M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Je comprends mieux pourquoi le ministère de l’éducation nationale avait besoin d’une ancienne Première ministre et d’une ministre d’État ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la ministre d’État, à l’occasion de la présentation de cet amendement, vous nous avez réservé des annonces extrêmement positives, qui camouflent en réalité une baisse de crédits de 52 millions d’euros : il fallait bien, pour y parvenir, tout le talent d’une ancienne Première ministre !

Le calendrier des annonces gouvernementales a lui aussi un certain intérêt. Avant le vote de la dernière motion de censure, on a beaucoup parlé des fameux 4 000 postes. En revanche, on n’a guère évoqué la baisse de 52 millions d’euros infligée au budget de l’éducation nationale. Chers collègues socialistes, à votre place, je me dirais : « Tiens, nous nous sommes fait avoir »…

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Oh !

M. Max Brisson. Ce calendrier est tout de même un peu surprenant.

M. Thomas Dossus. Il faut censurer !

M. Max Brisson. Enfin, madame la ministre d’État, je tiens à revenir sur certains de vos propos.

Vous avez annoncé une mesure attendue depuis bien longtemps : la pluriannualité de la carte scolaire. Cette solution permettra d’éviter des crises de nerfs systématiques, et je vous en remercie.

De même, j’ai écouté avec intérêt vos propos relatifs à l’école inclusive. À ce titre, nous devons encore beaucoup travailler.

En revanche – nous aurons l’occasion d’en reparler –, dans vos déclarations à la presse, vous revenez selon moi beaucoup trop fortement sur le « choc des savoirs » annoncé par M. Attal lorsqu’il était lui-même ministre de l’éducation nationale. Ainsi, vous avez déclaré que l’admission au lycée ne serait plus soumise à l’obtention du brevet des collèges. Vous renoncez à cette mesure, ce que je regrette particulièrement.

Quel curieux pays ! Tel un médecin qui poserait un diagnostic sans jamais délivrer d’ordonnance, on multiplie les évaluations du système scolaire, on constate nombre de dysfonctionnements, maints risques de décrochage, mais on ne prend aucune mesure pour aider les élèves en difficulté. Pourtant, si un élève ne parvient pas à obtenir le brevet des collèges, il y a fort à parier qu’il sera en grande difficulté au lycée. C’était là une bonne décision de Gabriel Attal et il est bien dommage que vous y renonciez !

M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.

M. Laurent Lafon. Je ne reviens pas sur la méthode suivie, que l’on pourrait dénoncer à propos de chaque mission. Ce qui est anormal dans cette situation, c’est en somme de voter le budget de l’éducation nationale un 18 janvier… Le cœur du problème est là.

Ce constat étant fait, nous sommes ici pour parler du budget : qu’y a-t-il de nouveau depuis le vote de la motion de censure ?

D’une part, Mme la ministre propose 52 millions d’euros d’économies par le biais de l’amendement présenté à l’instant.

D’autre part, une annonce importante a été faite : on ne supprimera pas 4 000 postes. On n’en supprimera seulement pas 2 000. On n’en supprimera aucun. Si l’on veut débattre objectivement du budget de l’éducation nationale dans sa nouvelle version, il faut aussi rappeler cette annonce.

Chers collègues socialistes, communistes et écologistes, sauf erreur de ma part, vous avez demandé au Gouvernement de revenir sur ces suppressions ; or vous vous êtes gardés d’aborder ce point dans vos interventions respectives.

J’invite les uns et les autres à la modération. Pour le budget de l’éducation nationale, qui dépasse 63 milliards d’euros, une baisse de 52 millions d’euros, ce n’est même pas l’épaisseur du trait. On peut s’exprimer avec force pour dénoncer une méthode scandaleuse. Relativisons un tant soit peu, au regard du budget de l’éducation nationale et des enjeux éducatifs auxquels nous devons faire face.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre d’État, peut-être serez-vous en mesure de m’éclairer : je ne sais toujours pas sur quels crédits du ministère de l’éducation nationale sont financés les cours d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. Relèvent-ils du programme « Vie de l’élève » dont vous souhaitez réduire le budget ? J’ai interrogé quelques personnes par SMS : elles ne sont pas en mesure de m’indiquer par quel biais sont rétribués les intervenants, notamment les membres d’associations, qui, en vertu de conventions, viennent donner ces cours dans les établissements scolaires.

