M. André Reichardt. Voilà un amendement qui est particulièrement important, selon moi. L’article 3 consacre le consentement préalable du consommateur à être démarché par téléphone, dans le cadre du régime d’opt-in dont nous avons parlé tout à l’heure.

Dans la mesure où ce nouveau régime vaut pour tous les domaines économiques, je m’interroge : pourquoi maintenir une interdiction sectorielle, tout particulièrement celle qui existe en matière de rénovation énergétique ?

Le maintien de l’interdiction existante de démarchage téléphonique dans ce secteur et l’introduction envisagée d’une interdiction pour un autre secteur, ainsi que l’extension de ces interdictions à d’autres modes de prospection commerciale me paraissent présenter des risques sérieux de non-conformité avec les directives européennes concernées, lesquelles, comme vous le savez, prohibent les interdictions absolues.

D’ailleurs, le tribunal administratif de Rennes a jugé que l’interdiction de la prospection commerciale par voie téléphonique en matière de rénovation énergétique était incompatible avec les objectifs de l’une des directives européennes dont je viens de parler.

La DGCCRF a en outre mis en place une tolérance administrative, vous le savez bien, madame la ministre, permettant aux entreprises d’appeler des consommateurs en rénovation énergétique s’ils ont donné leur accord préalable, et j’insiste bien sur cette notion. Dès lors, l’application du nouveau régime de l’opt-in au secteur de la rénovation énergétique ne serait pour moi que la légalisation de la tolérance administrative en vigueur depuis trois ans.

Enfin, ces interdictions pour certains secteurs et modes de commercialisation me paraissent induire une véritable inégalité de traitement, voire une distorsion de concurrence. Elles sont aussi, à mon sens, susceptibles d’être jugées contraires au principe d’égalité devant la loi.

C’est la raison pour laquelle je propose de supprimer les interdictions qui figurent, en l’état actuel du texte, à l’article 3.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 40 est présenté par M. Michau, Mme Briquet, M. Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, Lurel, Mérillou, Montaugé, Pla, Raynal, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 71 est présenté par MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 115 est présenté par MM. Gontard et G. Blanc, Mme Guhl, MM. Jadot, Salmon, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 26

Après le mot:

professionnels

insérer les mots :

réalisée physiquement au domicile du consommateur,

La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour présenter l’amendement n° 40.

M. Jean-Jacques Michau. Nous proposons d’introduire dans le texte l’interdiction du démarchage à domicile dans le domaine de la rénovation énergétique, en cohérence avec l’extension prévue par la présente proposition de loi de l’interdiction des sollicitations commerciales sur ce secteur d’activité aux mails, SMS et réseaux sociaux.

Nous le savons, le secteur de la rénovation énergétique concentre un très haut niveau de litiges de consommation et d’escroqueries, réalisées en particulier sur des personnes âgées ou vulnérables. C’est la raison pour laquelle la prospection commerciale par téléphone dans ce domaine a été purement et simplement interdite par la loi Naegelen.

Cependant, le démarchage à domicile est encore plus intrusif et beaucoup plus dangereux pour le consommateur. Pour les associations de défense des consommateurs, comme l’UFC-Que Choisir, son autorisation par la loi en manière de rénovation énergétique est de nature à conduire à la création de sociétés dont l’objet serait exclusivement d’opérer des escroqueries à grande échelle visant des personnes vulnérables.

Le consommateur finit par donner son accord à un achat qu’il n’aurait jamais effectué dans des conditions normales. Dans certains cas, le démarcheur peut faire signer un faux document de renoncement à l’usage du droit à rétractation.

Enfin, l’interdiction du démarchage à domicile pour la rénovation énergétique permettrait de mieux lutter contre les fraudes et malfaçons propres à ce type de prospection commerciale.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 71.

M. Fabien Gay. Après le démarchage par téléphone, mail, SMS, réseaux sociaux, la question du démarchage à domicile dans le domaine de la rénovation énergétique pose question. Il faut savoir que le montant moyen par dossier de ce type de préjudices est de 20 000 euros. Et ce sont des personnes extrêmement vulnérables et souvent âgées qui sont le plus souvent touchées.

