M. Stéphane Piednoir, rapporteur. Ce n’est pas l’avis du Conseil d’État…
Mme Mathilde Ollivier. Ces mesures enfreignent en effet le droit de manifester librement son identité, sa religion ou croyance en privé et en public, et de prendre part à la vie culturelle.
Nous devrions porter haut et fort l’héritage des récents jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris : faire de la pratique sportive la priorité de nos politiques publiques.
M. Michel Savin. C’est vrai !
Mme Mathilde Ollivier. Or, à l’inverse, le Gouvernement nous laisse en héritage une baisse exponentielle des crédits budgétaires et la droite sénatoriale veut restreindre la pratique du sport…
M. Michel Savin. Non !
Mme Mathilde Ollivier. … en excluant les femmes de confession musulmane.
M. Max Brisson. C’est faux !
M. Jacques Grosperrin. Vous caricaturez !
Mme Mathilde Ollivier. Donc, non, nous ne voterons pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Adel Ziane applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question qui nous réunit cet après-midi dépasse largement le cadre du sport, chacun l’aura bien compris. Elle engage un principe fondateur de notre République : la laïcité.
C’est sûrement ce qui explique la présence au banc du Gouvernement de M. le ministre auprès du ministre de l’intérieur, chargé des cultes, en lieu et place de Mme la ministre des sports, alors que la proposition de loi de M. Savin porte sur le code du sport…
Au fond, quelle laïcité voulons-nous ? Une laïcité éclairée, qui protège la liberté de conscience et la neutralité de l’État, ou une laïcité instrumentalisée à des fins identitaires et partisanes ?
Mes chers collègues, ce débat n’est pas qu’une affaire de règlements ou de codes. Il met en jeu notre pacte républicain et la manière dont nous concevons le vivre ensemble.
La laïcité n’est pas une arme, c’est une source d’équilibre. Elle repose sur une architecture subtile, que nous devons protéger. Elle n’impose pas le silence aux convictions personnelles : elle empêche simplement qu’une croyance ne domine les autres dans l’espace public, sous l’effet d’une démarche prosélyte.
Vouloir, par cette proposition de loi d’interdiction, faire de la laïcité un outil d’exclusion, c’est travestir son essence. User d’elle comme d’un prétexte pour dicter aux individus ce qu’ils doivent être, c’est détourner un principe de notre République au profit d’une lecture restrictive de cette notion.
Oui, notre conception de la laïcité diffère de la vôtre. Nous ne saurions en aucun cas vous suivre dans la course effrénée, véritable course à l’échalote, dans laquelle vous vous êtes lancés avec l’extrême droite française… (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Pas ça, monsieur Kanner !
M. Patrick Kanner. … et nous l’assumons.
M. Jacques Grosperrin. On l’attendait, celle-là…
M. Patrick Kanner. Oui, monsieur Grosperrin ; et vous avez cité une de mes anciennes interventions : je vous répondrai plus tard à ce propos.
M. Stéphane Piednoir, rapporteur. Ce sera intéressant…
M. Patrick Kanner. Alors que les intentions de vote en faveur de l’extrême droite sont à leur plus haut niveau dans notre pays, vous ne faites que nourrir les confusions, les approximations et les stéréotypes en mettant ce principe fondateur au service de votre récit antimusulman.
Certains n’hésiteront pas à nous cataloguer parmi les naïfs ou les laxistes.
M. Francis Szpiner. Oui !
M. Patrick Kanner. Je leur réponds par avance, avec fermeté et sans ambiguïté.
J’étais ministre des sports à l’époque des attentats de 2015 et de 2016…
M. Stéphane Ravier. Et vous vous en vantez, en plus ?
M. Patrick Kanner. … et nul ne saurait taxer devant moi la gauche républicaine de laxisme. Le groupe socialiste, que j’ai l’honneur de présider, n’a, sur ce point, de leçons à recevoir de personne. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je suis un « laïc » de la première heure…
M. Stéphane Ravier. Et vous faites alliance avec LFI ?
Mme la présidente. Monsieur Ravier, laissez parler M. Kanner !
