COM(2021) 189 final
du 21/04/2021
Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)
La directive 2014/95/UE sur la publication d'informations non financières, dite NFRD, s'applique, depuis 2018, aux entreprises qui emploient plus de 500 salariés et aux entreprises mères de groupes employant plus de 500 salariés sur une base consolidée. Complétée par des lignes directrices de la Commission publiées en 2017 et 2019 (informations relatives au climat), elle leur fait obligation de publier des informations sur l'incidence des questions de durabilité sur leurs résultats, leur situation et leur évolution (en interne) ainsi que l'incidence de leurs activités sur la population et l'environnement (d'un point de vue externe)1(*).
Dans sa communication relative au Pacte Vert européen de décembre 2019, la Commission européenne a annoncé une révision de la directive NFRD. L'EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) a été chargé d'un travail préparatoire et de formuler des recommandations sur la forme que pourrait prendre le standard européen de publication extra-financière2(*).
· Objectif d'amélioration de l'information publiée par les acteurs économiques et financiers en matière de durabilité
La proposition de directive entend promouvoir une standardisation de l'information sur les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (dits ESG) à la hauteur de l'ambition sociale et environnementale de l'UE et en adéquation avec les spécificités des entreprises européennes pour disposer d'informations fiables et comparables3(*).
Pour favoriser l'essor de la finance durable, le périmètre des entreprises concernées, y compris les entreprises d'assurance et les établissements de crédit, est fortement élargi (environ 49 000 au lieu de 1 700 actuellement). Un délai de mise en oeuvre est toutefois prévu pour les PME non cotées et la publication par les PME, y compris cotées, d'informations en matière de durabilité est soumise à un régime allégé spécifique.
L'enjeu sous-jacent est celui de la performance et de la résilience. Pour les entreprises, porter une attention particulière aux enjeux ESG participe en effet à leur performance économique et financière. Il en résulte notamment un moindre coût de financement, dans la mesure où l'intégration de ces facteurs est de plus en plus recherchée par les investisseurs. L'accès à des données ESG de qualité et comparables conditionne en outre leur capacité à maîtriser l'impact d'un investissement sur l'environnement et les risques financiers liés au climat ainsi que leur capacité à réorienter les capitaux vers la transition écologique.
Comme la directive NFRD, la proposition de directive modifie les directives « comptable » (2013/34/UE), « transparence » (2004/109/CE) et « audit » (2006/43/CE) ainsi que le règlement « audit » (UE n° 537/2014).
· Enrichissement des données ESG
De nouvelles obligations d'information en matière de durabilité, qualitatives et quantitatives, prospectives (à court, moyen et long termes) et rétrospectives, sont introduites dans la directive comptable, notamment sur les stratégies, les objectifs, le rôle du conseil d'administration et de la direction, les incidences négatives liées à l'activité de l'entreprise et à sa chaîne de valeur, les actifs incorporels et la manière dont l'entreprise définit les informations qu'elle publie.
Il est, en effet, considéré que les acteurs économiques doivent se préoccuper des actions des partenaires commerciaux avec lesquels ils ont une relation stable, faute de quoi les entreprises seraient en mesure d'externaliser leur impact négatif en matière ESG au travers de leurs fournisseurs.
Des informations consolidées sont en outre prévues dans le rapport consolidé de gestion de l'entreprise mère afin de mesurer les incidences du groupe sur les questions de durabilité et leur impact sur l'évolution des activités, des résultats et de la situation du groupe.
Des sanctions pécuniaires doivent être prévues par les États membres en cas d'infraction aux dispositions nationales de transposition de la directive ainsi que la possibilité de prononcer des injonctions.
· Standardisation des données : des actes délégués pour définir les normes d'information en matière de durabilité
Il est prévu que les normes d'information en matière de durabilité soient définies par des actes délégués que la Commission devra publier au plus tard le 31 octobre 2022 pour les sociétés cotées et qui seront complétées au plus tard le 31 octobre 2023, notamment par des dispositions sectorielles.
