Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure spéciale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Frédérique Espagnac, rapporteure spéciale de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en complément de l’intervention de mon collègue Thierry Cozic, j’aborderai pour ma part l’état du déploiement de la fibre optique, puis les compensations des missions de service public au groupe La Poste, avant de m’attarder sur la fusion d’Atout France et de Business France annoncée par le Gouvernement, sur laquelle nous sommes très réservés.

Tout d’abord, le plan France Très Haut Débit (THD) doit permettre le déploiement complet de la fibre optique à l’horizon 2025. Il est financé en particulier par le programme 343, dont l’objet est de subventionner les réseaux d’initiative publique (RIP) dans des zones où le déploiement de la fibre n’est pas rentable pour les opérateurs. Ces RIP sont mis en œuvre dans le cadre de projets portés et financés par les collectivités territoriales.

Les crédits du programme 343 subventionnant les RIP ont des effets positifs sur le déploiement dans les zones concernées. Toutefois, nous avons des raisons de nous inquiéter quant à l’atteinte de l’objectif de déployer la fibre optique sur l’ensemble du territoire d’ici à 2025, dans les zones RIP et ailleurs.

M. Patrick Chaize. Très bien !

Mme Frédérique Espagnac, rapporteure spéciale. À ce jour, seuls 87 % des locaux recensés en France sont éligibles à la fibre optique, c’est-à-dire raccordables. En outre, le taux de déploiement est très hétérogène sur le territoire.

Surtout, les crédits consacrés au plan France Très Haut Débit ont déjà fait l’objet de coupes budgétaires massives en cours d’année 2024, et cette tendance devrait se poursuivre en 2025. Le PLF prévoit en effet une nouvelle diminution majeure des crédits consacrés aux RIP, en baisse de plus de 52 % par rapport à l’an dernier. Nous regrettons cette situation, qui risque d’affecter les collectivités locales. Celles-ci devront, dans les cas où leur situation financière le permet, se substituer à l’État pour garantir le financement des projets. À défaut, cette situation se répercutera sur les opérateurs et leurs sous-traitants, fragilisant ainsi le tissu économique local.

La commission prend acte de cette baisse de crédits, justifiée par la situation dégradée de nos finances publiques. Toutefois, ce désengagement de l’État nous semble préoccupant et nuit à la crédibilité de la parole publique, puisque, rappelons-le, le Gouvernement s’était engagé à déployer la fibre sur l’ensemble du territoire à l’horizon 2025 !

Par ailleurs, nous vous présenterons tout à l’heure un amendement visant à sécuriser la concrétisation du plan France Très Haut Débit à Mayotte, qui, faute de crédits suffisants, n’est à ce jour pas garantie.

Je poursuivrai en évoquant les compensations financées par la mission « Économie » et versées à La Poste au titre de ses différentes missions de service public. Je m’attarderai plus particulièrement sur le service universel postal et la mission d’aménagement du territoire de La Poste.

La mission de service universel postal est compensée, en 2025, à hauteur de 500 millions d’euros, soit un montant stable par rapport à l’année dernière. Cela fait maintenant deux années que le PLF ne prévoit pas la part variable de 20 millions d’euros qui est censée être accordée en fonction du taux de lettres vertes effectivement livrées à J+3 par La Poste. Pourtant, les résultats du groupe concernant ses délais de livraison sont conformes aux objectifs fixés. Nous vous présenterons donc un amendement visant à garantir que La Poste puisse bénéficier de cette part variable.

Enfin, des questions majeures demeurent concernant la mission d’aménagement et de développement du territoire de La Poste en 2025. Cette mission essentielle consiste à maintenir des points de contact dans l’ensemble du pays. Elle fait l’objet d’un financement par le biais du Fonds postal national de péréquation territoriale. Celui-ci est alimenté par deux biais, à la fois par des allégements de fiscalité locale et par une dotation budgétaire. L’objectif pour l’État est d’apporter une compensation globale de 174 millions d’euros.

