Travaux de la commission des finances
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.
PJLF pour 2005 - Audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire, sur le projet de loi de finances pour 2005
La commission a procédé àl'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire, sur le projet de loi de finances pour 2005.
M. Jean Arthuis, président,a rappelé que le projet de loi de finances pour 2005 était le dernier présenté sous l'égide de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances.
Présentant tout d'abord le contexte économique du projet de loi de finances pour 2005, M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a exposé que le taux de croissance avait atteint, en 2004, 2,5 %, supérieur de 1 % à la moyenne de l'Union européenne. Constatant qu'un taux inférieur aurait été mis au « débit » du gouvernement, il en a déduit que cette évolution positive devait donc, au contraire, être portée à son « crédit ».
M. Nicolas Sarkozy a observé que l'accumulation du déficit budgétaire suscitait de la part des contribuables une épargne de précaution et qu'une politique de réduction de celui-ci s'avèrerait favorable à la consommation.
Evoquant ensuite la mise en oeuvre des dispositions de la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 sur la consommation et l'investissement relative aux exonérations de droits de mutation sur les dons en faveurs des enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, il a précisé qu'entre les mois de juin et d'août 2004, 90.000 donations avaient été actées, pour un montant de 1,6 milliard d'euros.
A propos de la réduction d'impôt au titre des intérêts payés dans le cadre d'un prêt à la consommation, il a précisé que cette mesure avait suscité une progression de 6 % de ces prêts, et concernant la disposition sur le déblocage de la réserve de participation, il a indiqué qu'au cours de l'été 2004, 1.000 accords avaient été conclus, concernant 321.000 salariés.
S'agissant de la hausse des prix à la consommation, M. Nicolas Sarkozy a regretté que certains dérapages à l'occasion du passage à l'euro aient été trop longtemps niés et que les producteurs de fruits et légumes, comme les consommateurs, aient été, en définitive, lésés. Il a affirmé qu'à la suite des accords conclus le 17 juin 2004, 3.700 prix de produits de grande consommation avaient baissé.
Evoquant les dispositions de la loi du 9 août 2004 sur le dégrèvement temporaire de taxe professionnelle afférant à certains investissements réalisés entre janvier 2004 et juin 2005, il a précisé que, selon les indications de certains chefs d'entreprise, ceux-ci auraient connu une progression de 8 % au cours de la même période.
Puis M. Nicolas Sarkozy a précisé que le projet de loi de finances pour 2005 avait été établi sur la base d'une prévision d'inflation de 1,8 % en 2005, d'un taux de croissance de 2,5 %, ce qui constituait un choix volontariste, ainsi que d'un prix moyen du baril de pétrole de 36,5 dollars, alors que le budget pour 2004 avait été tracé sur la base d'un prix moyen de 28 dollars.
M. Nicolas Sarkozy a, ensuite, énuméré les principales priorités du projet de loi de finances pour 2005, soulignant que la première d'entre elles consistait en une réduction de 10 milliards d'euros du déficit de l'Etat, ce qui constituait un niveau record de baisse, le déficit revenant de 55 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2004 à 45 milliards d'euros fin 2005. Il a précisé que le montant global des dépenses de l'Etat ne progresserait pas plus que l'inflation.
Rappelant que 15 % du budget de l'Etat étaient préemptés par le remboursement de la dette, que 40 % de celui-ci étaient affectés au paiement des rémunérations de fonctionnaires, il a annoncé qu'en 2005, 10.000 fonctionnaires partant à la retraite ne seraient pas remplacés. Il a ajouté que 3.000 emplois publics seraient créés dans les secteurs prioritaires et donc qu'au total, le nombre de fonctionnaires serait réduit de 7.000 l'an prochain.
M. Nicolas Sarkozy a fait valoir que les mesures fiscales prévues pour 2005 étaient destinées à stimuler la croissance. Il a précisé que la suppression de la contribution additionnelle de 3 % à l'impôt sur les sociétés laisserait cet impôt à un taux de 33 %, alors que dans les pays d'Europe de l'Est, celui-ci était de 20 %. Il a ajouté qu'avec la prolongation du dégrèvement temporaire de taxe professionnelle, cela représentait un coût de 1,1 milliard d'euros.
M. Nicolas Sarkozy a démenti l'évolution du niveau des prélèvements obligatoires telle qu'elle avait été présentée dans certains organes de presse, précisant que ceux-ci s'établiraient à 43,7 % en 2005, au lieu de 43,8 % en 2002. Il a nié que le projet de loi de finances pour 2005 impliquait une augmentation des impôts, sauf en ce qui concernait les cas particuliers de la taxe d'apprentissage, pour laquelle un système de bonus/malus était proposé, et de la contribution spécifique sur les pétroliers.