M. Patrick Kanner. Mais être un partisan de la laïcité ne signifie pas être fermé à l’expression de toute croyance, à toutes les religions quelles qu’elles soient ou encore à une religion en particulier, comme c’est le cas en l’occurrence, ainsi que l’exposé des motifs du présent texte le laisse comprendre.
Sous couvert de défendre la laïcité, vous tournez le dos à Aristide Briand, dont Gérard Larcher convoque souvent la mémoire. Briand affirmait : « La loi protège la foi, à condition que la foi ne veuille par faire la loi. » (Exclamations et vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Stéphane Piednoir, rapporteur. Excellent !
Mme la présidente. Mes chers collègues, c’est M. Kanner qui a la parole…
M. Patrick Kanner. Dans cet esprit, je me permets de vous rappeler que les garanties constitutionnelles interdisent non seulement de cibler une religion plus qu’une autre, mais aussi de porter une atteinte excessive et disproportionnée aux libertés individuelles.
Force est de constater que, depuis plusieurs années, la droite ne cesse d’interroger notre manière de vivre ensemble. Alors, reprenons le débat. Confrontons votre vision étriquée de la laïcité à la nôtre : celle d’une laïcité qui ne construit pas des murs, mais qui ouvre des ponts (Mme Samantha Cazebonne s’exclame.), sans angélisme ni amalgame.
Pourquoi nous opposons-nous au présent texte ?
Premièrement, cette proposition de loi est redondante. Grâce à une jurisprudence déjà rappelée à plusieurs reprises au cours de cette discussion, les fédérations sportives délégataires disposent déjà du pouvoir nécessaire pour réglementer ces questions de manière équilibrée et réfléchie. À ce titre, le mouvement sportif n’est d’ailleurs pas demandeur d’une nouvelle loi.
M. Patrick Kanner. En parallèle, ce texte porte atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales. En interdisant de manière générale l’utilisation d’un équipement sportif comme salle de prière, il va à l’encontre de la jurisprudence du Conseil d’État et de l’esprit même de la loi de 1905, qui autorisent sous condition la mise à disposition temporaire de locaux communaux à des associations cultuelles. Vous le savez bien.
Nous prenons acte de l’amendement de M. le rapporteur visant à élargir le champ de la mesure à l’ensemble des cultes ; mais l’intention initiale reste inchangée. Pourquoi prévoir une dérogation pour des fêtes paroissiales ou des réunions catholiques tout en interdisant clairement la prière musulmane ? Loin d’assurer une laïcité équilibrée, cette différence de traitement crée une inégalité flagrante. Elle nourrit un climat de suspicion envers une partie de nos concitoyens.
Deuxièmement, cette proposition de loi est discriminatoire. En ciblant spécifiquement les signes religieux, notamment le voile, elle marginalise en particulier nos concitoyennes musulmanes, trop souvent au centre des polémiques relatives à l’identité.
De telles interdictions entraîneront à coup sûr une exclusion sociale dévastatrice pour ces femmes, pour qui le sport est un canal essentiel de sociabilité, d’intégration et de bien-être physique et mental. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Stéphane Ravier s’exclame.)
De telles dispositions – cela ne fait aucun doute – auront pour seul résultat de condamner ces sportives à l’isolement. Peut-être même les pousseront-elles au communautarisme.
M. Jacques Grosperrin. Mais non !
M. Patrick Kanner. Cette proposition de loi interdit, lors des compétitions, « le port de tout signe ou tenue manifestant [clairement] une appartenance politique ou religieuse ». Dès lors, je m’interroge : la majorité sénatoriale entend-elle aussi interdire les campagnes contre l’homophobie, qui se manifestent parfois par le port d’un autocollant sur le maillot pendant les matchs ? (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Ce n’est pas religieux !
