M. Jean-Baptiste Lemoyne. Avec ma collègue Nicole Duranton, je propose aussi d’élargir l’assiette de la TTF aux transactions intrajournalières.
Dans l’étude très approfondie qu’il a présentée au conseil scientifique de l’Autorité des marchés financiers (AMF), l’économiste Gunther Capelle-Blancard juge envisageable cet élargissement. « Cela nécessite, dit-il, d’adapter le dispositif de recouvrement, mais cela ne peut que favoriser la transparence sur les marchés financiers. » Cet obstacle ne serait pas « insurmontable ». Et de conclure que « la TTF est un bon impôt moderne et efficace ».
Son assiette est certes déjà large, mais elle pourrait l’être encore plus. J’invite donc le Gouvernement à étudier cet amendement avec attention. Son adoption permettrait en effet de dégager 3 milliards d’euros de recettes supplémentaires.
Alors que le week-end s’annonce riche en débats, voilà des recettes qui pourraient se révéler utiles.
M. le président. L’amendement n° I-412 rectifié, présenté par MM. Bilhac et Daubet, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « de », sont insérés les mots : « l’exécution d’un ordre d’achat ou, à défaut, de » ;
b) Après le même alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Cette taxe s’applique également :
« 1° À l’ensemble des contrats mentionnés par l’article D 211-A du code monétaire et financier ;
« 2° Aux instruments financiers mentionnés aux points 4 à 10 de la section C de l’annexe 1 de Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers ;
« 3° Aux contrats mentionnés à l’article 39 du règlement (CE) 1287/2006 de la Commission du 10 août 2006 ; »
2° Au V, le taux : « 0,3 » est remplacé par le taux : « 0,6 ».
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. Christian Bilhac. Cet amendement vise à augmenter les recettes assises sur les transactions financières et à élargir l’assiette de la TTF aux transactions intrajournalières.
Cette mesure est doublement pertinente : le risque de contournement apparaît modéré et le ciblage des opérations intrajournalières vise les activités les plus spéculatives.
M. le président. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° I-461 est présenté par MM. Szczurek, Hochart et Durox.
L’amendement n° I-950 est présenté par Mme Carlotti, MM. Temal, Chantrel, Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Conway-Mouret, MM. Darras et Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Lurel, M. Vallet, Vayssouze-Faure et Marie, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon et Chaillou, Mmes Conconne et Daniel, MM. Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin, Jomier et Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, M. Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Tissot, Uzenat, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-1308 rectifié est présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° I-1337 est présenté par MM. Mellouli, Gontard, Dantec, G. Blanc et Dossus, Mme Senée, M. Benarroche, Mme de Marco, M. Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.
L’amendement n° I-1757 est présenté par MM. Patriat et Lemoyne, Mme Duranton, MM. Fouassin, Rambaud et Patient, Mme Cazebonne, MM. Buval, Buis et Iacovelli, Mme Havet, MM. Kulimoetoke, Lévrier et Omar Oili, Mmes Nadille, Phinera-Horth, Ramia et Schillinger, MM. Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au V de l’article 235 ter ZD du code général des impôts, le taux : « 0,3 % » est remplacé par le taux : « 0,5 % ».
L’amendement n° I-461 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° I-950.
Mme Isabelle Briquet. Cet amendement de repli a pour objet de porter le taux de la TTF à 0,5 %.
Il est important de rappeler que cette taxe présente la particularité d’être directement affectée à la solidarité internationale. Ainsi, près de 30 % des recettes de la TTF étaient affectées, en 2023, à l’aide publique au développement que notre pays consacre aux pays les plus vulnérables.
Ces fonds peuvent être utilisés à des fins humanitaires ; ils peuvent servir pour distribuer des vaccins ou bien encore pour financer des associations féministes partout dans le monde. Et croyez-moi, les besoins sont importants !
En augmentant à la fois le taux de la TTF et le plafond des sommes affectées à l’aide publique au développement au travers du fonds de solidarité sur le développement, il est possible de garantir une contribution équitable du secteur financier, tout en refusant de réduire l’effort consacré à la lutte contre la pauvreté, les inégalités et les crises sanitaires.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont, pour présenter l’amendement n° I-1308 rectifié.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement de repli vise à porter le taux de la TTF non pas à 0,6 %, mais à 0,5 %, ce qui revient à s’aligner sur le taux britannique. Au passage, permettez-moi de signaler qu’il ne s’agit pas d’un taux révolutionnaire, puisqu’il a été fixé par Margaret Thatcher…
Par ailleurs, comme l’a souligné ma collègue Isabelle Briquet, cette mesure permettrait de dégager des crédits supplémentaires pour la mission « Aide publique au développement », dont le budget pour 2025 baissera de 34 %.
