Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Voilà un exemple parfait du saupoudrage que l'on déplore dans le plan France 2030 !

Je m'excuse auprès de Mmes Loisier et Billon, mais il faudra reconfigurer ce plan : si l'on veut financer des technologies de rupture, il ne faut pas gaspiller ces crédits dans des achats de matériel, dans l'agriculture comme dans bien d'autres secteurs. Il faut avoir le courage de le dire !

Tout notre rôle au sein du comité de surveillance des investissements d'avenir sera précisément de reconcentrer les aides.

Un autre exemple s'impose : celui du petit nucléaire, où l'on a ouvert pour 12 entreprises le robinet des milliards d'euros de l'État, alors qu'il n'y aura peut-être parmi elles, au bout du compte, qu'un seul survivant ! Cette approche est contre-productive : il est temps que l'État se réveille et que les services du Premier ministre assument une réelle stratégie de développement des technologies de rupture.

De vrais choix devront être faits pour préserver le nucléaire, car, plus vous mettez la gomme sur l'éolien et le photovoltaïque, plus vous mettez le nucléaire en péril. On fait baisser le taux de charge des centrales et ainsi, automatiquement, le prix du mégawattheure augmente, alors que nos entreprises ont besoin que celui-ci soit le plus bas possible pour survivre, demain, à la désindustrialisation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-894 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 », figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des crédits des missions « Plan de relance » et « Investir pour la France de 2030 ».

Engagements financiers de l'État

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

Remboursements et dégrèvements

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Engagements financiers de l'État » constitue malheureusement, depuis 2024, le deuxième poste de dépenses du budget de l'État en crédits de paiement ; elle risque même de devenir prochainement le premier.

Pour 2025, cette mission devrait ainsi représenter 56 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 61,3 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une croissance de 520 millions d'euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.

Ce niveau record résulte principalement de l'alourdissement de la charge de la dette de l'État, qui devrait s'établir à 53,5 milliards d'euros en comptabilité budgétaire, alors que la dette publique dépasse désormais – nous le savons tous, car notre commission des finances ne cesse de le rappeler – 3 300 milliards d'euros, soit 113,7 % du PIB, dont 2 690 milliards d'euros pour la dette de l'État – la dette des collectivités, dont on nous parle souvent, n'en représente qu'une petite part !

C'est donc à la trajectoire alarmante de la charge de la dette de l'État que je consacrerai l'essentiel de mon propos. J'aborderai brièvement, dans un second temps, la question des appels en garantie au titre des prêts garantis par l'État (PGE).

En 2025 et dans les années à venir, la charge de la dette de l'État devrait continuer de s'alourdir fortement, représentant un poids croissant pour nos finances publiques.

Cela résulte de l'augmentation du stock de dette, mais aussi de celle des taux d'intérêt. De fait, le taux à dix ans sur la dette française connaît une remontée significative, repassant au-dessus de la barre des 3 % et atteignant même plus de 3,40 % au mois de janvier 2025. Selon le scénario de taux d'intérêt retenu dans ce projet de loi de finances, ce taux devrait poursuivre sa croissance dans les prochains mois pour s'établir à 3,60 % à la fin de 2025 et à 3,70 % à la fin de 2026.

Cette évolution s'explique principalement par la hausse de la prime de risque, mesurée par l'écart de taux, ou spread, par rapport à la dette allemande. Cet écart est passé d'environ 50 points de base au début de l'année 2024 à plus de 80 points de base actuellement.

De fait, cette dégradation résulte, pour une part déterminante, de l'instabilité politique et budgétaire et, plus particulièrement, du dérapage historique du déficit public enregistré en 2023 et en 2024. Les auditions menées par notre commission des finances n'ont pas permis de nous offrir un éclairage complet quant aux causes de ce dérapage. Or les annonces de dérapage du déficit public constituent pour les marchés obligataires souverains le pire des scénarios, celui de l'incertitude, qui affecte la confiance des investisseurs dans la transparence de la trajectoire des finances publiques et dans notre capacité à stabiliser notre dette.

