Sommaire
Présidence de Mme Sylvie Robert
Secrétaires :
M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.
2. Pratiques des centrales d’achat de la grande distribution implantées hors de France. – Débat organisé à la demande du groupe Union Centriste
Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe Union Centriste
M. Serge Mérillou ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement ; M. Serge Mérillou.
Mme Sophie Primas ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Pierre Jean Rochette ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Guislain Cambier ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement ; M. Guislain Cambier.
M. Guillaume Gontard ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
Mme Cathy Apourceau-Poly ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Michel Masset ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Didier Rambaud ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Jean-Claude Tissot ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Laurent Burgoa ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement ; M. Laurent Burgoa.
M. Yves Bleunven ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
Mme Marie-Do Aeschlimann ; Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement.
M. Franck Menonville, pour le groupe Union Centriste
Suspension et reprise de la séance
3. Dépistage des troubles du neurodéveloppement. – Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Discussion générale :
Mme Jocelyne Guidez, auteure de la proposition de loi
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure de la commission des affaires sociales
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités
Mme Catherine Vautrin, ministre
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 7 de la commission. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Amendement n° 4 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Amendement n° 2 rectifié de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 1 de Mme Solanges Nadille. – Rejet.
Adoption, par scrutin public n° 113 de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure
Suspension et reprise de la séance
4. Droit applicable aux collectivités locales. – Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme Nathalie Delattre, rapporteure de la commission des lois
Amendement n° 3 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles 1er à 14, 16 à 19 (examinés dans le cadre de la législation en commission, réservés)
Adoption des articles 1er, 2, 4, 6, 7, 9, 11, 13, 14 et 17 à 19, les articles 3, 5, 8, 10, 12 et 16 demeurant supprimés.
Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
compte rendu intégral
Présidence de Mme Sylvie Robert
vice-présidente
Secrétaires :
M. Jean-Michel Arnaud,
Mme Catherine Conconne.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Pratiques des centrales d’achat de la grande distribution implantées hors de France
Débat organisé à la demande du groupe Union Centriste
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Union Centriste, sur les pratiques des centrales d’achat de la grande distribution implantées hors de France.
Dans le débat, la parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe Union Centriste. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis les États généraux de l’alimentation réunis en 2017, quatre lois portant sur les relations commerciales autour des produits de grande consommation ont été adoptées et promulguées.
L’objectif était d’assurer une plus juste rémunération des agriculteurs en confortant la construction du prix « en marche avant », c’est-à-dire du producteur au distributeur, en passant par le transformateur.
Nous avons pourtant rapidement vu se développer des pratiques de contournement, par le biais de pénalités logistiques ou de plans d’affaires, rendant nécessaire l’adoption de nouvelles dispositions cadres.
Ces dernières années, la plupart des grandes enseignes de distribution ont ouvert des centrales d’achat à l’étranger pour conclure des contrats d’approvisionnement avec des industriels et fournisseurs, ce qui est tout à fait leur droit au regard des règles de libre circulation des biens, des services et des établissements dans le cadre du marché unique européen.
Cependant, au fil des négociations, nous avons pu observer que la multiplication des centrales d’achat à l’étranger s’accompagnait de pratiques plus préoccupantes : en clair, ces centrales seraient devenues le support de pratiques commerciales dont l’intérêt, pour les distributeurs, va bien au-delà de celui qu’assure le principe du groupement d’achat.
Elles leur permettraient de s’affranchir du cadre des négociations défini notamment par les lois du 30 octobre 2018 et du 18 octobre 2021, dites lois Égalim et Égalim 2, et d’imposer aux fournisseurs des contraintes parfois abusives au regard du droit français.
On nous a notamment rapporté, outre la facturation excessive de services de coopération commerciale, que des pressions étaient exercées pour un retour aux prix d’achat d’avant la récente inflation, ou pour rejoindre une centrale d’achat européenne sous contrat étranger, sous la menace d’une réduction des références en rayon, voire d’un déréférencement. Dernièrement – cela en dit long sur le baromètre des relations commerciales entre industriels et distributeurs –, on a même pu assister à des opérations de dénigrement des fournisseurs dans les magasins avec lesquels ils sont en contrat.
Les principaux distributeurs ont développé des alliances avec des centrales d’achat basées à l’étranger : Leclerc avec Eurelec, Carrefour avec Eureca, Intermarché et Casino avec Global Retail Services, qui a succédé à Agecore et ITM, Système U avec Everest et Epic.
Il n’existe pas, à notre connaissance, de chiffres publics ou officiels sur la part des achats que font les distributeurs français hors du territoire national, mais, aux dires des observateurs, leur importance grandit.
Certains y auraient recours alors même qu’ils réalisent plus de 95 % de leur chiffre d’affaires en France, ce qui laisse peu d’ambiguïté sur les motifs de ces délocalisations.
C’est pourquoi l’article 1er de la loi du 30 mars 2023 tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, dite loi Descrozaille, ou Égalim 3, est venu préciser que tout contrat visant des produits commercialisés sur le sol français doit se voir appliquer le cadre français des négociations commerciales et les sanctions qu’il prévoit.
Dès 2019, le ministre de l’économie avait assigné la centrale internationale Eurelec, réclamant le paiement d’une amende de 117 millions d’euros pour non-respect des dispositions du droit commercial français.
Cependant, à la suite de l’arrêt du 22 décembre 2022 de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans cette affaire, la mobilisation de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et du ministre de l’économie s’est affaiblie. Cela s’est immédiatement traduit par une dégradation de la situation ; les autres enseignes françaises se sont alignées sur les mauvaises pratiques d’Eurelec afin de garder leur compétitivité par rapport à Leclerc.
Pourtant, l’arrêt de la CJUE n’empêche pas le ministère de l’économie de poursuivre son action en matière de police du commerce. La Cour européenne ne s’est pas prononcée sur la compétence du juge français dans l’absolu ; elle a seulement limité l’applicabilité du règlement européen du 12 décembre 2012, dit règlement Bruxelles I bis, aux actions du ministre en la matière. En pratique, sauf précision contraire de votre part, madame la ministre, rien n’interdit donc au Gouvernement d’assigner devant le juge français des sociétés de droit étranger en s’appuyant sur les règles internes de compétence étendues aux situations internationales.
Madame la ministre, la centrale Eurelec respecte-t-elle aujourd’hui le droit français et les dispositions des lois Égalim ? Combien de contrôles ont-ils été menés sur ces sujets en 2023 par la DGCCRF ?
S’agissant du respect des dates butoirs, ramenées dernièrement aux 15 et 31 janvier, il semblerait que seule Everest, parmi les trois principales centrales délocalisées à l’étranger, en tienne compte. Eurelec et Eureca se dispensent ouvertement de cette servitude, sans plus de considération pour l’alourdissement des sanctions adopté sur l’initiative du Sénat. Qu’en est-il, madame la ministre, du respect de la date butoir du 15 janvier pour les PME ?
Les plans d’affaires des industriels seraient bousculés pour faire de la place aux marques de distributeurs (MDD). Si cela était avéré, nous assisterions à un phénomène de concentration qui pose problème pour l’avenir, le distributeur se faisant industriel. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles le Sénat, lors de l’examen de la loi Descrozaille, a choisi de soumettre également les MDD à renégociation et à leur appliquer le principe de non-négociabilité des matières premières agricoles.
Néanmoins, sauf intervention du Gouvernement, cela restera peine perdue, car, avec des centrales d’achat échappant au droit français, la sanctuarisation de la matière première agricole (MPA) par rapport aux MDD pourra être contournée.
Cerise sur le gâteau, si vous me permettez l’expression, il semble aujourd’hui flotter un sentiment général d’impunité du côté des enseignes et des centrales d’achat, un sentiment peut-être lié à l’injonction du ministre de l’économie d’aller chercher des baisses de prix à tout prix, si j’ose dire, c’est-à-dire sans base rationnelle.
Le problème posé par les pratiques des centrales d’achat basées à l’étranger n’est pas spécifique à la France : vingt parlementaires européens de tous les groupes politiques, dont plusieurs députés français, ont demandé en mai 2023 à la Commission européenne d’agir contre les alliances de distributeurs.
De très nombreuses fédérations de tous pays ont répondu à la consultation de la Commission européenne, demandant un encadrement des pratiques déloyales de ces alliances et un renforcement du réseau européen des autorités de contrôle. Ce sujet ne sera toutefois à l’agenda qu’à la fin de 2025.
La grande distribution contre-attaque sans vergogne : EuroCommerce a déposé un recours contre la loi Descrozaille auprès de la Commission européenne. Elle prétend que cette loi française est protectionniste, car elle empêcherait les alliances de distributeurs.
C’est faux : la loi française n’empêche nullement les alliances européennes de distributeurs ! Elle précise simplement que le droit français des négociations commerciales doit être respecté pour les produits destinés au marché français, car ces dispositions sont d’ordre public. Ces dérogations sont d’ailleurs parfaitement reconnues par les traités européens, a fortiori quand il s’agit de protéger la rémunération des agriculteurs.
Madame la ministre, quelles actions le Gouvernement entend-il entreprendre pour faire appliquer le droit français ? Envisagez-vous, notamment, une augmentation du plafond des sanctions adoptées dernièrement dans le but de dissuader ces mauvaises pratiques ?
Le Gouvernement peut-il confirmer que des sanctions immédiates seront prises contre les centrales d’achat si les contrôles engagés par la DGCCRF montrent qu’elles n’ont pas respecté les dates butoirs et la sanctuarisation de la MPA ?
Pour conclure cette introduction et ouvrir le débat, j’ajouterai que la souveraineté agroalimentaire française a un coût ; que les normes écologiques ont également un coût ; mais que ces coûts ne peuvent être supportés par les seuls agriculteurs et entreprises agroalimentaires de notre pays.
C’est tout le travail engagé à travers les lois Égalim successives : faire reconnaître la valeur ajoutée par chaque maillon de la chaîne de production.
Le dernier texte sur les négociations commerciales présenté par le ministre de l’économie – devenu la loi du 17 novembre 2023 portant mesures d’urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation – est toutefois venu remettre en cause ce travail de longue haleine ; y était prônée une baisse des prix « coûte que coûte », quelles que soient les contraintes supportées par les agriculteurs, les fournisseurs et les industriels de l’agroalimentaire. Le ministre a ainsi relancé – sans le vouloir, je pense – une certaine guerre des prix entre distributeurs, dont les bras armés seraient ces centrales d’achat basées à l’étranger.
Les conséquences pourraient s’avérer désastreuses, tant pour la pérennité des entreprises françaises de l’agroalimentaire que pour les agriculteurs qui manifestent en ce moment leur ras-le-bol et expriment leur perte de confiance, ou encore pour la qualité de l’alimentation des Français et pour notre balance commerciale.
Madame la ministre, comment envisagez-vous de faire respecter les dispositions des lois Égalim et le droit français par les centrales d’achat basées à l’étranger ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Madame la présidente, madame la sénatrice Loisier, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis 2017, le Gouvernement est pleinement engagé pour la protection des revenus des agriculteurs. C’est un élément auquel le Sénat est particulièrement attentif, je le sais, et le débat que propose le groupe UC aujourd’hui l’illustre parfaitement.