La DGCCRF et l’UFC-Que Choisir nous alertent sur les démarcheurs qui prétendent aider les victimes de fraude aux travaux de rénovation énergétique en se faisant passer eux-mêmes pour des délégués d’associations de consommateurs et nous appellent à légiférer sur cette question.

Nous pensons donc qu’il s’agit là d’un amendement de bon sens.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 115.

M. Guillaume Gontard. C’est en effet un amendement de bon sens, qui vise à interdire le démarchage physique pour lutter contre les arnaques aux travaux de rénovation des logements, ainsi qu’aux travaux d’adaptation au vieillissement ou au handicap des logements.

Ces démarches abusives, basées sur la présence physique, sont source de fraudes importantes. Je rappelle tout de même que cette disposition avait été intégrée par l’auteur et rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, mais qu’elle avait été jugée contraire à la directive européenne déjà évoquée.

Cependant, n’oublions pas que les États membres peuvent agir sur un motif d’intérêt public et il me semble que nous sommes bien dans ce cadre. Cette disposition pourrait donc tout à fait s’appliquer.

M. le président. Les quatre amendements suivants sont également identiques.

L’amendement n° 37 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, M. Belin, Mme Belrhiti, M. Burgoa, Mmes Dumont et Evren, M. Genet, Mmes Hybert et Josende, M. Khalifé et Mmes P. Martin, Micouleau et Ventalon.

L’amendement n° 47 rectifié quater est présenté par Mme M. Carrère, MM. Cabanel, Fialaire, Masset, Roux et Bilhac et Mme Guillotin.

L’amendement n° 52 rectifié est présenté par Mmes Demas, Muller-Bronn et Aeschlimann, MM. Sautarel, Houpert, Levi et Cambon, Mme M. Mercier, MM. Panunzi, Favreau, Milon, P. Vidal, Delia, Rapin, Reichardt et Lafon, Mmes Bellurot et Joseph, MM. Rojouan et Pillefer, Mmes Borchio Fontimp et Eustache-Brinio et MM. Bazin, Bonhomme, Brisson et Laugier.

L’amendement n° 108 est présenté par M. Bleunven.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 26

Supprimer les mots :

par courrier électronique ou sur un service de réseaux sociaux en ligne

La parole est à M. Laurent Burgoa, pour présenter l’amendement n° 37 rectifié bis.

M. Laurent Burgoa. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 47 rectifié quater.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement a pour objet le démarchage par mail. Le droit en vigueur prévoit déjà la règle de l’opt-out pour l’envoi de mails de prospection à des clients et la règle d’opt-in pour l’envoi de mails à des prospects.

Concernant le démarchage sur les réseaux sociaux, la loi de 2023 dite Influenceurs a introduit des mesures pour mieux encadrer le démarchage commercial effectué via les influenceurs et améliorer l’information des usagers.

Le groupe RDSE considère que l’efficacité de ces règles doit d’abord être évaluée, avant qu’elles ne soient modifiées le cas échéant. Nous estimons dès lors que l’interdiction sèche introduite par l’article 3 présente le risque de préempter cette démarche.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour présenter l’amendement n° 52 rectifié.

M. André Reichardt. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 108 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. Canévet, Bleunven et Chauvet, Mmes Patru et Havet et MM. Fargeot, Folliot, Duffourg et Longeot, est ainsi libellé :

Alinéa 26

Compléter cet alinéa par les mots :

ou en cas de détention par le professionnel de signes de qualité définis par décret

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Il s’agit de permettre aux entreprises disposant d’un label de qualité de mener tout de même des actions de prospection commerciale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Rietmann, rapporteur. Par son amendement n° 24 rectifié bis, notre collègue André Reichardt entend revenir sur l’interdiction du démarchage téléphonique dans la rénovation énergétique issue de la loi Naegelen, ainsi que sur son extension au secteur de l’adaptation des logements.