Certes, si l'on veut être un peu moins pessimiste, on peut relever deux facteurs qui jouent aujourd'hui en notre faveur pour limiter les tensions sur notre dette, même si rien n'est inscrit dans le marbre : d'une part, le niveau relativement faible de la détention de la dette par des non-résidents, les investisseurs de la zone euro représentant quasiment trois quarts des détenteurs de notre dette, 48 % d'entre eux étant des investisseurs français ; d'autre part, la protection de la Banque centrale européenne (BCE), qui n'est cependant ni éternelle ni absolue ; en tout cas, elle est conditionnée au respect des règles budgétaires européennes. Je rappelle à cet égard que nous sommes déjà dans une position délicate, puisqu'une procédure pour déficit excessif a été enclenchée cet été à notre encontre et que la pression de nos partenaires européens va aller s'accentuant.

Si les tensions sur notre dette devaient s'aggraver, l'augmentation de la prime de risque pourrait avoir des conséquences massives sur la charge de la dette. Selon l'Agence France Trésor, l'effet d'un choc de taux pérenne de 1 point entraînerait une hausse de la charge de la dette de 3,2 milliards d'euros à un an, 19,1 milliards d'euros à cinq ans et 32,6 milliards d'euros à neuf ans. On débat parfois dans cette enceinte, à l'occasion de l'examen des missions budgétaires, de quelques centaines de millions d'euros ; l'ordre de grandeur ici est tel que toute marge de manœuvre pourrait nous être définitivement retirée.

À politique inchangée, la charge de la dette de l'État pourrait approcher la barre des 100 milliards d'euros à l'horizon 2030, montant absolument insupportable pour nos finances publiques.

S'agissant du périmètre de la mission, je relève avec regret le maintien du programme 369 relatif à l'amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19, ce qui n'a pas de sens ; nous vous proposerons donc, par amendement, de le supprimer, comme nous l'avons fait l'année dernière.

Enfin, je veux dire un mot des crédits alloués aux appels en garantie de l'État, dont le montant baisse fortement, de 1,9 milliard d'euros à 985 millions d'euros. Le montant cumulé des sommes décaissées pour les PGE reste important, autour de 6 milliards d'euros. Certains secteurs sont plus touchés que d'autres : la construction, l'immobilier, l'hébergement-restauration, l'information et la communication…

Mme la présidente. Merci de conclure, monsieur le rapporteur spécial !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Je m'y emploie, madame la présidente, mais il s'agit tout de même de la deuxième mission du budget de l'État !

C'est donc à regret que je vous propose, au nom de la commission des finances, d'adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ». En effet, nous ne pouvons que constater combien d'argent nous devons à nos créanciers, autant d'argent que nous ne pouvons investir dans l'économie française : 900 milliards d'euros, voilà le prix que nous laisse à régler, notamment, le ministre des finances de la précédente législature ! (M. Marc Laménie applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, parallèlement aux crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », nous examinons ce matin ceux du compte d'affectation spéciale (CAS) « Participations financières de l'État », pour lesquels la commission des finances m'a désigné comme rapporteur spécial.

Ce compte constitue l'instrument budgétaire de mise en œuvre de la politique d'actionnariat public, c'est-à-dire les interventions de l'État actionnaire.

De manière complémentaire, le programme 732 de ce compte d'affectation spéciale sert de support, depuis 2022, à un schéma très artificiel d'isolement comptable mis en place par le Gouvernement en lien avec la crise sanitaire.

Sur ce point, la commission proposera, encore une fois cette année, de mettre fin à ce schéma complexe qui nuit à la lisibilité du budget général en prétendant amortir une dette qui n'est pas isolée financièrement, ce qui aboutit à creuser le déficit.

Sur l'autre programme du compte d'affectation spéciale, qui correspond aux interventions publiques en fonds propres, l'actualité récente nous a donné l'occasion de constater une nouvelle fois à quel point l'actionnariat public était un levier déterminant de notre politique industrielle.