Le revenu agricole, c’est aussi un sujet sur lequel nous avons constamment besoin de travailler. La rémunération des agriculteurs soulève nombre de difficultés qui se cristallisent dans les mobilisations que l’on observe aujourd’hui. La première des réponses que nous devons y apporter, c’est la stricte application des lois qui ont été votées par le Parlement, sans contournements.
Les agriculteurs assurent une mission absolument essentielle : ils nous nourrissent ! Cette mission est d’autant plus essentielle que notre capacité à produire pour nous nourrir redevient aujourd’hui un enjeu stratégique avec le retour de la guerre en Europe, l’alimentation étant de nouveau utilisée comme une arme par des puissances étrangères.
Pour autant, le partage de la valeur est insuffisant en la matière et les agriculteurs bénéficient encore trop peu de leurs gains de productivité. Pour une répartition plus juste, le Gouvernement agit donc sans relâche depuis 2017 et les États généraux de l’alimentation.
À ce titre, le Gouvernement a soutenu le vote et la mise en œuvre de la loi Égalim 2, qui a constitué une avancée majeure dans l’organisation des négociations commerciales entre l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur. L’objectif est de pouvoir conjuguer défense du pouvoir d’achat alimentaire des consommateurs et protection des revenus des agriculteurs. Il faut de surcroît que nous assumions collectivement, dans le débat public, qu’une agriculture qui produit dans des conditions respectueuses de l’environnement a un coût, donc un prix.
Pour atteindre cet objectif, la loi Égalim 2 organise la construction du prix « en marche avant » et la sanctuarisation de la matière première agricole tout au long de la chaîne, de la production à la distribution en passant par la transformation.
À cette fin, le texte repose sur deux piliers.
En amont, entre l’agriculteur et le premier acheteur, la loi impose la contractualisation écrite de la relation commerciale ; ainsi, celle-ci peut prendre en compte les coûts et leur évolution.
En aval, entre l’industriel et le distributeur, c’est-à-dire la chaîne de supermarchés, la loi prévoit le « soclage » des coûts de la matière première agricole. Ceux-ci ne peuvent pas être renégociés par le distributeur, et ce afin de préserver l’équilibre de la relation commerciale finale avec l’agriculteur en amont de la chaîne.
Pour veiller à l’application de cette loi, le Gouvernement mobilise massivement les agents de la DGCCRF. Ainsi, chaque année depuis trois ans, plus de 120 agents sont missionnés. Il faudra, dans les semaines qui viennent, faire encore davantage.
À titre d’exemple, sur la relation aval entre le fournisseur et le distributeur, des contrôles sont effectués chez chacun des principaux distributeurs. Plus de 500 relations contractuelles avec les principaux industriels sont ainsi vérifiées.
En cette période de fin de négociations commerciales, la mobilisation des agents de la DGCCRF est particulièrement forte et se poursuivra dans les prochains jours.
En cas de constatation d’un manquement à ces obligations, la DGCCRF peut recourir à des leviers juridiques puissants. Elle dispose en effet d’un pouvoir d’injonction sous astreinte financière pour contraindre un opérateur à mettre ses pratiques et ses contrats en conformité avec le droit applicable. Ce pouvoir a été mis en œuvre contre les trois grandes enseignes qui pratiquaient des pénalités logistiques.
La DGCCRF peut également prendre directement des sanctions administratives en cas de non-respect de la date butoir ou du formalisme contractuel, comme elle l’a fait en 2019 contre quatre enseignes de la grande distribution.
Enfin, elle peut assigner en justice un opérateur pour des pratiques abusives, telles que le déséquilibre significatif, et demander au juge civil de prononcer une amende. En 2019, la DGCCRF a ainsi demandé au juge de prononcer une amende civile de 117,3 millions d’euros à l’encontre d’Eurelec, une somme correspondant au triple des sommes indûment perçues par cette centrale internationale auprès de ses fournisseurs.
De la même manière, le Gouvernement accorde une attention toute particulière au respect de la véracité de l’origine France affichée. Protéger la crédibilité de l’indication d’origine française est aussi une manière de protéger les revenus de nos agriculteurs, tout en respectant les choix des consommateurs. Chaque année, plus de 600 sanctions sont ainsi imposées par la DGCCRF.
Dans ce contexte, le Gouvernement veille à éviter tout comportement de contournement via l’étranger.
Le développement récent des centrales d’achat européennes pose ainsi problème. L’articulation entre le droit du marché intérieur européen, d’une part, et le droit commercial français, d’autre part, peut interroger.
Toutefois, à ce jour, l’utilisation de centrales situées hors de France n’interdit nullement de faire appliquer la loi française.
Le Gouvernement mobilise ainsi pleinement la DGCCRF et n’hésite pas à sanctionner les pratiques qui seraient en infraction à la loi française. Ainsi, ces deux dernières années, plusieurs chaînes de distributeurs français ont fait l’objet de sanctions, atteignant parfois plusieurs dizaines de millions d’euros, pour non-respect des dispositions de la loi Égalim 2 par leurs centrales d’achat situées hors de France.
En parallèle, et de manière plus structurelle, le Gouvernement proposera à la prochaine Commission européenne un agenda visant à une clarification et une meilleure coordination du droit applicable. L’objectif doit être de mettre un terme à d’éventuelles pratiques de contournement qui ne pourraient aujourd’hui pas être facilement sanctionnées.
Permettez-moi de conclure en soulignant de nouveau l’importance majeure de l’agriculture, dans toute sa diversité, à la fois pour la souveraineté alimentaire de notre pays et pour notre activité économique. Elle est résolument engagée en faveur des transitions écologiques, avec un budget de 4 milliards d’euros sur trois ans qui lui permettra de sortir des injonctions et de lui donner, enfin, les moyens d’agir. Je salue enfin son apport essentiel pour la cohésion de nos territoires.
En cette période où le monde agricole se mobilise fortement, non seulement pour faire entendre ses revendications et ses difficultés, mais aussi pour exprimer sa fierté et son besoin de reconnaissance, cette contribution essentielle mérite d’être rappelée. Je tiens à assurer aux agriculteurs que nous ne lâchons rien dans le combat pour leur garantir une juste rémunération et les moyens d’exercer leur activité dans de bonnes conditions.
Débat interactif
Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au débat interactif.
Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum, y compris pour l’éventuelle réplique.
Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à une réplique pendant une minute ; l’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.
Dans le débat interactif, la parole est à M. Serge Mérillou.
M. Serge Mérillou. Madame la ministre, le débat d’aujourd’hui tombe à point nommé. L’actualité brûlante, avec cette mobilisation massive des agriculteurs dans tout le pays, nous rappelle à quel point notre agriculture est en crise.
La situation nous oblige. Elle nous oblige à agir pour une meilleure reconnaissance du travail et pour une plus juste rémunération de celles et ceux qui contribuent à nourrir les Français. Elle nous oblige à respecter la lettre et l’esprit des lois Égalim : assurer une juste répartition de la valeur entre producteurs, transformateurs et distributeurs.
À cet égard, je ne peux que constater l’échec cuisant du Gouvernement, un échec qui condamne les agriculteurs.
Eurelec, Eureca, Everest : ces noms ne disent rien à la plupart des Français ; pourtant, ces centrales d’achat situées à l’étranger mènent une véritable guerre des prix qui pénalise fortement les petits fournisseurs et se répercute inévitablement sur les producteurs et les éleveurs. Ces géants de la distribution usent de stratagèmes parfois à la limite de la légalité pour garantir leurs marges.
Mais rien n’arrête les centrales d’achat ; aucune considération éthique ne leur importe ! Leurs profits sont sacrés et peu importe si les agriculteurs en meurent…
Face à cette situation, le Parlement a adopté en 2023 la loi Descrozaille, qui visait notamment à encadrer l’activité des centrales d’achat internationales en imposant que les contrats conclus sur des produits commercialisés en France respectent notre législation.
Cette disposition du texte avait été largement critiquée et dénoncée par les distributeurs, qui estimaient cette mesure contraire aux règlements européens.
Madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour contrer ces pratiques déloyales ? Alors que l’inflation mine déjà le budget des Français, comment comptez-vous réguler cette guerre des prix pour assurer une meilleure rémunération des agriculteurs ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, nous avons parfaitement conscience qu’il est essentiel de reconnaître le travail des agriculteurs, qui se mobilisent aujourd’hui dans tout le pays.
Cette reconnaissance s’est traduite notamment par la mise en place du « paquet » Égalim, qui doit permettre de mieux sécuriser le revenu des agriculteurs. Ces lois entrent progressivement en application, la loi Égalim 2, qui porte plus particulièrement sur ce dernier point, étant en vigueur depuis 2023.
La première loi Égalim avait quant à elle pour objet d’encourager la structuration des filières, notamment laitière, bovine et porcine. Ce chantier est bien avancé et nous constatons une amélioration du revenu des agriculteurs, particulièrement dans la filière laitière. Certes, nous devons encore y travailler, comme nous y invite la mobilisation de ces derniers jours, notamment en continuant à accompagner ce mouvement de structuration.
Le cadre législatif que nous avons mis en place est donc solide, même s’il peut toujours être amélioré. C’est le sens de la loi Descrozaille, sur laquelle le Sénat a beaucoup travaillé.
Enfin, une mission gouvernementale va être lancée par Bruno Le Maire pour continuer à réfléchir à la sécurisation du revenu des agriculteurs.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Mérillou, pour la réplique.
M. Serge Mérillou. Votre gouvernement prône la baisse des prix des produits alimentaires dans les supermarchés pour lutter contre l’inflation. Il alimente de ce fait les difficultés des agriculteurs.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas.
Mme Sophie Primas. Madame la ministre, les négociations commerciales sont en cours et nous attendrons le début du mois de février pour faire un bilan global. Ce que nous savons déjà, c’est que, au lieu d’avoir des révisions de prix en mars, les Français supporteront les hausses dès février.
À rebours du discours porté depuis des années en faveur de la sécurisation du revenu des agriculteurs, nous avons eu droit à un discours très agressif visant à faire baisser les prix, discours puissamment relayé par Bruno Le Maire et les distributeurs, balayant d’un revers de main l’inflation des coûts de production. Bizarrement, d’ailleurs, cette petite musique s’est tue depuis le début des manifestations de nos agriculteurs voilà quelques jours…
Les centrales d’achat européennes constituent l’un des points sensibles de ces négociations très difficiles. De plus en plus d’entreprises sont concernées, en premier lieu les multinationales souvent stigmatisées. L’argument des distributeurs est toujours celui des volumes. Certaines centrales d’achat européennes demandent même, en préambule de toute négociation cette année et indépendamment des plans d’affaires nationaux, d’avoir un prix unique pour tous les pays européens, évidemment le prix le plus bas.
