu'il représentait un travail considérable pour les présidents des conseils généraux comme pour l'administration de l'équipement. Compte tenu des conséquences pour les personnels, qui sont dans l'incertitude, une attention toute particulière sera accordée par les directeurs départementaux de l'équipement à la question de la répartition des effectifs sur les sites afin de ne pas conduire à un éclatement excessif des équipes.

S'agissant de la nouvelle génération de CPER, M. Dominique Perben a souligné qu'elle devait intégrer le décroisement des financements et les effets du transfert des routes sur le rôle des régions dans le domaine des infrastructures routières. Il a également observé qu'un examen attentif des contrats actuels faisait apparaître à la fois une surprogrammation mais aussi une part notable de projets inscrits, bien qu'irréalisables sur la durée des contrats. De ce fait, un certain nombre d'opérations qui ont été engagées n'étaient pas prioritaires. Il en a conclu à la nécessité de s'interroger sur la pertinence de la méthode retenue par rapport aux dépenses, estimant qu'un élément de réponse pouvait résider dans l'exemple de l'étude qui avait été réalisée en 2003 afin de définir un schéma national de grandes infrastructures. S'agissant de la grève à la SNCF, M. Dominique Perben a fait observer que sa motivation affichée, qui était de s'opposer à la « privatisation rampante » de la SNCF, lui apparaissait sans fondement.

Notant que le système du service garanti avait très bien fonctionné à la RATP et de manière satisfaisante à la SNCF en Ile-de-France, il a indiqué qu'un accord similaire s'appliquerait en région Alsace à compter du 1er janvier 2006 et qu'il était favorable à ce que d'autres initiatives soient prises dans d'autres régions.

Il a souligné, encore une fois, que les moyens et les effectifs des subdivisions de l'équipement devraient être positionnés, après le transfert, de manière à conserver une masse critique suffisante indispensable à la qualité du service rendu.

En conclusion, il a indiqué que le conseil d'administration de l'AFITF examinerait les conséquences de la réduction de crédits votée par l'Assemblée nationale et sa répartition sur les projets d'infrastructure. Il a convenu que la réduction de la durée des chantiers permettrait, certainement, des économies.

M. Jean Arthuis, président, a remercié le ministre pour sa disponibilité et la qualité des réponses apportées à la commission.

A l'issue de l'audition du ministre, à l'invitation de ses rapporteurs spéciaux, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Transports » du budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » et du compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisées des infractions au code de la route » ainsi que de l'article 90 rattaché.

Jeudi 17 novembre 2005

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

PJLF 2006 - Mission « Justice » - Examen du rapport spécial

La commission a tout d'abord examiné le rapport spécial de M. Roland du Luart, rapporteur spécial, sur la mission « Justice ».

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a rappelé que la mission « Justice » était constituée des cinq programmes suivants : « Justice judiciaire », « Administration pénitentiaire », « Protection judiciaire de la jeunesse », « Accès au droit et à la justice » et « Conduite et pilotage des politiques de la justice ».

Tout d'abord, il a souhaité faire quelques remarques de caractère général sur la mission « Justice » :

- il a constaté, au cours de ses déplacements et auditions, que la mise en oeuvre de la LOLF avait permis un développement nécessaire de la culture de gestion au sein de la justice, laquelle peut tout à fait se concilier avec le principe constitutionnel de l'indépendance de l'autorité judiciaire ;

- il a exprimé le souhait que la politique volontariste engagée par le garde des sceaux afin de maîtriser les frais de justice, dans le respect de la liberté du prescripteur, porte suffisamment ses fruits pour justifier le montant proposé des crédits prévus à ce titre pour 2006 ;

- il a également fait part des interrogations subsistant quant au niveau de prévision des crédits d'aide juridictionnelle, dont l'engagement était lié à la seule preuve par le justiciable de ce qu'il répondait aux conditions fixées par la loi, ajoutant que l'instabilité de la législation pénale s'avérait coûteuse.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, s'est réjoui de l'annonce faite devant le Sénat par M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, le 10 novembre 2005, de sa détermination à veiller à l'exactitude et à la cohérence des études d'impact financier, qui devraient constituer un accompagnement indispensable des projets de réforme législative.

Il a fait valoir que la poursuite de la bonne exécution du programme pénitentiaire de rénovation et de construction d'établissements était indispensable, y compris pour limiter la promiscuité dans les prisons, source de « contagion » de la délinquance.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a confirmé la demande, déjà clairement exprimée par la commission des finances, de regroupement, dans la mission « Justice », des juridictions administratives et judiciaires.

Puis M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a, tout d'abord, évoqué le programme « Justice judiciaire ». Il a rappelé que la mise en oeuvre de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ), avait connu quelque retard en ce qui concerne les créations d'emplois prévues sur la période 2003-2007 puisqu'à la fin de 2006, le taux d'exécution de celles-ci s'établit à 65 % pour les magistrats et à seulement 38 % pour les greffiers, alors que le taux théorique d'exécution après quatre années était de 80 %. Il a exposé qu'il était prévu pour 2006 la création de 186 emplois de magistrats et de 11 emplois de fonctionnaires, correspondant à 99 ETPT, compte tenu des dates prévues d'entrée en fonction des personnels concernés, à savoir au milieu de l'année 2006. Il a ajouté qu'actuellement, le ratio était en moyenne de 2,63 fonctionnaires pour 1 magistrat, comme il avait pu le constater en visitant diverses juridictions, ce qui pouvait constituer un handicap pour le soutien logistique susceptible d'être attendu par les magistrats, tant pour le rendu des décisions juridictionnelles que pour la gestion des juridictions. Il a aussi relevé qu'il était difficile « d'attirer ou de retenir » des greffiers dans des juridictions situées dans les zones sensibles.

Il a estimé satisfaisant que les indicateurs de performance portant, tant en matière civile que dans le domaine pénal, sur les délais de procédure, l'ancienneté des stocks, le nombre d'affaires traitées par magistrats et fonctionnaires, soient positifs car répondant aux préoccupations des justiciables qui souhaitent une justice moins lente. Il a indiqué que l'indicateur de performance sur les frais de justice, ciblé uniquement sur les dépenses pénales constituant les trois quarts de ces frais, pourrait être utilement démultiplié en sous-indicateurs, selon les catégories de dépenses (expertises génétiques, réquisitions d'opérateurs de téléphonie), et étendu à la matière civile.

Il a reconnu que la mesure de la qualité des décisions juridictionnelles était, en revanche, plus délicate et s'est interrogé en particulier sur les indicateurs portant sur les taux de cassation des décisions juridictionnelles, qui pourraient être interprétés comme une incitation au conformisme, même si, par ailleurs, une certaine stabilité de la jurisprudence pouvait être bénéfique. En revanche, il s'est déclaré intéressé par l'indicateur de performance se référant aux seules « erreurs objectives », parce qu'il ne remettait pas en cause la liberté d'appréciation du magistrat. Il a expliqué que cet indicateur portait sur le taux de requêtes en interprétation, en rectification d'erreurs matérielles et en omissions de statuer. Il a toutefois jugé qu'il serait préférable que la mesure porte, non sur les requêtes elles-mêmes, qui pouvaient être dilatoires, mais sur les décisions effectivement infirmées pour ce motif.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a rappelé que les procédures d'ordonnancement des dépenses de fonctionnement des cours et tribunaux étaient transférées, dès 2006, des préfectures vers les juridictions, observant que ce transfert de charge s'effectuait sans transfert d'emplois de la part des préfectures. Pour justifier cette situation, le ministère de l'intérieur a fait valoir le rôle déterminant du préfet dans la mise en oeuvre de la LOLF, qui doit en effet être le garant de la cohérence territoriale de l'action publique. Pour autant, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a estimé que le développement d'une culture de gestion au sein des juridictions, facteur d'économies budgétaires, aurait supposé un investissement initial en personnel de greffe. Il a fait un parallèle avec la décentralisation, qui avait vu la création de fonctionnaires territoriaux sans réduction comparable des effectifs de préfecture.

Il a exposé que, s'agissant du régime budgétaire des juridictions, et par analogie avec les dispositions prises en faveur du Conseil d'Etat et des autres juridictions administratives, les mesures de réserve budgétaire n'affecteraient pas la Cour de cassation et que les gels susceptibles de concerner les autres juridictions devraient recueillir l'accord préalable du garde des sceaux.

Il a indiqué que les frais de justice étaient évalués dans le projet de loi de finances pour 2006 à 370 millions d'euros, alors même que la dépense effective de l'année 2004 s'élevait à 420 millions d'euros. Dans ce contexte, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, s'est inquiété de la sincérité et du réalisme de cette prévision, rappelant qu'il avait interrogé le ministre à ce sujet en séance publique, le 10 novembre 2005, lors du débat de contrôle budgétaire consécutif à son rapport d'information sur la mise en oeuvre de la LOLF dans la justice judiciaire. Il a fait valoir que, sur la base d'un taux annuel d'augmentation arrondi à 20 %, on devrait parvenir à une dépense de 504 millions d'euros en 2005 et d'environ 600 millions d'euros en 2006.

Il a ajouté que dans sa réponse, le garde des sceaux avait précisé que le montant des dépenses effectives pour 2005 était évalué, par ses services, à 490 millions d'euros au maximum, compte tenu des premiers effets des mesures prises pour maîtriser les frais de justice. A titre d'exemple, il a précisé qu'à la suite d'une mise en concurrence, les frais d'empreintes génétiques étaient revenus, au cours de l'été 2005, d'un tarif moyen de plus de 150 euros à 85 euros.

Il a exposé que le garde des sceaux, après avoir souligné que les mesures d'économies entreprises ne touchaient en aucune manière la liberté de prescription du magistrat, puisqu'il s'agissait essentiellement de mise en concurrence, avait évalué à 62 millions d'euros l'impact de ces mesures en 2006. Il a alors estimé que, compte tenu du chiffre espéré de dépenses pour 2005 et des économies escomptées, la dépense en 2006 pourrait s'élever à 428 millions d'euros, montant finalement assez proche des 420  millions d'euros de la loi de finances, compte tenu des 50 millions d'euros prévus à cet effet dans la mission « Provisions » et susceptibles d'être débloqués par Bercy, si nécessaire.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, s'est interrogé sur le caractère réaliste de ces évaluations, y relevant néanmoins le signe de la volonté du ministre de poursuivre avec fermeté la politique qu'il avait engagée en matière de maîtrise des frais de justice.

Il a indiqué que, dans un premier temps, il avait envisagé un amendement, destiné à inviter le gouvernement à une évaluation plus fiable mais qu'il avait choisi, réflexion faite, d'accorder au ministre le « bénéfice du doute » afin d'encourager une politique tout à la fois volontariste et respectueuse de l'indépendance de l'autorité judiciaire. Il lui est apparu clair que, dans la logique induite par la LOLF, l'examen du projet de loi de règlement de l'exercice 2006 donnerait l'occasion de vérifier la justesse des prévisions du ministre et, le cas échéant, celle d'en tirer les conséquences éventuelles.