Dans un contexte de baisse de rendement des allégements de fiscalité locale, liée notamment à la réduction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), la dotation avait été rehaussée en 2023 de 74 millions à 105 millions d’euros. Cependant, elle n’a pas été revalorisée depuis cette date, alors que le rendement des abattements fiscaux a diminué.

Au total, 15 millions d’euros manqueront en 2025 pour atteindre le niveau de compensation cible de 174 millions d’euros. L’amendement que nous vous présenterons tout à l’heure tend à remédier à cette situation, et nous nous félicitons que le Gouvernement ait lui aussi pris cette initiative.

Enfin, j’attire votre attention sur le projet de fusion entre Atout France et Business France, annoncé par le Premier ministre lors de son discours de politique générale en octobre dernier. L’ambition du Gouvernement est de réaliser des économies budgétaires, notamment par une mutualisation du réseau à l’international de ces deux opérateurs.

Or les gains qu’est censée assurer cette fusion sont aujourd’hui très loin d’être démontrés. Cette réforme a été visiblement annoncée sans avoir été sérieusement préparée et sans que les acteurs concernés aient été consultés. Les missions d’Atout France et Business France ne se recoupent pas totalement.

Atout France dispose d’une compétence métiers, illustrée par son action de développement de l’offre touristique sur le territoire français. Une fusion précipitée des deux opérateurs pourrait conduire à un affaiblissement de cette offre et avoir des conséquences négatives en termes de retombées économiques pour le secteur du tourisme.

Par ailleurs, les suppressions d’effectifs au sein d’Atout France qui résulteraient d’une fusion pourraient impliquer des procédures de licenciement et reclassement coûteuses et source de difficultés juridiques. Vous l’aurez compris, madame la ministre, nous sommes très sceptiques sur l’intérêt de cette réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Antoinette Guhl applaudit également.)

Mme Sylviane Noël, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits relatifs à la consommation, au commerce, à l’artisanat et au tourisme connaissent eux aussi une diminution globale.

Les crédits relatifs à la consommation sont en légère hausse, en raison d’une dépense exceptionnelle liée au nouveau bail de l’école de formation des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Si l’on ne tient pas compte de cette mesure, les crédits sont en réalité en baisse de 3 % en autorisations d’engagement et de 11 % en crédits de paiement.

Pourtant, nous savons ici combien les missions de la DGCCRF sont plurielles. Ces dernières années, elles ont été considérablement étendues et concernent aussi bien la régulation des influenceurs et le contrôle des négociations commerciales de la grande distribution que la lutte contre le greenwashing. La DGCCRF s’est bien adaptée au développement de nouvelles pratiques de consommation. Il ne faudrait pas obérer ses efforts.

Je salue donc l’effort du Gouvernement, qui a déposé un amendement visant à augmenter d’un peu plus de 1 million d’euros les crédits de fonctionnement de la DGCCRF. En effet, ces crédits supplémentaires seront nécessaires pour mener à bien des chantiers de modernisation, notamment dans le domaine informatique, pour le suivi des enquêtes ou l’enrichissement des dispositifs de signalement SignalConso et RéponseConso.

Concernant l’artisanat, la commission des affaires économiques se félicitait l’an dernier du lancement de la stratégie nationale pour les métiers d’art, à laquelle 3,4 millions d’euros de crédits étaient consacrés. Cette stratégie ne bénéficie d’aucun crédit dans le PLF pour 2025. En particulier, le label « Entreprises du patrimoine vivant » serait tout bonnement supprimé, alors qu’il est la vitrine de l’excellence et des savoir-faire des artisans français à l’international. Les 1 500 entreprises labellisées sont connues du grand public et ont des savoir-faire exceptionnels. Je pense aux verres Duralex, aux chaussures Repetto ou à la porcelaine Degrenne, pour n’en citer que quelques-unes.

Si nous en restions aux 200 000 euros de crédits actuellement consacrés à la gestion du label, aucune nouvelle entreprise ne serait susceptible de bénéficier de ce dispositif l’année prochaine. Je rappelle que l’objectif fixé par le Gouvernement s’élevait initialement à 2 500 entreprises labellisées en 2025 !