Personne ne s’en est vraiment ému, comme si ces multinationales n’avaient pas d’usines en France, dans nos territoires, ni de salariés français répondant à notre modèle social, ou comme si ces entreprises ne s’approvisionnaient pas auprès de nos agriculteurs français.
Aujourd’hui, l’émotion commence à poindre, puisque toutes les entreprises françaises sont maintenant concernées par ce détournement de la loi. Le Sénat avait alerté le Gouvernement sur ce risque dès la première loi Égalim en pointant le probable déplacement des négociations en dehors de la France.
Madame la ministre, je souhaiterais que vous nous disiez très clairement comment Bercy compte faire appliquer la loi française. Comment les industriels, quelle que soit leur taille, peuvent-ils être assurés que les procédures des lois Égalim seront respectées pour sécuriser juridiquement les contrats qui seront conclus – du moins l’espérons-nous – d’ici quelques heures ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Primas, la lutte engagée par Bruno Le Maire contre l’inflation et la recherche d’une juste rémunération des agriculteurs ne sont pas forcément antagoniques.
Vous m’interrogez sur les négociations menées par les centrales d’achat européennes. Soyons clairs : en aucun cas la localisation des négociations hors de France ne doit servir à contourner la législation française.
Si la signature des conventions a lieu hors de France, les échanges de produits et les commandes ont bien lieu sur notre sol. L’exécution du contrat a donc intégralement notre territoire pour cadre. Dès lors, quand les prix d’achat sont négociés pour les distributeurs français hors de France, les centrales d’achat européennes doivent se conformer au droit français. (Mme Sophie Primas se montre dubitative.)
Elles sont notamment soumises à la loi Égalim, qui impose le « soclage » du prix des matières premières agricoles dans les relations commerciales entre les industriels et les distributeurs, ainsi qu’aux dispositions relatives aux pratiques restrictives de concurrence, notamment l’interdiction de soumission à un déséquilibre significatif et l’interdiction d’obtention d’avantages sans contrepartie tirées des articles L. 442-1 et suivants du code de commerce.
Enfin, madame Primas, sachez qu’en 2023 la DGCCRF a mené quelque cinquante contrôles au sein des centrales d’achat européennes.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jean Rochette.
M. Pierre Jean Rochette. Madame la ministre, le débat qui nous réunit aujourd’hui est tristement d’actualité. Le monde agricole est en feu et réclame de vivre dignement de son travail : quoi de plus logique ? quoi de plus évident ? quoi de plus noble ?
Les agriculteurs, ces travailleurs stakhanovistes, ont été dépouillés de leurs marges, au bénéfice notamment de certaines centrales d’achat, et ce depuis plusieurs dizaines d’années.
Où sont passées ces marges ? C’est l’objet de notre débat ce matin.
Les centrales d’achat situées hors de France sont incontrôlables, à l’abri du droit français, au contraire de celles qui se trouvent sur notre territoire et des coopératives, bien que l’on y recense encore parfois des pratiques régulièrement dénoncées.
Ces agissements mettent le monde agricole à l’agonie. Ces centrales d’achat n’ont d’autre ambition – passez-moi l’expression – que de serrer le kiki des agriculteurs pour les plonger dans leurs retranchements, dans la spirale infernale de la réduction des marges et du travail à perte !
Pris dans une concurrence mondialisée avec des pays imposant des contraintes d’exploitation bien plus légères, le monde agricole français souffre et les centrales d’achat enfoncent le clou, bien décidées à faire supporter aux agriculteurs la pression sur les marges.
Le ministre de l’économie demande des sanctions ; les parlementaires, eux, demandent l’application stricte des lois Égalim.
Les tensions sont importantes. Elles résultent de la politique désastreuse du « toujours moins cher » au détriment du « toujours mieux produit ». Les conséquences se font sentir directement, en nous détournant d’une consommation locale au préjudice de nos agriculteurs.
Madame la ministre, allons-nous réviser les règles et les sanctions en vigueur à l’échelle de notre pays ? Allons-nous activer les leviers européens à Bruxelles ? L’agenda que vous avez évoqué est trop lointain.
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Pierre Jean Rochette. Le monde agricole attend des mesures rapides et, surtout, de la bienveillance.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je reconnais qu’il peut y avoir des tensions violentes dans les relations entre les agriculteurs, les industriels et les distributeurs, mais ne caricaturons pas : il est aussi des cas où les choses se passent bien. Je prendrai l’exemple de Lidl, qui a su trouver un modèle avec ses éleveurs.
S’agissant du durcissement des sanctions, le Gouvernement est bien sûr tout à fait ouvert à une réflexion sur ce sujet. Des contentieux sont en cours, illustrant à la fois notre mobilisation pour faire respecter le droit applicable et notre volonté de ne pas laisser impunis des comportements visant à contourner la loi ou à affaiblir la rémunération des agriculteurs.
Toutefois, nous faisons face à des difficultés, notamment d’ordre juridique. La réflexion doit être menée sur la façon dont on impose une sanction dans un cadre transfrontalier, et non pas sur le montant des sanctions. En effet, c’est bien la localisation de ces centrales d’achat qui pose problème. Ce point sera vraisemblablement tranché à la faveur du contentieux en cours entre l’État et Eurelec, centrale d’achat du groupement Leclerc.
Le Gouvernement travaille prioritairement à une meilleure harmonisation du droit européen et portera ce combat auprès de la prochaine Commission européenne.
Mme la présidente. La parole est à M. Guislain Cambier. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Guislain Cambier. Madame la ministre, Eurelec pour Leclerc, installée à Bruxelles, Eureca pour Carrefour, immatriculée à Madrid, ou encore Everest pour Système U, située aux Pays-Bas : de nombreux acteurs français de la grande distribution ont eu recours, ces dernières années, aux services d’une centrale d’achat européenne basée à l’étranger.
Ces géants de la grande distribution achètent en commun et imposent un rapport de force déséquilibré dans les négociations avec les grandes multinationales de l’agroalimentaire, mais également avec nos ETI (entreprises de taille intermédiaire) et nos PME. C’est une arme de plus dans l’arsenal des distributeurs lors des négociations commerciales. Elle s’ajoute au recours de plus en plus fréquent aux marques de distributeurs, les fameuses MDD.
En plus de fragiliser notre écosystème agroalimentaire, ces pratiques offrent aux distributeurs la possibilité de s’adonner à une forme d’évasion juridique, qui consiste à délocaliser les négociations avec leurs fournisseurs loin de la France et de son cadre juridique construit autour des lois Égalim.
Madame la ministre, comment justifiez-vous l’existence de telles pratiques, le choix d’un cadre juridique moins protecteur des intérêts des agriculteurs français et du fabriqué en France ? En effet, si le recours aux centrales d’achat européennes peut se concevoir pour faire face aux producteurs internationaux de l’agroalimentaire, pourquoi des distributeurs français les utiliseraient-ils pour négocier avec des producteurs français le tarif de produits vendus in fine sur le territoire français, si ce n’est pour contourner la loi française et ses dispositions protectrices des producteurs nationaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. C’est vrai, monsieur le sénateur, on ne dit pas assez qui se cache derrière ces centrales d’achat.
On dénombre trois principales centrales d’achat européennes : Eurelec, installée en Belgique, qui représente notamment Leclerc et à laquelle quarante-trois fournisseurs français sont associés ; Eureca, domiciliée en Espagne, qui représente notamment Carrefour et à laquelle quinze fournisseurs français sont associés ; enfin, Everest, située aux Pays-Bas, qui représente notamment Système U et à laquelle quarante-quatre fournisseurs français sont associés.
C’est tout l’enjeu du débat qui nous occupe aujourd’hui : ces centrales d’achat représentent une part croissante des achats des enseignes françaises. Certes, elles référencent relativement peu de fournisseurs, mais ce sont les plus gros industriels ; par ailleurs, elles représentent les plus gros volumes de transactions.
Comme je l’ai indiqué dans mes réponses à M. Rochette et à Mme Primas, des contentieux sont en cours entre l’État français et ces centrales d’achat, visant à empêcher des contournements et à faire respecter notre droit. C’est bien la volonté de sanctionner de telles pratiques qui est à l’origine du déclenchement de ces procédures.
Par ailleurs – et cela me permet de préciser ce que j’ai déjà indiqué –, des transformateurs et des industriels travaillent en France avec nos éleveurs. C’est notamment le cas de Mondelez International. Il s’agit là d’un exemple de pratiques qui pourraient être étendues aux autres industriels.
Mme la présidente. La parole est à M. Guislain Cambier, pour la réplique.
M. Guislain Cambier. Madame la ministre, vous l’avez reconnu vous-même, pour faire respecter notre droit et garantir un juste prix à nos agriculteurs, il ne faut pas nécessairement viser à tout prix – c’est le cas de le dire ! – le prix le plus bas possible, car cela pénalisera l’ensemble de la chaîne.
Un peu de colbertisme serait sans doute plus efficace que du libéralisme à tous crins !
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Madame la ministre, vous les avez cités : Hurley, Everest, Eureca, AgeCore… Ces noms sont inconnus du grand public ; pourtant, ces centrales d’achat font la pluie et le beau temps dans le secteur agroalimentaire. Elles fixent en effet les prix d’achat de tous les produits vendus dans nos supermarchés. Leur objectif est simple : acheter le moins cher possible, pour maximiser ensuite leurs marges lors de la revente au consommateur.
Avec des chiffres d’affaires de centaines de milliards d’euros, ces centrales d’achat ont un pouvoir absolu. Refuser leurs prix, c’est ne plus toucher des millions de consommateurs. Les industriels jouent donc le jeu, tout en pratiquant les mêmes méthodes auprès des agriculteurs. En tirant toujours plus leurs prix d’achat vers le bas, leurs marges brutes ont atteint 48 % l’an dernier ! Le groupe Avril, présidé par M. Rousseau de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles), a ainsi vu son résultat net augmenter de 45 % en 2022 !
C’est ce système, qui tue l’agriculture en la forçant à vendre à perte, que dénoncent les agriculteurs dans toute la France. Ils ont raison : ce racket ne peut plus durer !
Les lois Égalim devaient corriger ce système et rendre les rémunérations un peu plus justes. Elles ont échoué, parce qu’elles ont renoncé aux prix planchers et aux quotas de production, mais aussi parce qu’elles ont été contournées. Leclerc, Carrefour, Intermarché et Système U ont ainsi délocalisé leurs centrales d’achat respectivement en Belgique, en Espagne, en Suisse et aux Pays-Bas. Cela leur a permis de passer outre les règles françaises, notamment celles qui concernent les dates des négociations annuelles.
La centrale d’achat AgeCore, qui travaille pour Intermarché, a été condamnée à 151 millions d’euros d’amende pour ces pratiques, mais la Cour de justice de l’Union européenne l’en a exemptée en raison de son implantation étrangère. Heureusement, la loi Descrozaille devrait y remédier.
C’est une bonne nouvelle, mais, face à la puissance de ces groupes, la bonne volonté ne suffit pas. Il faut des mesures fortes pour rééquilibrer ces négociations commerciales.
Madame la ministre, j’ai trois questions à vous poser.