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour présenter l’amendement n° I-1337.
M. Akli Mellouli. Rappelons quelques principes. La fraternité, pilier de notre engagement républicain, trouve une résonance universelle dans l’aide au développement.
Dans un monde marqué par des tensions géopolitiques croissantes, la France fait face à des défis majeurs sur la scène internationale, en particulier en Afrique. Les récents événements au Tchad et au Sénégal, symboles d’une érosion de notre influence, rappellent l’urgence de redoubler d’efforts plutôt que de céder à la tentation du repli.
Réduire notre aide au développement en ces temps troublés serait non seulement un renoncement, mais aussi un message de fragilité adressé à ceux qui aspirent à voir la France reculer dans le concert des nations.
L’aide au développement est bien plus qu’un moyen financier. Elle porte en elle une promesse de solidarité, une capacité à réparer les fractures complexes et à offrir un avenir partagé.
Il est impératif de redéfinir notre relation avec l’Afrique, en rompant avec les perceptions réductrices d’une politique migratoire punitive ou les restrictions de visas. Le continent attend de la France qu’elle offre une vision audacieuse et respectueuse, à la hauteur des attentes des nouvelles générations.
La France a encore tout pour rayonner. Son patrimoine linguistique, la francophonie, ses diasporas, l’aide au développement sont de véritables passerelles vers d’autres cultures et autant de forces à valoriser.
Bien utilisés, ces leviers permettront de redorer notre image, de renforcer nos alliances et de bâtir une relation fondée sur la coopération, l’échange et le respect mutuel. C’est par cette ambition empreinte de fraternité et d’humanisme que la France peut continuer à jouer un rôle moteur sur la scène internationale.
La TTF permet de défendre ces principes et de les réaffirmer sur la scène internationale.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour présenter l’amendement n° I-1757.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Il s’agit de porter le taux de la TTF de 0,3 % à 0,5 %.
Entre 2017 et 2022, sous l’impulsion du Président de la République, les crédits de la mission « Aide publique au développement » ont presque doublé, la hausse s’établissant à 96 %.
L’heure est désormais aux efforts budgétaires. Il nous faut donc trouver des relais, si nous voulons rester ambitieux dans ce domaine.
C’est pourquoi de nouvelles recettes seraient tout à fait bienvenues. Elles permettraient de générer près de 1,5 milliard d’euros, que nous pourrions flécher vers des actions bilatérales menées par l’Agence française de développement (AFD) ou encore vers un certain nombre de mécanismes multilatéraux auxquels la France participe, comme le Fonds mondial ou au Fonds vert pour le climat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Vous connaissez la jurisprudence qui est celle de la commission depuis un certain temps déjà : la taxe sur les transactions financières doit se penser d’abord au niveau européen.
Nous avons tout intérêt à nous préserver des divergences fiscales. Je rappelle d’ailleurs que, depuis le Brexit, la place financière de Paris est en concurrence avec celle d’Amsterdam pour constituer le principal pôle d’attraction financier européen.
Pour ces raisons, je suis défavorable à l’ensemble des amendements visant à augmenter le taux de la TTF.
Je ne suis pas plus favorable à son extension aux transactions intrajournalières, et ce pour trois raisons.
Premièrement, une telle mesure aurait une portée limitée compte tenu de l’exemption prévue par la tenue de marché.
Deuxièmement, elle serait complexe à mettre en œuvre, en raison des nouveaux mécanismes et des informations nécessaires.
Troisièmement, elle reposerait nécessairement sur des acteurs étrangers, ce qui ferait peser un risque sur la collecte effective de la taxe.
Enfin, les amendements identiques nos I-673 rectifié, I-951 rectifié bis et I-2041 rectifié bis ont été rectifiés pour que le recouvrement de la taxe soit désormais assuré par la DGFiP. Il serait ainsi mis fin à la collecte par Euroclear, qui était un de nos sujets de préoccupation récent. Nous voilà rassurés ! Cela étant, il est, de mon point de vue, inutile d’augmenter le taux d’une taxe que l’on ne peut pas recouvrer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Sur la forme, d’abord, je ne crois pas dire de bêtise – je ne l’ai pas vérifié – en rappelant que, depuis que la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) a été modifiée, le produit de la TTF n’est plus directement affecté à l’aide publique au développement, mais est reversé au budget général de l’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. On peut toujours faire de la tuyauterie !
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Pourvu qu’il n’y ait pas de fuite ! (Sourires.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Sur le fond, ensuite, je suis d’accord avec le rapporteur général. Monsieur Lemoyne, vous avez cité la période 2017-2022, que vous avez bien connue, puisque vous étiez alors membre du gouvernement : c’est à ce moment-là que la place financière de Paris est devenue attractive, à la suite du Brexit. Il faut donc faire attention ; c’est un point sensible : il ne faudrait pas qu’une hausse de la TTF casse, tant soit peu, cette dynamique post-Brexit.
Avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. J’entends les arguments du rapporteur général et du ministre. Pour autant, nous y croyons : nous souhaiterions que l’Assemblée nationale se prononce à son tour sur ces amendements.
Au regard de la pugnacité et de l’engagement dont a témoigné le rapporteur général à l’amendement précédent, sur les montages frauduleux CumCum, pourquoi ne pas mener là le même travail sur les obstacles techniques qu’il a invoqués ? Maintenant que nous avons quelques années de recul, nous savons qu’il est possible à la commission de proposer un dispositif consensuel qui puisse lever les craintes ou les doutes qui peuvent persister ici ou là.
En attendant, nous y croyons fort et nous voterons ces amendements.
M. Éric Jeansannetas. Excellente proposition !
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Monsieur le ministre, vous avez tout à fait raison : il n’existe plus de système de tuyauterie entre la TTF mise en place par Nicolas Sarkozy, au taux de 0,3 %, et l’aide au développement – c’est François Bayrou qui était à l’origine de ce fléchage. N’oublions pas le contexte historique : cette taxe avait été créée en raison de l’incapacité de l’Union de mettre en place une taxe européenne.
Monsieur le ministre, j’ignore si vous avez encore quelques liens avec le Président de la République, mais vous engagez-vous à répondre à la demande qu’il a formulée à deux reprises, cette semaine, à savoir ne pas réduire encore davantage le budget de l’aide publique au développement (APD) ? Vous engagez-vous à ne pas revenir sur ce qui était prévu dans le texte initial du projet de loi de finances et, donc, à ne pas présenter l’amendement tendant à réduire ses crédits de 640 millions d’euros supplémentaires, étant entendu que TTF et APD sont sans lien direct ?
Diminuer le montant de l’APD, ce serait rompre profondément avec tout ce que fait la France depuis vingt ans. Ce faisant, notre pays renoncerait à toute capacité de peser sur la régulation du monde, ce qui serait extrêmement grave.
Par ailleurs, pour en revenir à la TTF, 0,5 %, c’est le taux qu’appliquent les Anglais. Et, le moins qu’on puisse dire, c’est que la question de la concurrence entre places financières n’est pas étrangère aux préoccupations de la City. Par conséquent, si la place de Londres peut survivre à un tel niveau de taux, je ne vois pas bien pourquoi la place de Paris ne le pourrait pas !
Tout à l’heure, nous avons eu un long débat, très technique, sur l’un des amendements du rapporteur. Dans le cas d’espèce, notre proposition consistant à augmenter le taux de 0,3 % à 0,5 % est extrêmement simple à mettre en œuvre. Expliquez-nous pourquoi cet alignement de notre taux sur celui de la City affaiblirait la place de Paris dans sa concurrence avec la place de Londres ?
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, je ne voudrais pas vous ennuyer avec une question qui peut sembler être un détail, mais comment la taxe sur les transactions financières est-elle collectée ? Il me semble que c’est une société dénommée Euroclear, dont le siège est en Belgique, qui en est chargée. Or je ne suis pas certaine que tout soit très clair…
Ne serait-il pas possible, ainsi que le recommande, me semble-t-il, un rapport de la Cour des comptes, que ce soit la DGFiP qui collecte le produit de cette taxe, de manière que le processus soit tracé ?
Collecter, c’est bien, mais encore faudrait-il que la procédure de recouvrement soit un peu plus transparente et que nous disposions sur cette société Euroclear d’un peu plus de renseignements.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je pensais que M. le ministre répondrait à mon collègue Dantec…
Jetons un œil sur la suite du texte.
À l’article 28, il est question de proroger d’un an l’expérimentation des clubs de jeux à Paris ; ce n’est pas avec une telle disposition que nous allons pouvoir dégager des milliards supplémentaires ! L’article 27, quant à lui, comporte des dispositions relatives aux collectivités territoriales. Puis, très rapidement, nous en arriverons à l’article d’équilibre.
Aussi, quitte à être rabat-joie, je vous pose la même question que celle que je vous ai posée ce matin, monsieur le ministre : comment parvient-on à l’équilibre qu’avait initialement proposé le Gouvernement ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il faut attendre la fin !
M. Grégory Blanc. Va-t-il falloir procéder à des coupes budgétaires supplémentaires, ou bien le déficit va-t-il s’en trouver aggravé ? Cette question mérite une réponse.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur le sénateur Dantec, 0,3 % ou 0,5 % ? C’est un choix politique et vous vous prononcerez souverainement par votre vote.
Ce n’est pas tant à la place de Londres qu’aux places de Francfort ou d’Amsterdam qu’il faut se comparer, places qui sont situées dans la zone euro. Veut-on que la place de Paris soit plus attractive que les autres pour les transactions financières ? Une place financière forte non seulement attire les transactions, mais offre également des externalités et des services, notamment pour le financement des entreprises. Il est important de le souligner et de faire preuve de vigilance à ce sujet.
Telle est la position du Gouvernement ; après, il vous appartiendra de faire un choix.
Par ailleurs, le rendement d’une taxe dépend de son assiette. Dans le cas de la TTF, je suis méfiant, car je crains que celle-ci ne soit très volatile, ce qui est la nature même des transactions sur les marchés de capitaux.
Ma conviction, c’est que vous risquez d’être déçu du produit d’une TTF dont le taux aurait été augmenté, sans compter que, auquel cas, la place financière de Paris perdrait de sa puissance de frappe.
La question du montant des crédits consacrés à l’APD a fait l’objet d’un arbitrage. Lors de l’examen, en seconde partie, des missions budgétaires, le Gouvernement proposera, par voie d’amendements, des réductions de crédits, y compris ceux de l’APD. Nous l’assumons en toute transparence : la baisse de la dépense publique est le premier vecteur du redressement de nos comptes publics.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-673 rectifié, I-951 rectifié bis et I-2041 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Ce que vient de dire M. le ministre est d’une extrême gravité : c’est la remise en cause de tout ce que la France a fait depuis vingt ans, notamment lorsqu’elle avait à sa tête de grands présidents de droite, qui ont toujours été extrêmement attentifs à notre action en matière de solidarité internationale.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. « Surtout » quand elle avait à sa tête ces présidents de droite !
M. Ronan Dantec. « Surtout », dit notre collègue Lemoyne…
Monsieur le ministre, les crédits les plus attaqués dans votre projet budgétaire, c’est l’aide publique au développement. Et de très loin ! Ce ne sont pas uniquement les crédits destinés à financer le développement d’infrastructures avec les Chinois qui sont concernés, tant s’en faut ; les crédits les plus affectés, ce sont ceux du programme 209 « Solidarité à l’égard des pays en développement », gérés, au titre de l’aide bilatérale, par le ministère des affaires étrangères.
Je le répète, c’est d’une extrême gravité !
Il ne suffit pas de dire qu’il faut redresser les comptes de la Nation ; la question est de savoir où portent les efforts – nous faisons de la politique. Dans le cas d’espèce, vous opérez ce redressement au prix de la capacité de la France de participer à la régulation internationale. Et le monde nous observe.
Mes chers collègues, votons tous ensemble les amendements qui tendent à augmenter le taux de la TFF de 0,3 % à 0,5 %. Faisons ce premier pas, avant que nous ne trouvions par la suite une solution de compromis. Et je doute que cette hausse mette en difficulté la place de Paris : ce sont toujours les mêmes arguments qu’on nous ressert pour ne pas avancer.
Nous devons signifier très clairement que nous refusons que la France renonce à sa capacité de participer à la solidarité et à la régulation internationales et que l’une et l’autre soient sacrifiées dans le budget de la Nation.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-950, I-1308 rectifié, I-1337 et I-1757.
(Les amendements sont adoptés.) – (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Sophie Briante Guillemont applaudit également.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 26.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° I-135 rectifié bis est présenté par M. Mandelli, Mme Gosselin, M. Bas, Mmes Josende et Havet, MM. Burgoa, P. Martin et D. Laurent, Mme Imbert, M. Rapin, Mme Hybert, MM. Somon et Sol, Mme Dumont, MM. Brisson, Bruyen et Genet, Mmes Petrus et Demas, M. Chaize, Mme P. Martin, M. Gremillet, Mme Lassarade, MM. Perrin, Rietmann, Piednoir et de Nicolaÿ, Mme Micouleau et MM. Panunzi, Belin et Naturel.
L’amendement n° I-927 rectifié est présenté par MM. M. Vallet, Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-1373 rectifié bis est présenté par Mmes Billon, Housseau, Morin-Desailly, Saint-Pé et Tetuanui et MM. Cambier, Courtial, Delcros, Fargeot, Longeot, Menonville et Bleunven.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre II de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un chapitre II ter ainsi rédigé :
« Chapitre II ter :
Taxe sur les exploitants de plateformes de locations touristiques de courte durée.
« Art. 301. – I. – Est instituée une taxe due à raison des sommes encaissées par les entreprises de mise en relation des personnes par voie électronique en vue d’une location touristique de courte durée, au sens de l’article L 324-1-1 du code du tourisme, en contrepartie de la fourniture sur les communes littorales en France au sens de l’article L. 321-1 du code de l’environnement, au cours d’une année civile, des services définis au II.
« II. – Les services taxables sont la mise à disposition, par voie de communications électroniques, d’une interface numérique qui permet aux utilisateurs d’entrer en contact avec d’autres utilisateurs et d’interagir avec eux, notamment en vue d’une location de biens situés sur les communes littorales au sens de l’article L. 321-1 du code de l’environnement.
« Art. 301 bis. – I. – Le fait générateur de la taxe prévue à l’article 300 bis est constitué par l’achèvement de l’année civile au cours de laquelle le service de mise en relation mentionné au même article 300 bis est fourni en France. Toutefois, en cas de cessation d’activité du redevable, le fait générateur de la taxe intervient lors de cette cessation. Le redevable de la taxe est la personne qui exploite le service de mise en relation. La taxe devient exigible lors de l’intervention du fait générateur.
« II. – Les entreprises mentionnées au I sont celles, quel que soit leur lieu d’établissement, pour lesquelles le montant des sommes encaissées en contrepartie des services taxables lors de l’année civile précédant celle mentionnée au même I excède les deux seuils suivants :
« 1° 750 millions d’euros au titre des services fournis au niveau mondial ;
« 2° 25 millions d’euros au titre des services fournis en France, au sens de l’article 301 bis.
« Pour les entreprises, quelle que soit leur forme, qui sont liées, directement ou indirectement, au sens du II de l’article L. 233-16 du code de commerce, le respect des seuils mentionnés aux 1° et 2° du présent III s’apprécie au niveau du groupe qu’elles constituent.
« Art. 301 ter. – Pour l’application du présent chapitre :
« 1° La France s’entend du territoire national, y compris les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, la Nouvelle-Calédonie, à l’exception des terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton ;
« 2° Les encaissements versés en contrepartie de la fourniture d’un service taxable défini au I de l’article 301 s’entendent de l’ensemble des sommes versées par les utilisateurs de cette interface.
« Art. 301 quater. – I. – La taxe est déclarée et liquidée par le redevable aux dates déterminées par un arrêté du ministre chargé du budget. La périodicité des déclarations et des paiements est au plus mensuelle et au moins annuelle. En cas de cessation d’activité du redevable, le montant dû au titre de l’année de la cessation d’activité est établi immédiatement. La taxe est déclarée, acquittée et, le cas échéant, régularisée selon les modalités prévues pour la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable ou, à défaut, dans les soixante jours suivant la cessation d’activité.
« II. – La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.
« III. – Lorsque le redevable n’est pas établi dans un État membre de l’Union européenne ou dans l’un des États mentionnés au 1° du I de l’article 289 A, il fait accréditer auprès du service des impôts compétent, dans les conditions prévues au IV du même article 289 A, un représentant assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée établi en France, qui s’engage à remplir les formalités au nom et pour le compte du redevable et, le cas échéant, à acquitter la taxe à sa place.
« Art. 301 quinquies. – I. – La taxe prévue à l’article 301 est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée des sommes encaissées par le redevable, lors de l’année au cours de laquelle la taxe devient exigible, en contrepartie d’un service taxable fourni en France.
« II. – Le montant de la taxe est calculé en appliquant à l’assiette définie au I du présent article un taux de 1 %. »
La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l’amendement n° I-135 rectifié bis.