Le 5 novembre dernier, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a annoncé avoir finalisé l'opération d'acquisition par l'Agence des participations de l'État (APE) de 80 % du capital de la société Alcatel Submarine Networks (ASN).

Préalablement intégrée au groupe Nokia, cette société est un acteur de référence dans le secteur de la conception, de la fabrication, de l'installation et de l'entretien de câbles sous-marins de télécommunication. Elle réunit à la fois un savoir-faire industriel, incarné dans son usine de production de Calais, et un enjeu de souveraineté technologique.

C'est cette dimension stratégique qui a motivé l'intervention de l'État comme actionnaire, pour un coût de 100 millions d'euros. Cette opération, qui s'imposait, consolide la résilience de notre système de télécommunication. Je vous rappelle en effet que l'infrastructure des câbles sous-marins est devenue incontournable et représente 99 % du trafic intercontinental de données.

J'en viens aux crédits proposés pour l'exercice 2025.

D'une part, il est proposé dans ce projet de loi de finances d'ouvrir un montant total de 2,7 milliards d'euros pour les opérations en capital de l'APE.

Ces crédits pourront financer, selon l'échéancier retenu, la reprise d'une partie des activités du groupe Atos. Le Gouvernement a en effet annoncé, au mois de novembre dernier, être entré en négociations exclusives avec Atos pour l'acquisition de ses activités de calcul de haute performance. Au regard du caractère stratégique des activités en question, la volonté de l'État de prendre une participation financière semble légitime.

D'autre part, en dehors du périmètre de l'Agence des participations de l'État, le compte d'affectation spéciale sert également de support à l'ensemble des opérations patrimoniales de l'État. Pour l'exercice 2025, le montant total de ces interventions sectorielles atteint 1,8 milliard d'euros.

Ces crédits servent en priorité à financer les souscriptions de la Banque publique d'investissement à des fonds d'investissement ou à des « fonds de fonds » dans le cadre des investissements d'avenir.

Pour finir, je tiens à souligner que la situation, inédite depuis plus de quarante ans, que traverse notre pays du fait de l'absence de budget adopté en début d'exercice n'est pas sans conséquence sur la politique de l'État actionnaire.

En effet, le décalage, légitime et systématique, entre la temporalité budgétaire et la temporalité actionnariale a pour effet de faire largement reposer le fonctionnement du compte d'affectation spéciale sur des reports de crédits.

La nécessité de compléter les crédits votés annuellement par le Parlement par les crédits reportés depuis l'exercice précédent est justifiée par l'économie générale du compte, qui a pour objet de financer les acquisitions nouvelles par des cessions. Les occasions d'acquisition ne se présentant pas nécessairement simultanément aux occasions de cession, le législateur organique a prévu un cadre spécifique pour le report des crédits du compte d'affectation spéciale en l'exonérant des plafonds de droit commun.

Pour autant, le Gouvernement a eu l'occasion d'indiquer que les reports de crédits depuis l'exercice 2024 vers l'exercice 2025 ne pourraient avoir lieu que dans le cas où un budget était promulgué d'ici au 15 mars. D'après les estimations que les services du ministère nous ont transmises, ces reports représentent un montant de plus de 2 milliards d'euros pour le compte d'affectation spéciale.

Cet enjeu rend d'autant plus nécessaire l'adoption d'un budget pour garantir le fonctionnement régulier de nos instruments de politique industrielle et, singulièrement, des leviers d'intervention de l'État actionnaire.

Je conclus en vous rappelant que la commission a émis, sous réserve de l'adoption de l'amendement n° II-31, un avis favorable sur l'adoption des crédits de ce compte pour l'exercice 2025. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi avant tout un mot sur le contexte. Je tiens en effet à redire qu'il est incompréhensible pour les Français que nous continuions à débattre comme si de rien n'était !