La proposition de directive (art. 1er) introduit dans la directive « comptable » une liste détaillée de ces informations, tant en ce qui concerne les facteurs environnementaux (atténuation et adaptation au changement climatique, pollution, économie circulaire, biodiversité et écosystèmes, utilisation des ressources aquatiques et marines), que les facteurs sociaux (égalité des chances, conditions de travail, dialogue social, respect des droits de l'homme etc.) et les facteurs de gouvernance. Il est en outre précisé que les actes délégués tiennent compte des travaux et initiatives mondiales en matière de normalisation d'informations sur la durabilité, la responsabilité sociale des entreprises et le développement durable, des indices de référence « transition climatique et accords de Paris » ainsi que des informations et critères prévus par d'autres textes européens.
· Extension du périmètre de responsabilité de l'information financière figurant dans le rapport de gestion
La directive « transparence » est modifiée (art. 2) par voie de conséquence afin de compléter les déclarations des personnes responsables de l'information financière au sein de l'émetteur, qui certifient qu'à leur connaissance le rapport de gestion est établi conformément aux normes d'information en matière de durabilité.
La Commission est en outre habilitée à adopter des mesures visant à créer un mécanisme de détermination de l'équivalence des normes d'information en matière de durabilité par les émetteurs de pays tiers et à prendre les décisions d'équivalence.
Par ailleurs, des lignes directrices devront être publiées par l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) à l'intention des autorité nationales compétentes pour promouvoir la convergence en matière de surveillance des informations publiées en matière de durabilité.
· Contrôle des publications extra-financières par un prestataire spécialisé et indépendant
La directive « audit » est également modifiée (art. 3) pour prévoir notamment la mise en place de procédures nationales d'agrément des contrôleurs légaux des comptes et des cabinets d'audit afin de vérifier qu'ils justifient du niveau nécessaire de connaissances théoriques sur les sujets pertinents pour apprécier les informations en matière de durabilité et effectuer des missions d'assurance en la matière.
Le système d'assurance qualité des contrôleurs légaux des comptes est complété ainsi que le régime d'enquête et de sanctions qui leur est applicable. Afin de garantir l'indépendance de l'assurance qualité et éviter l'éco-blanchiment, la prestation des services de conseil pour la préparation des informations en matière de durabilité est interdite aux contrôleurs légaux et aux cabinets d'audit qui procèdent à l'assurance de ces informations.
Le contenu du rapport d'audit est complété pour prendre en compte les informations ESG (y compris la prise en considération des risques et la réaction aux risques). Enfin, les tâches du comité d'audit concernant l'assurance des informations publiées en matière de durabilité sont précisées.
Ce texte intervient dans un domaine qui ne relève pas de la compétence exclusive de l'Union européenne. Il est en effet fondé, comme la directive NFRD, sur les articles 50 (liberté d'établissement) et 114 (marché intérieur) du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). En renforçant les informations publiées par les entreprises en matière de durabilité, cette proposition de directive vient incontestablement garantir des conditions de concurrence équitables au sein du marché intérieur et renforcer la protection des investisseurs en assurant la cohérence et la comparabilité de l'information publiée par les entreprises. Elle entend également permettre de promouvoir au niveau international une approche européenne globale et cohérente.
Compte tenu de ces observations, cette proposition de directive ne semble pas porter atteinte au principe de subsidiarité.
Le groupe de travail sur la subsidiarité a donc décidé de ne pas intervenir sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.
* 1 « Double importance relative ».
* 2 La présidence de la taskforce a été confiée à Patrick de Cambourg, président de l'Autorité des normes comptables.
* 3 La Commission indique que cette standardisation doit notamment permettre le développement d'une base de données extra-financière libre d'accès, favorisant l'utilisation, la comparabilité et la transparence des données pour toutes les parties prenantes (entreprises, investisseurs, chercheurs, ONG, citoyens, etc.) et limitant l'éco-blanchiment (greenwashing). Cette base de données permettra une concurrence accrue dans le domaine de la donnée qui en réduira le coût pour les acteurs européens, principaux producteurs et utilisateurs de données ESG.