Vous vous êtes engagée à ce que ces enseignements soient dispensés, conformément à la loi. Avec une telle baisse de crédits, les établissements auront-ils encore les moyens de les assurer ?

Vous me confirmez d’un hochement de tête que ces financements relèvent de l’éducation nationale : pouvez-vous me préciser sur quels crédits ?

M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.

Mme Monique de Marco. Madame la ministre, vous êtes le cinquième ministre nommée, depuis un an, à la tête de l’éducation nationale.

Mme Laurence Rossignol. Ce n’est pas de sa faute…

Mme Monique de Marco. Vos prédécesseurs ont fait beaucoup d’annonces. Gabriel Attal a ainsi pu déclarer que, pour lui, « l’école [était] la mère des batailles ». Sans doute avez-vous le même sentiment et les mêmes ambitions que lui.

Le nouveau Premier ministre ayant renoncé aux 4 000 suppressions de postes, j’espérais vraiment, aujourd’hui, une augmentation du budget de l’éducation nationale. Ce n’est pas le cas.

Même si certains considèrent que 52 millions d’euros, c’est très peu par rapport à ce budget, à la suite de Mme Brossel, je n’en souhaite pas moins savoir en détail quels seront les dispositifs supprimés au sein des programmes « Vie de l’élève » et « Enseignement scolaire public du second degré » ? Il nous faut des précisions pour affûter notre vote.

Pour ma part, je voterai contre cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre d’État.

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. Monsieur le sénateur Brisson, je tiens à vous rassurer. Toutes les mesures visant à relever le niveau des élèves dans nos écoles, nos collèges et nos lycées ont été annoncées par Gabriel Attal, alors ministre de l’éducation nationale, quand j’étais Première ministre.

M. Max Brisson. Y compris la mesure relative au brevet des collèges…

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. Par définition, je soutiens donc ces dispositions.

Comme vous tous ici, je suis préoccupée par le niveau de nos élèves et j’entends prendre les mesures nécessaires pour le relever. Il convient de déployer de nouveaux moyens pour accompagner ceux qui éprouvent des difficultés. En parallèle, il faut faire en sorte que les bons élèves continuent à progresser : ce faisant, nous aurons encore davantage d’excellents élèves.

L’obtention du brevet des collèges, dont nous n’allons pas retracer l’histoire cet après-midi, n’a jamais été requise pour entrer au lycée. Cela étant, quand un élève autorisé à passer en seconde échoue à cet examen, il faut que l’on comprenne pourquoi. En effet, ce jeune doit pouvoir aborder la suite de son parcours scolaire dans de bonnes conditions, que ce soit via des prépa-secondes, actuellement mises en place à titre expérimental, ou par d’autres dispositifs de soutien.

Madame Rossignol, lorsque j’étais Première ministre, j’ai demandé au Conseil supérieur des programmes de concevoir le contenu de l’enseignement à la vie affective et relationnelle ainsi qu’à la sexualité. Il s’agit d’un programme à part entière, qui a vocation à être mis en œuvre…

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. … par les personnels de l’éducation nationale.

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. J’espère que ce programme sera validé prochainement, même si – je le répète – je suis à la disposition de ceux qui souhaiteraient encore en évoquer tel ou tel aspect. Dès lors, nous formerons les personnels de l’éducation nationale pour qu’ils soient à même de le mettre en œuvre dès la prochaine rentrée.

Enfin, je précise que le programme « Vie de l’élève » finance les recrutements d’AED dans nos établissements, les fonds sociaux ainsi que les crédits éducatifs. Pour ma part, je regrette que ces fonds ne soient pas davantage mobilisés. En 2024, on disposait, à ce titre, d’un an de trésorerie. À l’évidence, nous avons des marges de manœuvre pour mieux aider les élèves à l’échelle des établissements sans abonder davantage encore des trésoreries déjà importantes.

Avant tout, il faut s’assurer que tous les parents d’enfants ayant besoin des fonds sociaux peuvent bel et bien y accéder. Pour l’heure, ce n’est, hélas ! manifestement pas le cas.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, je n’aborderai pas ce débat sous l’angle éducatif, mais sous celui de la technique financière, en commençant par une observation.