Nous reprenons cette discussion budgétaire comme si le pays avait été figé, confiné pendant un mois. Pourtant, la censure a eu lieu. Les élections législatives du mois de juillet 2024 ont adressé un message clair au Gouvernement et au Président de la République : il faut changer de cap.

Pour notre part, nous, parlementaires communistes, ne nous résoudrons pas à la résignation. Quand on ne respecte pas la démocratie, ça ne marche pas ! C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous défendrons une proposition de loi d'urgence économique et sociale.

J'en viens au rapport que je présente en tant que rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Remboursements et dégrèvements », la plus importante en volume de crédits, tous budgets confondus. Ses crédits dépassent 147 milliards d'euros. Ils ont augmenté de 86 milliards d'euros depuis 2001.

La part la plus importante porte sur les impôts d'État, avec des crédits évalués à 142,7 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2025. Si ce montant représente une hausse notable, de 6,5 milliards d'euros, par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, les crédits de celle-ci étaient néanmoins manifestement sous-estimés – c'est peu de le dire ! –, puisque les dernières estimations à date pour l'année 2024 les évaluent en hausse de 9 milliards d'euros.

Il est donc plutôt proposé dans le projet de loi de finances pour 2025 une baisse de 2,5 milliards d'euros par rapport à ce montant révisé. Cette baisse est-elle la conséquence de la politique récessive du Gouvernement, qui déboucherait sur une diminution des recettes fiscales brutes ? Je vous laisse juges de la réponse…

Les restitutions concernent principalement la TVA, à hauteur de 80,3 milliards d'euros dans ce projet de loi de finances, soit une progression de 32,7 milliards d'euros entre 2014 et 2025.

Ce niveau historiquement haut pose également la question du niveau de fraude, puisque les remboursements de TVA augmentent plus rapidement que la TVA collectée. Des avancées ont été constatées dans la lutte contre la fraude ; toutefois, le défi reste de taille : les dernières estimations évaluent la fraude à la TVA autour de 10 milliards d'euros.

Les autres crédits liés à la mécanique de l'impôt se sont révélés particulièrement imprévisibles. Je vous ai alerté l'an passé sur le faible niveau des remboursements en matière d'impôt sur les sociétés : de fait, leur niveau a été fortement revu à la hausse en 2024, passant de 11,4 milliards d'euros en loi de finances initiale à 18,5 milliards d'euros selon les dernières estimations. Le projet de loi de finances pour 2025 anticipe une baisse des remboursements en 2025 : ils se situeraient autour de 15,5 milliards d'euros.

Nous pouvons unanimement convenir que le Parlement doit être mieux informé sur les hypothèses retenues par l'administration afin de pouvoir jouer pleinement son rôle de contrôle.

D'un côté, la mécanique de l'impôt, de l'autre, la responsabilité des politiques publiques : la part des crédits de cette mission associée à ces politiques s'élève à 18,8 milliards d'euros pour 2025, soit un peu plus de 13 % de l'ensemble.

Les remboursements et dégrèvements liés à l'impôt sur le revenu progressent, notamment sous l'effet de la montée en charge du crédit d'impôt contemporain pour l'emploi d'un salarié à domicile : les crédits prévus pour 2025 s'élèvent à 2,4 milliards d'euros, soit une hausse de près de 800 millions d'euros – une hausse significative de 49 % par rapport à 2024.

L'autre crédit d'impôt coûteux auquel nous prêtons une grande attention est le crédit d'impôt recherche (CIR) ; les sommes qui lui sont allouées continuent à croître, pour atteindre 7,7 milliards d'euros en 2025, alors même que son effet sur le niveau d'investissement en France reste à démontrer. Il me paraît nécessaire de mener une réforme du CIR, qui mette en place une véritable différenciation par type d'entreprise et par secteur d'activité ; par ailleurs, le versement d'argent public devrait être, au minimum, conditionné au maintien de l'activité et des emplois.