Allez-vous obliger la grande distribution et l’industrie agroalimentaire à publier leurs marges ?
Allez-vous appliquer des sanctions en cas d’achat de produits agricoles en dessous de leur prix de revient ?
Allez-vous défendre, à l’échelle européenne, des accords tripartites de répartition de la valeur entre agriculteurs, industriels et distributeurs ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, dans le cadre des débats qui ont eu lieu sur la loi Descrozaille, une série de solutions ont été imaginées pour remédier au comportement des enseignes de distribution.
Ainsi, l’article 1er de ce texte a créé l’article L. 444-1 A du code de commerce, aux termes duquel le droit français doit s’appliquer à tout contrat ayant pour finalité la distribution de produits en France.
Si, auparavant, le Gouvernement, par l’intermédiaire de la DGCCRF, veillait déjà avec la plus grande vigilance à l’application du cadre juridique français – cinquante contrôles ont été réalisés en 2023, ainsi que je l’ai rappelé à Mme Primas –, cet article produit d’ores et déjà des effets, puisque l’on constate qu’EuroCommerce, qui est le représentant des intérêts des distributeurs, a entamé un contentieux visant à remettre en question l’applicabilité de l’article 1er de la loi Descrozaille, ce qui prouve bien son effectivité ou à tout le moins son utilité.
Pour le Gouvernement, cet article est conforme au droit européen, puisqu’il permet d’éviter les contournements du droit français sans pour autant imposer les conditions de la loi Égalim aux autres États membres ni empêcher les fournisseurs d’autres États de commercialiser leurs produits en France.
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez également sur la publication des marges. À cette heure, une telle publication n’est pas prévue.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la ministre, depuis de nombreuses années, les parlementaires du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky dénoncent les pratiques des centrales d’achat, qui cassent les prix et grèvent le revenu des agriculteurs, tout en s’assurant des marges indécentes qui alimentent la vie chère. Ce débat est salutaire, alors que les agriculteurs sont dans la rue et qu’une grande partie de la population ne mange pas à sa faim.
Nous l’avons dit, les dispositions des trois lois Égalim sur les négociations commerciales ne fonctionnent pas, car les grands groupes distributeurs ont tous développé des stratégies de contournement de la loi française.
Leclerc, Carrefour, Système U ou encore Auchan se sont regroupés au sein de puissantes centrales d’achat à Bruxelles, à Madrid et dans d’autres capitales européennes. Ce faisant, ils favorisent l’internationalisation contractuelle, alors que ces négociations ont des incidences sur les prix applicables sur le marché national.
Ces centrales d’achat étrangères servent à contourner les faibles mesures de protection des maillons d’amont de la chaîne d’approvisionnement. Comme cela a été révélé par la commission d’enquête sur le sujet, « la “guerre des prix” imprègne ainsi toute la stratégie de la grande distribution française qui en impose les conséquences à ses fournisseurs, souvent en dehors des considérations de coûts de production ».
Il faut que le droit national s’applique à tous les produits vendus en France, y compris ceux qui sont négociés via les centrales d’achat européennes. Comme le rappelle Frédéric Descrozaille dans l’exposé des motifs de son texte, « il s’agit ici de contrer le phénomène d’évasion juridique qui consiste à délocaliser la négociation contractuelle afin de la soumettre à des dispositions juridiques plus favorables et moins protectrices des intérêts des agriculteurs français et du fabriqué en France ».
Madame la ministre, je vous poserai deux questions : quand le Gouvernement va-t-il enfin plaider pour une exception agricole à l’échelon européen ? quelles mesures va-t-il prendre pour que cesse ce phénomène ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, nous voulons une Europe ouverte et forte, mais aussi une Europe qui, dans le même temps, protège son agriculture.
Il est important qu’elle soit ouverte et forte, car, pour nos filières, pour nos producteurs, pour le rayonnement du savoir-faire agricole français, il y va de notre capacité à exporter nos productions. L’accord de libre-échange avec le Canada en est un bon exemple, lui qui nous permet d’exporter très largement nos produits agricoles et de montrer la très grande qualité de nos productions. Ces accords commerciaux garantissent la défense de nos IGP (indications géographiques protégées), qui ont vocation à protéger l’exception agricole française et européenne.
Il est important de s’inscrire dans cette démarche, dans la mesure où la France est un acteur agricole et agroalimentaire mondial. La plupart de nos groupes, notamment Carrefour, sont également représentés dans d’autres pays.
Pour autant, dans un contexte d’accumulation d’accords avec des exportateurs agricoles importants, il convient de demeurer vigilant pour ne pas affaiblir notre capacité de production européenne. On l’a vu ces dernières années, particulièrement au moment de la crise du covid-19, la maîtrise des filières est garante de la maîtrise de notre souveraineté ; c’est pourquoi elle est au cœur de nos préoccupations.
Le Gouvernement rappelle donc régulièrement à la Commission européenne qu’il faut davantage tenir compte du cumul de l’ensemble des concessions octroyées par l’Union européenne sur les produits agricoles sensibles. C’est d’ailleurs une des raisons qui a conduit la France à vouloir introduire des clauses miroirs, comme cela a été fait dans le cadre des négociations de l’accord entre l’Union européenne et la Nouvelle-Zélande.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je salue l’initiative de ce débat sur un sujet d’une actualité particulièrement brûlante : il n’est qu’à voir les manifestations de nos agriculteurs, qui veulent bien légitimement pouvoir vivre décemment de leur travail.
Cette crise, nous l’avons vue arriver en Lot-et-Garonne, pays agricole régulièrement marqué par des mouvements de protestation contre les prix imposés par la grande distribution.
Si le Parlement français a tenté de fixer des règles pour encadrer les négociations commerciales entre distributeurs et producteurs, le recours aux centrales d’achat européennes constitue un moyen de contourner notre réglementation.
Au mois de décembre 2022, la Cour de justice de l’Union européenne a donné raison, contre Bercy, aux distributeurs et à différentes centrales d’achat, par exemple Eurelec. Les centrales d’achat établies hors de France ont donc bel et bien gagné : foin du respect de la loi française et notamment de la loi Égalim 3…
Les distributeurs espèrent maintenant un moratoire. Madame la ministre, il me semble qu’une loi votée à l’unanimité ici même, au Sénat, doit être appliquée.
Que devrons-nous accepter demain ? Des centrales d’achat hors d’Europe, à l’abri de toute réglementation ?
Nous sommes en présence de cartels européens de la distribution qui contestent leurs obligations légales. Qu’entendez-vous entreprendre pour lutter contre ce qu’il faut bien appeler la délocalisation des négociations commerciales et, ainsi, pour concourir à la fixation d’un juste prix qui n’est pas forcément le plus bas pour l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement du producteur au consommateur ?
Enfin, quel mécanisme de surveillance des oligopoles de la distribution comptez-vous appuyer à l’échelon européen pour protéger nos agriculteurs et l’industrie agroalimentaire ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué la mise en application des lois Égalim 1, 2 et 3.
Les dispositions de ces textes traduisent, dans leur ensemble, plusieurs objectifs. Elles concourent à mieux structurer les filières, à améliorer le revenu de nos agriculteurs, à protéger nos industriels et à contrôler ce qui pourrait apparaître comme une tentative de contournement des normes françaises.
Il faut veiller à ce que ces lois entrent en application et soient pleinement effectives, ainsi que je l’ai souligné dans mon propos introductif. Il convient notamment d’accompagner la structuration de certaines filières, notamment bovine et porcine.
Plus spécifiquement, nous devons veiller à ce que la loi Égalim 2, qui vise à protéger la rémunération de nos agriculteurs, soit pleinement déployée, notamment en imposant la contractualisation écrite des industriels avec les agriculteurs et le « soclage » des coûts de la matière première agricole dans la relation commerciale entre les industriels et les distributeurs.
Enfin, nous nous engageons aussi à ce que la loi Descrozaille, qui est parfois contestée par des acteurs privés ou par les institutions européennes, soit pleinement mise en application. En effet, elle permet de lutter contre les tentatives de contournement auxquelles donnent lieu les centrales d’achat européennes. Qui plus est, je le répète, elle présente l’avantage de s’appliquer uniquement aux transactions qui concernent la France, même si celles-ci ont lieu hors des frontières, sans avoir d’impact sur les autres États membres. Elle permet en outre à des fournisseurs d’autres pays européens de commercialiser leurs produits en France.
Nous devons continuer à renforcer les contrôles. Une cinquantaine ont été réalisés en 2023 ; il faut aller plus loin au cours de l’année 2024.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. Madame la ministre, quelle coïncidence : nous voici réunis pour débattre d’un sujet crucial qui nous concerne tous, notre agriculture, secteur qui crie en ce moment même sa colère dans tous les territoires de notre pays.
La question qui nous occupe plus particulièrement ce matin porte sur les relations entre producteurs et distributeurs au sein de notre système économique, ainsi que sur les pratiques de la grande distribution.
Oui, la loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, ou loi Descrozaille, a marqué une étape importante dans le rééquilibrage de ce rapport de force, d’abord, en accélérant le cycle des discussions, ensuite, en renforçant les sanctions contre les enseignes ne respectant pas les dates butoirs, ce qui démontre une volonté ferme de protéger les acteurs vulnérables de la production alimentaire.
Cependant, un défi considérable reste à relever.
Force est de constater que les centrales d’achat implantées hors de nos frontières échappent aux contraintes de nos lois, créant par conséquent un terrain propice à des pratiques commerciales inéquitables.
Comme l’a souligné, en 2019, le rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec leurs fournisseurs, le système des centrales d’achat est en réalité « opaque ».
En fait, ce système permet de contourner la réglementation française issue des lois Égalim, une réglementation essentielle qui impose une rémunération minimale pour les agriculteurs.
Aujourd’hui, on le voit bien, la protection de nos agricultrices et de nos agriculteurs est plus que jamais cruciale. Ces derniers veulent, à juste titre, vivre de leur métier !
Il est donc essentiel d’examiner de près les moyens d’agir et les solutions qui s’offrent à nous, à l’échelle nationale et européenne, afin d’établir un juste équilibre dans les rapports de force.
Madame la ministre, l’adoption des lois Égalim et Descrozaille n’étant pas suffisante pour protéger les revenus du monde agricole, quelles initiatives concrètes peut-on envisager pour contrer ces pratiques déloyales et équilibrer les relations entre les fournisseurs, la grande distribution et les centrales d’achat opérant hors de nos frontières ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, comme je l’ai rappelé à M. Gontard, l’article 1er de la loi Descrozaille, devenu l’article L. 444-1 A du code de commerce, dispose que le droit français s’applique à tout contrat ayant pour finalité une distribution de produits en France. En d’autres termes, les fournisseurs de produits destinés à être commercialisés par nos enseignes, même si ces derniers se négocient dans une centrale d’achat internationale, sont protégés par les dispositions du chapitre IV du titre IV du code de commerce.
Par ailleurs, les actions de contrôle de la DGCCRF et les différentes actions en justice sont des outils précieux permettant de s’assurer du respect du cadre législatif.