Puis M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a abordé le programme relatif à l'administration pénitentiaire. Il a exposé qu'outre les changements de périmètre, l'évolution des crédits de programme, tant en dépenses de fonctionnement que pour les crédits d'intervention, était liée principalement à la poursuite du programme de rénovation et de construction d'établissements pénitentiaires.

Il a jugé que les indicateurs de performance du programme pouvaient, dans un certain nombre de cas, être considérés comme satisfaisants, qu'il s'agisse de ceux qui mesurent l'efficacité du service ou de ceux qui évaluent son efficience, citant en exemple, pour la mesure de l'efficacité, le nombre d'évasions, le taux d'incidents ou d'agressions en établissements et le pourcentage de condamnés bénéficiant d'un aménagement de peine.

S'agissant de la mesure de l'efficience du service, il a évoqué un indicateur sur le coût de la journée de détention, avec un sous-indicateur distinguant selon le type d'établissement et le mode de gestion.

Il a suggéré, en outre, une mesure de la régularité du suivi médico-psychologique des délinquants sexuels.

Il a ensuite évoqué la rénovation et la construction de places en établissement pénitentiaire, soulignant que les conditions de détention étaient, en France, absolument inacceptables en raison de la vétusté de la plupart des établissements, ainsi que d'un taux de surpopulation carcérale qui atteignait en moyenne 111,8 %, occultant de très grands écarts pouvant aller jusqu'à 200 %. Il s'est référé à un récent article paru dans le « Nouvel Observateur », citant 4 établissements pénitentiaires dont le taux était supérieur à 220 %.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a estimé que d'une part, l'exécution d'une peine privative de liberté ne devrait pas conduire à des conditions parfois inhumaines de détention et que d'autre part, la promiscuité était un facteur de « contagion » de la délinquance, contraire à l'objectif premier de la peine, à savoir l'amendement du condamné.

Il a donc jugé heureux que la LOPJ ait prévu la réalisation d'un ambitieux programme de modernisation du parc immobilier de l'administration pénitentiaire au travers de la construction de 13.200 places supplémentaires.

Il a exposé que 10.800 places étaient réservées à la réalisation de nouveaux établissements et 2.400 étaient dédiées à l'application de nouveaux concepts pénitentiaires adaptés à la diversité de la population pénale, en particulier pour éviter le risque évoqué de la contamination. Il a précisé que 2.000 de ces places étaient destinées à des détenus majeurs et 400 à des structures exclusivement réservées aux mineurs.

Puis M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a évoqué le programme « Protection judiciaire de la jeunesse » en indiquant que les crédits, hors changement de périmètre, évoluaient principalement en raison de la poursuite par le gouvernement de l'un des objectifs prioritaires de la LOPJ, à savoir la création de centres d'éducation fermés.

Il a jugé que l'examen de l'exécution budgétaire des années passées laissait apparaître un niveau trop important de régulation budgétaire, ce qui avait pour effet de priver le gestionnaire d'une lisibilité suffisante et de ne pas permettre au Parlement, au travers des chiffres du projet de loi de finances pour 2006, d'évaluer précisément le montant des moyens qui seront effectivement mis à la disposition des services de la protection judiciaire de la jeunesse. Il a émis le souhait que la régulation budgétaire n'hypothèque pas, en fait, une part trop importante des moyens alloués.

Il a considéré que la plupart des indicateurs de performance paraissaient plus destinés à l'élaboration d'un rapport d'activité qu'à une véritable évaluation de la performance et qu'ils « poussaient à la mesure ».

En outre, il a jugé excessif un total de 13 indicateurs, sachant que leur alimentation accroîtrait inévitablement les tâches administratives des agents au détriment de leurs missions essentielles.

Il a évoqué, comme indicateurs d'activité appelant des moyens supplémentaires, le taux d'occupation des établissements ou le taux d'activité par catégorie de personnels, estimant qu'il s'agissait d'indicateurs essentiellement informatifs qui ne mesuraient en aucune manière la performance. En revanche, il a relevé quelques indicateurs de qualité de service, comme le taux d'évolution favorable de la situation des mineurs en danger (mesures non renouvelées ou « atténuées »), le taux d'inscription en « fin de mesures » dans les dispositifs de droit commun ou encore la part des jeunes pris en charge au pénal qui n'ont ni récidivé, ni réitéré dans l'année qui suit.

Puis M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a abordé le programme concernant l'accès au droit et à la justice, précisant que ce programme revêtait une importance singulière, car il correspondait précisément à l'aspiration croissante de la population à mieux connaître ses droits.

Il a exposé que ce programme concernait le développement du réseau d'information sur le droit, mis en oeuvre par les conseils départementaux de l'accès au droit institué dans 80 départements, chargés notamment de coordonner les activités des maisons de la justice et du droit. Il a ajouté que celles-ci étaient implantées principalement dans les zones urbaines sensibles (ZUS). Il a ajouté que le programme comportait aussi des crédits d'intervention pour les associations d'aide aux victimes dont le réseau assurait l'accueil, l'information et l'orientation auprès de 181 tribunaux de grande instance.

Il a souligné que l'aide juridictionnelle constituait l'essentiel du programme, avec plus de 90 % des crédits.

Il a exposé que, compte tenu du fait que ces crédits, comme les frais de justice, devenaient limitatifs et que l'aide juridictionnelle constituait un droit pour le justiciable qui remplit les conditions légales, les marges du gestionnaire seraient en cours d'exercice étroites, notamment au regard des nouvelles règles de fongibilité asymétrique introduites par la LOLF.

Il a noté avec satisfaction que la plupart des indicateurs de performance du programme mesuraient la qualité du service et le degré de satisfaction du public. Il a cité, pour exemple, le délai moyen de traitement des demandes d'aide juridictionnelle et le pourcentage de bureaux d'aide juridictionnelle dont le délai moyen d'instruction était supérieur à 2 mois.

Il lui a aussi paru intéressant de mentionner l'indicateur concernant le pourcentage de personnes satisfaites parmi celles qui accèdent à un dispositif d'information juridique, sous réserve que l'évaluation prévue à partir d'un sondage ne puisse en accroître le coût.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a souligné que la dépense d'aide juridictionnelle avait progressé de 39 % entre 1999 et 2004, essentiellement en raison de l'incidence de diverses réformes législatives.

Il a fait valoir qu'il s'agissait d'un exemple supplémentaire de la nécessité d'accompagner toute réforme législative d'une étude d'impact sérieuse et solide, et relevé avec satisfaction, qu'en réponse à ses questions, le ministre de la justice avait témoigné, au cours du débat en séance publique du 10 novembre 2005, de sa détermination à renforcer les études d'impact.

Il s'est inquiété de l'exactitude de l'évaluation des crédits d'aide juridictionnelle faite dans la loi de finances pour 2006 (à savoir 304,7 millions d'euros alors que la dépense pour 2005 devrait rester dans l'enveloppe allouée de 299,7 millions d'euros), compte tenu de la progression des dossiers de demande d'aide juridictionnelle au cours des années passées. Il a indiqué qu'il souhaitait interroger le ministre à ce sujet.

Enfin, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a abordé le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés », constitué, d'une part, des moyens nécessaires à la gestion administrative commune de la mission justice et, d'autre part, des crédits destinés à 4 institutions rattachées à cette mission, à savoir la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), le Haut conseil au commissariat aux comptes, l'Ordre de la légion d'Honneur et l'Ordre de la Libération.

Il a jugé que cette situation pourrait soulever une question de principe, singulièrement pour la CNIL. Il s'est demandé si la fongibilité asymétrique n'autoriserait pas le responsable de programme, en l'occurrence un directeur d'administration à la chancellerie, à « prélever » en cours d'exercice des crédits de la CNIL, par exemple. Il a rappelé que la commission des finances avait proposé en 2004, sans succès, la création d'un programme « Autorités administratives indépendantes » au sein d'une mission autonome.

Il a indiqué, qu'en réponse à son interrogation, la chancellerie avait fait valoir, d'une part que l'évolution des crédits de la CNIL, identifiés en tant que telle dans une action en loi de finances initiale, était supérieure à la progression globale du budget de la mission (9 millions d'euros au lieu de 7,1 millions d'euros) et d'autre part que la CNIL disposait d'une « écoute » tant à Bercy qu'au plus haut niveau de l'Etat, qui la garantissait contre certaines décisions.

Il a exposé que la CNIL disposait de 90 équivalents temps plein travaillé (ETPT) et qu'elle avait vu le nombre de ses dossiers progresser sensiblement ces dernières années, passant de 25.000 en 2003 à 38.000 en 2005. Il a ajouté aussi que la progression de ces crédits intégrait un projet de déménagement en 2006, destiné à regrouper les 3 sites actuels de la CNIL afin de disposer de locaux mieux adaptés.

Il s'est félicité de ce que les indicateurs de performance du programme mesurent la qualité du service ou son efficience.

Toutefois, pour compléter l'indicateur sur le taux de publication des décrets d'application des lois « chancellerie » dans un délai de six mois et dans un délai d'un an, il a suggéré la création d'un nouvel indicateur concernant le délai de transposition des directives européennes « chancellerie ».

En conclusion, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a proposé à la commission d'adopter les crédits de la mission « Justice », malgré une certaine perplexité de sa part quant à la « solidité » de certaines évaluations, notant que, dans l'esprit de la LOLF, les vérifications utiles seraient faites dans le cadre de l'examen du projet de loi de règlement. Il a annoncé, enfin, l'entrevue qu'il aurait le jour même avec M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, à la demande de ce dernier.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis, président, après avoir félicité M. Roland du Luart, rapporteur spécial, pour la qualité de sa présentation et observé que celle-ci se situait dans le prolongement du rapport d'information qu'il avait présenté en juillet 2005 sur la mise en oeuvre de la LOLF dans les juridictions judiciaires, s'est réjoui de la densité du débat de contrôle budgétaire intervenu le 10 novembre 2005 en séance publique et faisant suite à ce rapport d'information.

Il s'est félicité de l'entrée progressive au sein de la justice d'une culture de gestion, faisant valoir que le rapport d'information en cause avait contribué à cette évolution. Il a considéré que le prochain entretien entre M. Roland du Luart, rapporteur spécial, et le garde des sceaux, proposé par ce dernier, constituait en lui-même un bon signal de l'utilité des travaux de la commission des finances.

M. Aymeri de Montesquiou s'est inquiété de la répartition entre les missions « Justice » et « Sécurité » des compétences et dépenses en matière de transfèrement et de garde de personnes mises en cause par la justice et s'est interrogé sur la prise en charge financière des dégradations matérielles consécutives à une manifestation sur la voie publique. Il s'est aussi demandé si l'externalisation était utilisée pour la construction d'établissements pénitentiaires. M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a répondu que cette procédure était effectivement activée dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ).

M. Michel Charasse a déploré le refus de concours de la force publique pour l'exécution des décisions de justice, qui était selon lui trop fréquemment opposé.

M. François Trucy s'est inquiété des solutions qui seraient trouvées s'il apparaissait, en cours d'exercice, que les crédits pour les frais de justice avaient été entièrement consommés.