Depuis que notre pays affronte des difficultés financières, les gouvernements successifs nous assurent tous qu’ils n’appliqueront pas de coup de rabot aveugle. Vous-même, madame la ministre, lorsque vous étiez Première ministre, n’avez pas manqué de prononcer cette phrase classique. En l’occurrence, c’est bien un coup de rabot aveugle que l’on nous propose, sur dix mois au lieu de douze…

Tel ou tel établissement, tel ou tel opérateur dispose d’une trésorerie excédentaire : on peut l’entendre. De même, on peut comprendre que le Gouvernement souhaite puiser dans ces fonds, bien que ce ne soit pas une idée brillantissime. Aujourd’hui, pour une économie de quelque 50 millions d’euros, ce qui représente un montant tout à fait dérisoire au regard du budget de 63 milliards d’euros dont dispose l’éducation nationale, vous êtes en train de perdre tous les bénéfices politiques de la précédente annonce. On pouvait savoir gré au Gouvernement de renoncer aux 4 000 suppressions d’emploi : vous perdez tout, et pour à peu près rien ! Pour 50 millions d’euros…

M. le rapporteur spécial s’est exprimé avec délicatesse, mais, à l’évidence, c’est sans enthousiasme qu’il votera votre amendement. Pour ma part, j’estime qu’il faut purement et simplement refuser ce coup de rabot. D’un point de vue technique, c’est ridicule et, pour vous-même, ce n’est pas très bon.

Bref, madame la ministre, nous allons vous aider, en rejetant cet amendement. (Mme la ministre dÉtat sourit. – Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. Si l’on s’en tenait à la copie votée par le Sénat avant la censure, on n’aurait pas besoin de ces 52 millions d’euros d’économies supplémentaires.

Par voie d’amendement, nous avons en effet limité à 2 000 la réduction du nombre d’enseignants. Revenir sur cette mesure, c’est accepter un coût supplémentaire de 150 millions d’euros pour la seule année 2025, qui ne sera seulement pas une année pleine. Qu’en sera-t-il en 2026 et au-delà ? Que ferez-vous des postes ainsi pourvus, alors que, malheureusement, la démographie scolaire se détériore d’année en année ? (Protestations sur les travées du groupe SER.)

Mmes Colombe Brossel et Marie-Pierre Monier. Eh bien, il y aura moins d’élèves par classe !

Mme Christine Lavarde. Si nos résultats s’amélioraient – je pense par exemple aux tests du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa) –, on pourrait entendre cet argument, mais ce n’est pas le cas ! Il est temps de se poser un certain nombre de questions.

Madame la ministre, je le répète : vous nous demandez, à la dernière minute, d’accepter 52 millions d’euros d’économies, alors que, dans notre copie, il n’y a absolument pas besoin de cette mesure. Nous ne sommes évidemment pas opposés aux efforts de modération de la dépense publique, mais, à nos yeux, il n’est au fond pas nécessaire de voter cet amendement, puisque nous avons réduit la dépense de 150 millions d’euros.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-2186.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-228, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

133 776 000

 

133 776 000

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

133 776 000

 

133 776 000

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

133 776 000

133 776 000

133 776 000

133 776 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Nous proposons de recruter 2 000 AESH supplémentaires afin d’assurer pleinement les droits des élèves en situation de handicap.

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit déjà le recrutement de 2 000 AESH. Cette mesure va dans le bon sens, mais elle reste insuffisante face aux besoins constatés. Pour rappel, 436 000 élèves sont aujourd’hui en situation de handicap, chiffre en constante augmentation depuis le début des années 2000. Selon les données du ministère de l’éducation nationale, seuls 56 % des élèves en situation de handicap étaient accompagnés en 2022. De plus, certains AESH suivent jusqu’à cinq élèves à la fois.

Il est donc essentiel d’accélérer le recrutement d’AESH. En parallèle, d’autres mesures sont indispensables, comme la revalorisation des salaires, la titularisation et la création de formations adaptées.

M. le président. L’amendement n° II-206 rectifié, présenté par M. Laouedj, Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Grosvalet et Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mme Briante Guillemont, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

88 124 196

 

88 124 196

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

88 124 196

 

88 124 196

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

88 124 196

88 124 196

88 124 196

88 124 196

SOLDE

0

0

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Par cet amendement, mon collègue Ahmed Laouedj appelle lui aussi l’attention sur le sort des AESH, lesquels doivent pouvoir vivre dignement de leur travail.

Œuvrant au côté de nos enfants, les AESH souffrent de rythmes de travail éreintants. Ils sont souvent contraints de suivre plusieurs élèves à la fois et ne peuvent donc accorder à chacun d’eux le temps qu’il exigerait. De surcroît, leurs salaires sont bien trop faibles.