En outre, j’ai été informée d’un risque financier en cas de rupture du marché public de gestion du label, d’un montant supérieur à celui qui est nécessaire à la préservation du label. La commission a donc adopté un amendement visant à augmenter de 1,3 million d’euros les crédits consacrés à la gestion du label « Entreprises du patrimoine vivant », afin de pérenniser le dispositif en 2025.

Des amendements identiques ont ainsi été déposés par mes collègues du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, par Mme Billon et par Mme Espagnac. Je vous invite à adopter ces amendements, afin de contribuer à mettre en valeur des centaines de pépites industrielles et artisanales qui constituent notre patrimoine commun et valorisent des savoir-faire uniques dans nos territoires.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos portera sur les crédits des postes, des télécommunications et de l’économie numérique.

Le plan France Très Haut Débit a démontré ses résultats. La France fait partie des pays les mieux raccordés à la fibre de l’Union européenne. Toutefois, l’objectif de généralisation de la fibre optique jusqu’à l’abonné d’ici à la fin de l’année 2025 ne sera vraisemblablement pas atteint.

En effet, le Plan France Très Haut Débit contribue très largement à l’effort national de redressement des finances publiques. Le PLF prévoit une baisse de 50 % des crédits qui lui sont alloués, alors qu’une part importante de crédits de paiement avait déjà été annulée au cours de l’année 2024.

Dans la situation actuelle, si un effort généralisé est bien évidemment nécessaire, nous ne pouvons pas pour autant laisser subsister de fortes inégalités territoriales, à l’exemple, madame la ministre, de ce qui se passe dans le département de Mayotte, seul département français à ne pas disposer de la fibre optique. Alors que des crédits supplémentaires avaient été adoptés l’an dernier sur l’initiative du Sénat, une grande partie a été annulée en gestion, empêchant ainsi le conseil départemental de lancer sa délégation de service public. La commission des affaires économiques vous propose donc de rétablir les crédits destinés à l’application de ce plan à Mayotte.

Concernant le maillage territorial de La Poste, sa pérennité est compromise par l’insuffisance de la compensation budgétaire versée au titre de la mission de contribution à l’aménagement du territoire.

Alors que le contrat de présence postale territoriale, négocié avec les maires et les présidents d’intercommunalité, prévoit un financement de 174 millions d’euros par an, la compensation budgétaire prévue pour 2025 est de 105 millions d’euros. À ce montant s’ajoute l’abattement fiscal prévisionnel de 55 millions d’euros dont bénéficie La Poste. Quelque 14 millions d’euros manquent donc pour atteindre le financement visé. Cette situation est préjudiciable aux commissions départementales de présence postale territoriale qui assurent le maintien des services de proximité en permettant aux élus locaux d’agir et de maintenir les bureaux de poste et les points de présence postale. Aussi, la commission des affaires économiques vous proposera un amendement tendant à rétablir ces 14 millions d’euros.

À la suite de l’assemblée générale de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), il y a quelques mois, le Gouvernement s’était engagé à abonder, au travers du projet de loi de fin de gestion, les crédits manquants pour 2024 à hauteur de 50 millions d’euros. Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer que cette promesse sera tenue ?

Enfin, la politique d’inclusion numérique, qui permet notamment de financer les 4 000 conseillers numériques déployés dans nos territoires, a montré son utilité. Depuis 2021, plus de 2 millions de personnes, souvent isolées et âgées, ont bénéficié de cet accompagnement, dans la droite ligne du projet de dématérialisation de 100 % des services administratifs dès demain.

Le dispositif de conseillers numériques se révèle opérationnel, efficace et essentiel. Il est important de le préserver, sans pour autant transférer des charges supplémentaires sur le budget des collectivités territoriales. Par conséquent, la commission des affaires économiques vous proposera d’adopter un amendement tendant à rétablir le budget de 2024.

