M. le président. La parole est à M. Georges Naturel, pour la réplique.

M. Georges Naturel. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse.

Oui, il faut rétablir l’ordre. Ce sera long.

Il faut reconstruire ce qui a été détruit ces trois derniers jours. Ça aussi, ce sera long.

Il faut à tout prix renouer de manière sérieuse les fils du dialogue. Confierez-vous ce chantier à des personnalités qualifiées et à de nouveaux interlocuteurs, qui sauront lancer un nouveau format et repenser la méthode, comme cela a été demandé plusieurs fois ?

Monsieur le Premier ministre, je m’adresse à vous : ne nous abandonnez pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

lutte contre le narcotrafic (ii)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jérôme Durain. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Le drame qui s’est produit hier dans l’Eure a profondément ému la représentation nationale. Je veux exprimer au nom de mon groupe nos sincères condoléances aux familles et aux proches des agents blessés ou sauvagement assassinés.

Je le dis avec toute la prudence qui convient, il est difficile de ne pas relier ces faits aux constats que la commission d’enquête sénatoriale sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier a formulés hier. Fort de ce rapport, le Sénat appelle à « un nécessaire sursaut [pour] sortir du piège du narcotrafic ».

Pourtant, monsieur le ministre, vous avez réitéré ce matin votre volonté d’attaquer le fléau par le bas. Nous pensons au contraire qu’il faut frapper les réseaux au portefeuille et à la tête.

Monsieur le ministre, allez-vous répondre à l’appel unanime du Sénat ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Thomas Dossus applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

M. Gérald Darmanin, ministre de lintérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Durain, c’est avec prudence que vous faites le lien entre l’attaque ignoble qui a eu lieu au péage dans l’Eure et le narcotrafic. Pour ma part, je ne m’encombre pas de prudence : il y a un lien, c’est une évidence.

D’abord, parce que nous parlons d’un narcotrafiquant ayant été arrêté par la police de notre pays. Il avait entamé sa carrière de criminel – si j’ose dire – dès l’âge de 10 ans et il était manifestement – c’est pour cela qu’il a été par deux fois jugé aux assises – le commanditaire de meurtres à Marseille, là où la police et la justice accomplissent un travail formidable et, vous le savez, très difficile.

Ensuite, parce que l’équipe de tueurs qui est intervenue – l’enquête le dira, mais, après quatre ans au ministère de l’intérieur, je commence malheureusement à avoir un peu d’expérience – a procédé de façon à peu près similaire à ce que l’on voit lors des règlements de compte dans certaines villes, notamment dans le sud de la France.

Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement raison. Devant votre commission d’enquête, j’ai moi-même évoqué le fait que le narcotrafic était le plus grand danger pour notre unité nationale. Bien sûr qu’il faut par le bas attaquer les points de deal, interpeller les « choufs » et les trafiquants, faire des saisies et attaquer les consommateurs, mais personne ne doute un seul instant que le sénateur Blanc et vous-même ayez raison : la confiscation doit être générale, l’argent du crime doit être confisqué et nous devons faire cent fois plus que ce que nous faisons collectivement.

Comme l’a dit la ministre déléguée en réponse à une question précédente, nous suivrons les préconisations du Sénat.

C’est tout notre pays, le monde entier qui doit réagir. En effet, que se passe-t-il ? Monsieur le sénateur, vous le savez très bien. La première cause de mortalité aux États-Unis, le plus grand pays développé au monde, c’est le Fentanyl. Aux Pays-Bas, en Belgique, on assassine des journalistes et des avocats et on assassine peut-être putativement des hommes et des femmes politiques. En Amérique du Sud, la production de stupéfiants a été multipliée par cent parce que les États-Unis se sont désintéressés de ce trafic. En Afghanistan, depuis que nous en sommes partis avec les Américains, l’augmentation de la production d’héroïne et de cocaïne paie l’argent de la drogue et la rend moins chère chez nous.

Oui, monsieur le sénateur, il faut tous se réveiller. Cela fait quatre ans que je le dis : la drogue, il faut la combattre ; elle n’est jamais festive, mais toujours mortelle. Nous vous accompagnerons. Plus personne ne doit tenir un discours complaisant à l’égard de cette consommation. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.

M. Jérôme Durain. Monsieur le ministre, l’écart est grand entre le discours que vous tenez devant nous et les actes du Gouvernement.

Vous affirmez que la drogue est la plus grande menace sécuritaire que notre pays et le monde vont connaître. Nous partageons cet avis, mais nous estimons que votre réponse n’est pas à la hauteur de la menace.