De grâce, monsieur Reichardt, ne rejouons pas le débat de 2020 ! Ces interdictions sectorielles sont justifiées, car elles permettent de cibler des entreprises potentiellement fraudeuses, qui jouent sur les aides distribuées par l’Anah.

Je rappelle que, selon la DGCCRF, cette interdiction du démarchage téléphonique pour les rénovations énergétiques n’est toujours pas respectée, près de cinq ans après la loi Naegelen. Les amendes qu’elle a adressées pour le non-respect de cette interdiction s’élèvent tout de même à 4,4 millions d’euros en 2023.

Je rappelle aussi que certaines entreprises malhonnêtes se rabattent sur la prospection par voie électronique pour compenser le fait que nos concitoyens décrochent de moins en moins leur téléphone face à un numéro inconnu. En plus d’être inondés d’appels, nous recevons de plus en plus de messages personnels par mail, voire sur des messageries instantanées.

N’allons pas au-delà du vote du Sénat, le 14 novembre dernier, et n’oublions pas que les secteurs de la rénovation énergétique et de l’adaptation des logements concentrent les fraudes. Je vous demande donc de retirer votre amendement, mon cher collègue, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.

J’en viens aux amendements identiques nos 40, 71 et 115 de nos collègues Michau, Gay et Gontard.

Mes chers collègues, vous avez raison, le démarchage à domicile abusif est un véritable fléau qui peut entraîner des abus de faiblesse. Cependant, il me semble que les dispositions de vos amendements soulèvent une question de conformité au droit de l’Union européenne.

La directive dite Omnibus précise que, si les États membres peuvent prendre des dispositions renforçant la protection du consommateur dans le cadre de visites non sollicitées ou non souhaitées – c’est l’objet de vos amendements –, ces dispositions doivent être proportionnées. Tel ne serait peut-être pas le cas d’une interdiction totale.

Néanmoins, madame la ministre, est-ce qu’une interdiction fondée sur l’intérêt public lié à la lutte contre la fraude permettrait d’être en conformité avec le droit de l’Union européenne ? Il est vrai que, en matière de rénovation énergétique, le taux d’anomalie des établissements contrôlés par la DGCCRF s’établit à 51 %. La lutte contre la fraude est un enjeu important. C’est la raison pour laquelle je demande l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements.

En ce qui concerne les amendements identiques nos 37 rectifié bis, 47 rectifié quater et 52 rectifié, sur le fond, je pense que, au contraire, l’interdiction de la prospection commerciale par voie électronique dans le domaine de l’adaptation des logements est pertinente, car de nombreux professionnels malhonnêtes se reportent sur les e-mails et messages sur les réseaux sociaux pour contourner l’interdiction du démarchage téléphonique dans ces secteurs, qui n’est d’ailleurs toujours pas bien respectée, comme je le rappelais précédemment.

Comme je l’ai déjà souligné au cours de la discussion générale, la publicité est très différente de la prospection commerciale.

Quand on parle de prospection commerciale par voie électronique, on ne vise que les messages personnels sur les réseaux sociaux par mail ou sur un service de communication interpersonnelle. On ne va bien évidemment pas interdire à une entreprise de communiquer sur les réseaux sociaux ni de faire de la publicité. Il faut être très clair : ce sont deux choses très différentes.

J’y insiste, les publications en ligne sur les réseaux sociaux ne sont pas visées. Par exemple, je connais personnellement des chefs d’entreprise dans le bâtiment qui publient régulièrement sur Facebook des photos de leurs réalisations. Ce sera encore permis, tout comme la publicité. Je le répète, le texte ne vise que les messages personnels.

Aussi, je sollicite le retrait de ces trois amendements identiques, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.

Enfin, monsieur Canévet, je crains que l’exception que vous voulez introduire par votre amendement n° 54 rectifié ne complexifie le contrôle et n’entraîne des contournements de la part d’entreprises malhonnêtes.