Dans la mesure où ces trois amendements essentiels proposés par la commission des affaires économiques sont acceptés, nous vous proposons d’adopter ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Christian Redon-Sarrazy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la ministre, madame la présidente, mes chers collègues, à l’exception de ceux qui sont alloués à la compensation carbone, les crédits de politique industrielle prévus au sein de la mission « Économie » accusent une baisse d’environ 40 % par rapport à l’an dernier.

Cette réduction concerne tous les secteurs, dans un contexte de réduction du déficit public. Alors que la Cour des comptes vient de dresser un bilan sévère des politiques publiques en faveur de l’industrie au cours de la dernière décennie, la commission des affaires économiques souhaite avant tout la pleine efficacité des dispositifs d’aide en vigueur.

Cependant, je me demande si certains des coups de rabot administrés à la mission « Économie » n’arrivent pas à contretemps. Alors que la liste des fermetures d’usine s’allonge, est-il opportun de supprimer la ligne d’accompagnement à la restructuration et à la résilience des petites et moyennes entreprises (PME) ? Ce dispositif, très peu coûteux, a en effet permis, depuis sa création, de maintenir à flot plus d’un millier d’entreprises. Cette suppression est d’autant moins compréhensible que le Premier ministre annonce, au même moment, la création d’une task force interministérielle pour accompagner les entreprises en difficulté !

Dans une logique de bonne allocation des deniers publics, je m’interroge aussi sur la suppression des dispositifs d’accompagnement non financier des entreprises par Bpifrance, alors que les études scientifiques montrent pourtant qu’ils ont un effet très positif, et plus important, à montant égal, que les aides financières !

Je veux ensuite revenir sur un marronnier de notre discussion budgétaire. Nous risquons en effet de délaisser l’industrie que je qualifierais de « normale », celle qui n’est ni spécialement verte, ni spécialement innovante, celle qui n’a pas les moyens de répondre aux appels à projets de France 2030. Cette industrie irrigue pourtant les territoires, crée de l’emploi et revitalise les bourgs ruraux.

Ce budget prévoit ainsi de supprimer la part de financement de l’État des pôles de compétitivité, qui maillent l’ensemble de notre pays. Ce dispositif bénéficie particulièrement à nos PME, notamment en facilitant leur accès à la recherche appliquée et à l’innovation. Au nom de la commission des affaires économiques, je vous proposerai donc le rétablissement de cette part de financement. Nos politiques industrielles doivent en effet marcher sur deux jambes, à la fois celle de l’innovation, de la transition verte et de la numérisation, et celle des territoires.

Enfin, le Gouvernement a déposé un amendement visant à abonder la nouvelle ligne dédiée à la décarbonation de l’industrie à hauteur de 1,5 milliard d’euros. Nous nous félicitons de cette réorientation, car il s’agit d’un enjeu majeur pour l’industrie de demain, et c’est bien en milliards d’euros que se chiffreront les besoins pour les prochaines années. Les 50 millions d’euros prévus dans le texte initial faisaient, à cet égard, bien pâle figure. Nous souhaiterions cependant des précisions sur les actions concernées et leur suivi, mais aussi sur les modalités de financement de cette enveloppe.

Compte tenu de ces éléments, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Économie ». Ce n’est pas, vous vous en doutez, la position du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui votera contre ces crédits.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Sébastien Fagnen, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Madame la ministre, mes chers collègues, deux facettes de l’aménagement numérique de notre territoire ont particulièrement retenu l’attention de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Il s’agit, d’une part, des infrastructures de déploiement de la fibre optique, et d’autre part, des usages, en lien avec l’inclusion numérique de nos concitoyens.

J’évoquerai tout d’abord le déploiement de la fibre optique. Onze ans après le lancement du plan France Très Haut Débit, nous arrivons à la fin de ce marathon. Au premier semestre 2024, 89 % des locaux sont éligibles à la fibre optique, ce qui place la France, et nous pouvons nous en féliciter, dans le peloton de tête des pays européens.

À quelques kilomètres de l’arrivée, ce n’est pas l’heure de ralentir, surtout que les deniers raccordements seront les plus difficiles et les plus complexes à mettre en place. Malheureusement, c’est la direction que prend le Gouvernement dans ce projet de loi de finances.

Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, ce texte divise par deux le budget alloué au plan France Très Haut Débit, dont les crédits passent de 480 millions à 200 millions d’euros. Je déplore ce désengagement de l’État, qui oblige les collectivités territoriales à augmenter leur participation dans le déploiement des réseaux de fibre optique, alors qu’elles sont déjà fortement mises à contribution, à bien des égards, dans ce PLF.

Un territoire est particulièrement touché par ce coup de rabot. Il s’agit de Mayotte, qu’a évoqué Frédérique Espagnac précédemment, seul département français dans lequel le déploiement de la fibre optique n’a toujours pas commencé. La commission a donc adopté un amendement qui vise à augmenter les crédits du plan France Très Haut Débit de 37,6 millions d’euros, afin de remédier à cette regrettable situation.

J’en viens à la question de l’inclusion numérique. Pour répondre au phénomène d’illectronisme dans les territoires, des conseillers numériques France Services ont été recrutés dans le cadre du plan France Relance. Malheureusement, malgré les engagements pris par l’État à son lancement, ce dispositif rencontre déjà des contrariétés budgétaires. En effet, les crédits alloués au déploiement des conseillers passent de 41 millions d’euros en 2024 à 27 millions d’euros en 2025.

L’incompréhension face à cette baisse brutale des crédits est partagée par tous les acteurs du secteur que nous avons auditionnés. Le désengagement de l’État pourrait conduire des espaces France Services à abandonner, faute de financement suffisant, la mise à disposition de conseillers numériques. Or ceux-ci jouent un rôle pourtant essentiel auprès de nos concitoyens en situation d’illectronisme qui sont confrontés à la dématérialisation croissante des services publics. Je regrette que le Gouvernement n’ait pas pris la mesure du caractère primordial que revêt la pérennité de ce service.

Mes chers collègues, tant dans le déploiement de la fibre optique que dans notre politique d’inclusion numérique, nous devons plus que jamais continuer à lutter contre les fractures numériques.

Notre commission a émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits, avis qui, vous l’aurez compris, n’est pas partagé par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Olivier Rietmann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Rietmann. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis hier après-midi, nous savons que ce budget ne tient qu’à un fil, mais nous poursuivons son examen dans l’espoir qu’un miracle se produise.

Or je ne crois pas aux miracles, et je me satisfais encore moins de les attendre. (Mmes Silvana Silvani et Mme Cécile Cukierman ironisent.)

Pourtant, l’examen de cette mission me donne l’occasion de m’appuyer sur des arguments concrets pour tenter de convaincre les Français et – pardonnez ma crédulité – les députés que la censure du Gouvernement serait une erreur historique pour notre pays.

Les dirigeants d’entreprise, eux, l’ont bien compris. C’est la raison pour laquelle ils ont accepté, en grande partie, les efforts qui leur étaient demandés dans le projet de loi de finances pour 2025.

Lucides sur les conséquences de la gestion calamiteuse des finances publiques et conscientes des risques d’une dégradation des conditions d’emprunt, les entreprises ont besoin de visibilité et donc, d’un nouveau budget pour l’année à venir.

Il faut que nos collègues députés en soient conscients : la censure relèverait d’une irresponsabilité mortifère pour nos entreprises et pour notre pays. Une France sans budget, sans alternative et bientôt privée d’une partie de ses entreprises : sommes-nous bien conscients de ce qui nous attend ?

Les effets de l’incertitude politique et budgétaire se font déjà ressentir. Les taux d’emprunt de la France sur les marchés financiers ont plusieurs fois dépassé ceux de la Grèce. Le maintien de la notation de notre dette souveraine ne tient qu’au crédit accordé à l’actuel gouvernement pour réduire le déficit et redresser nos finances publiques. L’écart entre les taux d’emprunt français et allemand sur les marchés a atteint son plus haut niveau depuis 2012. La moitié des entreprises étrangères estime que l’attractivité du pays s’est dégradée. L’investissement est en panne.