M. Patrick Kanner. Voyez, chers collègues de droite, à quoi vos amalgames pourraient mener…
Troisièmement, cette proposition de loi est potentiellement liberticide. Elle permet de restreindre les libertés individuelles sans fournir de justification suffisante, pavant ainsi la voie à des interprétations dangereuses, car extrêmes, de la laïcité. Le Conseil d’État lui-même a souligné que de telles mesures généralisatrices n’étaient ni nécessaires, ni adaptées, ni proportionnées.
Cette proposition de loi constitue une violation flagrante des engagements internationaux de la France en matière de droits humains. Elle va à l’encontre de tout ce que notre République représente.
Afin de préserver l’attractivité de la France pour l’accueil d’événements sportifs internationaux, cette nouvelle réglementation, si elle était adoptée, ne s’appliquerait pas aux compétitions inscrites au calendrier des fédérations internationales. Bref, les auteurs de cette proposition de loi semblent à l’aise avec l’idée d’exclure certains compétiteurs français d’événements nationaux tout en accueillant sans réserve, au nom de l’attractivité, des athlètes internationaux qui ne respecteraient ni la lettre ni l’esprit des lois françaises. Cherchez l’erreur !
Enfin, le non-respect de ces nouvelles obligations serait passible de sanction. Mais de quels moyens l’administration dispose-t-elle réellement pour contrôler leur mise en œuvre, à l’heure de l’austérité budgétaire ? Sur ce point, je suis d’accord avec les auteurs de ce texte : l’administration – je pense notamment au ministère des sports – manque de moyens pour constater d’éventuelles dérives sur le terrain.
En la matière, on ne peut que regretter l’absence de mesures de prévention, via le renforcement du rôle des éducateurs sportifs, prépondérant auprès des jeunes. Nous sommes d’ailleurs favorables à l’article 4, permettant de passer au crible le recrutement de ces éducateurs, comme c’est déjà le cas dans les centres de loisirs sans hébergement (CLSH) et les colonies de vacances.
Cette proposition de loi, qui n’a fait l’objet ni d’une étude d’impact ni d’un avis du Conseil d’État, suit une approche uniquement répressive. À l’évidence, ses auteurs ne se soucient pas de l’effectivité de son contenu.
Que cherchons-nous, somme toute, à protéger ? Tout simplement le sport, dans son essence la plus pure. Vecteur d’intégration et de cohésion sociale, le sport est un domaine où les différences de foi, de couleur ou de conviction s’effacent devant le mérite, l’effort et le respect mutuel.
M. Stéphane Piednoir, rapporteur. C’est précisément ce que nous voulons !
M. Patrick Kanner. En tant que législateurs, nous devons à tout prix préserver cette essence. Nous devons éviter le piège du tout-interdiction, qui vire très vite au tout-exclusion.
À nos yeux, le respect de l’égale dignité de chacun nous impose de considérer les personnes pour ce qu’elles sont et non pour ce qu’elles devraient être. C’est le signe de la pluriculturalité de notre société, une société où unité ne rime pas systématiquement avec uniformité.
Mes chers collègues, nous croyons en une laïcité qui protège, qui inclut, qui éduque et qui rassemble. La laïcité doit être un bouclier, non une épée dirigée contre une partie de nos concitoyens.
Au nom de ce principe, au nom des valeurs d’égalité, de liberté et de fraternité, les élus de mon groupe voteront contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. Max Brisson. La gauche a bien changé…
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, quand Karim Benzema et de nombreux autres footballeurs professionnels français « aiment » le post Instagram d’une célébrité tchétchène célébrant la décapitation de Samuel Paty, c’est qu’il y a une emprise islamiste au plus haut sommet du sport français. La défaite du football français, qui avait commencé par des accommodements raisonnables sur les repas halal des joueurs, finit avec l’apologie du terrorisme.
Voilà où mène notre lâcheté face à la pernicieuse politique des petits pas menée par les Frères musulmans, accompagnée des grands pas de la gauche…
La soumission islamiste commence toujours par la victimisation. Elle se poursuit par la revendication, puis elle s’impose par l’intimidation.