M. le président. L’amendement n° II-559, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

30 000 000

 

30 000 000

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

30 000 000

 

30 000 000

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. La rentrée de 2024 a été, comme les rentrées précédentes, marquée par des dysfonctionnements en matière de scolarisation des élèves en situation de handicap. Les ministères compétents portent l’entière responsabilité des tensions résultant de cette situation dans les établissements scolaires.

Alors que plus de 490 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire, la moitié d’entre eux ne bénéficient pas de l’accompagnement auquel ils ont droit. Dans ces conditions, réduire de 4 000 à 3 000 le nombre d’emplois d’AESH créés à la rentrée est un choix lourd de conséquences.

En effet, le recrutement d’AESH est nettement inférieur aux années précédentes, et les effectifs restent insuffisants pour offrir un accompagnement de qualité aux élèves en situation de handicap. J’ajoute que ces derniers sont de plus en plus nombreux.

Voilà pourquoi nous proposons d’augmenter les futurs recrutements d’AESH.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Nos amis écologistes veulent augmenter le nombre d’AESH de 2 000, nos amis radicaux de 5 000 et nos amis communistes, pour une fois moins-disants (Sourires.), de 1 000.

Le projet de loi de finances crée déjà 2 000 postes d’AESH. Le budget de l’école inclusive s’élève à 4,5 milliards d’euros. Depuis 2017, le nombre d’AESH a été multiplié par quatre, pour atteindre bientôt 135 000. C’est vrai, on peut toujours faire mieux, mais il me semble objectivement que, sur ce dossier, l’on fait un mauvais procès au Gouvernement. On ne saurait prétendre que ses efforts sont insuffisants : j’y insiste, il crée déjà 2 000 postes d’AESH, et c’est déjà beaucoup.

Par conséquent, mes chers collègues, la commission demande le retrait de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. Sur ce sujet, j’abonde pleinement dans le sens de M. le rapporteur spécial.

Évidemment, il faut poursuivre le déploiement de l’école inclusive. Nous y sommes tous attentifs, et pour cause, il s’agit d’un enjeu absolument majeur.

Madame de Marco, les moyens dégagés doivent notamment nous permettre de créer des pôles d’appui à la scolarité (PAS) pour soutenir le travail des AESH, en améliorant le niveau des élèves de quatrième et de troisième et en renforçant les brigades de remplacement.

Il faut bien sûr continuer à renforcer l’école inclusive. Toutefois – M. le rapporteur spécial l’a très bien dit –, 2 000 créations de postes sont déjà prévues. Elles nous permettront d’accompagner le fil des prescriptions d’AESH par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

De plus, je vous rappelle un enjeu majeur, sur lequel je me suis engagée à ouvrir la discussion dans le cadre de l’agenda social de mon ministère : l’attractivité du métier d’AESH. Nous avons déjà beaucoup travaillé à la revalorisation et à la CDIsation de ces personnels. À présent, nous devons être en mesure de leur offrir un véritable parcours de carrière.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements. J’y insiste, les 2 000 créations de postes prévues nous permettront de répondre aux besoins.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Madame la ministre d’État, lorsque vous étiez Première ministre et que M. Attal était ministre de l’éducation nationale, nous avons évoqué la nécessité, pour le ministère, de piloter davantage la politique de l’école inclusive. Nous constations alors qu’il était, à ce titre, largement soumis aux prescriptions des MDPH.

Nous commémorerons bientôt les vingt ans de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et liens vers les décrets d’application, dite Handicap. C’est peut-être l’occasion d’une vaste remise à plat. (Mme la ministre dÉtat acquiesce.)

De grands efforts quantitatifs ont été faits. En particulier, de nombreux AESH ont été recrutés, mais ces professionnels restent dans une grande précarité. Ni leurs salaires ni leurs emplois du temps ne sont dignes d’une véritable politique de l’école inclusive. À cet égard, dans leurs classes, les professeurs éprouvent d’indéniables difficultés.

Encore une fois, cette politique mérite un débat approfondi afin d’aboutir à des propositions le plus rapidement possible. Je vous rappelle qu’un article qui permettait de faire avancer les choses avait été supprimé d’un projet de loi de finances, parce que le véhicule législatif n’était pas le bon.

J’insiste, le débat continue de se poser et nous devons le reprendre via un autre véhicule législatif.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Je ne voterai pas ces trois amendements, qui d’ailleurs ne s’accordent pas entre eux, car nous devons prendre en compte l’effort accompli par le Gouvernement. En témoigne la création de deux mille postes d’AESH pour la rentrée prochaine.