Sur le terrorisme, nous sommes en ordre de bataille. Sur le narcotrafic, nous avançons en ordre dispersé. Corruption, outre-mer, blanchiment, sécurité des ports, prison, procédure pénale, coopération internationale, magistrats et policiers en demande de moyens : tous les chantiers sont ouverts.

Le Sénat propose la création d’un parquet national anti-stupéfiants, avec pour corollaire du côté répressif une sorte de Drug Enforcement Administration à la française (DEA). Nous vous proposons une vision globale, une stratégie et surtout des moyens et un pilotage spécifique des services de renseignement, de sécurité et de justice favorisant un dialogue entre eux.

Ces propositions sont sur la table. Il est temps que le Gouvernement s’en saisisse ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – MM. Franck Dhersin, Rémy Pointereau et Mme Nadine Bellurot applaudissent également.)

recrutement des enseignants

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Belrhiti. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Madame la ministre, vous avez récemment reconnu les difficultés de recrutement des enseignants dans certaines académies pour la rentrée 2024. Les premiers résultats des écrits du concours de recrutement des professeurs des écoles affichent ainsi un ratio de candidats par poste largement inférieur aux précédentes décennies, et ce avant même les résultats définitifs.

Face à ce constat, vous répondez chaque année par le recrutement de nouveaux contractuels, dans des conditions de formation loin d’être adaptées. La volonté gouvernementale de passer le concours de recrutement à bac+3 est une réponse bien insuffisante face à la gravité de la situation. Insérer nos futurs enseignants dans leur milieu professionnel selon les modalités actuelles ne conduira qu’à les exposer à plusieurs problèmes systémiques de l’éducation nationale : la rémunération, le déroulement des carrières, la mobilité et le manque de reconnaissance. Qui aujourd’hui souhaiterait gagner 1,1 fois le Smic en début de carrière après cinq années d’études ?

De plus, le système de gestion des ressources humaines, qui ne fonctionne qu’à l’ancienneté, conduit à envoyer de jeunes professeurs loin de chez eux, dans les territoires réputés les plus difficiles. Cela revient souvent à leur demander de sacrifier leur projet de vie.

Madame la ministre, quand le Gouvernement se décidera-t-il enfin à mettre en place un pacte qui rendra à la profession son attractivité et offrira à la jeunesse de ce pays un avenir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Nicole Belloubet, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Belrhiti, j’ai effectivement reconnu que nous rencontrions des difficultés de recrutement de nos personnels enseignants lors des concours.

Je me permets simplement de signaler que nous ne sommes pas les seuls dans ce cas. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) J’ai récemment participé à une réunion du Conseil de l’Union européenne : tous les pays – je dis bien : « tous les pays » – de l’Union européenne, quelles que soient les rémunérations de leurs enseignants, quelle que soit l’organisation de leur système éducatif, connaissent de telles difficultés.

Nous avons pris un certain nombre de décisions pour y faire face.

D’abord, ainsi que vous l’avez rappelé, nous allons – je le reconnais devant vous – recruter des personnels contractuels, afin d’assurer la rentrée prochaine. Mais nous le ferons suffisamment tôt, parfois dès le 1er juin, pour que les personnes concernées puissent bénéficier d’une formation et prendre leur poste au 1er septembre. Cela me semble être un progrès.

Ensuite, comme mes prédécesseurs s’y étaient engagés, et contrairement à ce que vous indiquez, nous avons augmenté la rémunération de nos personnels enseignants, notamment en début de carrière. Alors qu’un enseignant du premier degré gagnait moins de 1 800 euros net par mois en 2017, il gagne plus de 2 100 euros net par mois aujourd’hui. Je pense que cela mérite d’être salué.

Enfin, ainsi que vous l’avez souligné, nous avons décidé de modifier la formation initiale de nos personnels. Nous mettons en place – c’est véritablement une réforme structurante et enthousiasmante – une formation d’excellence. D’une part, la préparation au concours se fera désormais à bac+3. D’autre part, les jeunes recrutés bénéficieront d’une gratification et d’une rémunération. Ils poursuivront leurs études jusqu’au master tout en effectuant sur le terrain des stages d’observation et de pratique accompagnée et des stages en responsabilité afin de se professionnaliser.

Ces différents éléments conditionnent, me semble-t-il, l’attractivité de la profession. J’y crois beaucoup.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Nicole Belloubet, ministre. Et je pense surtout que, comme le disait Charles Péguy, le métier d’enseignant est le plus beau métier du monde, et qu’il faut…

M. Rachid Temal. Le payer correctement !

Mme Nicole Belloubet, ministre. … le dire et le redire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.