Enfin, je vous rappelle que la date butoir pour les négociations commerciales a été fixée au 15 janvier dernier pour les PME et ETI et au 31 janvier prochain pour les grands groupes. Quand ces dates auront passé, des contrôles démarreront pour vérifier l’effectivité des négociations et, surtout, si elles ont été conduites dans le respect du cadre légal.
Comme je l’ai déjà indiqué en réponse à M. Mérillou, une mission va être engagée par Bruno Le Maire sur la question du cadre des négociations commerciales. Ce sera peut-être l’occasion d’approfondir la réflexion sur la façon de mieux lutter à la fois contre le recours aux centrales d’achat européennes et contre les distorsions de concurrence entre les différents acteurs de la négociation.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à mon tour, je tiens à remercier mes collègues du groupe Union Centriste d’avoir organisé ce débat sur un sujet particulièrement opaque, qui est certainement l’un des facteurs d’échec des différentes lois Égalim.
En effet, cela a été souligné à plusieurs reprises, ce système, construit par de très grands groupes de distribution, qui jouent des différences de TVA ou de quelques centimes d’euro à la marge, conduit à fortement renforcer la pression sur les agriculteurs et les producteurs.
Inéluctablement, cette tension permanente entraîne une course aux coûts pour les agriculteurs, qui n’ont d’autre choix que de privilégier l’efficacité, au détriment de leur santé, de celle des consommateurs et de la préservation de notre environnement.
La récente crise du monde agricole trouve certainement une partie de ses origines dans les agissements de cette oligarchie des industriels et de la grande distribution agroalimentaire.
Il est indispensable que les pouvoirs publics reprennent le contrôle sur la régulation du prix.
Mes chers collègues, nous le voyons avec ce débat, la solution est européenne. Ces enjeux, qu’il s’agisse de l’alimentation, de l’agriculture ou de la distribution, doivent donc être au cœur de la campagne des prochaines élections européennes, et ce non pas de manière dogmatique ou catastrophiste, mais de manière raisonnée et concrète.
Le Gouvernement français doit défendre ce sujet à l’échelon européen en 2024, que ce soit sous la présidence belge ou hongroise, pour réellement encadrer les pratiques de ces centrales d’achat.
Pour ma part, je considère qu’un des enjeux de ce sujet est le phénomène de concentration des très grands groupes de distribution au sein de centrales d’achat européennes, qui possèdent, par ce biais, une influence disproportionnée. Nous ne devons pas ignorer les terribles conséquences de ce système pour les plus petits acteurs de la distribution et les producteurs locaux.
Il est donc indispensable de légiférer sur la concentration de ces acteurs, ce qui doit se faire à l’échelon tant national qu’européen, avec des autorités de contrôle dotées de moyens de surveillance et de sanction.
Madame la ministre, de manière très concrète, comptez-vous agir sur ce phénomène de concentration au sein des centrales d’achat européennes, qui pèse sur toute la filière et sur nos agriculteurs ? Comment comptez-vous le faire ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, la recherche de la compétitivité ne doit pas être considérée comme un gros mot pour nos agriculteurs : au fond, ce sont des chefs d’entreprise, qui plus est des chefs d’entreprise particulièrement complets, dans la mesure où ils occupent souvent une grande diversité de fonctions au sein de cette entreprise.
L’utilité de la loi Égalim 2 a été démontrée : elle était nécessaire pour protéger le revenu des agriculteurs. Aujourd’hui, elle doit s’appliquer sans aucune condition. Votée en 2021, elle est désormais connue de tous ; il est donc temps de lancer des contrôles pour s’assurer qu’elle est correctement mise en œuvre. Si tel n’est pas le cas, des sanctions fermes devront être prises. C’est d’autant plus important en cette période où le monde agricole exprime son très fort mécontentement.
Nous constatons également que cette loi a commencé à porter ses fruits : un an après son entrée en vigueur, on note une amélioration du revenu des agriculteurs. Certes, cette amélioration n’est pas suffisante, elle ne touche pas toutes les filières de manière uniforme. Reste que ces premiers résultats nous invitent à penser que cette loi permet d’aller dans le bon sens.
Je le répète, cette loi protège le revenu des agriculteurs et permet de corriger un certain nombre d’inégalités. Toutefois, il ne faut pas oublier les facteurs conjoncturels et structurels pointés du doigt par les agriculteurs à l’occasion de cette crise agricole, facteurs qui affectent les productions et la situation de nos agriculteurs.
La contractualisation constitue la clé de voûte de la loi Égalim 2 ; à l’exception de certaines filières, les dispositions en question sont entrées en vigueur. Nous devons rester très vigilants et nous assurer que ces dispositions sont pleinement appliquées et que les sanctions les plus fermes sont prises pour dissuader ceux qui ne voudraient pas que cette loi puisse entrer pleinement en vigueur.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je remercie tout d’abord le groupe Union Centriste d’avoir pris l’initiative de ce débat, alors que notre pays se trouve en pleine crise agricole.
Permettez-moi de faire part, à distance, de tout mon soutien aux agriculteurs gardois qui manifestent ce matin.
Madame la ministre, nos agriculteurs attendent un plan Marshall de la ruralité. Ils en ont assez que certains les pointent du doigt et les considèrent comme des pollueurs, alors qu’ils sont des aménageurs du territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Le 30 mars 2023 a été promulguée la loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, dite loi Descrozaille. Le Sénat s’est fortement impliqué lors de l’examen de ce texte et a notamment défendu le principe de son article 1er, qui vise à faire appliquer le droit français à toute transaction portant sur des produits ou services commercialisés en France. Force est de constater qu’un certain nombre de grandes enseignes n’ont pas mis fin à leurs pratiques en la matière et continuent de contourner le droit français.
Face à cette situation, le Gouvernement français est tenu de faire appliquer la loi votée au Parlement. C’est une question de principe, mais également de justice, à l’heure où nos agriculteurs expriment leur colère face à des lois qui les pénalisent trop souvent et les protègent trop peu.
L’action de l’État doit être intraitable ; à défaut, ce sera une nouvelle démonstration d’incohérence entre les discours et les actes.
Madame la ministre, je souhaite donc que vous nous indiquiez de façon précise le nombre de contrôles réalisés par la DGCCRF depuis la promulgation de la loi Descrozaille, ainsi que le nombre des sanctions prononcées et leur montant.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur Burgoa, comme le montrent les échanges entre la France et l’Union européenne, il existe encore des difficultés juridiques quant au droit applicable et à la détermination des tribunaux territorialement compétents. Le Gouvernement s’est attelé à cette tâche.
Parallèlement, le Gouvernement engage une action résolue contre les tentatives de contournement du droit français, pour lutter contre les pratiques abusives des centrales d’achat européennes que vous avez tous mentionnées, mesdames, messieurs les sénateurs.
Monsieur Burgoa, pour répondre à votre question le plus concrètement possible, notamment au regard des précisions que j’ai d’ores et déjà apportées dans mes précédentes interventions, je mentionnerai certaines sanctions infligées par la DGCCRF et qui me paraissent emblématiques dans le cadre de la lutte contre ces abus.
Je pense d’abord à l’amende administrative de 6,34 millions d’euros qui a été infligée à Eurelec, à laquelle est rattaché Leclerc, pour absence de signature des conventions avec ses fournisseurs au 1er mars.
Cette centrale d’achat a également été assignée par le ministre de l’économie devant le tribunal de commerce de Paris en juillet 2019 pour soumission de ses fournisseurs à un déséquilibre significatif. En effet, Eurelec a tenté d’imposer la loi belge à ses fournisseurs sans négociation, les privant de la sorte des mécanismes protecteurs du droit français.
Au mois de janvier 2022, c’est l’enseigne Intermarché qui a fait l’objet d’une amende administrative d’un montant de 19,2 millions d’euros pour les pratiques de la centrale AgeCore. Il était reproché à Intermarché de ne pas avoir fait figurer les services internationaux fournis par AgeCore dans des conventions signées.
Enfin, deux entités françaises et une entité belge d’Intermarché ont été assignées en 2021 pour les pratiques d’AgeCore sur le fondement des dispositions relatives à l’avantage sans contrepartie, en raison de l’inconsistance des services de coopération commerciale fournis par la centrale d’achat.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, des sanctions ont été prises. Celles que j’ai mentionnées datent toutes d’avant 2023. Comme je l’ai indiqué à Mme Primas, cinquante contrôles sur les pratiques des centrales d’achat européennes ont été réalisés par la DGCCRF en 2023. (Mme Anne-Catherine Loisier s’exclame.)
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Madame la ministre, je vous remercie des éléments que vous venez de nous fournir. Continuez : les agriculteurs ont besoin d’un véritable contrôle de ces centrales d’achat. Ce ne sont pas des voyous : ils ne comprennent pas que les personnels des agences de l’eau viennent les contrôler armés, alors qu’eux respectent les règles de la République.
M. Guislain Cambier. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bleunven. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Yves Bleunven. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’un des marqueurs de la colère des agriculteurs est la situation économique dans laquelle ils se trouvent et qui touche l’ensemble de nos filières agricoles. L’efficacité toute relative des lois qui se succèdent depuis trente ans n’a pas permis une révolution en matière de construction des prix ; force est de constater que le compte n’y est pas.
La France est dotée d’un arsenal législatif important pour une meilleure rémunération des agriculteurs. Pour autant, qu’en est-il du contrôle du respect de ces règles ? La pratique des centrales d’achat à l’étranger, qui sévit maintenant depuis plus d’une dizaine d’années et qui a été mise en lumière par le rapport de la commission d’enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec leurs fournisseurs, ne cesse de se développer.
Je n’énumérerai pas ces grandes entités – mes collègues l’ont très bien fait précédemment – dont la discrétion délibérée les rend parfaitement inconnues du grand public. Ces groupements internationaux permettent aux distributeurs de s’affranchir du droit français, donc des garde-fous que nous avons mis en place avec les lois Égalim, notamment en matière de respect du calendrier des négociations, cher aux interprofessions.
Nous savons que les négociations commerciales ont été particulièrement difficiles cette année. Samedi dernier, le Premier ministre a promis davantage de contrôles pour s’assurer que les négociations commerciales entre les enseignes des supermarchés et leurs fournisseurs de l’agroalimentaire ne se fassent pas au détriment du prix payé aux agriculteurs.
Quid des contrôles auxquels sont soumises ces grandes centrales d’achat ? La loi Descrozaille a pourtant soumis au droit et aux tribunaux français les contrats négociés avec les grandes et moyennes surfaces via ces centrales d’achat dès lors que les produits sont vendus en France. Combien de contentieux aujourd’hui ?
Si la coercition mise en place est insuffisante, peut-on imaginer, comme le préconisait déjà le rapport de la commission d’enquête de 2019, un encadrement de la création et de l’activité de ces centrales d’achat via une directive européenne ? Où en sont les discussions à ce sujet ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, j’espère avoir déjà apporté des éléments de réponse à vos questions en répondant à M. Burgoa.