M. Philippe Dallier a fait part avec étonnement d'une information selon laquelle 50 places seraient disponibles en Ile-de-France au sein de centres d'éducation fermés (CEF). M. Roland du Luart, rapporteur spécial, lui a répondu qu'il interrogerait le ministre à ce sujet au cours de l'entretien qu'il aurait avec lui aujourd'hui même.

M. Michel Charasse a considéré qu'il n'était pas anormal que le Conseil d'Etat figure dans un programme relevant d'une mission dont le pilote était le Premier ministre, puisque celui-ci était le président de cette Haute juridiction. Il s'est interrogé sur les éventuelles conséquences en termes indemnitaires du rattachement de la Cour des comptes à la mission « Conseil et contrôle de l'Etat ».

Il a trouvé anormal que le transfert de la charge de l'ordonnancement secondaire des dépenses de fonctionnement des juridictions, depuis les préfectures vers les services gestionnaires des juridictions, n'ait pas été accompagné d'un transfert correspondant de personnel. Il a annoncé le dépôt, à titre personnel, de trois amendements dans le cadre de l'examen de la loi de finances pour 2006 :

- le premier tendrait à mettre à la charge des compagnies d'assurance tout ou partie de frais de justice lorsque ces dernières auraient abusé de procédures judiciaires ;

- le deuxième imposerait une tarification des frais de téléphonie sollicitée par les juridictions auprès des opérateurs ;

- le troisième amendement viserait à lever le secret de l'instruction au bénéfice du rapporteur spécial pour la justice dans le cadre des missions qu'il accomplit en application de l'article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Il a demandé que la chancellerie communique le relevé des dépenses effectuées récemment dans le cadre d'une procédure de reconstitution diligentée par un magistrat du tribunal de grande instance de Pau.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, lui a répondu qu'il formulerait effectivement une demande en ce sens et qu'il publierait les informations recueillies dans son rapport spécial.

M. Auguste Cazalet s'est inquiété de l'insuffisance des crédits alloués au secteur associatif habilité par les services de la protection judiciaire de la jeunesse.

M. Jacques Baudot s'est préoccupé du coût des écoutes téléphoniques, ainsi que des frais de traduction, auxquelles donnaient lieu les procédures judiciaires.

M. Jean Arthuis, président, a demandé si la question de la répartition des compétences entre les forces de sécurité et les services de l'administration pénitentiaire pour la garde et le transfèrement des détenus avait « avancé » et suggéré un développement de la visio-conférence afin de contenir de telles dépenses.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, en réponse aux différents intervenants, a souligné la réelle volonté de la chancellerie et des juridictions de parvenir à une meilleure gestion des crédits alloués, estimant que leur culture de gestion était désormais perceptible.

S'agissant du dossier des gardes et transfèrements des détenus, il a indiqué que les discussions interministérielles pour rationaliser leur organisation n'avaient malheureusement pas abouti. Il a ajouté que ceci était regrettable, car des économies substantielles pourraient être dégagées, évoquant la mission qu'il avait effectuée au tribunal de grande instance de Bobigny, où dix policiers pouvaient être mobilisés pour la surveillance de trois personnes mises en cause.

Il a rappelé qu'avec la LOLF, les frais de justice jusqu'à présent évaluatifs devenaient des crédits limitatifs à partir du 1er janvier 2006, ce qui rendait d'autant plus nécessaire la sincérité des prévisions budgétaires les concernant. Il a ajouté d'une part, que la mission « Provisions » gérée par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie comportait 50 millions d'euros susceptibles d'être dégagés en cours d'exercice si nécessaire, et d'autre part, que des « réserves » de moyens étaient prévues par la chancellerie tant au niveau national qu'à celui des cours d'appel. Il a indiqué qu'en tout état de cause, le cours de la justice ne serait pas interrompu pour des raisons financières, à charge pour le responsable de programme de mettre en oeuvre le cas échéant, les règles sur la fongibilité asymétrique des crédits.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a confirmé que le projet d'extension du palais de justice de Paris demeurait à l'étude, soulignant la vétusté de certains bâtiments actuels, comme il avait pu, lui-même, le constater.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que la mission de certification des comptes de l'Etat confiée à la Cour des comptes en application de l'article 58-5° de la LOLF justifiait que la Cour des comptes n'appartienne pas à une mission budgétaire relevant du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a souligné une nouvelle fois les efforts sensibles de la chancellerie pour maîtriser désormais les frais de justice, notamment en matière de téléphonie. A propos des transferts de compétences non accompagnés de transfert de personnel, qu'il a évalué à 200 équivalents temps plein travaillé (ETPT), il a rappelé que M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat », avait annoncé à la commission son intention d'engager en 2006 un contrôle budgétaire en application de l'article 57 de la LOLF portant sur les dépenses de fonctionnement des préfectures, dans la perspective éventuelle d'en tirer les conséquences dans le cadre de l'examen de la prochaine loi de finances.

M. Jean Arthuis, président, a suggéré, pour limiter l'explosion des frais d'interprétariat dans le cadre de procédures judiciaires, le recours à des réseaux d'interprètes agréés plutôt que de solliciter systématiquement la présence d'interprètes dans les palais de justice.

M. Michel Charasse a souhaité que la loi rende obligatoire le recours à la visio-conférence et M. Jean Arthuis, président, a fait valoir l'impératif d'une politique plus volontariste en la matière.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a annoncé à la commission qu'il attirerait l'attention du garde des sceaux sur cette question essentielle à la réalisation d'économies.

M. Michel Charasse approuvé par M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a demandé la communication par la chancellerie d'une évaluation des frais de justice qui seront en instance le 31 décembre 2005, puis de l'état effectif de ces frais en instance à la clôture du présent exercice.

M. Serge Dassault, après avoir évoqué une vacance d'emploi de substitut au tribunal de grande instance d'Evry, s'est interrogé sur la législation en vigueur concernant la responsabilité pénale des mineurs.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a indiqué que, sur un plan global, les juridictions manquaient plus de greffiers que de magistrats. Il a ajouté que les peines ne sont exclues que pour les mineurs âgés de moins de 13 ans mais qu'à partir de l'âge de 10 ans, ceux-ci étaient passibles de sanctions éducatives. Il a précisé qu'en tout état de cause, le cas échéant, la responsabilité civile des parents pouvait toujours être engagée.

A l'invitation de son rapporteur spécial, la commission a alors adopté les crédits de la mission « Justice ».

PJLF 2006 - Mission « Défense » - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite examiné le rapport spécial de MM. Yves Fréville et François Trucy, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Défense ».

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a précisé qu'il avait rencontré, avec M. François Trucy, rapporteur spécial, les chefs d'état-major, les responsables de programmes et les responsables de certains budgets opérationnels de programme (BOP) dans le cadre de la préparation de l'examen de la mission « Défense ». Il a rappelé que le budget de la mission « Défense » s'élevait, en crédits de paiement, à 36,061 milliards d'euros, pensions incluses. Il a souligné que cette mission était le premier budget d'investissement de l'Etat, regroupant 78,6 % du total des crédits du titre 5 du budget général pour 2006. Il a ajouté que ces crédits d'investissement étaient regroupés à hauteur de 83,6 % dans le programme « Equipement des forces » de la mission « Défense ».

Il a observé que la définition des programmes de la mission « Défense » avaient suscité de vifs débats, menant au rejet d'une maquette budgétaire s'appuyant sur une répartition organique des crédits, inadaptée à l'accroissement de l'« interarmisation », d'une part, et d'une maquette basée sur une répartition par grandes fonctions de l'armée, telles que la dissuasion, la projection des forces et la prévention d'autre part. Il a indiqué que le découpage retenu se caractérisait par le maintien de la distinction entre deux programmes majeurs, l'un dédié à l'équipement et l'autre au fonctionnement.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a noté que le programme 146 « Equipement des forces », essentiellement dédié aux équipements neufs, était doté de 10,61 milliards d'euros. Il a précisé que ce programme concernait des matériels dont la durée de vie pouvait aller jusqu'à 50 ans, soit 10 années de conception, 30 années d'utilisation, et 10 années de démantèlement dans le cas des matériels nucléaires.

Il a rappelé que le programme 178 « Préparation et emploi des forces » regroupait les crédits de personnel et les crédits dédiés au maintien en condition opérationnelle des matériels. Il a constaté que la sophistication accrue des nouveaux équipements avait pour corollaire un coût de maintenance plus élevé.

Il a observé que deux programmes « annexes » complétaient la mission « Défense ». Il a relevé que le programme 212 « Soutien de la politique de la défense » était dirigé par le secrétaire général pour l'administration et regroupait les crédits relatifs à l'administration générale, aux dépenses informatiques et à l'infrastructure. Il a évoqué l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, à l'initiative du gouvernement, visant à transférer près de 600 millions d'euros de ce programme au bénéfice du programme « Gendarmerie nationale » de la mission interministérielle « Sécurité ». Il a constaté que 200 millions d'euros alloués aux activités militaires de la gendarmerie étaient maintenus au sein du programme 212.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » regroupait des politiques publiques assez disparates, allant du renseignement militaire aux études amont, gérées par la délégation générale pour l'armement (DGA).

Il a expliqué que la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) s'était accompagnée d'une réforme en profondeur des structures du ministère de la défense et s'en est félicité. Il a observé qu'aux termes de cette réforme, les attributions du chef d'état-major des armées (CEMA) étaient renforcées, sa position d'autorité hiérarchique des chefs d'état-major des armées étant affirmée, et sa compétence étendue à la cohérence organique des armées, et non à leur seul emploi opérationnel. Il a observé qu'en tant que responsable du programme 178, le CEMA gérait les crédits relatifs à la préparation et à l'emploi des forces, les majors généraux de chaque armée étant responsables des budgets opérationnels de programmes afférents.

Il a rappelé que le programme « Equipement des forces » était codirigé par le CEMA et le délégué général pour l'armement selon des modalités fonctionnelles adaptées.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a remarqué qu'en l'absence de présentation des devis globaux des programmes d'armement le budget de la mission « Défense » n'était pas lisible à moyen terme. Il a relevé que ce type d'information était légitimement couvert par la classification « secret défense ».

Il a indiqué que le projet de loi de finances pour 2006 permettait de respecter les objectifs définis par la loi de programmation militaire pour les années 2003 à 2008. Il a considéré qu'à l'approche du terme de la période de programmation, la visibilité des engagements financiers du ministère de la défense, à moyen terme, diminuait. Il a suggéré que la France, à l'instar de ses partenaires européens, adopte un mode de programmation militaire triennal glissant. Il a estimé, de plus, que la diminution du coût des programmes d'armement n'était possible que dans le cadre de coopérations européennes, ce qui plaidait d'ailleurs pour l'adaptation du système de planification des dépenses militaires.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a ensuite souligné la difficulté d'évaluer la performance de la mission « Défense », en expliquant que les indicateurs de performance financière ne prenaient tout leur sens que lorsqu'ils étaient mis en regard d'indicateurs « d'activité militaire ». Il a donné, pour exemple, le taux de maintien en condition opérationnelle des matériels militaires démontrant qu'il pouvait être différent de la capacité opérationnelle effective des équipements, qui seule permettait de juger de l'efficacité réelle des armées. Il a souhaité, en conséquence, que des indicateurs de type « militaro-militaire » complètent la présentation de la performance des programmes de la mission « Défense ».