Les entreprises, prises dans l’étau du remboursement des prêts garantis par l’État (PGE) et de la hausse des coûts contraints comme l’énergie ou les assurances, licencient. On dénombre plus de 3 200 suppressions de postes par semaine, dont 1 219 dans les seules entreprises de moins de dix salariés.

Ceux qui envisagent de censurer le Gouvernement doivent bien mesurer le poids de leur responsabilité, car ils semblent avoir oublié que la paralysie financière de la France retombera sur les entreprises, qui sont les seules à créer de la valeur.

Or c’est cette création de valeur qui permet de financer nos services publics et nos politiques publiques, et de débattre de la répartition des crédits au sein des différentes missions de la deuxième partie de ce projet de loi de finances.

Sans les entreprises, pas de salariés, donc pas de salaires nourrissant l’impôt sur le revenu et les cotisations patronales.

Sans les entreprises, pas de bénéfices, donc pas d’impôts sur les sociétés.

Sans les entreprises, pas de création de richesses en France, donc pas d’exportations pour combler le déficit abyssal de notre balance commerciale.

Sans les entreprises, nous n’aurons même plus les moyens de réaliser des arbitrages budgétaires ; nous n’aurons plus que le souvenir douloureux d’avoir eu un jour le choix de définir nos priorités de dépenses et d’avoir gâché notre chance de nous en sortir.

Initialement, j’avais prévu d’évoquer devant vous le financement des pôles de compétitivité et de soutenir notre commission des finances.

Initialement, je comptais vous parler également de la suppression dans le programme 134 d’une ligne budgétaire dotée de 100 millions d’euros dédiés au financement des actions d’accompagnement des entreprises de Bpifrance. Je souhaitais rappeler l’importance de ce métier d’accompagnement, devenu une activité très importante de Bpifrance, qui permet d’accélérer la transition énergétique et environnementale et la digitalisation des petites et moyennes entreprises (PME) françaises, les aidant ainsi à devenir des entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Or, aujourd’hui, du fait de l’éventuelle censure du Gouvernement, sans alternative pour le budget, l’enjeu ne sera même plus la croissance des PME. L’enjeu sera celui de leur survie.

Hier, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) l’a d’ailleurs clairement dit : « L’adoption d’une motion de censure signifierait l’ouverture d’une nouvelle période d’instabilité et un nouvel arrêt de l’économie qui tourne déjà au ralenti. […] La France et les Français, les entrepreneurs et les salariés, en paieraient lourdement le prix. Et nos entreprises seraient les premières victimes. »

Si la censure est votée, nous allons en effet nous priver de toute création de richesses à cause d’une conjuration des irresponsables. La paralysie qui s’annonce est le produit d’une coalition des contraires. À la surenchère fiscale dont les entreprises ont été la cible principale s’ajoute une irresponsabilité des forces politiques. Les seuls bénéficiaires seront les extrêmes. Les seuls vaincus seront nos compatriotes les plus précaires, qui ne pourront pas se protéger de la faillite publique. Citoyens et entreprises sont pris au piège des jeux politiciens du PS, du RN et de LFI.

Quel que soit le scénario envisagé ensuite, qu’il s’agisse de l’adoption du budget par ordonnance par le gouvernement démissionnaire ou de la reconduction du budget de 2024 par le truchement d’une loi spéciale, il nous sera impossible de redresser les finances publiques et de retrouver la confiance des marchés. Les investisseurs imposeront une prime de risque bien plus élevée. Le poids de la dette va asphyxier notre économie et, par conséquent, anéantir les marges de manœuvre dont nous disposions et dont nous avons débattu ensemble ici même.

Alors que notre pays a besoin de mesures fortes lui permettant de ne pas reculer, nous ne pouvons pas nous offrir le luxe d’une crise financière se surajoutant à la crise politique et d’une défiance généralisée de la part des marchés qui financent notre dette. Les entreprises qui créent la richesse indispensable à la prospérité de tous méritent mieux. Les Françaises et les Français méritent mieux. La France mérite mieux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)