Néanmoins, j’appelle votre attention, madame la ministre, sur le fait que nous n’allons pas au bout des moyens nécessaires – je suis sûre que vous en êtes consciente. Rappelons que, l’an dernier, sur l’initiative de notre collègue Cédric Vial, le Sénat a voté des moyens supplémentaires pour l’accompagnement des enfants en situation de handicap, notamment sur le temps de pause méridienne.

J’avais eu l’occasion de dire que l’accompagnement sur le temps périscolaire était tout aussi important. Il est difficile d’annoncer à un enfant en situation de handicap qu’il ne peut pas bénéficier d’un accompagnement passé quatre heures et demie pour accomplir d’autres activités.

Dans ces conditions, l’enfant n’a d’autre choix que de retourner chez lui. Cela a des conséquences lourdes pour les mères,…

Mme Marie-Do Aeschlimann. … qui doivent interrompre leur activité professionnelle pour assurer la garde. Une telle organisation entraîne une rupture d’égalité des chances entre les enfants. Il faut donc encore accomplir un certain nombre d’efforts en la matière.

Les circonstances actuelles appellent au sérieux budgétaire. Les PAS vont peut-être apporter des solutions, mais il faudra néanmoins moderniser les modalités de traitement par les MDPH. Surtout, il faudra en finir avec la mutualisation des AESH : un accompagnant pour cinq enfants, ce n’est pas raisonnable !

Nous avançons progressivement et nous comptons sur vous pour poursuivre les efforts engagés, madame la ministre.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre Monier. Les moyens budgétaires ont un impact majeur sur les enfants en situation de handicap ; il est donc important de voter ces amendements. Le but est d’assurer qu’ils puissent être accueillis en milieu scolaire ordinaire.

La création de deux mille postes d’AESH était déjà actée par le budget précédent. C’est une bonne chose, mais, pour l’heure, il n’existe aucune solution s’agissant des remplacements. Il y a plus de trois mois, le maire d’une commune m’a fait part de la situation d’un enfant accueilli dans une classe en milieu ordinaire sans AESH, alors qu’il souffre de troubles autistiques.

Par ailleurs, il conviendrait de faire un point sur les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial), dont la mise en place a parfois eu des conséquences délétères.

Parlez avec des AESH, ils vous diront combien ils sont tiraillés entre de nombreux élèves aux handicaps très différents. Ces professionnels doivent réfléchir à des solutions adaptées et sont parfois contraints de parcourir des kilomètres, alors qu’ils perçoivent une rémunération en dessous du seuil de pauvreté.

Madame la ministre, avant de généraliser quoi que ce soit, évaluez précisément ce qui s’est passé sur les Pial et menez correctement l’expérimentation des PAS !

M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Il faut que nous votions ces amendements, mes chers collègues ! La droite de cet hémicycle salue l’effort du Gouvernement, mais nous, à gauche, nous entendons les besoins du terrain. (Et pas nous ?! sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous savons que l’école est dans l’obligation d’accueillir des élèves en situation de handicap, qu’elles disposent ou non d’un dispositif d’accueil ou d’un accompagnement spécifique.

Nous, nous entendons la détresse des professionnels et la solitude des enseignants démunis, alors qu’ils doivent accueillir chaque jour des élèves en difficulté. Pourtant, ils n’ont d’autre choix que de les inclure dans leurs enseignements et de les accompagner dans les apprentissages. En outre, ils doivent rassurer les familles et assurer la continuité du service public.

Et rien n’est fait pour les aider à accomplir leur mission !

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. La mission « Enseignement scolaire », le budget le plus important de l’État, pèse 63 milliards d’euros. Ces amendements méritent beaucoup d’attention, même s’ils ont un coût – 133 millions d’euros pour le premier d’entre eux. Ces crédits sont toutefois prélevés sur une autre ligne budgétaire : le solde est donc neutre.

Le rôle des AESH est considérable. La proposition de loi de Cédric Vial avait été adoptée à l’unanimité à l’issue d’un travail conjoint de la commission de la culture et de la commission des affaires sociales. N’oublions pas le rôle des associations, des collectivités territoriales, de l’État et, bien sûr, des enseignants.

Bref, nous sommes confrontés à un dilemme avec ces amendements, dont je comprends pleinement le sens. Il convient, en tout état de cause, de trouver la solution la plus adaptée.