M. Nicolas Sarkozy a présenté ensuite trois mesures destinées à lutter contre les délocalisations d'entreprises. Il annoncé, en premier lieu, des allègements fiscaux et sociaux pour les entreprises participant à un projet de recherche et de développement dans les « pôles de compétitivité ». Il a précisé, en deuxième lieu, qu'un crédit de taxe professionnelle serait accordé dans 30 zones exposées aux délocalisations et aux restructurations industrielles, à raison de 1.000 euros par salarié. Il a ajouté, en troisième lieu, qu'un crédit d'impôt sur les sociétés serait accordé aux entreprises qui « relocalisent » des activités qu'elles avaient transférées hors de l'Espace économique européen.
M. Nicolas Sarkozy a indiqué que l'effort réalisé par la France pour réduire son déficit public, qui avait ouvert la perspective d'une réforme de la politique agricole commune, ne devait pas être accompagné de l'augmentation projetée par la Commission européenne de la contribution française, qui serait portée de 16 à 22 milliards d'euros au terme de la période.
Il a fait part à la commission de la démarche qu'il avait conduite auprès des ministres des finances de l'Union européenne tendant à ce que les Etats membres dont le niveau d'imposition sur les sociétés était inférieur au niveau moyen d'imposition sur les sociétés dans l'ensemble des Etats membres fassent l'objet d'une réduction des fonds structurels auxquels ils avaient actuellement droit, rappelant que ceux-ci constituaient 40 % du budget communautaire.
M. Nicolas Sarkozy a évoqué ensuite les crédits d'impôt et réductions de charges destinés à porter le nombre d'apprentis de 350.000 à 500.000, ainsi que les mesures projetées pour renforcer le dispositif initié en 1991 en faveur des emplois à domicile. Il a fait valoir que les textes en vigueur permettaient déjà, à 1,6 million de salariés peu qualifiés, de bénéficier d'un emploi stable, et déclaré que la situation actuelle était, sur le plan fiscal, moins favorable pour les familles que pour les entreprises ayant engagé du personnel.
Il a précisé, enfin, que l'aide publique au développement atteindrait 0,44 % du produit intérieur brut en 2005, et que l'engagement pris par le Président de la République de porter celui-ci à 0,5 % en 2007 serait tenu.
M. Nicolas Sarkozy a considéré que le projet de loi de finances pour 2005 constituerait un « budget pour tous », évoquant l'augmentation de 5,4 % du SMIC, largement financée par l'Etat au travers de dispositifs d'allègements de charges sociales, le rehaussement à 4 % au total des seuils relatifs à la prime pour l'emploi, la suppression du SMIC hôtelier et la création de 90.000 logements sociaux.
A propos du dispositif de création d'un crédit d'impôt en faveur de la première accession à la propriété, devant se substituer au prêt à taux zéro, il a fait remarquer que celui-ci, contrairement au précédent, porterait aussi bien sur les logements anciens que sur le neuf et bénéficierait à deux fois plus de personnes.
Il a confirmé que les successions en ligne directe ne dépassant pas 100.000 euros, soit le patrimoine moyen transmis par succession aujourd'hui, ne seraient plus soumises à l'imposition, précisant qu'une telle disposition était motivée essentiellement par la volonté de développer une politique en faveur de la famille.
M. Jean Arthuis, président, a observé que la réduction significative du déficit budgétaire prévue par le projet de loi de finances pour 2005 était de nature à susciter la confiance.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire, a tout d'abord rappelé qu'avec la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), le budget devenait un outil pour la modernisation de l'Etat, évoquant en particulier le remplacement de 850 chapitres budgétaires par 32 missions, la nouvelle comptabilité publique ainsi que la réforme du contrôle financier.
Il a indiqué que la réduction d'impôt en faveur des contribuables effectuant leur déclaration par Internet serait portée de 10 à 20 euros, avec comme objectif que le nombre de télé-déclarants passe de 1.250.000 en 2004 au double en 2005.
M. Dominique Bussereau a précisé que l'adossement de la redevance de l'audiovisuel sur la taxe d'habitation permettrait un meilleur recouvrement de celle-ci, confirmant qu'il serait dû une redevance par foyer, quel que soit le nombre de téléviseurs et que les allocataires du RMI en seraient exonérés.
Evoquant enfin la compensation des transferts de compétences aux collectivités territoriales, il a annoncé une progression de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 3,9 %, la deuxième par son importance, depuis 1996.
M. Dominique Bussereau a confirmé que les transferts de compétences aux régions seraient compensés par une « régionalisation » de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), à hauteur de 400 millions d'euros, et que les transferts aux départements seraient compensés par une taxe sur les conventions d'assurance, pour un montant de 120 millions d'euros.
M. Jean Arthuis, président, après s'être félicité de la progression du crédit d'impôt en faveur des contribuables ayant « télé-déclaré » leur impôt sur le revenu, a proposé à la commission une nouvelle réunion pour permettre à celle-ci d'interroger le ministre d'Etat et le secrétaire d'Etat sur le projet de loi de finances pour 2005.
Questions diverses
M. Roland du Luart s'est enquis des conséquences d'un changement de ministre sur le calendrier et le contenu de la discussion budgétaire au Sénat.