Vous connaissez mon obsession pour la simplification : plus c’est simple, plus c’est facile à contrôler, plus c’est facile à sanctionner. Nous avons énormément de remontées de fraudes aux labels, notamment le RGE. En outre, l’interdiction du démarchage par voie électronique vise un objectif simple : la protection des consommateurs.

L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Monsieur Reichardt, vous avez rappelé que la DGCCRF avait mis en place une tolérance administrative permettant aux entreprises d’appeler les consommateurs en rénovation énergétique s’ils ont donné leur accord préalable. Ce consentement préalable du consommateur à être appelé fait que la démarche ne peut être assimilée à de la prospection commerciale téléphonique.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur l’amendement n° 24 rectifié bis.

Il y a énormément de fraudes à la rénovation énergétique et à l’adaptation au logement, avec des démarchages intempestifs qui présentent des risques d’abus de faiblesse envers des populations qui sont particulièrement vulnérables et qui ont besoin d’être protégées. Nous connaissons tous ce type d’affaires sur nos territoires.

Pour ces raisons, je donne un avis défavorable sur les amendements n° 40, 71 et 115.

Les amendements nos 37 rectifié bis, 47 rectifié quater et 52 rectifié visent à supprimer l’interdiction de démarchage par courrier électronique, SMS et réseaux sociaux en ligne pour certains secteurs déterminés, notamment la rénovation énergétique.

Là encore, compte tenu de nombre de tentatives de fraudes sur différents dispositifs qui nous sont remontés, il me semble important de protéger les populations fragiles. J’en profite pour préciser que la plupart des artisans et entreprises honnêtes du secteur n’ont pas forcément besoin de recourir à de telles méthodes de démarchage pour se constituer une clientèle.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Pour les mêmes raisons, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 54 rectifié.

M. le président. Quel est, finalement, l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 40, 71 et 115 ?

M. Olivier Rietmann, rapporteur. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Je ne comprends pas bien l’avis défavorable du Gouvernement sur les amendements identiques nos 40, 71 et 115. M. le rapporteur lui-même souligne à quel point les démarchages à domicile présentent des risques… Il s’agit en effet du vecteur majeur d’amorce des fraudes.

Madame la ministre, je n’ai pas bien compris vos motivations, qui mériteraient d’être approfondies. Je reprends la directive dite Omnibus : « Lorsque ces restrictions au démarchage commercial sont adoptées pour des motifs autres que la protection des consommateurs, tels que des motifs d’intérêt public ou des motifs liés au respect de la vie privée des consommateurs protégés par l’article 7 de la Charte, elles ne relèvent pas du champ d’application de la directive 2005/29/CE. »

Vous dites qu’il faut traiter le problème du démarchage à domicile en vous appuyant sur des textes qui ne disent pas vraiment ce que vous prétendez qu’ils disent… Pouvez-vous être plus explicite ?

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Je veux naturellement revenir sur l’amendement n° 24 rectifié bis.

Monsieur le rapporteur, je vous remercie de votre ouverture d’esprit et du travail que vous avez réalisé, mais nous ne sommes plus dans la même situation que lors de la proposition de loi Naegelen, dont j’avais eu l’honneur d’être le rapporteur à l’époque. Nous sommes dorénavant en opt-in, c’est-à-dire que nous décidons d’accepter ou non le démarchage. Pourquoi, dès lors, y a-t-il lieu d’interdire en plus ? Il suffit que la personne se manifeste pour refuser le démarchage, et le problème est réglé.

Par ailleurs, madame la ministre, vous nous dites qu’il y a trop de fraudes dans le domaine de la rénovation énergétique. Je voudrais juste vous rappeler que cette interdiction existe déjà depuis un moment et, s’il y a des fraudes, c’est que, manifestement, il est massivement passé outre à cette interdiction.

Je vous rappelle qu’un tribunal administratif et une cour d’appel ont rappelé qu’il fallait tenir compte de l’existence d’un accord. On assiste à une évolution dans les intentions du législateur, parce que nous n’arrivons pas à juguler ce phénomène de fraude.