Il a également observé que les indicateurs du programme « Equipement des forces », basés par exemple sur le « passage de jalons », c'est-à-dire le rythme de réalisation des différentes étapes d'un équipement militaire, ne permettaient pas d'évaluer la performance de la DGA. Il a considéré que celle-ci devrait être mesurée par la capacité de la DGA à négocier les devis avec les industries d'armement, et à mettre en oeuvre des coopérations européennes, permettant des fabrications en série, moins coûteuses que les productions unitaires, comme dans le cas des frégates européennes multi-missions (FREMM).

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a rappelé que l'existence d'un monopole bilatéral entre un industriel, seul « vendeur », et l'armée, seule « cliente », d'une part, et d'information asymétrique ou imparfaite, lorsque l'industriel en disposait de façon exclusive, d'autre part, rendait complexe l'évaluation de la performance économique des investissements de défense.

Il a indiqué que la mission « Défense » était inscrite dans une dimension pluriannuelle, en raison de la durée de vie des équipements militaires. Il a estimé que le remplacement des autorisations de programme par des autorisations d'engagement était un enjeu pour cette mission. Il a souligné que la notion d'autorisation d'engagement était plus restrictive, dans la mesure où celle-ci correspondait à des dépenses susceptibles d'être non seulement affectées, mais aussi engagées dans l'année. Il a regretté que les échéanciers de réalisation des programmes d'armement ne figurent plus dans le « bleu Défense » annexé au projet de loi de finances pour 2006, et a souhaité que la composition de ce document budgétaire soit modifiée en ce sens.

Il a précisé qu'à la fin de l'année 2005, le montant des autorisations de programme non engagées atteignait 8,4 milliards d'euros, dont 5,3 milliards d'euros étaient « affectés », c'est-à-dire qu'ils avaient reçus le visa du contrôleur financier, et devraient donc être « reportés » en 2006, par l'ouverture d'autorisations d'engagement pour un montant équivalent. Il a indiqué que 3,1 milliards d'euros n'étaient pas « affectés », dont 1,1 milliard d'euros ouvert au titre du programme Barracuda.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a observé que le ministère de la défense souhaitait le report de 6,4 milliards d'euros d'autorisations de programme non engagés, dont près de 3 milliards d'euros au titre du programme « Equipement des forces ».

Il a ajouté que le montant des reports de crédits de paiement, non consommés et non annulés à la fin de l'année 2004, s'élevait à 2,8 milliards d'euros. Il a constaté que cette « bosse des reports de crédits » avait, selon le ministère de la défense, trois causes : la non-consommation de 0,8 milliard d'euros au titre de la LPM pour les années 1997 à 2002, la non-budgétisation des opérations extérieures (OPEX) et l'application de la « norme de dépense », c'est-à-dire l'interdiction de dépenser plus que le montant des crédits votés en loi de finances initiale, malgré l'abondement des fonds de concours, et l'ouverture de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a noté que le ministère de la défense avait reçu l'autorisation de ne plus respecter la « norme de dépense » dès 2005, et que la ministre de la défense, Mme Michèle Alliot-Marie, avait pris l'engagement lors de son audition par la commission des finances, le 25 octobre 2005, de résorber la « bosse des reports de crédits » avant la fin de l'année 2007. Il a ajouté que l'article 57 du projet de loi de finances pour 2006 prévoyait une mesure dérogatoire afin de reporter les crédits de paiement non consommés en 2005 dans une proportion supérieure à la limite globale de 3 % des crédits initiaux, inscrits sur un même titre d'un programme, définie par la LOLF.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que la justification au premier euro des autorisations d'engagement et des crédits de paiement du programme 146 « Equipement des forces » devait être améliorée. Il a présenté la synthèse des engagements financiers de l'Etat pour les grands programmes d'équipement militaires en cours, indiquant, qu'avant 2005, 128,37 milliards d'euros avaient été engagés à ce titre, puis 10,816 milliards d'euros en 2005. Il a observé que, pour 2006, les autorisations d'engagement demandées s'élevaient à 12,534 milliards d'euros, dont 9,5 milliards d'euros prévus par le projet de loi de finances pour 2006, et 3 milliards d'euros au titre des reports de 2005. Il a noté que le coût total des engagements financiers du ministère de la défense, relatifs aux programmes d'équipement en cours, atteindrait 151,9 milliards d'euros à la fin de l'année 2006.

Il a précisé que les sommes payées au titre des programmes d'équipement en cours s'élevaient, avant 2005, à 96,275 milliards d'euros, et à 8,967 milliards d'euros en 2005. Il a rappelé qu'en 2006 les crédits de paiement atteindraient 9,599 milliards d'euros, et que 37 milliards d'euros devraient donc être ouverts après 2006 afin de financer le coût total des programmes en cours de réalisation.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a rappelé que les crédits de la mission « Défense » respectaient les objectifs fixés par la LPM, pour la quatrième année consécutive. Il a souligné l'effort réalisé par le ministère de la défense pour mettre en oeuvre la LOLF, tout en estimant que des améliorations pourraient être apportées à la présentation du « bleu Défense » dans les années à venir.

Il a salué la politique de rationalisation des dépenses menée par le ministère de la défense au titre de la stratégie ministérielle de réforme et des externalisations. Il a précisé que 415 millions d'euros avaient ainsi été économisés, de 2003 à 2005, et que la réduction des dépenses devrait être poursuivie en 2006, pour atteindre 86 millions d'euros. Il a ajouté que les économies prévues pour l'année prochaine proviendraient notamment de l'externalisation de la gamme commerciale des véhicules du ministère de la défense et de l'externalisation de la formation des pilotes d'hélicoptère à Dax.

Il a rappelé que les pensions de retraite militaires bénéficiaient à 508.000 personnes, pour un montant de 6.666 millions d'euros. Il a précisé que cette somme excluait les pensions « cristallisées », versées aux ressortissants des ex-territoires français, soit 33 millions d'euros concernant 52.920 pensionnés.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a indiqué que la part des dépenses françaises de défense dans le PIB était très inférieure à celle des principaux partenaires européens de la France, exception faite de l'Allemagne. Il a estimé que si le budget de la défense n'était pas augmenté, pour atteindre 3 % du PIB, il serait très difficile de tenir les obligations internationales de la France et les objectifs fixés par la LPM, dans les années à venir.

Il a ensuite observé que le plafond d'emploi ministériel était de 334.204 équivalents temps plein travaillé (ETPT), dont 255.455 militaires et 78.749 personnels civils. Il a souligné que le sous-effectif par rapport aux objectifs fixés par la LPM s'élevait à 3 % des personnels.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a constaté que la mission « Défense » représentait l'essentiel des investissements de l'Etat et qu'à ce titre, le ministère de la défense était le premier acheteur public, avec 67 % des marchés publics de l'Etat, concernant 10.000 entreprises et 2 millions de salariés dont 176.000 dans les industries de l'armement.

Il a ensuite souligné que les dépenses de personnel de la présente mission s'élevaient à 17,829 milliards d'euros en 2006, soit une diminution de 1,32 % par rapport à 2005. Il a indiqué que les dépenses de fonctionnement progressaient de 7,62 % par rapport à 2005, pour s'établir à 7,327 milliards d'euros. Il a relevé que cette augmentation tenait au fort accroissement des dépenses d'entretien programmé des matériels et de la dotation en carburants, soit respectivement 9,5 % et 8,2 %. Il a considéré que la dotation en carburants semblait sous-évaluée par rapport aux besoins des armées et qu'il serait sans doute nécessaire d'ouvrir des crédits supplémentaires, à ce titre, en loi de finances rectificative.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a relevé que les mises en réserve de crédits en début d'exécution budgétaire, prévues par l'article 51 de la LOLF, s'exerceraient sur 2 % des crédits, soit 0,1 % des dépenses du titre 2 et 5 % de celles des autres titres.

En ce qui concerne les OPEX, il a rappelé que l'absence de budgétisation de leurs surcoûts expliquait en grande partie la formation de la « bosse des reports de crédits » précitée. Il s'est félicité de l'engagement pris par la ministre de la défense, Mme Michèle Alliot-Marie, lors de son audition devant la commission des finances, le 25 octobre 2005, de budgétiser intégralement les surcoûts des OPEX dans le projet de loi de finances pour 2007.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a expliqué que les auditions qu'il avait menées lui avaient permis d'appréhender plus concrètement le taux de disponibilité des matériels, qui devait être mis en regard de la variété d'obsolescence des différents parcs d'équipement militaire et de la disponibilité à 100 % des matériels utilisés en OPEX.

Il a observé que les crédits destinés au financement de la réserve augmentaient pour atteindre 110 millions d'euros. Il a salué la création d'un crédit d'impôt en faveur des employeurs de réservistes, prévu par le projet de loi accroissant l'efficacité de la réserve militaire, en instance de deuxième lecture à l'Assemblée nationale.

Enfin, M. François Trucy, rapporteur spécial, a indiqué que le service de santé des armées (SSA) semblait sortir de la grave situation de sous-effectif dans laquelle l'avait plongé la suppression de la conscription. Il a noté que le sous-effectif en médecins avait été ramené à 10 postes en 2005.

Il a précisé que le SSA contribuait largement au bon déroulement des OPEX, dans la mesure où il leur consacrait l'équivalent du personnel d'un hôpital militaire par an. Il a ajouté que le SSA devait faire face à deux défis importants pour son avenir : la féminisation des professions médicales qui, si elle devait être saluée, pourrait à l'avenir poser un problème de fidélisation des femmes médecins au SSA, d'une part, et la perspective du passage à la tarification à l'activité, d'autre part. Il a rappelé que 44 % du budget du SSA était constitué par la dotation de la caisse nationale d'assurance maladie au titre de sa participation au service public de santé. Il a considéré que le passage à la tarification à l'activité rendra patente l'importance de l'effort consenti par le SSA au titre de sa participation aux OPEX.

M. Jean Arthuis, président, a remercié les rapporteurs spéciaux pour la clarté de leur présentation des crédits de la mission « Défense », qui illustrait tout l'intérêt de la LOLF. Il s'est demandé si l'état des équipements militaires était satisfaisant et quelle était la qualité des prestations fournies par les industries d'armement.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a rappelé que, de 1995 à 2001, la part des dépenses de la défense, hors pensions et hors gendarmerie, était revenue de 2 % à 1,65 % du PIB. Il a observé que la professionnalisation concomitante des armées avait conduit à sanctuariser les dépenses de personnel, au détriment des crédits destinés à l'entretien programmé du matériel. Il a constaté que lors de la séparation des activités étatiques et des activités industrielles militaires, qui avait abouti à la création des sociétés anonymes d'armement, le maintien en condition opérationnelle des matériels avait souffert d'une certaine désorganisation. Il a estimé que la situation avait été alarmante dans ce domaine, le taux de disponibilité des équipements baissant gravement, mais que depuis 2002, la situation s'améliorait très rapidement.