Aujourd’hui, les islamistes prennent les tenues féminines spécifiques comme nouvel étendard de conquête. Comme au judo, ils se servent de notre force pour nous renverser. Ils se servent de nos principes juridiques – le « droit à la non-discrimination » et à « l’inclusion » – pour en retourner le sens premier et renverser notre identité française.
Mais ils ne s’arrêtent pas là. En 2025, en France, des clubs de football professionnels se soumettent à la charia, en diffusant des photos de leurs joueurs masculins genoux floutés, selon les codes de la pudeur islamique. Même si la loi le leur défendait, nous ne réglerions pas le problème de fond : l’islamisme gangrène l’esprit d’une grande partie des jeunes musulmans de France, et nous ne parlons pas seulement des plus précaires d’entre eux.
Le voile n’est qu’un prétexte : les islamistes n’ont aucune limite. Leur objectif est de nous asservir à leur code religieux, qui, rappelons-le, est aussi un code civil.
Aujourd’hui, le législateur français doit faire barrage pour protéger les présidents de fédération sportive, les présidents de club et les 16,5 millions de nos compatriotes licenciés d’une fédération sportive, pris en otages par un entrisme islamiste victimaire, organisé et menaçant. (Mme Émilienne Poumirol manifeste son exaspération.)
La parenthèse enchantée des jeux Olympiques et Paralympiques cache les petits maîtres chanteurs de l’islamisme, qui marquent leur terrain au quotidien dans les clubs de banlieue ou de province. Certains arbitres isolés sur une pelouse doivent renoncer à appliquer le règlement de leur fédération sportive quant au port du voile, tout simplement pour sauver leur peau… Mais ces agents islamistes ne prospèrent que sur les ruines laissées par les déconstructeurs.
Nous avons tous en tête le soutien du maire islamo-écolo-collabo de Grenoble (Protestations sur les travées du groupe GEST.), jamais en retard d’une régression, qui a soutenu l’association des « hijabeuses » comme il voudrait imposer des créneaux pour les burkinis dans ses piscines municipales.
Ces élus prennent pour mot d’ordre « vivre le sport ensemble » ; mais ils font advenir l’apartheid, la discrimination à l’égard des femmes et le face-à-face.
Même les plus hautes institutions ont capitulé.
M. Philippe Grosvalet. L’art de la nuance…
M. Stéphane Ravier. En effet, la sentence « la liberté est dans le hidjab » ne vient pas de Téhéran, mais d’une campagne de promotion concoctée par le Conseil de l’Europe à Bruxelles.
Face à cela, face à ces collabos, la France ne doit rien céder. Inscrire dans la loi le principe de l’interdiction du port du voile lors des compétitions sportives est un minimum. Faire appliquer cette règle en tout point de notre territoire est un impératif. Assécher le courant de ces revendications dangereuses en luttant contre l’hydre islamiste…
Mme Monique de Marco. Ça suffit !
M. Philippe Grosvalet. C’est fini !
M. Stéphane Ravier. … et en stoppant l’immigration…
Mme la présidente. Merci de conclure, cher collègue !
M. Stéphane Ravier. … est un préalable urgent !
Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Dany Wattebled. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons cet après-midi un texte majeur, qu’il s’agisse des valeurs de la République ou de la lutte contre le communautarisme.
Face à la multiplication des phénomènes de repli communautaire dans le sport, aucun renoncement n’est acceptable. Il est de notre devoir d’agir en responsabilité.
Il y a déjà plus de vingt ans, le rapport de la commission Bernard Stasi sur l’application de la laïcité alertait quant à la formation d’équipes « communautaires » et quant au déclin de la pratique sportive féminine.
Il y a déjà près de dix ans, une note du service central du renseignement territorial (SCRT, devenu la direction nationale du renseignement territorial) dévoilait que, dans certaines salles de sport comme dans certaines équipes sportives, le recrutement s’exerçait principalement au sein de communautés religieuses.
Depuis plusieurs années, des affaires judiciaires et médiatiques éclatent régulièrement, venant illustrer ces phénomènes. Que ce soit à Sète, où un club de sport s’est vu retirer son agrément pour pratiques communautaires, ou bien à Grenoble, où le conseil municipal a autorisé le burkini dans les piscines publiques, les fédérations sportives sont confrontées à des revendications communautaires croissantes.
Face à cela, le renoncement n’est pas une option.
En 2021, la loi confortant le respect des principes de la République a institué le contrat d’engagement républicain. En vertu du même texte, une association méconnaissant ce contrat peut se voir retirer son agrément. Cette faculté n’est pas suffisamment utilisée aujourd’hui.
Le 29 juin 2023, le Conseil d’État a jugé conforme à la loi la décision des fédérations de football d’interdire le port de signes religieux. Le ministère des sports a généralisé cette interdiction pour les athlètes français participant aux jeux Olympiques.
Il y a trois ans, j’ai moi-même présenté une proposition de loi pour interdire clairement les signes religieux dans la pratique sportive. Ce texte suivait peu ou prou la même logique que la loi de 2004 sur le port de signes religieux ostensibles à l’école. Il consacrait le respect du principe de laïcité dans le sport et l’interdiction des tenues et signes religieux dans tout équipement sportif.
Cette levée de boucliers doit se poursuivre et s’intensifier, car le repli communautaire et le séparatisme n’auront jamais leur place dans le sport.
Fondateur des jeux Olympiques modernes, Pierre de Coubertin disait du sport qu’il faisait « partie du patrimoine de tout homme et de toute femme », et que rien ne pourrait jamais « compenser son absence ». Le sport a le pouvoir de rassembler des Français de toutes origines sociales, culturelles et territoriales. Il est, en ce sens, un puissant vecteur d’intégration et de cohésion.
Les fédérations sportives jouent un rôle clé dans le quotidien de nombre de nos concitoyens. Elles concourent largement à l’émancipation des générations futures. Plus de 6,3 millions de jeunes sont inscrits dans ces fédérations. Si, aujourd’hui, l’État ne dispose pas de moyens suffisants pour faire face au risque croissant de séparatisme dans le sport, cette proposition de loi n’en contient pas moins des mesures concrètes.
À ce titre, l’interdiction du port de signes religieux ostensibles lors des compétitions sportives, édictée à l’article 1er, est essentielle. Parmi les phénomènes de repli communautaire, l’un des plus récurrents et des plus largement rejetés par la société française est évidemment le port de signes religieux visibles.
Il en va de même de l’interdiction des prières collectives dans les locaux mis à disposition par les collectivités territoriales en vue d’une pratique sportive, ainsi que du respect des principes de laïcité et de neutralité dans les piscines publiques, conformément aux articles 2 et 3.
Le présent texte permet également la réalisation d’enquêtes administratives préalables à la délivrance de la carte professionnelle d’éducateur sportif.
Cette disposition est d’autant plus urgente que, en l’état actuel du droit, un individu fiché au titre de la prévention de la radicalisation à caractère terroriste peut tout de même se voir délivrer une carte professionnelle d’éducateur sportif. Le droit français présente aujourd’hui des insuffisances : les mesures qui figurent dans ce texte sont donc nécessaires.
Certains sénateurs présents dans cet hémicycle voient dans la présente proposition de loi un texte d’exclusion, antiféministe, un texte qui, s’il était adopté, empêcherait la pratique sportive des femmes. Ce n’est ni plus ni moins qu’un renoncement.
Cette posture revient à admettre dans le sport la discrimination de genre que certaines religions imposent aux femmes et à nier que le port de vêtements religieux peut représenter une pression pour les autres femmes de même confession.
En quoi le fait d’autoriser le port du voile lors d’activités sportives permettrait-il d’émanciper, d’intégrer et d’assimiler de jeunes femmes ?
M. Olivier Paccaud. En rien !
M. Max Brisson. Exactement !
M. Dany Wattebled. On ne répond pas aux prédicateurs et à ceux qui dévoient le sport pour y faire du prosélytisme par le renoncement. Or refuser de faire respecter la laïcité dans le sport, au motif que cela éloignerait certaines femmes, c’est, je le répète, un renoncement !
La meilleure façon de défendre les femmes, le sport et la laïcité, c’est de respecter nous-mêmes nos propres valeurs, d’être fidèles à nos principes et de refuser toute compromission.
C’est pourquoi le groupe Les Indépendants soutient les objectifs de cette proposition de loi. Oui, la laïcité doit être protégée dans le sport ! (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pourquoi est-il urgent de légiférer pour assurer le respect du principe de laïcité dans le sport, et ce dans un pays dont la Constitution dispose clairement, dans son article premier, qu’il « est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale » ? Pourquoi de si nombreux sénateurs ont-ils cosigné la proposition de loi de notre collègue Michel Savin et voulu réaffirmer un principe fondateur de notre société ?
Selon moi, c’est tout d’abord parce que les précédents gouvernements n’ont pas voulu, en leur temps, conserver les mesures qu’avait adoptées le Sénat en la matière ; c’est aussi parce qu’il appartient au ministre chargé des sports – c’est son rôle – de convaincre toutes les fédérations d’adhérer au principe de laïcité.
Le sport, comme l’école, doit être absolument sanctuarisé et préservé de tout entrisme religieux. Gabriel Attal, lors de son passage au ministère de l’éducation nationale, avait tenu un discours ferme vis-à-vis de l’entrisme religieux à l’école. Nous demandons à Mme la ministre des sports de faire preuve de la même fermeté au sein de son ministère.
Le voile, l’abaya, le qamis, le burkini ne sont pas des vêtements culturels, ce sont des étendards politiques qui s’immiscent dans notre société et, tout particulièrement, dans le sport.
Le port de ces vêtements trouve sa source dans des normes imposées par l’islam le plus rigoriste, lequel souhaite instituer – ne l’oublions pas – une communauté islamique mondiale, l’oumma. Le port de l’abaya par de plus en plus de petites filles en est un exemple effrayant qui, en France comme ailleurs, contribue à un véritable apartheid sexuel.
M. Olivier Paccaud. Tout à fait.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. N’oublions pas qu’en Iran le premier geste politique des mollahs, à leur arrivée au pouvoir en 1979, a consisté à voiler les femmes et à les rendre invisibles, alors que ce pays était jusqu’alors très moderne et à l’avant-garde du féminisme.
N’oublions pas non plus que le pays qui a imposé au monde entier la première athlète voilée – c’était lors des jeux Olympiques d’Atlanta en 1996 –, la tireuse à la carabine Lida Fariman, est également l’Iran, qui a ainsi foulé aux pieds l’article 50 de la Charte olympique. C’est dans ce même pays que des femmes meurent aujourd’hui, parce qu’elles refusent de porter ce voile qui étouffe leur cri : « Femme, Vie, Liberté ».
Le sport fait fi de la religion, du milieu social, de la couleur de peau et permet de se réunir sous un même maillot, avec un même objectif : gagner, battre l’adversaire. Cette saine émulation est une chance, en particulier pour la jeunesse. Sachons absolument la préserver, tout comme il faut rappeler que les équipements sportifs ne sont pas destinés à se transformer en lieux de culte.
M. Stéphane Ravier. Bravo !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Une fois n’est pas coutume, je vais citer le Président de la République, qui, dans son discours des Mureaux en octobre 2020, avait déclaré : « Ce à quoi nous devons nous attaquer, c’est le séparatisme islamiste. C’est un projet conscient, théorisé, politico-religieux, qui se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République, […] dont les manifestations sont […] le développement de pratiques sportives, culturelles communautarisées qui sont le prétexte pour l’enseignement de principes qui ne sont pas conformes aux lois de la République. C’est l’endoctrinement et par celui-ci, la négation de nos principes, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité humaine. »
Plus de quatre ans après ces belles paroles, où en sommes-nous des objectifs concrets ainsi définis ? Nulle part ! Je dirais même que la situation a empiré…
L’opposition des précédents gouvernements à la quasi-totalité des amendements que nous avions défendus dans le cadre de l’examen du projet de loi confortant le respect des principes de la République – un temps appelé « projet de loi Séparatisme » –, lesquels amendements avaient alors été qualifiés d’amendements « textiles » par un ministre dont je ne citerai pas le nom, ou aux amendements déposés sur la proposition de loi visant à démocratiser le sport en France est un exemple concret de ce manque d’engagement et de clarté.
Pour conserver ses vertus émancipatrices et libératrices, pour les jeunes et les moins jeunes, le sport doit se pratiquer sans entrave religieuse. Aucun enfant, aucun adolescent ne doit subir l’hydre islamiste – je reprends l’expression utilisée par le président Macron en 2019 – ni au sein de son établissement scolaire ni au cours de ses activités sportives, lieux où doit s’appliquer, plus que nulle part ailleurs, la devise « Liberté, Égalité, Fraternité », à laquelle j’ajouterais « Unité ».
L’adoption de la présente proposition de loi permettra au Gouvernement et au Parlement d’envoyer un message fort, un signal de fermeté. Oui, j’assume mes propos : entre le hidjab ou le burkini, d’une part, et le sport, d’autre part, il faut choisir !
Aujourd’hui, notre rôle est d’affirmer que la neutralité dans le sport répond à une impérieuse nécessité. Ne soyons pas dupes, ne nous voilons pas la face, le sport fait partie des vecteurs de l’entrisme islamiste, vecteur déjà préconisé par le fondateur des Frères musulmans, Hassan el-Benna, décédé en 1949, dont je rapporte ici les propos : « Nous ne sommes pas un groupe sportif, même si le sport est un moyen pour nous. »
Monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l’écrivait Pierre de Coubertin, il est temps, dans le domaine du sport comme dans tous les autres, de « voir loin, parler franc, agir ferme » ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions. – M. Claude Kern applaudit également.)
(M. Dominique Théophile remplace Mme Sylvie Robert au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Dominique Théophile
vice-président
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à l’examen du texte de la commission.
proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport
Article 1er
La section 1 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code du sport est complétée par un article L. 131-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 131-7-1. – Lors des compétitions départementales, régionales et nationales organisées par les fédérations sportives agréées, leurs organes déconcentrés, leurs ligues professionnelles et leurs associations affiliées, le port de tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique ou religieuse est interdit. »
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, sur l’article.
M. Olivier Paccaud. « L’important, c’est de participer » ; nous connaissons tous cette phrase attribuée, peut-être à tort, à Pierre de Coubertin. Mais l’essence même du sport, aujourd’hui comme demain, et si nous y veillons, réside dans sa capacité à rassembler, à unir autour d’une même passion des femmes et des hommes venus d’horizons variés.
Dans une société de plus en plus archipélisée, bunkérisée, « escargotisée », le rectangle vert, le stade et le vestiaire sont parmi les derniers espaces de mixité sociale. Combien de membres d’une même association sportive, issus néanmoins de milieux différents, ne se seraient peut-être jamais rencontrés sans le sport ?
Quand on porte le même maillot, les chaînes religieuses, les a priori de classe, les stigmates des quartiers s’effacent. Oui, sous un même maillot, plus de barrières, que des coéquipiers ! Quand on joue ensemble, quand on souffre ensemble, quand on gagne et qu’on perd ensemble, on apprend à se connaître, à s’apprécier, à se comprendre. Le vestiaire peut être cet endroit où tombent les préjugés et où naît la fraternité.
Faire partie d’une équipe est un formidable moyen d’intégration et de cohésion sociale. Les clubs sportifs demeurent d’incomparables lieux d’échanges, d’amitié, de générosité, où la formule latine Mens sana in corpore sano – « Un esprit sain dans un corps sain » – prend tout son sens pour le bien de tous.
Le sport ne divise pas, il rassemble. Quand l’essentiel, c’est l’équipe, les différences s’estompent. Que la religion reste donc aux portes du stade et du gymnase, il y a assez de facteurs de division dans notre société ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, sur l’article.