Madame la ministre, pour sanctionner ceux qui ne respectent pas la loi, il y a le règlement général sur la protection des données, qui vise très directement ceux qui ne tiennent pas compte de la volonté des uns et des autres.

Aussi, je maintiendrai mon amendement, car, à partir du moment où le démarchage téléphonique n’est possible qu’en cas d’accord – au passage, l’extension de l’interdiction au domaine numérique me paraît complètement folle ! –, je ne comprends pas qu’il faille préciser en plus que la pratique est complètement interdite dans tel ou tel secteur. Franchement, il y a là quelque chose qui me passe au-dessus de la tête !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je ne comprends pas non plus les explications de Mme la ministre.

Tout le monde est d’accord pour dire que, dans la rénovation énergétique, les entreprises vertueuses, et il y en a, n’ont pas besoin de faire du démarchage à domicile. Les fraudeurs, eux, en ont besoin. On le sait bien, tous ceux qui font du démarchage s’adressent à des personnes âgées ou vulnérables. Et ils n’ont cure de la question du consentement, qu’ils contournent en faisant signer de faux documents en même temps qu’un devis. Je rappelle les chiffres : 20 000 euros en moyenne, ce qui est considérable.

Ensuite, j’ai entendu plusieurs de mes collègues déclarer que ceux qui font du démarchage à domicile pour la rénovation énergétique étaient potentiellement des fraudeurs.

Enfin, le droit européen nous permet de nous prévaloir de motifs d’intérêt public pour déroger à certaines dispositions : en l’occurrence, empêcher que des personnes vulnérables ne se fassent avoir par des escrocs me semble entrer dans ce cadre.

Je résume : avec cet amendement, on ne touche pas les entreprises vertueuses et on protège les consommateurs des escrocs. Je ne vois pas pourquoi on se priverait de le voter !

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Fabien Gay. J’ai moi-même subi un démarchage frauduleux de la part d’un pseudo-agent d’EDF qui voulait me vendre un contrat d’énergéticien alternatif. Le pauvre, il a été bien reçu… (Exclamations amusées.)

M. Stéphane Piednoir. Vous êtes une personne vulnérable !

M. Fabien Gay. Sérieusement, aujourd’hui, le démarchage, c’est ça ! On devrait pouvoir se mettre d’accord, car il est d’intérêt public de l’interdire…

M. le président. Je suis obligé de vous couper le courant, monsieur Gay ! (Rires.)

M. Fabien Gay. Ce ne sera pas la première fois !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Sur toutes les travées, chacun s’émeut du trop grand nombre de fraudes. Devant ce constat, faut-il ouvrir le dispositif, au risque d’augmenter encore le nombre de fraudes ? Ce n’est pas ce que je souhaite.

Par ailleurs, je rappelle, après M. Reichardt, qu’il existe une tolérance administrative, que la DGCCRF a mise en place et qui, finalement, permet d’avoir un contact, le cas échéant, sur des propositions de rénovation énergétique.

Pour ma part, je connais un certain nombre de personnes qui souhaitent faire des travaux de rénovation énergétique et qui n’ont pas besoin d’être sollicitées par du démarchage. Il y a partout sur les territoires des entreprises qui sont vertueuses. Ce sont des acteurs locaux reconnus et qui n’ont pas besoin de ce type de pratiques.

Voilà pourquoi je suis défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Olivier Rietmann, rapporteur. Je souhaite répondre à notre collègue Reichardt, qui m’a demandé plus de précisions sur mon commentaire de son amendement.

Mon cher collègue, l’enjeu réside dans le message politique que nous allons envoyer. La proposition de loi de notre collègue Pierre-Jean Verzelen tend, en quelque sorte, à régler le problème du démarchage d’une manière assez forte et assez large.

Toutefois, cela ne vous aura pas échappé, la loi Naegelen, n’est pas encore respectée : on a encore infligé pour 4,4 millions d’euros d’amende pour non-respect de cette loi rien qu’au cours de l’année 2023 !