M. Jean Arthuis, président, s'est demandé s'il ne fallait pas désormais situer l'effort de défense au niveau européen plutôt qu'au niveau national.

M. Roger Karoutchi a affirmé, qu'en ce domaine, comme dans d'autres, des choix devraient être faits.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a considéré que la définition d'un modèle européen de défense était un enjeu essentiel, qui aurait sans doute des répercussions importantes sur les orientations de la prochaine loi de programmation militaire.

M. Philippe Dallier a demandé des précisions sur les économies réalisées grâce à l'externalisation de la gestion des véhicules de l'armée.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a indiqué que l'externalisation des véhicules de la gamme commerciale devait permettre de réaliser 23 millions d'euros d'économie en année pleine, grâce au redéploiement de 911 ETPT sur les 1.180 ETPT actuellement dédiés à la fonction « véhicules ».

M. Jacques Baudot a rappelé que le rapport entre les pensions militaires et les pensions « cristallisées », c'est-à-dire les pensions militaires d'invalidité pour les ayants cause des anciens combattants des anciennes colonies, était de 1 à 25.

M. Roger Besse s'est demandé quels effets la fin de la conscription avait eus sur les délégations militaires départementales.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a estimé qu'il serait intéressant de demander un recensement de ces délégations.

M. Roger Karoutchi a rappelé que 2,5 millions d'hectares d'emprises militaires étaient inutilisés en Ile-de-France, et s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles le ministère de la défense n'accélérait pas leur cession.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a indiqué que le coût de la dépollution de ces terrains était parfois supérieur à leur valeur immobilière.

A l'invitation de M. Yves Fréville et de M. François Trucy, rapporteurs spéciaux, la commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Défense » pour 2006.

PJLF 2006 - Mission « Ville et logement » et article 93 - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite examiné le rapport spécial de MM. Philippe Dallier et Roger Karoutchi, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Ville et logement » et l'article 93 rattaché.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé les circonstances bien particulières, liées aux dernières violences urbaines, dans lesquelles les deux rapporteurs spéciaux étaient amenés à présenter la mission « Ville et logement ».

Il a ajouté que les mesures annoncées le 8 novembre 2005 devant l'Assemblée nationale par le Premier ministre auraient évidemment des répercussions budgétaires, qui seraient précisées prochainement. Il a indiqué que ces mesures comprenaient la création de 15 zones franches urbaines supplémentaires, l'attribution de 25 % de moyens supplémentaires à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) sur une période de deux ans, le doublement du nombre des équipes de réussite éducative, l'attribution de 100 millions d'euros supplémentaires pour les associations en 2006 et la réunion, d'ici à la fin de l'année, d'un comité interministériel des villes sur l'avenir des contrats de ville qui arrivent à échéance.

Il a ensuite présenté l'économie générale de la mission ministérielle « Ville et logement », indiquant qu'elle était une des trois missions dépendant du ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement avec la mission « Travail et emploi » et la mission « Solidarité et intégration ».

Il a souligné qu'au sein de ces trois missions, la mission « Ville et logement », qui ne concerne que 3.000 emplois, était au deuxième rang en termes budgétaires, mais au premier rang en ce qui concernait les dépenses fiscales avec près de 10 milliards d'euros de dépenses fiscales en forte augmentation par rapport à 2005 (+ 9 %), soit 138 % des crédits budgétaires de la mission.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, a précisé que les crédits budgétaires de la mission s'élevaient à 7,2 milliardsd'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement soit, environ, 2,1 % du total des crédits des missions du budget général.

Il a observé que la faible diminution des crédits de la mission « Ville et logement » provenait pour plus de la moitié, de la modification du système d'aide à l'accession sociale à la propriété qui était intervenue en 2005 et qui avait fiscalisé le financement du prêt à taux zéro.

Il a noté également que la mission « Ville et logement » regroupait quatre programmes très inégalement dotés, dont deux portaient sur la politique de la ville, pour 12 % du total des crédits de la mission, et deux sur la politique du logement.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, a insisté ensuite sur le caractère partenarial et interministériel de la politique en faveur de la ville. Il a souligné en particulier que la loi de programmation du 18 janvier 2005 pour la cohésion sociale avait introduit une modification majeure dans le calcul de la dotation de solidarité urbaine (DSU) en doublant en 5 ans le volume de la dotation à répartir entre les communes (soit une augmentation de 120 millions d'euros sur la seule année 2006) et en privilégiant, pour sa répartition, les villes qui devaient assumer des charges socio-urbaines lourdes du fait de la présence sur leur territoire de populations en difficulté. Il a déclaré que, selon l'état récapitulatif de l'effort financier consacré à la politique de la ville (« jaune » budgétaire), la politique de la ville bénéficierait au total, en 2006, d'un effort financier de 7.213 millions, en augmentation de 13,1 % par rapport à 2005.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, a ensuite brièvement présenté les deux programmes « Rénovation urbaine » et « Equité sociale et territoriale et soutien » en soulignant les éléments permettant d'apprécier l'application des deux lois de programmation : la loi solidarité et rénovation urbaine (SRU) du 1er août 2003 et la loi du 18 janvier 2005 pour la cohésion sociale.

S'agissant du programme « Rénovation urbaine » qui retrace pour l'essentiel les interventions de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), il a fait part de ses interrogations quant à une augmentation du nombre des projets, qui faisait naître des espoirs chez les habitants des quartiers, mais dont le financement devait avant tout être garanti. Il a indiqué que, selon les dernières informations disponibles, l'ANRU avait validé 15,8 milliards d'euros de travaux sur les 5 années à venir, dont 5 milliards d'euros seront financés par l'agence et que 139 projets correspondant à 251 quartiers étaient retenus. Il s'est félicité du respect des engagements financiers du programme national de rénovation urbaine, en souhaitant que le principe de réaliser une reconstruction pour chaque démolition de logement ne se traduise pas par une densification de l'habitat dans certains quartiers.

Sur le deuxième programme « Equité sociale et territoriale et soutien », M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, a souligné que les différentes opérations, « ateliers santé ville », « adultes-relais », « réussite éducative » et « programme ville, vie, vacances » avaient fait l'objet de diminutions de crédits, mais que cette évolution était plus que compensée par l'augmentation de la DSU.

Prenant l'exemple du département de Seine-Saint-Denis, il a indiqué qu'il avait enregistré, en 2005, une baisse de 2,5 millions d'euros de ses crédits déconcentrés, mais une augmentation de 10 millions d'euros de sa DSU.

S'agissant des nouvelles subventions qui seront destinées aux associations en application de la décision prise par le Premier ministre, M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, a indiqué que les maires seront étroitement associés à leur attribution.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a, en préalable, regretté le manque de vision globale du problème du logement trop souvent abordé de manière parcellaire, en privilégiant le seul logement social et en oubliant le logement intermédiaire et le logement privé.

Il a également souligné l'explosion des prix de l'immobilier, qui a rendu inabordable le logement privé pour les ménages à revenus moyens.

Il s'est interrogé sur la contradiction entre les déclarations attribuant une priorité forte au logement et les mesures récentes dont la lisibilité n'est pas certaine. Il a cité, à cet égard, l'extension du prêt à taux zéro et la suppression du Fonds de garantie pour l'accession sociale (FGAS).

Il a estimé, par ailleurs, que nombre d'éléments positifs devaient être mis en valeur, comme la progression exceptionnelle du nombre des logements mis en chantier en 2005.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a ensuite présenté les deux programmes concernant plus particulièrement le logement : le programme 109 « Aide à l'accès au logement » doté de 5,11 milliards d'euros soit 71,1 % des crédits de paiement de la mission et le programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement », doté de 1,23 milliard d'euros soit 17,1 % des crédits de paiement de la mission. Il a noté que ce dernier programme avait été choisi pour regrouper toutes les actions de soutien de l'ensemble de la mission et centralisait, à ce titre, les crédits de personnel du titre 2.

Il a souligné que le programme « Aide à l'accès au logement » était le programme des aides personnelles au logement et qu'il comprenait deux actions, sans commune mesure en termes budgétaires, concernant d'une part les aides personnelles, qui utilisaient 99,9 % des crédits du programme avec plus de 5 milliards d'euros de dépenses et, d'autre part, les subventions aux associations spécialisées dans le domaine du logement  : l'Agence nationale et les associations départementales pour l'information sur le logement (ANIL et ADIL).

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a précisé que 18 dépenses fiscales étaient rattachées au programme, pour un montant évalué à 1,5 milliard d'euros en 2006, représentant 30 % des dépenses budgétaires directes.

Il a indiqué que l'augmentation sensible de l'évaluation des mesures fiscales en 2006 par rapport à 2005 (+ 58,7 %) résultait, pour sa quasi-totalité, de l'intégration du nouveau dispositif du prêt à taux zéro, dont le financement n'est plus assuré par une subvention versée sur crédits budgétaires, mais grâce à un crédit d'impôt sur les sociétés accordé aux établissements prêteurs. Il s'est interrogé sur le sens du rattachement au programme relatif aux aides personnelles du dispositif du prêt à taux zéro qui est présenté comme un élément déterminant du programme suivant relatif à l'aide à la pierre. Il a noté qu'en outre, 8 mesures fiscales figuraient simultanément dans les deux programmes concernant la politique du logement.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que les crédits de l'action « Aides personnelles » correspondaient, pour leur totalité, soit 5.107 millions d'euros, à la contribution de l'Etat au fonds national d'aide au logement (FNAL) qui assure le financement de l'aide personnalisée au logement (APL), de la prime de déménagement et de l'allocation de logement sociale (ALS). Il a ajouté que cette dotation, en légère diminution de 1,4 % par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2005, était justifiée par les paramètres retenus pour déterminer l'évolution tendancielle des prestations : une poursuite plus modérée en 2006 de la hausse des loyers, une diminution du chômage et la prise en compte des mesures décidées en 2005, en particulier la revalorisation de 1,8 % des loyers plafonds.

Concernant les objectifs et les indicateurs, il a regretté l'absence d'indicateur mesurant les taux d'effort en accession à la propriété. Il a ajouté que, de manière générale, les indicateurs n'étaient pas à la hauteur des enjeux du programme et des moyens budgétaires mis en oeuvre.

Il s'est interrogé sur l'efficacité, dans un contexte de flambée des loyers, du système des aides personnelles, alors que les chiffres des enquêtes logement de l'INSEE font apparaître que le taux d'effort brut moyen des locataires était passé de 15 % à 20 % entre 1988 et 2002, en augmentation de 4,4 % en HLM et 5,3 % dans le secteur privé.

S'agissant du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a rappelé qu'il regroupait les interventions de l'Etat pour la construction de nouveaux logements et l'amélioration du parc existant, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les aides à la pierre.

Il a précisé qu'il représentait 1,2 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement et que ces crédits étaient respectivement en augmentation de 6,4 % et en diminution de 9,5 %.

Il a également noté qu'à ce programme étaient rattachées, à titre principal ou complémentaire, pas moins de 31 dépenses fiscales, pour un montant évalué à 9,2 milliards d'euros en 2006, à rapporter au 1,2 milliard de crédits budgétaires, le montant des mesures fiscales strictement rattachées à la mission étant ainsi plus de 6,5 fois supérieur au montant de ses crédits budgétaires.

Il a noté aussi que, du fait de la baisse des taux d'intérêt qui s'était répercutée sur le coût de l'épargne logement, les dépenses fiscales concourrant au programme avaient connu une quasi-stabilité entre 2004 et 2005 et que les estimations pour 2006 prévoyaient une augmentation de 3,6 %, due essentiellement au coût du « dispositif Robien ». Il a souligné, enfin, que les mêmes critiques sur les choix de répartition des dépenses fiscales s'appliquaient au présent programme, comme au programme précédent.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a ensuite présenté les cinq actions du programme.

Il a indiqué que les crédits de l'action « Construction locative et amélioration du parc » correspondaient aux subventions en faveur du parc locatif social (PLUS, PLAI, PALULOS), à la subvention, en crédits de fonctionnement et d'investissement, au profit de l'ANAH pour un montant total de 390 millions d'euros et, résiduellement, à des subventions pour l'accueil des gens du voyage. Il a noté que cette action bénéficiait d'une augmentation des moyens, qui progressaient de 6,8 % en crédits de paiement.

Concernant l'action « Soutien à l'accession à la propriété », il a fait remarquer que les crédits étaient en forte diminution, car ils correspondaient à deux chapitres en « déshérence » : la participation de l'Etat au système actuel de garantie de l'accession sociale à la propriété que l'article 21 du présent projet de loi de finances pour 2006 proposait de supprimer et le financement résiduel des prêts à taux zéro attribués en vertu du dispositif antérieur au 1er février 2005. Il a ajouté que cette situation illustrait la prédominance de l'outil fiscal comme instrument de soutien à l'accession sociale à la propriété.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que les crédits de l'action « Lutte contre l'habitat indigne » représentaient 18 millions d'euros, en légère diminution par rapport aux crédits inscrits en 2005. Il a souligné que cette évolution devait être rapprochée de la montée en charge des dispositifs, en particulier dans le cadre de la lutte contre le saturnisme, qui avaient pour conséquence une sous-consommation des dotations.

S'agissant des indicateurs, il a constaté qu'ils avaient été améliorés par rapport à ceux qui figuraient dans l'avant-projet de programme, mais qu'ils conduisaient aussi à s'interroger sur la latitude dont disposait le responsable de programme en matière d'accession sociale à la propriété.

Il a par ailleurs noté, à cet égard, que selon le descriptif analytique fourni sur la ventilation des effectifs affectés à la politique du logement, 1 % seulement de ces effectifs se consacrait au soutien à l'accession à la propriété, contre 56 % à la construction locative et l'amélioration du parc.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a alors ajouté que les moyens budgétaires dévolus au logement social par le programme étaient complétés par les nouvelles dispositions financières et juridiques contenues dans le plan d'engagement national pour le logement et que ce plan, qui comportait des mesures de nature législative et réglementaire, prévoyait notamment : l'amélioration des conditions d'emprunt des organismes HLM et la mise à disposition de terrains pour la construction de logements sociaux ; l'application d'un taux de TVA réduit pour les opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans le cadre d'un projet de rénovation urbaine ; enfin, la simplification des procédures de lutte contre l'habitat indigne.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a présenté, en conclusion, quatre observations. Il a fait observer, tout d'abord, le fort enjeu de cette mission « Ville et logement » qui doit répondre aux priorités dégagées par le gouvernement à l'occasion du plan de cohésion sociale et du plan d'engagement national pour le logement. Il a considéré que l'effort consenti par le gouvernement était à la hauteur de cet enjeu.

Il a souligné également que la mission « Ville et logement » était doublement caractérisée par la masse des aides personnelles qui limitait les marges de manoeuvre et par le poids relatif très important de la fiscalité, devenue le levier principal de l'action gouvernementale.

Il a regretté que, de manière générale, dans le domaine du logement, l'efficacité des politiques conduites soit contrariée par la diversité des actions et il a souhaité un recentrage des politiques sur un nombre limité d'objectifs, ainsi qu'une évaluation systématique du bilan coût-avantage des nouvelles mesures proposées.

Enfin, concernant l'accession à la propriété, M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a déploré un manque de visibilité en la matière, dans une conjoncture très difficile et très risquée, compte tenu du coût du foncier et du risque de remontée des taux d'intérêt.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que la mission connaîtrait certainement des évolutions compte tenu des engagements pris par le Premier ministre le 8 novembre 2005. Il a convenu d'une nécessaire stabilisation de la législation, notamment fiscale, dans le domaine du logement et s'est interrogé, à cet égard, sur les dispositions du projet de loi portant engagement national pour le logement, qui allait être très prochainement examiné par le Sénat.

M. Yves Fréville a approuvé les observations des rapporteurs spéciaux sur l'évolution de la DSU et l'accession à la propriété.

Il a regretté que les interventions de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) ne permettent pas toujours de disposer de statistiques fines sur les problèmes urbains. Il a souhaité obtenir des statistiques sur la répartition locale des attributions d'allocations logement.

A l'issue de ces interventions, à l'invitation de MM. Philippe Dallier et Roger Karoutchi, rapporteurs spéciaux, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Ville et logement » pour 2006 et de l'article 93 rattaché.

PJLF 2006 - Mission « Politique des territoires » - Examen du rapport spécial

Enfin, la commission a examiné le rapport spécial de M. Roger Besse, rapporteur spécial, sur la mission « Politique des territoires ».

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a commencé par formuler plusieurs observations qui intéressaient la mission « Politique des territoires » dans son ensemble.

Il a d'abord rappelé que cette mission constituait une mission interministérielle et qu'elle était composée de six programmes. Il a précisé qu'elle associait deux ministères : d'une part, le ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, pour 4 programmes de la mission ; d'autre part, le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, pour 2 programmes de la mission.

Il a souligné que cette mission retraçait, principalement, trois grandes politiques sectorielles de l'Etat : la politique de l'urbanisme, le coeur de la politique de l'aménagement du territoire et la politique du tourisme.

Il a indiqué que, pour 2006, la mission « Politique des territoires » comprenait 1.549 équivalents temps plein travaillé, qui représentaient 0,06 % de l'ensemble des plafonds d'emplois inscrits au budget général de l'Etat. Il a noté que ces emplois étaient répartis entre les deux ministères concernés, à raison de :

- 92,5 % (soit 1.432 équivalents temps plein travaillé) pour le ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, ce qui correspondait à 1,53 % du plafond global d'emplois de ce ministère ;

- 7,5 % (soit 117 équivalents temps plein travaillé) pour le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Il a précisé que ces derniers emplois, en pratique, correspondaient aux effectifs de la DATAR, et qu'ils représentaient 0,06 % du plafond global d'emplois du ministère de l'intérieur.

Il a ajouté que la mission « Politique des territoires », pour 2006, en termes de crédits budgétaires, représentait 864,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement, et 701,8 millions d'euros de crédits de paiement. Il a fait observer que ces crédits faisaient de la mission « Politique des territoires », en volume, une « petite » mission du budget général de l'Etat, qui correspondait à 0,25 % du total des autorisations d'engagement de ce budget, et à 0,21 % du total de ses crédits de paiement.

Par ailleurs, il a signalé que, pour 2006, au titre de cette mission, étaient attendus des fonds de concours non négligeables : près de 28,7 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit l'équivalent de 3,32 % des autorisations d'engagement de la mission ; 33,8 millions d'euros en crédits de paiement, soit l'équivalent de 4,82 % des crédits de la mission. A ce propos, il s'est félicité de l'inscription, cette année, grâce à la LOLF, du montant des fonds de concours dans les « bleus » budgétaires, information améliorant la visibilité de la mission. Toutefois, il a souhaité qu'à l'avenir soit également précisée l'origine de ces fonds. Il a précisé que cette information, actuellement, n'était disponible qu'au travers des questionnaires budgétaires.

Il a précisé, en outre, que les finalités poursuivies par la mission « Politique des territoires », en 2006, devraient bénéficier de plus de 2,62 milliards d'euros de dépenses fiscales, soit l'équivalent de 3,75 fois les crédits de paiement demandés au titre de la mission elle-même.

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a ensuite analysé les crédits de chacun des six programmes composant la mission.

Concernant le premier programme de celle-ci, le programme 222 « Stratégie en matière d'équipement », il a indiqué qu'il s'agissait de crédits destinés au financement des moyens de pilotage stratégique de l'équipement, permettant d'adapter en permanence les politiques des territoires aux nouveaux besoins d'intervention publique. Il a précisé que ce programme était composé de sept actions.

Il a fait valoir que ce programme « Stratégie en matière d'équipement », visait, pour l'essentiel, à financer des dépenses de personnel et de fonctionnement dans le domaine de l'équipement. Il a signalé qu'eu égard à la complexité du périmètre de ce programme, il était envisagé de transférer, en 2007, l'ensemble de ses crédits dans le programme 217, « Conduite des politiques d'équipement », de la mission « Transports ». A cet égard, il a observé que l'opération s'inscrirait a priori à l'encontre des objectifs de la LOLF, qui visait à l'identification par nature des catégories de dépenses, mais il a estimé que ce transfert de crédits permettrait une lisibilité budgétaire constituant la véritable finalité poursuivie, en la matière, par la LOLF.

Puis il a évoqué les principaux chiffres concernant ce programme « Stratégie en matière d'équipement » pour 2006.

Il a tout d'abord relevé que les dépenses de personnel représentaient 56,43 millions d'euros de crédits de paiement et 847 équivalents temps plein travaillés. Il a signalé que ces équivalents temps plein travaillés ne concernaient que des personnels d'administration centrale de l'équipement. Il a expliqué que, compte tenu des mutations que connaissait l'équipement dans le contexte de la décentralisation, il avait été décidé, pour la commodité de la gestion, de transférer provisoirement les effectifs des services déconcentrés dans le programme 217, « Conduite et pilotage des politiques d'équipement » de la mission « Transports ».

Il a ensuite indiqué que, globalement, les crédits du programme « Stratégie en matière d'équipement », pour 2006, s'élevaient au total à 99,47 millions d'euros en crédits de paiement (soit 14 % des crédits de la mission) et que, par rapport aux crédits correspondants inscrits en loi de finances pour 2005, ces crédits s'avéraient en hausse de près de 6 %. Il a relevé que cette hausse profitait principalement à l'action 2, « Ecoles, pilotage des services et de l'encadrement », pour 2,78 millions d'euros. Il a précisé que cette somme devrait permettre de financer : d'une part, des travaux immobiliers dans les locaux de l'Ecole nationale des Ponts et chaussées, afin de répondre aux besoins de mise aux normes du bâtiment ; d'autre part, les besoins en animation et en communication liés à la réforme de l'équipement, notamment des actions à destination des citoyens et des élus locaux.