J'en viens aux remboursements et dégrèvements d'impôts locaux. Les crédits évalués pour 2025 en la matière s'élèvent à 4,4 milliards d'euros, soit une hausse légère qui met un terme à une tendance à la baisse entamée depuis 2021 en raison de la suppression de la taxe d'habitation, de la réforme des impôts de production et de la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Les remboursements et dégrèvements d'impôts économiques suivent naturellement la pause marquée dans la réforme des impôts de production, qui se confirme dans ce projet de loi de finances au vu du report à 2029 de la suppression totale de la CVAE.

Si ces réformes ont été interrompues, elles affectent durablement l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. Ce projet de loi de finances procède à une stabilisation en valeur des fractions de TVA affectées aux collectivités locales en 2025, ce qui entraîne un manque à gagner de l'ordre de 500 millions d'euros pour la compensation de la perte de la CVAE.

Enfin, les remboursements et dégrèvements de taxe foncière ont connu une progression de près de 78 % entre 2018 et 2024. Nous serons unanimes à reconnaître que cette dynamique découle avant tout d'une décision de l'État et non des collectivités territoriales.

En guise de conclusion, mes chers collègues, je rappelle que, lors de l'examen de la mission par la commission des finances, le 5 novembre 2024, celle-ci a proposé, à l'unanimité, l'adoption de ses crédits. Fidèle et loyal envers mes collègues commissaires, je vous propose donc à mon tour de les adopter de manière tout aussi unanime. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, 2024 a été une année particulière pour l'Agence des participations de l'État. Non seulement elle fêtait ses vingt ans d'existence, mais l'État a surtout annoncé des opérations d'ampleur d'investissement dans des entreprises de souveraineté qui étaient jusqu'alors hors de son giron, dans les secteurs de l'industrie, du numérique et de la défense.

Je pense par exemple à la souscription à l'augmentation de capital de John Cockerill Defense, pour créer un champion industriel européen des véhicules blindés légers pour la défense.

Je pense aussi à l'acquisition d'au moins 80 % du capital d'Alcatel Submarine Networks (ASN), leader des câbles sous-marins. C'est une opération importante, car ASN, propriété du groupe finlandais Nokia, est une entreprise critique pour notre souveraineté et notre indépendance numérique. Son savoir-faire et son implantation industrielle doivent être préservés sur le territoire national.

L'État prévoit également l'acquisition des activités sensibles de la branche Big Data & Security d'Atos en 2025. Une offre a été remise le 25 novembre dernier pour 500 millions d'euros. En parallèle des négociations, une action de préférence au bénéfice de l'État a été émise au sein de Bull SA, filiale qui loge des activités souveraines sensibles.

Au-delà de ces opérations nouvelles, l'APE accompagne les 85 entreprises de son portefeuille. En 2024, elle est intervenue pour soutenir des politiques publiques prioritaires : la souveraineté énergétique, avec la souscription à l'augmentation de capital d'Orano ; la réindustrialisation, avec une dotation en fonds propres octroyée au grand port maritime de Dunkerque ; la construction de logements, enfin, avec l'augmentation de capital de la Société pour le logement intermédiaire.

Ces évolutions appellent une réflexion sur la doctrine de l'État actionnaire. Cette doctrine sera actualisée en 2025, ce que la commission des affaires économiques juge nécessaire. Elle doit l'être en complémentarité avec les autres actionnaires publics : la Caisse des dépôts et consignations et Bpifrance. Je rappelle que cette dernière va entrer au capital d'Opella, filiale de Sanofi, à hauteur de 1 % à 2 %, afin d'assurer l'ancrage français des actifs stratégiques.

Il nous faut aussi engager une réflexion sur l'économie générale du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». Celui-ci est normalement alimenté par des produits de cessions, qui se font de plus en plus rares ; en 2025, 90 % de ses crédits proviennent du budget général de l'État. C'est déroutant, lorsque l'on sait que les dividendes de l'État actionnaire alimentent justement ce budget général ! L'APE est le seul actionnaire à ne pas récupérer le fruit de ses investissements.