Pour renforcer le cadre des négociations, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, s’apprête à lancer une mission gouvernementale sur le cadre appliqué aux négociations commerciales annuelles. Celle-ci sera chargée d’explorer les conditions permettant à la fois de négocier dans un cadre de confiance et de s’adapter aux crises, comme celles qu’on a pu connaître ces dernières années.
L’objectif est d’aboutir à une relation de confiance, une relation plus apaisée entre la distribution, les industriels et les agriculteurs, qui constituent tous trois des maillons indispensables de la chaîne de production.
Une bonne négociation devra s’inscrire dans une logique de valorisation du travail de nos agriculteurs et de nos industriels. Elle devra également permettre, au travers des enseignes de distribution, de montrer ce que la France sait faire de meilleur.
Vous avez évoqué les contrôles. Sachez que le contrôle des négociations qui se sont achevées démarrera prochainement et que le Gouvernement s’est engagé à ouvrir des discussions avec la prochaine Commission européenne pour harmoniser le cadre de ces négociations.
Enfin, madame Loisier – je vous ai vue réagir à ma réponse au sénateur Burgoa –, je voudrais vous préciser que, dans les cas que j’ai cités, les amendes administratives ont bien été payées.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la ministre, comme cela a été souligné, la loi du 30 mars 2023 tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, dite loi Égalim 3, avait un objectif simple dans un contexte d’inflation : faire appliquer le droit français aux produits commercialisés en France, afin de protéger les producteurs.
C’est un sujet d’actualité, alors que les négociations commerciales entrent dans leur dernière phase et que de très nombreux agriculteurs manifestent, en ce moment même, inquiétude et désarroi.
Nous le savons, le Sénat a agi pour sanctuariser, si je puis dire, la matière première agricole dans les négociations commerciales et permettre à nos agriculteurs, qui nourrissent la France, d’obtenir une juste rémunération de leur travail. Je tiens à leur exprimer ici mon soutien plein et entier.
Dans un maquis de règles tatillonnes et infantilisantes, l’interdiction de faire porter la négociation sur le prix d’achat des matières premières agricoles a suscité un grand espoir au sein de la profession.
Mais, comme cela a été souligné, le développement des centrales d’achat à l’étranger, qui échappent de facto au droit français, affaiblit significativement la portée et l’effectivité de cette clause de bon sens.
Pour que notre droit ne soit pas réduit à un catalogue de bonnes intentions, il faut veiller à ce que les tentatives de contournement de la loi française soient mises en échec.
Il apparaît dès lors indispensable de parvenir à une harmonisation des normes à l’échelle européenne pour mettre un terme à cette pratique regrettable.
Ma question est donc simple : quelle voix la France porte-t-elle, au niveau de l’Union européenne, pour faire respecter ses propres règles ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Aeschlimann, vous avez raison : aujourd’hui, en matière de négociations commerciales, les législations européennes sont trop peu harmonisées.
En fait, le seul cadre qui existe actuellement est celui de la directive européenne du 17 avril 2019 sur les pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire. Comme vous le savez certainement, cette directive liste un ensemble de pratiques déloyales qui sont interdites : retards de paiement de plus de trente jours pour les produits alimentaires périssables et de plus de soixante jours pour les autres ; annulations de commandes de produits périssables à brève échéance ; modifications unilatérales des contrats par les acheteurs ; menaces ou exécutions de représailles commerciales par l’acheteur contre le fournisseur.
Or l’on constate que tout cela est bien moins protecteur que la réglementation française, que le paquet Égalim et la loi Descrozaille, notamment, ont permis de consolider au fil des années.
C’est pourquoi la France prépare une stratégie de défense d’une plus grande harmonisation de la réglementation européenne, afin d’éviter tout déséquilibre dans les relations commerciales. Elle mènera ce combat auprès de la Commission européenne qui entrera en fonctions l’été prochain.
Nous l’avons fait, me semble-t-il, pour d’autres filières ; je pense notamment à l’industrie. Tout le monde a pris conscience des enjeux de la maîtrise des filières. Et, comme vous l’avez rappelé à juste titre, nous le devons tout particulièrement aujourd’hui à nos agriculteurs, qui se mobilisent pour rappeler les conditions dans lesquelles ils doivent exercer leur métier. Il me paraît d’autant plus important de travailler à une telle harmonisation pour renforcer notre agriculture française et européenne.
Conclusion du débat
Mme la présidente. En conclusion du débat, la parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Laurent Burgoa applaudit également.)
M. Franck Menonville, pour le groupe Union Centriste. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l’heure où la voix des agriculteurs français et européens résonne avec force partout sur notre continent, en particulier dans notre pays, il est de notre responsabilité d’apporter des réponses concrètes aux problèmes rencontrés par ceux qui nous nourrissent.
Je tiens à saluer la démarche de notre collègue Anne-Catherine Loisier et de notre groupe de l’Union Centriste, qui a permis d’inscrire à notre agenda politique le recours aux centrales d’achat par la grande distribution. Cette question fait évidemment pleinement écho à l’actualité immédiate de notre agriculture.
Notre groupe a souhaité se saisir d’un tel sujet, qui est important et particulièrement d’actualité pour l’équilibre des négociations commerciales et la juste rémunération des agriculteurs.
Eureca, Eurelec, Everest… ces centrales d’achat aux noms inconnus du grand public sont pourtant aujourd’hui des acteurs majeurs de l’agroalimentaire.
Les vagues d’alliances de distributeurs observées en 2014, puis en 2018, ont conduit au renforcement du pouvoir de marché des distributeurs. Je pense notamment aux alliances entre Carrefour et Système U et entre Carrefour et Tesco, ainsi qu’à Horizon, qui regroupe Casino, Auchan, Dia, Metro et Schiever.
Le cas d’Eurelec est symptomatique. En effet, avec cette centrale d’achat installée à Bruxelles, il devient possible pour certains distributeurs de s’affranchir de certaines règles françaises, en matière de droit de la concurrence et de délais de paiement notamment, en organisant une véritable extraterritorialité juridique et réglementaire.
De telles alliances soulèvent deux problèmes majeurs.
Le premier est le fait que ces centrales d’achat échappent trop souvent au droit français et à ses exigences.
Les pratiques d’optimisation juridique, voire d’évasion, des acteurs de la grande distribution doivent aujourd’hui cesser ; le droit français doit s’appliquer partout. Il n’est plus possible que des acteurs français travaillent avec des centrales d’achat installées ailleurs en Europe au mépris des règles, votées par la représentation nationale, protégeant les acteurs économiques de la filière agroalimentaire.
Les lois Égalim doivent s’appliquer à l’ensemble des acteurs. Personne ne peut s’affranchir du respect de l’ensemble des normes, à l’instar du principe de non-négociabilité des matières premières agricoles. C’est une question de justice sociale et d’équité économique. Nous devons être fermes avec les acteurs qui ne jouent pas le jeu.
Le second problème est double : il concerne la transparence et l’asymétrie des informations. Les systèmes d’achats en ligne des détaillants obligent les fournisseurs à fournir des informations sur leurs capacités, leurs usines, leurs profits nets et leurs volumes. Ces informations privilégiées sont ensuite communiquées aux différents distributeurs. Les fournisseurs ont alors des marges de manœuvre très réduites dans les négociations.
Nous devons donc, au plus vite, rééquilibrer et réguler ces relations, dont l’asymétrie grandit avec la puissance des centrales d’achat. Cette réflexion doit s’inscrire dans une volonté globale de bâtir un meilleur équilibre des relations commerciales.
La question d’une réforme de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, dite LME, doit, à mon avis, se poser également et, avec elle, celle de la lutte contre la surconcentration des acteurs et leurs positions dominantes.
Un débat sur les marques de distributeurs doit aussi se tenir. C’est un défi global que nous devons relever.
Le Gouvernement doit être à l’unisson sur ce dossier. Aujourd’hui, les injonctions contradictoires sont trop nombreuses et le manque de volontarisme en matière de contrôle de l’application de la loi Égalim est criant.
Le ministre de l’agriculture ne peut pas être le seul à gérer ce dossier. L’Europe doit aussi s’imposer et imposer ce débat pour harmoniser les procédures de négociation.
Madame la ministre, le moment est venu de passer des mots aux actes en encadrant, voire en sanctionnant davantage de telles pratiques et en protégeant nos agriculteurs, nos producteurs et notre industrie, afin de sortir de cette guerre des prix destructrice de valeur pour notre économie. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec le débat sur les pratiques des centrales d’achat de la grande distribution implantées hors de France.
Nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente-huit, est reprise à onze heures quarante.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Dépistage des troubles du neurodéveloppement
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Union Centriste, de la proposition de loi visant à améliorer le dépistage des troubles du neurodéveloppement, l’accompagnement des personnes qui en sont atteintes et le répit de leurs proches aidants, présentée par Mme Jocelyne Guidez et plusieurs de ses collègues (proposition n° 908 [2022-2023], texte de la commission n° 246, rapport n° 245).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme Jocelyne Guidez, auteure de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme Jocelyne Guidez, auteure de la proposition de loi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à vous faire part de ma satisfaction de voir cette proposition de loi inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée dans le cadre du temps réservé du groupe Union Centriste.
Avant toute chose, je veux remercier vivement mes collègues, de toutes sensibilités politiques, pour leur soutien et leur confiance.
Je tiens aussi à saluer l’engagement d’Annick Jacquemet, rapporteure de la première proposition de loi que j’ai déposée dans ce domaine, le 25 octobre 2021, ainsi que celui d’Anne-Sophie Romagny, rapporteure du présent texte. Elles ont su s’emparer du sujet et en comprendre les enjeux.
Mes remerciements les plus sincères s’adressent également à mes collègues Laurent Burgoa et Corinne Féret, avec qui j’ai eu l’honneur de travailler pendant plusieurs mois sur le rapport d’information intitulé Prise en charge des troubles du neuro-développement : le compte n’y est pas. Les victoires sont belles uniquement si elles sont partagées.
Nous avons donc le plaisir d’examiner aujourd’hui les dispositions d’un texte dont l’intitulé a été amélioré grâce à un amendement de la rapporteure : la notion de « repérage » est en effet préférable à celle de « dépistage ».
Cette initiative parlementaire s’inscrit dans la continuité de ma première proposition de loi et de la mission d’information qui nous a été confiée par la commission des affaires sociales sur les troubles du neurodéveloppement (TND).
À titre personnel, je connais bien le quotidien des enfants concernés, puisque mon petit-fils, qui vient de fêter ses 6 ans, présente un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) haut potentiel et bénéficie d’un suivi pluridisciplinaire hebdomadaire depuis ses 3 ans.
C’est pourquoi j’ai décidé, dès 2021, d’aller plus loin en multipliant les rencontres sur le terrain, auprès des familles, du corps éducatif et du tissu associatif et médico-social.
Je suis heureuse qu’une partie des conclusions de notre rapport d’information aient été reprises par le Gouvernement dans la stratégie nationale 2023-2027 pour les troubles du neurodéveloppement : autisme, dys, TDAH, troubles du développement intellectuel (TDI). Les objectifs de cette nouvelle stratégie me semblent ambitieux. C’est pourquoi j’espère sincèrement qu’ils s’accompagneront de mesures concrètes.