Il a signalé, encore, au bénéfice du programme « Stratégie en matière d'équipement », que 1,23 million d'euros était attendu, en 2006, au titre de fonds de concours, qui provenaient notamment de la vente de publications et documents statistiques divers.

Concernant le deuxième programme de la mission « Politique des territoires », le programme 113, « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique », M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué qu'il s'agissait de crédits destinés au financement des grandes opérations d'urbanisme lancées par l'Etat, de l'exercice de ses missions en matière de planification ou d'application du droit des sols, et du soutien technique ou opérationnel apporté par l'équipement aux collectivités territoriales et à d'autres ministères. Il a précisé que ces aspects étaient déclinés en six actions.

Il a indiqué que, pour 2006, les dépenses de personnel de ce programme « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique » représentaient 17,35 millions d'euros de crédits d'engagement et 259 équivalents temps plein travaillé. Il a noté que la quasi-intégralité de ces équivalents temps plein travaillé était consacrée à l'action 1 du programme, « Urbanisme, planification et aménagement ». Il a ajouté qu'il s'agissait, comme dans le cadre du programme « Stratégie en matière d'équipement », d'effectifs des services centraux de l'équipement. Il a rappelé, qu'en effet, les dépenses de personnel des services déconcentrés, cette année, se trouvaient rassemblés, pour la commodité de la gestion, dans le programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement » de la mission « Transports ».

Il a par ailleurs regretté que la ventilation des équivalents temps plein travaillé du programme « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique » ne soit pas détaillée, par affectation, dans le « bleu » budgétaire, comme cela avait été fait pour le programme « Stratégie en matière d'équipement ».

Puis il a indiqué que les crédits demandés pour ce programme « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique », représentaient, au total, 92,35 millions de crédits de paiement, soit 13 % des crédits de la mission « Politique des territoires ».

Il a précisé que les crédits de paiement enregistraient une hausse apparente de 17,97 %, par rapport aux crédits correspondants inscrits en loi de finances pour 2005. Cependant, il a fait valoir que cette hausse était essentiellement due à l'augmentation des crédits de l'action 6, « Soutien au programme », et résultait du changement de périmètre de certains postes budgétaires (en matière de contentieux) et du « rebasage » de certaines dépenses (concernant les études).

Il a également fait valoir que ces crédits finançaient la politique de l'urbanisme de l'Etat. Il a rappelé les trois grands axes structurant cette politique : d'une part, le soutien des pôles de développement d'intérêt national, touchant au patrimoine foncier de l'Etat, aux villes nouvelles et aux grandes opérations d'urbanisme ; d'autre part, le soutien aux politiques urbanistiques locales, concernant l'élaboration des schémas de cohérence territoriale, le volet foncier des contrats de plan Etat-régions et les établissements publics fonciers ; enfin, le soutien aux organismes et réseaux professionnels du secteur, dont les agences de l'urbanisme.

Il a alors signalé un amendement que l'Assemblée nationale, à l'initiative de son collègue député Louis Giscard d'Estaing, au nom de la commission des finances, avait adopté le 8 novembre 2005. Il a indiqué que cet amendement tendait à supprimer, dans le programme « Stratégie en matière d'équipement », deux millions d'euros, cette somme ayant été prévue pour financer l'aide au démarrage de nouveaux établissements publics fonciers locaux. Il a précisé que ces établissements étaient destinés à permettre l'accélération de la construction de logements. Il a expliqué que l'Assemblée nationale avait souhaité éviter de renforcer la complexité des structures intervenant dans le domaine foncier, domaine dans lequel les services déconcentrés de l'équipement, les agences d'urbanisme et les communautés d'agglomérations se trouvaient déjà compétents.

M. Jean Arthuis, président, a exprimé son accord avec cette analyse.

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué qu'il souscrivait, lui-même, à l'initiative de l'Assemblée nationale, à cet égard. En conséquence, il a précisé que, dans l'hypothèse où l'amendement précité ne serait pas maintenu au terme de la première délibération du projet de loi de finances par l'Assemblée nationale, il proposerait à la commission de rétablir la suppression des crédits correspondants.

Par ailleurs, il a indiqué qu'au bénéfice du programme « Stratégie en matière d'équipement », 26,48 millions d'euros en crédits de paiement étaient attendus en 2006, au titre de fonds de concours, soit l'équivalent de 28 % des crédits de paiement du programme. Il a ajouté que ces fonds de concours résultaient, pour l'essentiel, de la participation du conseil régional d'Ile-de-France aux opérations d'aménagement de la voirie primaire des villes nouvelles, prévue à hauteur de plus de 21,55 millions d'euros.

Concernant le troisième programme de la mission « Politique des territoires », le programme 159 « Information géographique et cartographique », il a indiqué qu'il s'agissait de crédits destinés au financement des besoins de la collectivité nationale en matière de données géographiques et cartographiques. Il a précisé que ce programme s'inscrivait dans une démarche de gestion des territoires. Il a ajouté qu'il était composé de deux actions et qu'il s'appuyait sur un opérateur unique, l'Institut géographique national (IGN).

Il a expliqué que, prenant en considération ce dernier élément, la responsabilité du programme avait été attribuée au directeur général de l'IGN. Il a signalé que, ce faisant, le directeur général de l'IGN avait été placé dans une position ambiguë, à la fois responsable et opérateur du programme. Il a exposé que l'Assemblée nationale, cependant, à l'initiative de son collègue député Louis Giscard d'Estaing, intervenant au nom de la commission des finances, avait adopté, le 8 novembre 2005, avec l'avis favorable du gouvernement, un amendement tendant à mettre fin à cette situation. Il a expliqué que l'amendement transférait dans le programme « Information géographique et cartographique » les crédits relatifs à l'information correspondante assurée par le ministère de l'équipement (soit un montant de 60.800 euros), qui figuraient dans le programme « Stratégie en matière d'équipement ». Il a fait valoir que cet amendement permettait d'attribuer la responsabilité du programme aux services du ministère chargé de l'équipement. Il a déclaré qu'il approuvait cette initiative.

Puis il a indiqué que les crédits demandés, pour 2006, au titre du programme « Information géographique et cartographique », représentaient 75 millions d'euros, soit un peu plus de 10 % des crédits de la mission « Politique des territoires ».

Il a signalé que, globalement, par rapport à ceux inscrits en loi de finances pour 2005, les crédits de paiement baissaient de 1,92 %. Il a relevé que cette baisse s'inscrivait dans le cadre de la convention d'objectifs et de moyens, passée entre l'Etat et l'IGN pour les années 2003 à 2006, visant à faire diminuer la part de la dotation de l'Etat par rapport aux ressources propres de l'établissement.

Concernant le quatrième programme de la mission « Politique des territoires », le programme 223 « Tourisme », M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué qu'il s'agissait, comme l'intitulé même du programme l'indiquait clairement, des crédits afférents à la politique conduite par l'actuel ministère délégué au tourisme. Il a rappelé les trois grands axes de cette politique, dont il a précisé qu'ils trouvaient leur correspondance dans les trois premières actions du programme (la quatrième action étant une action de « soutien ») :

1°- le renforcement de la promotion de la destination « France » et des savoir-faire nationaux, afin d'accroître la fréquentation touristique du pays ;

2°- l'appui à l'économie touristique nationale, par une meilleure connaissance des besoins et des attentes des touristes, dans le cadre d'une démarche dite « qualité » ;

3°- le développement de l'accès de tous aux vacances, y compris les publics économiquement fragiles.

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a tenu à attirer l'attention sur la conjoncture dépréciée dans laquelle se trouvait le tourisme français. Ainsi, il a indiqué qu'on assistait, depuis 2001, à une baisse du solde touristique de la France. Il a précisé que le contexte international ne suffisait plus à expliquer cette situation. Il a notamment fait valoir que la baisse était de 14,5 % en 2003, et de 15,7 % en 2004. Il a signalé qu'en 2004, pour la première fois depuis 15 ans, le tourisme n'avait plus représenté le premier poste excédentaire de la balance nationale des biens et des services, à la suite, notamment, de la progression des dépenses des Français à l'étranger. Il a indiqué que, la même année, malgré le retour des clientèles lointaines à fort pouvoir d'achat, essentiellement américaine et japonaise, clientèles qui augmentaient de près de 7 % chacune, la fréquentation étrangère était demeurée stable, sous l'effet d'un nouveau recul du nombre des touristes européens, de 1,5 %. Il a rappelé que cette clientèle constituait 80 % des touristes étrangers en France, et que sa diminution touchait les marchés britannique, allemand et néerlandais. Or, il a mis en exergue que ces derniers, globalement, représentent 54 % de la clientèle étrangère, et qu'en outre ils contribuaient à une répartition des activités touristiques sur l'ensemble du territoire, tandis que les clientèles lointaines se concentraient, elles, essentiellement en Ile-de-France.

Au regard de ce contexte, il a fait observer que les ressources de Maison de la France, groupement d'intérêt public fédérant des moyens publics et privés pour la promotion de l'image touristique de la France, n'avaient cessé de se dégrader depuis quatre ans, revenant de plus de 52 millions d'euros en 2003 à 49,1 millions d'euros en 2004, puis à 46,8 millions d'euros en 2005. Il a remarqué que, dans le même temps, les dotations de structures comparables à l'étranger, notamment en Espagne, avaient, au contraire, progressé. Ainsi, il a indiqué que « Turespana », en 2005, disposait d'un budget total de 115,7 millions d'euros, en augmentation de 11 %. De même, il a signalé que les communautés autonomes espagnoles investissaient quelque 230 millions d'euros dans la promotion touristique. Il a ajouté qu'à elle seule, la campagne d'image dont le slogan est « Souriez, vous êtes en Espagne » avait été dotée d'un budget de 32 millions d'euros.

Puis il a indiqué que le programme « Tourisme », pour 2006, représentait :

- en dépenses de personnel, 21,36 millions d'euros de crédits de paiement et 326 équivalents temps plein travaillé, correspondant pour l'essentiel à des effectifs d'administration centrale ;

- globalement, 78,29 millions en crédits de paiement, crédits qui, par rapport aux crédits correspondants inscrits en loi de finances pour 2005, se révélaient quasiment stables, enregistrant une baisse de 0,3 %.

Il a par ailleurs signalé que 1,67 million d'euros était attendu, en 2006, au bénéfice de ce programme, au titre de fonds de concours (soit l'équivalent de 2 % des crédits du programme). Il a précisé que ces fonds de concours résultaient, en pratique, de participations au financement d'études et d'enquêtes dans le domaine du tourisme, en provenance de la Banque de France et de la SNCF.

Il a également relevé que 8 catégories de dépenses fiscales, dont 6 à titre principal, se trouvaient recensées comme contribuant aux finalités poursuivies par le programme. Il a précisé que ces dépenses représentaient, au total, 1,746 milliard d'euros. Il signalé qu'il s'agissait, pour 88,5 %, des dépenses associées au taux de TVA à 5,5 % sur l'hôtellerie, dont le coût pour 2006 était évalué à 1,54 milliard d'euros, soit près de vingt fois les crédits de paiement du programme lui-même.

