Jeudi 13 juillet 2023, le Sénat a définitivement adopté le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.
Dans sa décision du vendredi 28 juillet 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré le texte partiellement conforme à la Constitution.
Le Président de la République a promulgué cette loi le mardi 1er août 2023.
Pourquoi ce texte ?
Ce projet de loi de programmation militaire et le rapport qui lui est annexé s'inscrivent dans le cadre de la Revue nationale stratégique (RNS) rendue publique le 9 novembre 2022.
Le texte fixe les orientations de la politique de défense française pour les sept prochaines années (de 2024 à 2030) et les moyens qui lui sont consacrés.
Il entend maintenir l’objectif de porter l’effort national de défense à hauteur de 2 % du PIB à compter de 2025.
Il présente également les ressources financières sous‑tendant la programmation militaire année par année (400 milliards d’euros courants de crédits budgétaires pour la mission "défense" sur la période 2024‑2030, complétés par 13,3 milliards d'euros de ressources supplémentaires pour financer des besoins totaux évalués à 413,3 milliards d'euros).
Au-delà de ces aspects financiers, le projet de loi comprend également de nombreuses dispositions normatives intéressant la défense nationale, concernant notamment :
- le renforcement du lien entre la Nation et les armées, et les conditions de vie et de travail des personnels de la défense et de leurs familles ;
- le renseignement et la contre-ingérence ;
- l'économie de défense ;
- la crédibilité stratégique ;
- la sécurité des systèmes d’information.
Selon le Gouvernement, cette quatorzième loi de programmation militaire a pour ambition de "garantir notre autonomie stratégique, d'assurer nos engagements au titre de notre statut d’allié de l’OTAN et de membre de l’Union européenne et de faire de la France une puissance d’équilibres".
Les apports du Sénat
Le texte définitif répond à la principale demande du Sénat : une accélération de la trajectoire budgétaire sur les premières années de la programmation. D’ici 2027, ce sont 2,3 milliards d’euros supplémentaires qui seront inscrits au budget des armées. Cela permettra notamment de relancer la préparation opérationnelle, dans un moment de dégradation du contexte géopolitique. Au moment où la tension internationale ne cesse de grandir, nos armées pourront bénéficier de moyens accrus pour se préparer, s’entraîner et s’équiper.
Le Sénat a également été entendu sur plusieurs demandes de renforcement des moyens de contrôle de l’action du Gouvernement :
- création d’une commission parlementaire d’évaluation de la politique d’exportation d’armements, composée de 3 députés et 3 sénateurs ;
- amélioration de la visibilité sur les évolutions des commandes et livraisons de matériel.
Revoir la conférence de presse du 12 juillet 2023
Les travaux de contrôle
Dans la perspective de l’examen du projet de loi de programmation militaire pour 2024-2030, la commission des affaires étrangères et de la défense a constitué cinq missions d'information préparatoires.
Rapporteurs : Olivier Cadic et Mickaël Vallet.
Les menaces de cybersécurité augmentent selon un rythme exponentiel (831 intrusions répertoriées en 2022 par l'ANSSI dans sa publication annuelle du panorama de la cybermenace, plus de 170 000 demandes d'assistance reçues par Cybermalveillance et 150 événements de sécurité numérique touchant au périmètre du ministère des armées - hors services de renseignement) sans que l’augmentation des moyens humains et budgétaires n'aient pu en ralentir la course.
Les rapporteurs pour avis du volet "Cyber" du programme 129 "Coordination du travail gouvernemental" ont étudié les axes d'amélioration de la gouvernance de la sécurité numérique française, et la capacité de l'écosystème cyber public et privé à mieux se coordonner, à prévenir et à réduire l'impact des cyberattaques.
La commission des affaires étrangères et de la défense a adopté ce rapport d'information le 24 mai 2023.
Rapporteurs : Pascal Allizard et Yannick Vaugrenard.
Les rapporteurs du programme 144 "Environnement et prospective de la politique de défense" ont examiné les priorités qui devront figurer dans la loi de programmation militaire en matière d'innovation de défense et de renseignement et les difficultés d'accès aux financements privés rencontrées par les entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD).
Selon les conclusions de leur rapport d'information, adopté par la commission le 24 mai 2023, les moyens consacrés au renseignement devront croître dans les années à venir. Les rapporteurs ont pris acte de l’augmentation des crédits inscrite dans le projet de LPM, mais ont estimé que la hausse prévue des effectifs ne permettra pas d’atteindre les niveaux de nos voisins allemand et britannique et reste inférieure aux ambitions exprimées par les services.
Les rapporteurs considèrent que l’innovation de défense doit demeurer une priorité de la future programmation. L’augmentation de plus de 10 % des crédits consacrés aux études amont va, selon eux, dans le bon sens. L’innovation devra en outre passer par une transformation des organisations.
Enfin, les rapporteurs constatent une persistance des difficultés de financement rencontrées par les entreprises de la BITD. Pour lever ces freins, ils formulent 18 recommandations .
Pour en savoir plus :
Rapporteurs : Cédric Perrin et Hélène Conway-Mouret.
Dans la perspective de la loi de programmation militaire, les rapporteurs du programme 146 "Équipement des forces" ont examiné les principaux enjeux capacitaires des prochaines années, au regard de la dégradation du contexte économique et géostratégique.
Leur rapport d'information, adopté par la commission le 7 juin, considère que l'effort significatif que représente l'augmentation des crédits consacrés aux équipements des forces ne permet pas de répondre à l’ensemble des enjeux, compte tenu de l’inflation et du coût accru de technologies de plus en plus complexes.
Selon les rapporteurs, en reportant des programmes, année après année, le bon séquencement du renouvellement des capacités a été perdu.
La LPM prévoit des aménagements de calendrier, dont certains s’apparentent, pour les rapporteurs, à des renoncements, des cibles sur des programmes cruciaux étant reportées à 2035, soit plus d’une décennie.
Pour en savoir plus :
Rapporteurs : Olivier Cigolotti et Michelle Gréaume.
Le rapport, adopté par la commission le 7 juin 2023, relève que les efforts budgétaires annoncés dans le cadre de la LPM sont conséquents : 20 milliards supplémentaires en faveur de l’activité et de l’entraînement, 14 milliards supplémentaires alloués à l’entretien programmé du matériel et 4 milliards supplémentaires aux services de soutien.
Les rapporteurs considèrent néanmoins que ces efforts pourraient perdre en efficacité si le choix de la cohérence se traduit par une diminution du capital technique des armées et une limitation de la remontée de la préparation opérationnelle faute d’équipements nécessaires à l’entraînement.
L’accroissement des moyens ne suffit pas. Il faut, selon les rapporteurs, imaginer et laisser les services imaginer de nouvelles solutions et de nouvelles organisations.
Pour en savoir plus :
Rapporteurs : Joël Guerriau et Marie-Arlette Carlotti.
À l’issue d’un cycle d’auditions avec des responsables des ressources humaines dans les armées, les rapporteurs du programme 212 ont identifié plusieurs points d’attention.
Leur rapport, adopté par la commission, identifie trois principaux défis en matière de ressources humaines : la fidélisation, l’attractivité dans les secteurs prioritaires de recrutement, et la transformation des réserves opérationnelles de premier niveau.
Pour en savoir plus :