Enfin, au niveau des dépenses, la commission des affaires économiques partage le constat du caractère artificiel de la contribution de ce CAS au remboursement de la dette covid.

Au total, la commission soutient l'inflexion de l'État actionnaire en 2024, caractérisée par des opérations stratégiques d'ampleur. C'est à ce titre qu'elle s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». (M. Marc Laménie applaudit.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Marc Laménie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons à présent les importantes missions « Engagements financiers de l'État » et « Remboursements et dégrèvements » du budget pour 2025.

Nous examinons ces missions chaque année, mais elles ne permettent pas véritablement – vous le savez bien, mes chers collègues – de réformer le pays : elles sont simplement les témoins des activités financières de l'État : l'une envers ses créanciers, l'autre envers les contribuables.

Ces deux missions et les montants de leurs crédits résultent directement des dispositifs fiscaux existants et des décisions d'emprunt de l'État.

La mission « Remboursements et dégrèvements » retrace les dépenses budgétaires résultant des dégrèvements d'impôt, des remboursements, des restitutions de crédit d'impôt ou des compensations prévues par des conventions fiscales internationales.

Les montants de ces remboursements nous apprennent que le droit fiscal français est très complexe, voire illisible. Pour chaque impôt existant, ou presque, il existe une niche qui permet à qui sait lire entre les lignes de sa déclaration de revenus de s'exonérer partiellement ou totalement de l'impôt.

Notre système se porterait bien mieux avec des impôts moins nombreux et moins écrasants, mais avec moins de dégrèvements, de remboursements ou de crédits d'impôt. L'impôt serait ainsi plus juste, donc plus acceptable pour tout le monde.

Les montants des crédits de cette mission nous apprennent aussi que la lutte contre la fraude fiscale est bien plus qu'une question de justice : c'est une question de salubrité budgétaire. Je veux à cette occasion remercier l'ensemble des agents de l'administration des finances publiques ; je peux témoigner avoir toujours eu affaire, dans mon département des Ardennes, à des interlocuteurs de qualité !

Les efforts en matière de lutte contre la fraude fiscale ont été largement accrus ces dernières années, grâce à un renforcement de l'arsenal légal, mais aussi des moyens humains. Il reste néanmoins beaucoup à faire dans cette matière, tout comme pour la fraude sociale.

La mission « Engagements financiers de l'État » couvre principalement les charges financières liées aux engagements financiers pris par l'État. Le premier d'entre eux est évidemment notre dette.

J'évoquerai d'abord la charge de notre dette, dont le montant est faramineux. Elle devrait s'élever à 61,3 milliards d'euros en crédits de paiements, soit une augmentation de près de 9 milliards d'euros par rapport à 2024. C'est presque le montant du budget de la justice ! Et cette charge n'a pas fini d'exploser. Elle pourrait atteindre 75 milliards d'euros en 2027, voire 92 milliards d'euros en 2029.

Rendons-nous compte : si les projections se confirment, le paiement des intérêts de la dette et des frais financiers associés aura été multiplié par 3,6 entre 2020 et 2029 !

Ce montant – 92 milliards d'euros – équivaut à presque quatre fois le budget de la Nasa (National Aeronautics and Space Administration), sans doute l'un des programmes publics les plus onéreux de l'Histoire, qui permet d'envoyer des femmes et des hommes sur la lune. Le remboursement de la charge de la dette constituera bientôt malheureusement le premier poste de dépenses de l'État.

Nous devons impérativement à nos enfants de changer le cours de l'Histoire sur ce point.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires considère que l'État doit sérieusement et durablement diminuer ses dépenses pour que ses besoins en financement par la dette s'amoindrissent rapidement. Nous avons devant nous très peu d'années utiles, il faut impérativement les mettre à profit pour nous désendetter.

Aussi, mes chers collègues, notre groupe votera, avec gravité, les crédits de ces deux missions. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Christian Bilhac applaudit également.)