Depuis près de vingt ans, l’action publique a concentré ses efforts sur les troubles du spectre de l’autisme (TSA), et je suis parfaitement consciente de l’ampleur du travail qu’il reste à réaliser. Le passage d’une stratégie pour l’autisme à une stratégie étendue à l’ensemble des TND était néanmoins indispensable.
Je suis satisfaite que le Gouvernement ait pris l’initiative, depuis 2017, de définir de nouvelles priorités pour répondre à l’ensemble des besoins des enfants, des adultes et de leurs familles ; je salue aussi la prise en charge plus spécifique, depuis peu, des personnes souffrant de TDAH.
Les principaux facteurs de risque sont l’existence de TND dans la famille, d’une part, et la prématurité, d’autre part. Or le nombre de bébés nés prématurément augmente depuis plusieurs années. Tous les nouveau-nés vulnérables ne font pourtant pas l’objet d’un suivi spécifique. Selon les études internationales, un enfant sur six présente des TND ; cela représente 18 % des naissances annuelles.
Si l’on transpose ces chiffres à la situation démographique française, on estime que les TDAH concernent 5 % des enfants et 2,5 % des adultes, les troubles dys 5 % à 17 % des enfants en âge scolaire et les TSA 1 % de la population. Mais les données récentes laissent penser que ce taux est plus proche de 2 % des naissances. Sans doute ces évolutions sont-elles dues non seulement à la redéfinition de certains troubles, mais aussi aux efforts accomplis pour en améliorer le repérage.
Face à ce constat alarmant, il est plus que nécessaire de s’interroger sur la manière de garantir l’accès à une scolarisation en milieu ordinaire à tous ces élèves, qui méritent un suivi spécifique, adapté et concret. Trop souvent, l’enjeu central pointé par les différents acteurs est celui du décalage entre les objectifs et la réalité vécue.
Lors d’une visite faisant suite à une interpellation par un maire de mon département, j’ai été sidérée de constater les difficultés rencontrées par une enseignante non spécialisée dans l’autisme et une accompagnante d’élèves en situation de handicap (AESH) dans une classe qui accueillait une dizaine d’enfants présentant un TSA.
Ces élèves ne parlaient pas. Ils criaient, sautaient d’un canapé à l’autre, tiraient les cheveux de l’enseignante et lui donnaient des coups de pied. Bref, elle vivait au quotidien une situation pour le moins difficile. Elle était d’une patience extraordinaire, mais nous a avoué que, si elle aimait énormément ces enfants, elle était néanmoins épuisée face à la complexité d’une telle situation. À mon sens, on ne peut pas parler ici d’inclusion.
Alors que ce terme est sans cesse mis en avant, mes observations de terrain démontrent malheureusement que l’on se retrouve complètement hors de la réalité par manque de moyens humains d’accompagnement.
Faute de places disponibles en institut médico-éducatif (IME), on rend tout le monde malheureux : le corps enseignant, qui se sent impuissant devant la situation actuelle, et les parents, à qui on a donné trop d’espoir. L’inclusion, oui ! Mais donnons-nous les moyens financiers et humains d’offrir un accompagnement de qualité à ces enfants !
« Le handicap n’est pas dans la personne, mais dans l’environnement qui ne sait pas l’accueillir », disait Albert Jacquard.
Les insuffisances d’un système jusqu’ici défaillant, notamment en ce qui concerne le passage d’une unité d’enseignement en maternelle autisme (UEMA) à une unité d’enseignement élémentaire autisme (UEEA), m’ont motivée à rédiger l’article 1er.
Cela entraîne une rupture dans le suivi de ces enfants entre l’école maternelle et l’école élémentaire. Là aussi, par mon expérience, j’ai pu constater le désarroi des enseignants, du corps médical et des parents quand on leur annonce qu’il n’y a pas de place pour cet enfant en école élémentaire et qu’il doit retourner chez lui alors qu’il a fait tant de progrès pendant son cursus en maternelle. D’où mon combat pour la mesure inscrite à l’article 1er.
Compte tenu de la progression constante du nombre d’enfants souffrant de handicap (ESH) scolarisés – il est passé de 134 000 à 430 000 enfants entre 2004 et 2022 –, force est de constater que les efforts sont largement insuffisants. Cette forte progression ne doit pas masquer l’hétérogénéité des situations, le manque de fluidité des parcours entre écoles maternelle et élémentaire, puis entre le primaire et le secondaire, ni le nombre considérable d’enfants dont la scolarisation est loin d’être effective, leur accès à l’école se limitant à quelques heures de cours par semaine.
La nouvelle stratégie nationale pour les TND ne demeure pas muette sur la scolarisation de ces enfants, mais les dispositifs supplémentaires annoncés sont loin de répondre à leurs besoins. Il est urgent d’avancer sur ce sujet.
Dans cette perspective, la rapporteure propose la création d’au moins un dispositif dédié à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un TND, avec l’appui de professionnels du secteur médico-social, dans chaque circonscription académique métropolitaine et académie d’outre-mer, et ce au plus tard le 1er septembre 2027. Je ne puis que partager cette suggestion, qui a pour objectif d’accompagner, d’anticiper et d’agir en amont, même si je suis favorable à ce qu’on aille encore plus loin !
Aussi, le Gouvernement prévoit l’extension du champ d’intervention des dispositifs d’autorégulation (DAR) aux élèves présentant un trouble spécifique du langage et des apprentissages (TSLA) ou un TDAH, ainsi que la priorité qui semble être donnée à l’ouverture de dispositifs à l’école élémentaire et dans l’enseignement secondaire pour assurer la continuité pédagogique. Sur ce sujet, nous ne pouvons que soutenir le Gouvernement et l’inciter à faire davantage en créant des unités d’enseignement secondaire autisme (UESA).
En outre, un travail structurel doit être mené afin d’améliorer la procédure administrative permettant d’obtenir, auprès des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), la notification des mesures d’inclusion scolaire. Il s’agit d’un parcours du combattant pour les familles concernées !
Pour lever ces difficultés, l’article 4 fluidifie les procédures applicables en inscrivant dans la loi la bonne pratique, déjà appliquée par certaines MDPH, de notifier les mesures d’inclusion scolaire pour la durée d’un cycle pédagogique, soit trois ans.
L’idée est simple : éviter d’avoir à remplir les formulaires de renouvellement de droits, ou encore de multiplier les bilans et les tests auprès de professionnels de santé pour lesquels il existe, sur de nombreux territoires, des files d’attente de plusieurs mois.
Elle est pertinente, puisque le renouvellement trop fréquent des dossiers MDPH contribue à emboliser l’accès aux soins pour les enfants en attente de diagnostic.
Je remercie la rapporteure d’avoir secondé ma préoccupation en déposant un amendement tendant à améliorer l’articulation entre les acteurs du diagnostic et les MDPH, en prévoyant que les premiers seront informés des délais de traitement des seconds. L’objectif est d’éviter la situation dans laquelle la programmation des examens de diagnostic conduits par le corps médical dépasse très souvent le délai, d’un mois, de traitement du dossier par la MDPH, ce qui fait perdre aux enfants un an, voire deux ans de mesures d’accompagnement.
Il est aussi temps de mieux former des équipes pédagogiques à l’échelle nationale. C’est l’objet de l’article 2, qui prévoit également le contrôle de la qualité des contenus de leurs formations.
En outre, il faut sensibiliser les professionnels de santé, afin de les inciter à suivre les formations qui sont à leur disposition.
Enfin, je tiens à souligner qu’il n’existe pas aujourd’hui d’ateliers de formation et de sensibilisation destinés aux parents d’un enfant présentant un TDAH. Ces parents en font pourtant la demande, parce qu’ils se trouvent souvent démunis face aux comportements de leur enfant.
J’en viens au repérage précoce des TND. Il est proposé à l’article 6 d’instaurer deux examens médicaux obligatoires de repérage, l’un à 18 mois et l’autre à 6 ans. Ces examens seraient intégralement pris en charge par la sécurité sociale.
Je souhaite enfin attirer votre attention sur le répit des proches aidants, travail que je mène depuis six ans, et la situation des adultes.
Je soutiens la pérennisation immédiate de l’expérimentation du relayage, prévue à l’article 7. Je défends cette idée depuis le mois de septembre dernier. Néanmoins, je déplore que la prise en charge des adultes présentant des TND n’avance que très lentement. Je souhaite que nos débats n’excluent pas cette question extrêmement importante.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quelle que soit notre place dans l’hémicycle, quelles que soient nos convictions politiques, nous sommes tous sensibles au sujet du handicap.
Madame la ministre, la prévention a un coût, mais ne pas en faire a un coût aussi : un coût humain, car enfants, parents et enseignants sont fragilisés ; un coût politique, celui qui est lié à la lutte contre le décrochage ; un coût social, celui qui est lié à l’addiction, à la délinquance et au suicide. Il est donc tout à fait judicieux d’investir aujourd’hui pour que toute la société soit renforcée demain.
Comme l’écrivait Albert Jacquard, auteur d’Éloge de la différence : « Notre richesse collective est faite de notre diversité. “L’autre”, individu ou société, nous est précieux dans la mesure où il nous est dissemblable. »
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Jocelyne Guidez. Mes chers collègues, cette proposition de loi, si vous l’adoptez, sera – je l’espère – un moyen d’accompagnement multidimensionnel en faveur de la prise en charge des TND. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE, RDPI, INDEP et Les Républicains. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, au printemps dernier, nos collègues Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa et Corinne Féret ont rendu les conclusions de leur rapport d’information sur la prise en charge des troubles du neurodéveloppement.
Les TND forment une catégorie de troubles disparates, caractérisés par une perturbation du développement cognitif ou affectif de l’enfant, et toucheraient, selon la délégation interministérielle aux TND, près de 17 % de la population. Ils regroupent les TSA, les TDAH, les troubles spécifiques du langage et de l’apprentissage, aussi appelés « troubles dys », et les TDI.
Les conclusions du rapport de nos collègues sont formelles : malgré les efforts déployés par le Gouvernement, le compte n’y est pas pour la prise en charge des TND. Dans le sillage de ce rapport, Jocelyne Guidez a donc déposé une proposition de loi afin d’améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des TND et de favoriser le répit des proches aidants. C’est ce texte qui est soumis au vote de notre assemblée aujourd’hui.
Danton disait : « Après le pain, l’éducation est le premier besoin d’un peuple. » L’éducation, c’est la clé de voûte de notre civilisation ; c’est le ciment de notre société. C’est la raison pour laquelle nous nous devons de garantir à tous les élèves, y compris à ceux qui présentent un TND complexe, l’accès à un parcours scolaire aussi ordinaire que possible, à proximité de leur domicile.
La France compte aujourd’hui 516 dispositifs spécifiques dédiés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un TND et nécessitant un accompagnement médico-social particulier. Il s’agit des UEMA, des UEEA et des DAR.