Concernant le programme 112, « Aménagement du territoire », M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué qu'il s'agissait des crédits destinés au financement des moyens mis à la disposition de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR). Il a rappelé que cette Délégation était appelée à devenir, en 2006, la « Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires » (DIACT), dans le sillage du Comité interministériel à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (CIACT) du 14 octobre 2005. Il a souligné que ce changement d'appellation traduisait une orientation nouvelle de la politique de l'aménagement du territoire, et résultait, en particulier, de l'absorption, par la DATAR, de la mission interministérielle sur les mutations économiques (MIME). Il a déclaré qu'il souhaitait, pour l'avenir, que cette politique ne fasse plus l'objet des changements de rattachement ministériel, selon lui trop fréquents, qui avaient pu être observés dans le passé.

Il a précisé que les crédits du programme « Aménagement du territoire » ne représentaient que 5,25 % environ de l'effort budgétaire global consacré à la politique de l'aménagement du territoire, politique au carrefour de nombreuses politiques publiques, retracée dans un « jaune » budgétaire. Il a noté que ce document révélait que, pour 2006, près de 4,35 milliards d'euros demandés au titre d'autres programmes que le programme 112 bénéficieraient à l'aménagement du territoire. Il a précisé que ce dernier représentait 275,5 millions d'euros en crédits de paiement. Il a indiqué que, par conséquent, l'effort budgétaire total, dans le domaine de l'aménagement du territoire, s'élèverait, en 2006, à près de 5,23 milliards d'euros.

Cependant, il a souligné que le programme « Aménagement du territoire » constituait le coeur de cette politique. Il a rappelé que celle-ci comprenait trois volets, correspondant aux trois premières actions du programme (la quatrième action étant une action de « soutien »).

Il a indiqué qu'il s'agissait, d'abord, du développement de l'attractivité des territoires. Il a précisé que cet aspect correspondait notamment aux crédits destinés à financer la prime d'aménagement du territoire (PAT), l'agence française pour les investissements internationaux (AFII), et les agences régionales de développement économique. Il a ajouté que les 55 pôles de compétitivité, validés par le CIACT du 14 octobre 2005, figuraient également dans ce premier volet. Au reste, il a salué l'impulsion donnée à la politique d'aménagement du territoire par l'instauration de ces pôles, mais il a tenu également à exprimer son inquiétude, quant à un éventuel effet de décalage aggravé, entre les territoires labellisés et ceux, économiquement fragiles, qui ne pourraient l'être. Il s'est tout particulièrement interrogé sur le devenir des territoires ruraux dans le cadre de ce nouveau dispositif. Il a déclaré qu'il doutait que les pôles d'excellence ruraux annoncés puissent satisfaire aux besoins importants qu'éprouvaient ces territoires.

Puis il a indiqué que le deuxième axe de la politique d'aménagement du territoire retracé par le programme 112 consistait dans le renforcement de la solidarité entre les territoires. Il a précisé qu'il s'agissait des contrats de plan Etat-régions et d'actions diverses en faveur du développement territorial. Il a indiqué que la troisième action du programme retraçait les crédits finançant le soutien apporté aux grands projets interministériels d'aménagement, ainsi qu'à la politique des massifs.

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que les dépenses de personnel du programme « Aménagement du territoire », pour 2006, représentaient 8,94 millions d'euros de crédits de paiement et 117 équivalents temps plein travaillé. Il a précisé que ces emplois correspondaient aux moyens propres, en personnels, de la DATAR, future DIACT.

Il a par ailleurs indiqué que les crédits demandés pour le programme en 2006, s'élevaient, globalement, à 275,5 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui représentait une hausse de 3,56 %, par rapport aux crédits correspondants inscrits en loi de finances pour 2005. Cependant, il a déploré que le « bleu » du programme ne détaille pas le montant des crédits prévus en 2006 pour certains engagements importants du gouvernement, notamment les pôles de compétitivité, et que, d'une façon générale, ce document reste très imprécis sur la ventilation des crédits, entre les mesures financées par chaque action. Il a fait observer que cette imprécision n'était pas conforme à l'obligation posée par la LOLF de justifier « au premier euro » les crédits demandés.

Il a précisé que, toutefois, les éléments recueillis grâce au questionnaire budgétaire, révélaient, en partie, cette ventilation. Il a ainsi pu indiquer que les dépenses de personnel se montraient stables, par rapport à 2005, l'augmentation (de 48,9 %) de la masse salariale n'étant due qu'à l'augmentation du point d'indice et, surtout, à la prise en charge par le programme des dépenses de pensions. S'agissant des dépenses d'interventions, il a relevé le retrait de 17,78 %, par rapport à 2005, des crédits de paiement affectés à la prime d'aménagement du territoire. Il a indiqué qu'une baisse de 18,37 % affectait les crédits destinés aux mesures d'assistance technique de l'action 2 du programme, qui permettaient notamment le soutien aux associations du réseau DATAR. Il a constaté que la hausse globale des crédits du programme « Aménagement du territoire » résultait de l'augmentation de la dotation du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Il a précisé que cette augmentation était destinée à prendre en compte les engagements du gouvernement des années précédentes, tout en dégageant une marge de manoeuvre pour de nouvelles priorités qu'il pourrait souhaiter soutenir.

Par ailleurs, il a indiqué que 24 catégories de dépenses fiscales étaient recensées comme contribuant, en 2006, aux finalités poursuivies par le programme « Aménagement du territoire », dont 20 à titre principal. Il a signalé que ces dépenses représentent, au total, plus de 879 millions d'euros, soit plus de trois fois les crédits de paiement du programme lui-même. Il a précisé que, parmi ces contributions, les deux principales étaient : d'une part, l'exonération, totale ou partielle, des bénéfices réalisés par les entreprises nouvelles, créées entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 2009, dans les zones prioritaires d'aménagement du territoire (pour un coût évalué à hauteur de 170 millions d'euros) ; d'autre part, les taux particuliers applicables à divers produits et services consommés ou utilisés en Corse (pour un coût évalué à hauteur de 140 millions d'euros).

Concernant le sixième et dernier programme, le programme 162 « Interventions territoriales de l'Etat » (PITE), M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué qu'il s'agissait de crédits destinés au financement d'actions définies comme « des actions régionales ou interrégionales, de nature interministérielle, couvrant des projets d'envergure, à enjeu de portée nationale », actions limitées dans le temps. Il a souligné que le PITE constituait un programme original :

- d'une part, son élaboration est interministérielle et déconcentrée, dans la mesure où il revient aux préfets de région de proposer les actions qui le composent ;

- d'autre part, les ressources budgétaires figurant au PITE sont retranchées des programmes ministériels où elles auraient vocation à apparaître, à l'exception des dépenses en personnel, que le PITE n'intègre pas ; ces ressources sont fongibles uniquement dans le périmètre de chaque action.

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a rappelé que le Premier ministre avait chargé le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, de la gestion du PITE. Puis il a détaillé les 8 actions regroupées, pour 2006, dans ce programme :

- l'action « Le Rhin et le bande rhénane », visant au développement durable des activités économiques de ce territoire, en améliorant l'efficacité du transport fluvial ;

- l'action « Eau - Agriculture en Bretagne », retraçant les crédits destinés au financement de la « reconquête » de la qualité des eaux de cette région ;

- l'action « Plan Loire Grandeur nature - Centre », finançant une deuxième phase du plan éponyme (débuté en 1994 et programmé jusqu'en 2006), et visant notamment la sécurité de ce territoire face au risque d'inondations ;

- l'action « Programme exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse », retraçant les crédits destinés au financement du développement économique de la Corse, par une remise à niveau des équipements publics structurants, infrastructures de base et services collectifs ;

- l'action « Filière bois - Auvergne et Limousin », tendant à la promotion d'une gestion durable des forêts de ce territoire, à l'accompagnement de la modernisation des entreprises de transformation du bois et à la dynamisation de leurs débouchés ;

- l'action « Plan gouvernemental sur le Marais poitevin - Poitou-Charentes », rassemblant les crédits destinés à la mise en oeuvre du plan pour le marais poitevin adopté en juin 2002, visant notamment à restaurer son caractère de zone humide ;

- l'action « Plan Durance multi-usages - Provence-Alpes-Côte d'Azur », retraçant les crédits destinés au financement des opérations tendant à un meilleur partage des ressources en eau de la rivière Durance, entre ses différents usages ;

- enfin, l'action « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes », concernant l'amélioration de la maîtrise des flux migratoires et la dynamisation de la politique d'accueil des demandeurs d'asile dans cette région. M. Roger Besse, rapporteur spécial, a fait observer que le rattachement de cette dernière action à la mission « Politique des territoires » pouvait paraître discutable, dans la mesure où il existait, au sein de la mission « Solidarité et intégration », un programme spécifiquement dédié à l'« accueil des étrangers et intégration ».

Enfin, il a formulé plusieurs observations relatives à la mesure de la performance au sein de la mission « Politique des territoires ».

Sur ce plan, en premier lieu, il a déclaré que, selon lui, aucun des programmes qui composaient la mission, à l'exception du programme « Information géographique et cartographique », ne donnait entièrement satisfaction. Il a exposé que les objectifs retenus ne constituaient qu'un développement explicatif des actions en cause, et non une véritable mesure de performance, et que les indicateurs, de leur côté, se révélaient lacunaires. Il a signalé qu'en particulier, les objectifs et indicateurs associés au PITE étaient largement perfectibles.

En second lieu, il a mis en exergue que certaines des mesures de performance des programmes composant la mission se trouvaient mal établies, faute que tous les indicateurs prévus aient été renseignés dans le projet de loi de finances pour 2006. Il a indiqué que les programmes concernés étaient les programmes « Stratégie en matière d'équipement » et « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique », ainsi que le PITE.

En conclusion, il a insisté sur la nécessité que la stratégie de performance des programmes de la mission « Politique des territoires » soit améliorée pour les prochains projets de loi de finances.

Un débat s'est instauré.

M. Jean Arthuis, président, a remercié M. Roger Besse, rapporteur spécial, pour le caractère très complet de sa présentation. Il a rappelé que la mission « Politique des territoires » avait été créée à l'initiative du Parlement.

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, a fait part de son optimisme quant au rôle que les territoires français étaient appelés à jouer dans l'avenir.

M. Yves Fréville a déclaré souscrire entièrement aux observations de M. Roger Besse, rapporteur spécial, s'agissant de la mesure de la performance du PITE. Il a appuyé son propos, notamment, sur l'indicateur de l'action « Eau - Agriculture en Bretagne » de ce programme, dont il a montré l'insuffisance.

Puis MM. Jean Arthuis, président, Yves Fréville et Roger Besse, rapporteur spécial, ont procédé à un large échange de vues concernant les actions inscrites au PITE, et les modalités du choix de ces dernières.

Enfin, après une intervention de M. Roger Karoutchi, la commission a décidé de réserver son vote sur ces crédits jusqu'à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, prévue pour le mardi 22 novembre 2005.