Mme Catherine Belrhiti. Madame la ministre, j’ai enseigné pendant quarante ans ; ce métier, je le connais. La crise la plus difficile que nous ayons à résorber est certainement celle de l’enseignement.

Vous traitez le problème d’attractivité par de petites réformes mises bout à bout, alors que nous avons besoin de repenser la profession en prévoyant un véritable plan d’insertion des jeunes professeurs. Par exemple, la régionalisation des concours semble aujourd’hui une étape indispensable.

Madame la ministre, sans une réforme d’ampleur, sans ce nouveau pacte fondateur, la contractualisation de l’éducation nationale est inexorable.

Soyez-en assurée, les professeurs qui ne s’épanouissent pas dans leur métier ne seront pas en mesure de former les têtes bien faites de demain ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

quatrième année d’études en médecine générale

M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Guislain Cambier. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention.

Depuis décembre 2022, les internes en quatrième année de médecine générale doivent effectuer un stage en cabinet médical. Cette réforme a deux objectifs : d’une part, renforcer la formation et la professionnalisation des médecins généralistes afin de faciliter et de sécuriser leur installation ; d’autre part, répondre aux besoins de santé croissants de la population, en particulier dans les territoires plus isolés et moins dotés en ressources médicales. Ce sont de beaux objectifs, mais rien n’est prêt !

Dans nos territoires, les élus, les médecins, les formateurs et les étudiants nous alertent sur l’urgence de publier les textes réglementaires. Les futurs généralistes concernés ont en effet débuté leur internat en 2023. Votre prédécesseur avait acté oralement plusieurs arbitrages qui ont engagé la parole de l’État auprès des étudiants, des professionnels et de la population. Mais, à ce jour, aucun texte relatif aux questions évoquées n’a été publié.

De ce fait, dans mon département, le Nord, beaucoup de praticiens nous disent qu’ils n’ont pas la place dans leur cabinet pour recevoir les 250 docteurs juniors programmés par an. Ces médecins risquent d’avoir à exercer dans des salles qui ne sont pas destinées à des consultations médicales, avec seulement un lit, une table et un ordinateur.

Les élus locaux sont évidemment prêts à accompagner la réforme pour revitaliser la médecine de proximité et orienter nos médecins vers nos territoires. Mais mettre à disposition de nouveaux locaux, des logements et, éventuellement, les construire nécessite un calendrier précis.

Monsieur le ministre, dans quels locaux les docteurs juniors exerceront-ils ? Sous quelle autorité ? Quelle sera leur formation, et celle des maîtres de stage ? Quid de leur rémunération et de leur logement ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention. Monsieur le sénateur Guislain Cambier, comme vous l’avez souligné, la médecine générale est essentielle à l’avenir de notre système de santé.

C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité envoyer un signal fort d’attractivité et de reconnaissance – c’est un terme que vous avez employé –, afin que les jeunes soient de plus en plus nombreux à choisir cette voie et à s’installer dans nos territoires.

Conformément aux engagements du Président de la République, mes prédécesseurs, en lien avec Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, ont engagé une réforme ajoutant une quatrième année au diplôme d’études spécialisées de médecine générale.

En effet, jusqu’à présent, la médecine générale était la seule discipline à n’avoir que trois années d’internat. Cette absence de phase de consolidation était considérée comme une faiblesse ne favorisant pas l’installation en sortie de cursus dont nous avons besoin.

La nouvelle maquette de formation du diplôme d’études spécialisées de médecine générale a été publiée l’an dernier. Elle a suscité des interrogations de la part des internes et de nombreux acteurs. Aussi ai-je demandé à des personnalités qualifiées de poursuivre la concertation nécessaire à l’identification des conditions de succès.

Des textes d’application – vous y avez fait référence – doivent encore être publiés. Je veillerai à ce qu’ils puissent l’être dans les meilleurs délais, c’est-à-dire d’ici à la fin de l’été.

Dès l’année 2026, ce sont 3 600 docteurs juniors qui pourront venir consulter, sous la supervision de médecins généralistes partout dans nos territoires, et notamment dans les zones les moins dotées. Pour qu’ils puissent s’installer dans les déserts médicaux, nous devons travailler dès maintenant à leurs conditions d’accueil et de logement.

Je souhaite anticiper l’échéance en la préparant dès à présent avec les collectivités territoriales. Pour cela, j’ai reçu l’ensemble des associations d’élus locaux, notamment les maires de France.

Je tiens à rappeler un élément : couplée à la fin du numerus clausus, qui est en vigueur depuis 2019 et qui a déjà permis – rappelons-le – de compter 25 % d’étudiants en plus en deuxième année de médecine, la réforme de la quatrième année de médecine générale constitue un tournant majeur pour la structuration des soins primaires dans notre pays.

Nous serons au rendez-vous : nous préparons dès maintenant les stages dans les territoires sous-dotés. Nous publierons les textes qui vous préoccupent tant, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour la réplique.

M. Guislain Cambier. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse. De nombreux internes qui, après avoir été formés à Lille, ont découvert Maubeuge, Avesnes-sur-Helpe ou Gouzeaucourt veulent s’y installer. Nous souhaitons le succès de la réforme. Nous avons donc besoin de ces textes pour pouvoir transformer l’essai. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

participation de taïwan à l’assemblée de l’organisation mondiale de la santé

M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Else Joseph. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Lors de la récente pandémie de covid-19, nous avons constaté que la coopération et l’inclusion de tous les pays étaient, ô combien, nécessaires, à travers les différents dispositifs de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Un accord pourrait même être prochainement adopté lors de la 77e Assemblée mondiale de la santé, qui se tiendra dans quelques jours.

La réponse aux pandémies suppose que tous les pays soient intégrés aux dispositifs de l’OMS, sans exclusion et sans réserve. À plusieurs reprises, la France s’est déclarée favorable à la participation de Taïwan au sein d’instances de l’OMS, reconnaissant son expertise médicale, par la voix de M. Le Drian en 2021 ou celle de Mme Colonna en 2023.

Cependant, il faut constater que, à part quelques réunions chichement autorisées par an, Taïwan ne peut pas s’impliquer dans des mécanismes comme le système mondial de surveillance de la grippe et de riposte ou le réseau mondial de vérification sanitaire numérique. Taïwan n’est ainsi pas en mesure de délivrer et de vérifier des documents de certification numérisée conformes aux normes internationales.

En cas de nouvelle pandémie, cela créerait des difficultés pour les Taïwanais travaillant à l’étranger, mais aussi pour tous les étrangers vivant à Taïwan, dont plusieurs milliers de Français. Cette exclusion de Taïwan est contraire aux objectifs de l’OMS, empêche la lutte contre les virus et nuit à la santé de toutes les populations.

Monsieur le ministre, Taïwan doit pouvoir participer pleinement aux activités de l’OMS. La lutte contre les pandémies ne saurait être sacrifiée du fait de pressions mesquines. Je vous demande donc de prendre des mesures concrètes en faveur de Taïwan.

Pourquoi faire preuve de lenteur alors qu’on sait visiblement dérouler le tapis rouge pour certains ? Qu’attendez-vous pour que Taïwan soit pleinement intégrée à l’OMS ? Pourquoi tant d’hésitations ? La santé publique mondiale et la santé des Français n’attendent pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité, de la francophonie et des Français de l’étranger.

M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de lattractivité, de la francophonie et des Français de létranger. Madame la sénatrice Joseph, je connais votre intérêt pour le sujet, vous qui êtes vice-présidente du groupe d’échanges et d’études Sénat-Taïwan, présidé par Jean-Baptiste Lemoyne.

Comme chaque année, la question de la participation de Taïwan à l’Assemblée mondiale de la santé est soulevée. La position de la France est connue et constante : il n’y a qu’une seule Chine. Nous soutenons cependant, dans le respect de la politique d’une seule Chine, la participation de Taïwan aux travaux des organisations internationales lorsque leur statut le permet et lorsque c’est dans l’intérêt collectif. Notre position sur ce point n’a pas changé ; elle a d’ailleurs été exprimée devant cette assemblée à plusieurs reprises.

Je l’ai indiqué, la France s’en tient depuis 1964 à sa politique constante d’une seule Chine et n’a pas de relations diplomatiques avec Taïwan. Cela n’empêche en aucun cas le développement de coopérations riches avec Taïwan dans de très nombreux domaines.

C’est dans cette perspective que nous appelons l’OMS, dans le respect de ses statuts, à inclure davantage Taïwan dans ses travaux, notamment à l’occasion de l’Assemblée mondiale de la santé, qui aura lieu fin mai et qui est chaque année un rendez-vous majeur pour les sujets de santé publique mondiale. Certains défis à relever sont majeurs ; vous en avez évoqué plusieurs, madame la sénatrice. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour la réplique.

Mme Else Joseph. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais il est temps de passer des paroles aux actes. J’aimerais que les décisions prises par l’OMS le soient en dehors de toute pression politique ou économique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation internationale

M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, quel message le Président de la République et le Gouvernement souhaitaient-ils adresser aux Français et au monde en envoyant l’ambassadeur de France assister à la cérémonie d’investiture de Vladimir Poutine ? (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’Europe. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur, merci beaucoup de votre question ! (Exclamations amusées sur les mêmes travées.)

Je crois que nul ici ne peut accuser la France, le Président de la République ou le Gouvernement de manquer de fermeté à l’égard de la Russie de Vladimir Poutine.

Dès les premiers jours de l’offensive russe en Ukraine, c’est la France qui a pris l’initiative de proposer le premier des quatorze paquets de sanctions ayant visé les intérêts russes et gelé les avoirs, avoirs dont les revenus seront désormais utilisés pour financer le soutien militaire à l’Ukraine.

M. Victorin Lurel. Ce n’est pas la question !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. C’est encore la France qui a signé, par la main du Président de la République, un accord de sécurité avec l’Ukraine l’engageant à soutenir cette dernière sur le plan militaire à hauteur de 3 milliards d’euros en 2024. Vous en savez quelque chose, puisque le Sénat a soutenu cet accord.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. C’est enfin la France qui a condamné le contexte de répression dans lequel se sont déroulées les élections sur le territoire russe et qui a dénoncé les résultats des élections tenues dans les territoires occupés. (Marques dimpatience sur les travées du groupe SER.)

M. Victorin Lurel. Vous ne répondez toujours pas à la question !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous semblez vouloir utiliser votre question pour pointer du doigt la diplomatie française. Permettez-moi donc d’utiliser ma réponse pour rendre hommage à l’excellence de la diplomatie française. (Protestations sur les travées du groupe SER.)

M. Hussein Bourgi. Ce n’est pas le sujet !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Je rends hommage à Pierre Lévy !

M. Hervé Gillé. Que faisait-il là-bas ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Notre ambassadeur de France en Russie, en poste depuis quatre ans, exerce ses responsabilités dans des conditions extrêmement difficiles et sous la pression permanente du pouvoir russe.

M. Hussein Bourgi. Ce n’est pas le sujet !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. En se joignant au peuple russe rassemblé en la mémoire d’Alexeï Navalny, victime d’un assassinat politique, il a montré le meilleur des visages de la diplomatie française.

M. Mickaël Vallet. Eh oui, la diplomatie, c’est un métier…

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Il a été l’honneur de la République et de la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe SER.)

M. Mickaël Vallet. Vous n’avez pas répondu à la question : c’était une boulette, oui ou non ?

M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour la réplique.

M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, la diplomatie, nous la défendons ; les diplomates, nous les défendons. Je rappelle au passage que c’est le gouvernement auquel vous appartenez qui a engagé une réforme particulièrement décriée par les membres du corps diplomatique ; nous, nous les avons défendus au Parlement.

Vous n’avez pas répondu à ma question. Celle-ci n’avait pas pour objet de remettre en cause nos diplomates, qui font un travail remarquable !

En l’occurrence, c’est vous qui n’avez pas protégé le diplomate en question, notre ambassadeur en Russie. Depuis le début de l’année 2024, il a été convoqué à trois reprises, dont le 6 mai, soit la veille de l’investiture de Vladimir Poutine, à laquelle vous lui avez pourtant demandé de participer.

Vous évoquez l’action de la France ? Nous avons voté les mesures concernées. Mais vous avez oublié de préciser que, à l’exception de la Hongrie et de la Slovaquie – voyez avec qui nous étions… –, aucun pays de l’Union européenne n’était présent le 7 mai, ni le Royaume-Uni, ni les États-Unis, ni les autres pays du G7. Nous étions les seuls !

Vous avez rappelé que la France a condamné les conditions d’élection du président russe. Le 15 mars, de retour de la réunion du Triangle de Weimar, avec les Allemands et les Polonais, le Président de la République a indiqué qu’il ne pouvait pas saluer les élections dans un pays qui emprisonne ses opposants, qui parfois les tue et qui mène une guerre. Et, un mois plus tard, le même envoie son ambassadeur à Moscou !

C’est cela, la faute qui vous est reprochée ! Car c’est bien une faute. Le message que vous adressez aux Ukrainiens et aux autres pays, c’est que la France tient un double discours ou, à tout le moins, n’est pas claire. Et ne venez pas nous parler d’« ambiguïté stratégique », comme à propos de l’éventuel envoi de troupes au sol. Là, vous abaissez la parole de la France ! Vous abaissez sa capacité à intervenir dans le débat ! C’est une faute, monsieur le ministre ; une triple faute : diplomatique, politique et morale ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Claude Malhuret applaudit également.)

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