Par conséquent, quelle sera la réaction des entreprises fraudeuses si on leur signifie qu’il n’est dorénavant plus interdit de contrevenir à la loi Naegelen, parce que le Sénat l’aura fait sauter ? Elle se dira que c’est permis !

M. André Reichardt. Seulement si la personne a donné son accord !

M. Olivier Rietmann, rapporteur. Si ce n’est plus interdit, c’est permis !

Ce serait donc un très mauvais message politique, et je fais le pari que ce ne sont plus 4,4 millions d’euros d’amende qui seraient alors prononcés, mais un montant bien supérieur. Il y aurait beaucoup plus de fraudes et de tentatives de fraude !

On ne peut pas envoyer ce message politique. Quand on vote, on doit tenir compte de l’effet en droit de la disposition adoptée, mais aussi de sa portée politique.

Je maintiens donc mon avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je n’ai toujours pas compris l’avis de Mme la ministre.

Je suis d’accord avec le fond de vos propos, madame la ministre, quand vous affirmez que la majorité des entreprises, celles qui travaillent très bien, n’ont pas besoin de recourir au démarchage ; ce sont même souvent elles qui sont démarchées par les clients…

En revanche, les entreprises qui posent problème recourent au démarchage et, on le sait très bien, quand il y a démarchage, il y a, sinon 100 %, du moins une proportion très importante de fraudes. Il est donc évidemment nécessaire d’encadrer cette activité.

Or, face à ce constat partagé, vous dites qu’il ne faut rien faire !

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Non !

M. Guillaume Gontard. D’où mon incompréhension.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Le cas que vous évoquez, monsieur le sénateur, est déjà visé par la directive dite Omnibus, qui renforce la protection des consommateurs en matière de démarchage à domicile. Ce que vous appelez de vos vœux existe donc déjà dans le droit.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 24 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40, 71 et 115.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 37 rectifié bis, 47 rectifié quater et 52 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 88 rectifié, présenté par MM. Verzelen, Brault, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte, M. Malhuret, Mme Paoli-Gagin et MM. Rochette et Wattebled, est ainsi libellé :

Alinéa 13

1° Remplacer les mots :

et informée

par les mots :

, éclairée, univoque et révocable

2° Après le mot :

accepte

insérer les mots :

, par un acte positif clair,

La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen.

M. Pierre-Jean Verzelen. Mes chers collègues, avec cet article, nous sommes au cœur de l’intérêt de cette proposition de loi pour ce qui concerne le démarchage téléphonique : le basculement de l’opt-out vers l’opt-in.

À ce jour, nous connaissons un régime d’opt-out, en vertu duquel chaque Français est considéré par défaut comme consentant au démarchage téléphonique. C’est d’ailleurs ce qui explique que toutes les adaptations du système adoptées jusqu’à présent n’aient fonctionné que moyennement.

Le basculement vers l’opt-in consiste à renverser la logique : une entreprise ne pourra nous appeler qu’à la condition d’avoir obtenu notre consentement.

Au travers de cet amendement, je propose de préciser que le consentement doit être « libre, spécifique, éclair[é], univoque et révocable ». Qu’est-ce que cela implique concrètement ? Qu’il ne pourra plus s’agir d’une page préremplie sur laquelle on coche la case « D’accord ». Il faudra que le consommateur complète la page et indique ses coordonnées téléphoniques et que, dans le cas où le consommateur est appelé et qu’il dit stop, l’entreprise cesse ses appels.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Rietmann, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Nous sommes là au cœur du dispositif de cette proposition de loi, avec la définition du consentement. La définition beaucoup plus précise que vous proposez, monsieur le sénateur, est nécessaire.

J’émets donc un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 88 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 89 rectifié, présenté par MM. Verzelen, Brault, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte, M. Malhuret, Mme Paoli-Gagin et MM. Rochette et Wattebled, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Il appartient au professionnel d’apporter la preuve que le consentement du consommateur a été recueilli dans les conditions fixées au deuxième alinéa du présent article. »

La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen.