M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

M. Christopher Szczurek. « Arrêtez d’emmerder les Français ! Il y a trop de lois dans ce pays, on en crève, laissez-les vivre, et vous verrez ça ira beaucoup mieux. » Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette déclaration du président Pompidou résonne aujourd’hui, je le crois, avec une particulière acuité, compte tenu de l’objet du texte que nous sommes appelés à voter.

En effet, devant les nombreuses difficultés que connaît notre pays, le poids toujours grandissant et handicapant des normes sur l’activité économique, sur les ménages et particulièrement sur les collectivités apparaît comme une tare, tare qui trouve malheureusement souvent son origine dans l’activité du législateur.

Parmi toutes nos difficultés, c’est un problème sur lequel le Parlement peut et doit se mobiliser. Au regard de l’ambition que traduit l’intitulé du projet de loi et des attentes de nos entreprises, nous ne pouvions que nous réjouir que le Gouvernement emboîte enfin le pas au Sénat dans son effort continu de simplification du droit.

Selon l’OCDE, le poids des normes engendre un coût de près de 3 % du PIB. Il condamne souvent l’initiative et pose un véritable problème de compétitivité.

Ainsi, nous vous rejoignons sur le constat et nous saluons la nécessité d’y apporter des réponses.

Je serai moins positif quant aux résultats de ce texte. À la place d’une simplification normative de la vie économique, nous devons voter un texte fourre-tout : évoquons, outre la facilité d’installation des débits de boissons, la construction d’infrastructures de télécommunications, la lisibilité de la commande publique ou encore, plus étonnant, une énième facilité législative pour les énergies prétendument renouvelables.

Sur ce dernier point, nous ne pouvons que nous montrer circonspects. Le déploiement des éoliennes est soutenu depuis des années par un lobby et certaines familles politiques et nous ne comprenons pas la présence dans ce texte de dispositifs nouveaux. D’ores et déjà, dans nombre de territoires, dont le mien, les éoliennes se sont beaucoup développées grâce à des dispositifs et des pressions sans cesse plus importantes, ainsi que des financements de plus en plus massifs, comme on peut le voir dans le projet de loi de finances pour 2025.

En quoi une loi de simplification économique devrait-elle encore soutenir ce secteur que l’on ne peut pas considérer comme lesté de normes ou de blocages trop grands ?

De plus, les dispositions introduites pour faciliter la recherche scientifique soulèvent des questions de bioéthique. Nous nous interrogeons par ailleurs sur la présence de telles dispositions dans un texte censé se limiter à la simplification de la vie économique et de son lien avec les collectivités et la commande publique.

Nous formons toujours le vœu que les bonnes lois chassent les mauvaises, mais, en l’occurrence, il nous est difficile de dire si le résultat est au niveau des exigences de l’instant.

Nous nous grandirions à systématiser l’effort de simplification. Celui-ci doit être réfléchi et mis en œuvre en lien avec les acteurs concernés, en construisant des textes portant sur des domaines précis et non des législations aux objectifs trop nombreux, ce qui nuit à leur acceptation.

Si nous sommes partisans de l’idée de simplification, nous ne pouvons soutenir un texte qui contient trop de dispositions inopportunes. Aussi, nous voterons contre ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, voter une loi de simplification est un projet ambitieux qui sonne comme un oxymore.

M. Marc-Philippe Daubresse. Après les allitérations, les oxymores ! (Sourires.)

M. Emmanuel Capus. Lors de l’examen du texte, plus de 1 000 amendements ont été déposés. C’est une démonstration certaine de notre engouement à simplifier la vie des entreprises comme celle de nos concitoyens, qu’ils soient entrepreneurs ou élus locaux.

Ce texte atteint-il son objectif ? Sans doute s’en est-il rapproché, mais il reste encore beaucoup à faire. Ce projet de loi est le dernier des volets législatifs de la démarche de simplification lancée par l’ancienne majorité présidentielle. Il s’inscrit dans la dynamique de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte), de la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (Asap) ou encore de la création d’un droit à l’erreur – autant d’initiatives saluées par nos concitoyens.

Les formalités administratives, véritable patrimoine culturel de notre pays, sont devenues trop nombreuses et trop pesantes. Elles paralysent l’activité de nos compatriotes. Les experts estiment que la complexité normative nous coûte chaque année 3 points de PIB.

Parlementaires, professionnels du droit ou encore entrepreneurs, nous nous accordons tous pour dénoncer l’inflation normative. Même l’administration finit par s’y perdre. En vingt ans, mes chers collègues, le volume des lois et décrets en vigueur a plus que doublé.

Dans ces conditions, nous ne pouvons que soutenir la simplification des régimes de déclaration et d’autorisation. Il en va de même pour le développement de la procédure de rescrit. Ces simplifications sont utiles pour sécuriser la vie de nos concitoyens.

Aussi, nous ne pouvons que regretter que les habilitations correspondantes n’aient pas été maintenues, mais ce que nous regrettons plus encore, c’est que la complexité de notre droit rende, par exemple, le rescrit si nécessaire.

Parallèlement aux travaux menés pour développer notre droit, nous devons faire en sorte de le rendre plus visible et plus simple. Ce projet de loi contient plusieurs mesures pour y parvenir : des relèvements de plafond, notamment en matière de concentrations des entreprises, pour permettre à nos services de se focaliser sur les cas les plus problématiques, des délais mieux encadrés et raccourcis, ou encore plusieurs dérogations visant à retrouver plus de souplesse, notamment en matière de marchés publics.

Nous devons toutefois veiller à ne pas multiplier les dérogations. Sans nous prononcer sur leur bien-fondé, force est de constater qu’elles accroissent le volume de nos lois. De dérogation en dérogation, certes, nous simplifions la vie des personnes éligibles, mais nous complexifions nécessairement notre corpus de normes.

M. Emmanuel Capus. On reconnaît la qualité d’une règle au faible nombre de ses exceptions.

Rien que sur les sept dernières années, le volume du droit en vigueur a augmenté de plus de 20 %. Nous devons être attentifs à mieux légiférer afin de moins légiférer.

Des principes simples peuvent faire gagner du temps à chacun. L’un d’entre eux est que le silence gardé par l’administration vaut acceptation de la demande. Des dispositions réglementaires ont, hélas, trop strictement encadré l’application de ce principe, allant jusqu’à le renverser.

Nous nous félicitons donc de l’adoption de l’article 3 bis, issu du travail de Dany Wattebled et défendu par le groupe INDEP. Il devrait permettre davantage de simplicité, ainsi qu’une meilleure économie de moyens.

Simplifier, c’est aussi être à l’écoute de nos entreprises et de nos territoires. Jean-Luc Brault a eu l’occasion de mettre en lumière des lacunes dans l’exécution des contrats de sous-traitance lorsque le sous-traitant est placé en redressement judiciaire. En votant son amendement, le Sénat a raccourci les délais de remplacement du sous-traitant défaillant pour permettre au plus vite la reprise des chantiers.

Certains parmi nous ont mis en doute le caractère simplificateur des dispositions de ce texte. Nous comprenons leurs inquiétudes, mais nous savons que l’effort de simplification est un travail de longue haleine. Il ne suffit pas d’abroger les dispositions obsolètes ou de dissoudre les comités qui n’ont pas d’activité réelle. Encore faut-il s’abstenir de les créer.

C’est en amont que le législateur doit se préoccuper de l’inflation normative. Antoine de Saint-Exupéry disait : « La perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer. » Nous devons nous inspirer de cet aphorisme en évitant de concentrer l’action publique sur la création de normes.

Cela implique de bannir les lois d’émotion, de veiller à la concision et à la clarté de nos normes. En prenant davantage le temps pour légiférer, donc en légiférant moins, nous pourrons améliorer la qualité de nos travaux, ainsi que leur durabilité.

Au-delà de ses désagréments et de son coût financier, l’inflation normative est dangereuse : elle affaiblit nos institutions. Nous croulons sous les quelque 354 000 articles de lois et décrets en vigueur.

« On reconnaît la décomposition d’un État à la surabondance de ses lois », nous dit Tacite. Nous devons donc absolument réduire et simplifier notre droit.

D’autres textes de simplification devront suivre. Le texte que nous allons voter améliore nécessairement le processus même de création de la loi, en tenant davantage compte du poids des normes sur l’activité de nos entreprises.

Nous savons, madame la ministre, monsieur le ministre, que votre gouvernement est attaché à l’objectif de simplification. Nous vous soutiendrons dans cette voie. Le groupe Les Indépendants votera donc sans réserve en faveur de l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.)

M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous devions procéder au vote solennel du projet de loi de simplification de la vie économique au Sénat le 11 juin dernier. Après une constructive et pragmatique discussion des articles dans cet hémicycle, un large consensus se dégageait. En prononçant la dissolution de l’Assemblée nationale, le Président de la République en a voulu autrement.

Je le rappelle, nous n’avions eu que trois semaines pour préparer l’examen de ce texte. En revanche, il nous aura fallu quatre mois pour, je l’espère, le voter. Je l’espère, car, dans cet intervalle lié aux aléas de notre vie politique, les problèmes de complexité administrative et de normes ont continué à se poser.

Ce texte a été annoncé comme l’un des piliers de la stratégie française présentée à l’Union européenne. Il est encore plus nécessaire aujourd’hui pour libérer la croissance, dans une période marquée par l’état préoccupant de nos finances publiques.

Naturellement, je veux saluer le travail de mes collègues rapporteurs, Catherine Di Folco et Yves Bleunven, ainsi que l’apport d’Olivier Rietmann, président de la délégation sénatoriale aux entreprises. Je veux enfin remercier les personnels du Sénat, qui ont travaillé, comme nous, dans l’urgence.

Comme nous en avions fait le constat, le projet de loi, très diversifié dans son contenu, s’appuie sur de nombreux travaux conduits par le Sénat. En adoptant 91 amendements en commission et 101 en séance, la Haute Assemblée l’a encore modifié, précisé et complété. Nous pensons qu’il constitue une base solide pour les futures discussions à l’Assemblée nationale.

Je l’ai dit à l’ancien ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et je vous le redis, monsieur le ministre : nous avons relevé le défi de la simplification sans renoncer à exercer notre mission de législateur.

Nous avons approuvé plusieurs des mesures du texte, notamment une disposition visant une meilleure évaluation des normes à venir que nous avons complétée en reprenant le texte adopté au mois de mars dernier par le Sénat, sur l’initiative d’Olivier Rietmann. Le test PME est une mesure essentielle pour gérer le flux des normes. Nous y sommes particulièrement attachés.

En ce qui concerne le stock de normes, nous savions que nous ne pouvions pas tout traiter dans ce texte, mais nous avons tout de même permis des avancées sur plusieurs sujets qui touchent le quotidien des entreprises, notamment l’accès à la commande publique et la soumission aux marchés publics. Nous avons ainsi aménagé le seuil de dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence. Nous avons également souhaité faciliter les relations avec les assurances, ainsi que la transmission des TPE et PME. Nous avons voulu sur ces points aller au bout de la logique de simplification.

Notre volonté de rester au plus près du quotidien des entreprises s’est traduite par l’adoption de mesures de simplification de la vie des commerçants, telles que la mensualisation des loyers commerciaux, l’encadrement du montant et du délai de restitution des dépôts de garantie et les mesures d’assouplissement de la politique d’aménagement commercial. Nous avons aussi adopté une mesure favorisant la réouverture de commerces de proximité dans les petites communes, la ruralité étant encore trop souvent oubliée dans les mesures de simplification de la vie économique.

Nous avons en outre complété les dispositions relatives aux secteurs de la banque et des assurances, afin de rééquilibrer le rapport de force entre assureurs et assurés au bénéfice de nos entreprises.

Enfin, nous avons complété les mesures de simplification de la compensation de la biodiversité, une attente très forte des acteurs de nos territoires.

Parmi les différents secteurs d’activité concernés par ce projet de loi, trois ont suscité d’importants débats.

Tout d’abord, dans le secteur des télécommunications, si les mesures proposées n’ont pas grand-chose à voir avec la simplification, elles permettent tout de même de mieux lutter contre la spéculation foncière sur les emplacements d’antennes relais.

Ensuite, dans le secteur de l’énergie, la commission spéciale a souhaité apporter son soutien à la plupart des mesures de simplification du droit minier, ainsi qu’au déploiement d’installations de production d’énergies renouvelables, en cohérence avec les travaux menés sur les enjeux de notre future programmation énergétique.

Enfin, en matière d’urbanisme et de déploiement de projets industriels et d’infrastructures stratégiques, les travaux de la commission spéciale sont utilement complétés par ceux du groupe de suivi sénatorial sur l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN) à l’épreuve des territoires.

Lors de nos débats, nous avons cherché la plus grande efficacité et accepté que ce projet de loi s’insère dans un ensemble. Nous n’avons donc pas abordé la simplification dans le domaine agricole ou dans le logement, bien que les attentes soient nombreuses en la matière, car nous attendons les textes spécifiques sur ces secteurs. Les besoins sont urgents, madame la ministre, monsieur le ministre, et le Sénat souhaite pouvoir rapidement s’en emparer.

Nous avons en revanche refusé les mesures présentées comme des simplifications, mais qui n’en étaient pas. C’est le cas des dispositions relatives aux bulletins de paie.

Par ailleurs, le Gouvernement prévoyait trop souvent le recours à des ordonnances larges et floues pour des mesures de portée générale, ce qui aboutissait à dessaisir le Parlement de ses compétences.

On nous a annoncé un rendez-vous annuel de simplification. Peut-être est-ce plus difficile aujourd’hui. On nous a aussi promis que l’administration travaillerait à la simplification des normes légales et réglementaires et procéderait aux concertations nécessaires. Je pense que ce travail a été entamé, il doit se poursuivre. Les conclusions devront être présentées au Parlement.

Si des mesures précises sont adoptées à l’Assemblée nationale, et non par ordonnance, nous les examinerons avec intérêt.

Dans l’ensemble, nous avons tenté de faire œuvre commune et d’entamer une démarche pour les lois de simplification à venir. Ce texte doit poursuivre son parcours à l’Assemblée nationale, où nous espérons que les apports du Sénat seront conservés. Nous souhaitons même qu’il soit enrichi dans les limites du périmètre constitutionnel.

Nous sommes prêts à travailler avec vous, monsieur le ministre, pour préparer au mieux les débats à venir. En attendant, le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Nadège Havet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 16 octobre, France Info titrait : « Avec 74 codes juridiques et 1 800 formulaires Cerfa, la simplification administrative, c’est compliqué. » Très juste !

Simplifier, dans un pays légicentriste comme la France, c’est difficile. Cela n’en reste pas moins nécessaire.

Pour aboutir aux explications de vote sur ce texte et à sa mise aux voix, il nous aura fallu un peu plus de temps qu’initialement prévu, mais, réjouissons-nous, cet allongement du délai n’a pas été causé par une lourdeur administrative… (Sourires.)

Avec plus de 400 000 normes, la France se classe au deuxième rang des pays où la bureaucratie est la plus complexe. C’est un constat qu’il faut savoir affronter et qui doit aussi nous interroger, nous, législateurs, dans nos pratiques. Peut-être faudra-t-il apprendre à forcer notre nature pour lutter contre cette autre forme d’inflation. Oui, il nous faut simplifier, mais simplifier sans déréguler, simplifier sans recomplexifier. Appliquons déjà les règles existantes, et ce de façon homogène ; expliquons les règles que nous adoptons à ceux à qui elles sont destinées avant de faire le procès de leur mauvaise mise en œuvre, voire de leur absence de mise en œuvre.

Je le rappelais en séance publique, voilà quatre mois, le coût des normes est estimé à 84 milliards d’euros par an, soit 3 % du PIB. L’excès de normes et leur complexité pèsent négativement sur l’activité de nos entreprises, mais il a une autre conséquence : elles créent de la désespérance chez les travailleurs et de la défiance par rapport à notre travail de parlementaires.

« Il faut arrêter de légiférer sans cesse », « Vous adoptez une norme qui vient en remplacer une autre que l’on n’a pas encore eu le temps d’appliquer », « La loi, ça allait, mais, à la fin, on ne comprenait plus rien à la circulaire » : voilà un florilège de ce que j’ai pu entendre lors d’auditions préalables et dans le cadre d’une consultation menée au début de l’année dernière. Chers collègues, il est urgent que nous passions d’un principe de contrôle à un principe de confiance. Cette démarche, positive, se matérialise aujourd’hui en partie dans ce texte, largement amendé et coconstruit, que nous nous apprêtons – je le souhaite – à adopter.

Ce texte constitue la deuxième étape du travail parlementaire entrepris ces dernières années afin de systématiser la démarche de simplification de la vie économique. En effet, il fait suite à la proposition de loi du président de la délégation sénatoriale aux entreprises, Olivier Rietmann, sur les tests PME, qui a été intégrée au projet de loi par voie d’amendement. L’objectif est d’évaluer la faisabilité de la mise en œuvre concrète de nouvelles mesures ayant un impact sur les entreprises, toute disposition jugée démesurée au regard des objectifs visés devant être adaptée. Nous sommes très favorables à l’organe consultatif créé à cette fin.

La simplification annoncée du bulletin de paie, qui n’était pas souhaitée, a été supprimée, de même que n’a pas été maintenu le dispositif d’information des salariés en cas de cession de l’entreprise. Sur le premier point, nous pensons qu’il sera préférable d’aboutir à une clarification par voie réglementaire et non législative, mais nous estimons qu’il est indispensable de porter à la connaissance du salarié le détail de la rémunération et des cotisations versées.

Sur l’article 6, le groupe RDPI a défendu un compromis, « une voie médiane entre la suppression pure et simple du droit d’information préalable et le statu quo », ainsi que l’avait souhaité Olivia Grégoire, en pointant par ailleurs le « risque d’inconventionnalité ».

La volonté d’accroître la maîtrise des élus locaux sur leur foncier s’est également manifestée lors de nos débats. Nous avons ainsi traité des zones commerciales, notamment pour faciliter les opérations de requalification en permettant un déplacement temporaire d’une activité commerciale le temps des travaux. Par ailleurs, l’adoption de plusieurs amendements a permis de conforter l’obligation faite aux opérateurs téléphoniques de privilégier des solutions de partage de sites et de pylônes radioélectriques afin de ne pas multiplier les implantations. Nous avons également œuvré, le groupe RDPI en particulier, sur la commande publique, le seuil de dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence pour les marchés de travaux étant définitivement relevé à 100 000 euros. L’objectif, avec cette dernière mesure, est de favoriser l’accès des PME aux marchés publics.

Il a également été prévu de faciliter le recours aux variantes techniques et environnementales pour les marchés publics.

Enfin, de nouvelles possibilités de dérogation au plan local d’urbanisme (PLU) ont été ouvertes par voie d’amendement, l’objectif étant d’étendre le champ d’application de l’article prévu dans le texte aux installations collectives de production de réseaux de chaleur et de froid et aux revêtements réflectifs innovants sur les toitures.

Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a martelé son intention de reprendre le chantier de la simplification. Madame la ministre, monsieur le ministre, nous partageons cette volonté et nous souhaitons que ce texte soit rapidement inscrit à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de nos travaux dans le cadre de la semaine réservée par priorité au Gouvernement est une décision respectueuse du travail réalisé durant plusieurs semaines par les rapporteurs, que je salue, par notre commission spéciale et en séance publique.

Ce projet de loi m’inspire deux séries de remarques, sur le fond et sur la méthode.

Sur le fond, d’abord, et à titre personnel, je tiens à souligner que ce texte comporte une majorité de mesures qui me semblent pertinentes et bienvenues pour le monde économique. Et pour cause, le travail législatif mené par le gouvernement d’alors et par notre assemblée a laissé une large place aux propositions des entreprises pour simplifier leur activité.

Une fois encore, le groupe RDSE s’est engagé dans une démarche constructive, avec de nombreux amendements de consensus adoptés par notre assemblée. Je rappelle notamment les amendements défendus par Raphaël Daubet et Nathalie Delattre, qui visent à faciliter les formalités déclaratives pour bénéficier d’un taux réduit de TVA en matière de travaux.

Je salue également l’initiative d’Éric Kerrouche, qui a été à l’origine d’un amendement transpartisan tendant à généraliser l’expérimentation du recours à un prestataire pour les opérations de recensement de la population. Et j’en passe…

Je veux surtout insister sur l’importance des dispositions qui visent à faciliter les rapports entre les entreprises et l’administration. C’était notamment l’objet d’une recommandation de la mission flash relative aux entreprises face à la pénurie le foncier économique, dont j’étais le rapporteur avec Christian Klinger.

Le principe du silence valant acceptation va dans le bon sens, tout comme le renforcement de la médiation pour un règlement des litiges plus rapide et moins dispendieux ou l’augmentation du corps des juges des référés par l’intégration de magistrats honoraires pour accélérer le traitement des requêtes.

Sur le fond, ensuite, je n’ai émis lors de nos débats que certaines réserves à l’égard de dispositions qui se retrouvent dans la version finale.

J’ai alerté sur l’atteinte, à mon sens disproportionnée, aux droits des soumissionnaires des marchés de la commande publique introduite par l’article 16. Il me semble en effet contre-productif, pour un texte qui a pour ambition de stimuler l’économie, d’adopter une disposition qui handicape les TPE et les PME.

J’ai également alerté sur l’article 6, qui réduit l’information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise. La simplification en la matière ne doit pas être moins disante au regard des droits des salariés.

Je tiens aussi à mettre l’accent sur la nécessité d’évaluer certaines dispositions, une fois qu’elles seront entrées en vigueur. Je pense au rehaussement du seuil d’exonération de toute publicité et de mise en concurrence pour les marchés de travaux inférieurs à 100 000 euros.

Dans le même esprit, je m’interroge sur la pertinence d’adopter les dispositions de remise en cause du ZAN. Manifestement, le dispositif législatif, tel qu’il a été adopté, puis modifié par le Parlement, n’est toujours pas abouti. Légiférer maintenant, alors que le groupe sénatorial de suivi vient de rendre un rapport d’information appelant à des modifications et que M. le Premier ministre a promis de nouveaux assouplissements, me paraît justement contraire à l’objectif de simplification.

Il est indispensable, en toute matière, de coconstruire une solution globale, complète et durable, qui puisse sécuriser juridiquement ce dispositif et apporter de la sérénité aux acteurs.

Cela me conduit à des remarques de forme.

La simplification correspond à une attente de longue date et absolument légitime du monde économique, qui souhaite être protégé de l’accessoire normatif susceptible d’entraver la bonne marche des entreprises. C’est pourquoi la simplification législative est un travail si complexe, qui suppose d’abord d’identifier l’essentiel.

Néanmoins, cette démarche simplificatrice n’implique pas forcément en elle-même une révision de l’esprit des lois simplifiées. Voilà pourquoi Michel Barnier a déclaré avec justesse que tous les progrès en matière de simplification ne passaient pas par la loi, l’exécution des normes étant le plus souvent à l’origine de la complexification.

Aussi, il est indispensable de capitaliser sur l’existant. Les années passées, de nombreuses lois dites de simplification ont eu pour conséquence in fine une augmentation du corpus de normes.

La temporalité législative est souvent décalée par rapport à la vie des entreprises, quelle que soit la nature de ces dernières : qu’ils soient dirigeants de petite ou moyenne entreprise, agriculteurs, artisans, commerçants, tous sont des entrepreneurs qui ont eu le courage de s’engager dans cette voie au prix de nombreux risques.

Le texte ne se borne pas à simplifier. Le réduire à cela conduit nécessairement à dépolitiser les choix que nous avons opérés et brouille ainsi le discours que nous défendons auprès des entreprises et des investisseurs.

Je l’ai dit au mois de juin dernier, je le redis aujourd’hui : assurons une transparence sur les objectifs visés par la loi et un contrôle indispensable. Ainsi, proposer d’alléger les contraintes liées à la transition énergétique et écologique correspond à un choix qui traduit une certaine vision de la place que doivent prendre les entreprises dans cette transition. Cette vision doit être clairement affirmée par le législateur.

À ce titre, j’ai proposé de modifier l’intitulé du texte pour mieux rendre compte des mesures économiques qu’il contenait. Madame le rapporteur, vous avez d’ailleurs apprécié cette proposition, qui, selon vous, relevait du bon sens. Cependant, l’amendement a été rejeté.

Finalement, nous nous apprêtons à nous prononcer sur un texte composite, particulièrement large. Le Sénat, notamment grâce à sa délégation aux entreprises, se tient toujours aux côtés des acteurs de l’économie. Ce projet de loi est fait pour eux. Aussi, malgré les quelques points de vigilance que j’ai soulevés, le groupe RDSE, dans sa pluralité, votera majoritairement en faveur de ce texte, qui, je l’espère, connaîtra une suite prochainement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)