Si les objectifs de la stratégie pluriannuelle sont atteints, il y aura un peu moins de 900 dispositifs à l’horizon 2027, ce qui me paraît tout à fait insuffisant dans la mesure où 7 000 enfants autistes naissent chaque année en France. Il est nécessaire que la Nation se mobilise davantage, afin de porter le nombre de ces dispositifs à au moins 1 300 d’ici à 2027.
C’est à cette fin que la commission a réécrit l’article 1er pour en assurer l’applicabilité, dans une démarche à la fois ambitieuse et réaliste. Il s’agissait ainsi de prévoir la création d’au moins un dispositif spécifique dédié à l’accueil des élèves présentant un TND nécessitant un accompagnement médico-social particulier par circonscription académique d’ici à la rentrée 2027. La commission vous proposera de renforcer encore davantage le dispositif, en prévoyant l’ouverture d’au moins une UEMA ou UEEA par circonscription et d’au moins un dispositif d’autorégulation par département.
En tout état de cause, madame la ministre, j’attire votre attention sur l’enjeu de continuité des parcours scolaires des élèves bénéficiant de ces dispositifs. Nous ne disposons aujourd’hui que de 128 UEEA pour 319 UEMA. Par conséquent, il arrive bien souvent que, compte tenu de la spécificité de leur trouble, les élèves accueillis en UEMA se trouvent sans solution de scolarisation en sortie de maternelle. De même, il n’existe pas d’équivalent à ces dispositifs dans l’enseignement secondaire. La commission vous invite donc, madame la ministre, à mieux équilibrer les créations de dispositifs et à parachever l’accompagnement proposé, en créant des UESA au collège et au lycée.
Un autre point saillant du rapport de Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa et Corinne Féret est la complexité de la procédure qui aboutit à la notification des mesures d’inclusion scolaire nécessaires. Cette procédure est bien souvent un véritable parcours du combattant. Sur ce sujet, la loi ne peut pas tout ; j’appelle donc les MDPH à poursuivre et à intensifier leurs efforts pour simplifier les procédures applicables et harmoniser leurs pratiques, parfois si disparates que des familles se voient contraintes de déménager dans un autre département.
L’article 4 apportera une première pierre à l’édifice, en inscrivant dans la loi la bonne pratique, déjà appliquée par certaines MDPH, de notifier les mesures d’inclusion scolaire pour la durée d’un cycle pédagogique, soit trois ans.
Un allongement de la durée des droits notifiés, pour les familles, ce sont des demandes de renouvellement plus espacées dans le temps et une charge administrative allégée ; pour les professionnels, ce sont moins de bilans à réaliser, ce qui libérera du temps pour le primodiagnostic et les interventions précoces.
En outre, l’article 4 a été amendé en commission, sur mon initiative, pour prévoir désormais une information des professionnels du diagnostic sur les délais de traitement des MDPH, afin de garantir une meilleure articulation pour une prise en charge plus précoce.
C’est dans la même logique que la commission a adopté l’article 2, tout en en clarifiant la rédaction. Cet article vise à assurer la formation des équipes pédagogiques à l’accueil et à l’accompagnement des élèves présentant un TND.
Là encore, madame la ministre, il me revient d’attirer votre attention sur la qualité parfois perfectible des contenus proposés aux enseignants, mais aussi sur l’incapacité de certains instituts à assurer l’intégralité des vingt-cinq heures de formation obligatoire sur les enjeux de l’école inclusive. Nous comptons sur votre engagement pour y remédier.
La commission a toutefois supprimé l’article 3, qui visait à renforcer la formation des professionnels de santé en contraignant le Gouvernement à inclure les situations de handicap et les TND dans les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu (DPC). Ces dispositions apparaissent en effet largement satisfaites par le droit en vigueur.
La formation n’en demeure pas moins un enjeu essentiel. Les professionnels de santé sont libres de choisir les actions auxquelles ils souhaitent s’inscrire. Or l’Agence nationale du DPC a souligné en audition la faible participation à certaines formations relatives aux TND. J’appelle donc le Gouvernement à renforcer les actions visant à sensibiliser les professionnels sur l’importance de cet enjeu, conformément aux engagements pris dans le cadre de la nouvelle stratégie nationale 2023-2027.
J’en viens maintenant aux dispositions du texte visant à systématiser le repérage précoce des TND, un enjeu clé pour éviter les retards de prise en charge et les risques de surhandicaps associés.
En population générale, malgré un taux de prévalence élevé, autour de 17 %, et un sous-diagnostic avéré, aucun des dix-sept examens obligatoires de l’enfant de moins de six ans n’est aujourd’hui dédié au repérage des TND. Certes, la refonte du carnet de santé devrait permettre une meilleure prise en compte, au sein de chaque examen, du repérage des TND. Pour autant, elle ne créera toujours pas d’examen spécifique et semble donc insuffisante pour répondre de façon adéquate aux enjeux du sous-diagnostic.
À cet effet, l’article 6 de la proposition de loi crée deux examens médicaux obligatoires de repérage des TND, pour tous les enfants. Conformément aux préconisations émanant des auditions, ces examens auront lieu à 18 mois, puis à 6 ans, deux âges charnières pour le repérage et le diagnostic des TND, pour lesquels il n’existe en outre pas d’examen obligatoire aujourd’hui. Condition nécessaire à un déploiement aussi vaste que possible, ces examens seront pris en charge intégralement par la sécurité sociale.
La Haute Autorité de santé (HAS) fait dépendre la stratégie de repérage précoce des facteurs de risque associés à chaque enfant. L’article 5, réécrit par la commission, complète le service de repérage créé par la dernière loi de financement de la sécurité sociale de manière à tenir compte de cette approche graduée, encore insuffisamment appliquée. Ce service s’appuiera désormais non seulement sur les examens obligatoires de l’enfant, mais également sur les examens complémentaires qui peuvent être justifiés par la prématurité ou tout autre facteur de risque identifié.
Enfin, le texte contient un dernier volet, relatif au répit des proches aidants. La commission a décidé de pérenniser les expérimentations mises en place par la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite loi Essoc, qui autorise des dérogations au droit du travail dans le cadre de prestations de relayage à domicile du proche aidant et dans le cadre de séjours de répit aidant-aidé. Ces dispositifs ont été expérimentés pendant une durée suffisante et leur bilan est globalement positif.
Ces solutions de répit de longue durée peuvent soulager temporairement de sa charge le proche aidant et préserver sa santé. Elles apparaissent particulièrement pertinentes dans les cas où l’état de la personne aidée nécessite une assistance permanente.
Afin de tenir compte des retours d’expérience des intervenants et des structures, la commission a adopté un amendement aux termes duquel un accord de branche pourra ajuster certains paramètres de ce dispositif dérogatoire, afin de permettre aux partenaires sociaux de l’adapter aux réalités du terrain.
Mes chers collègues, le texte que nous examinons ce matin, amendé par la commission en accord avec son auteure Jocelyne Guidez – je salue sa détermination et son engagement de longue date sur le sujet –, permettra, me semble-t-il, de simplifier les parcours des personnes présentant des TND, comme ceux de leurs proches. C’est pourquoi je vous invite à l’adopter. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE, RDPI, INDEP et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens d’abord à remercier Mme la sénatrice Jocelyne Guidez, grâce à qui nous discutons, ce matin, du sujet crucial du dépistage et de l’accompagnement des troubles du neurodéveloppement.
Au sein du très large ministère dont je suis chargée, j’aurai évidemment à cœur d’accorder une attention particulière à la situation des personnes en situation de handicap et à celle de leurs familles.
C’est notre devoir et notre honneur que d’être au rendez-vous de l’accompagnement et du soutien de toutes les vulnérabilités face aux épreuves de la vie. Nous devons tout faire pour permettre à chacun de vivre le plus normalement possible. Tel est le sens de l’inclusion.
C’est évidemment à l’école, cœur battant de la promesse républicaine d’égalité et d’émancipation, que nous devons agir pour l’inclusion de tous.
Vous le savez, en lien avec ma collègue chargée de l’éducation nationale, je souhaite faire de la scolarisation des enfants en milieu ordinaire un axe fort de mon action. Cela suppose plusieurs prérequis, en particulier la mise en place de dispositifs de formation et d’accompagnement spécifiques.
Madame la sénatrice, votre proposition de loi répond à cet objectif pour les élèves présentant un trouble du neurodéveloppement.
Comme élue locale ayant exercé différents mandats pendant de nombreuses années, je partage particulièrement votre approche, fondée sur l’accès au bon accompagnement dans tous les territoires.
L’enjeu est également de mieux accompagner les familles dans leurs démarches, qui sont complexes et souvent épuisantes.
Tout l’enjeu est donc de faire en sorte, ensemble, d’éviter le non-recours. C’est pourquoi le Gouvernement est favorable à ce que les mesures accordées par les MDPH pour l’insertion scolaire puissent être accordées pour un cycle scolaire.
Je veux revenir sur quelques autres éléments de cette proposition de loi, même si Mme la rapporteure l’a déjà présentée dans le détail.
Dans le domaine de la santé, la France excelle dans le curatif ; notre enjeu commun, mesdames, messieurs, les sénateurs, est d’atteindre cette qualité en matière de prévention. C’est pourquoi je partage pleinement votre ambition de mieux suivre et dépister ces troubles.
En revanche, il ne nous paraît pas forcément utile d’alourdir encore le parcours de détection précoce – déjà plus de vingt examens obligatoires – que connaissent les enfants de 0 à 6 ans, en y ajoutant un nouvel examen de dépistage. Le Gouvernement proposera donc plutôt d’accorder une attention accrue à la détection des TND dans le parcours existant.
Je salue particulièrement les dispositions de l’article 7. Vous avez raison, madame Guidez : les mesures visant à faciliter le recours à l’accompagnement, regroupées sous le vocable peu élégant, mais efficace, de « relayage », sont capitales.
Comme chacun d’entre nous, j’ai beaucoup de reconnaissance et de respect envers les proches aidants. Je connais l’épuisement moral et physique qui peut être le leur au quotidien. Il est vraiment temps d’apporter des réponses de long terme à cette situation et d’adapter notre droit du travail. Nous touchons là du doigt l’intérêt d’un ministère élargi, susceptible d’agir à la fois sur les métiers du médico-social et sur le droit du travail. Les assouplissements dont nous parlons depuis si longtemps s’en trouveront facilités.
Cette solution de répit, fondée sur une expérimentation qui a fait ses preuves, suscite un véritable espoir chez les millions de personnes concernées. Je tiens à remercier l’auteure comme la rapporteure de ce texte d’avoir défendu cette mesure.
Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez certains que vous pourrez compter sur ma détermination la plus totale.
C’est la troisième fois que j’ai l’honneur de m’adresser à vous en moins d’une semaine pour vous dire combien je souhaite agir à vos côtés en faveur des conditions de vie des personnes en situation de handicap. Ces personnes, en particulier les enfants atteints de troubles du neurodéveloppement, méritent une attention particulière, que l’État va exprimer au travers de sa stratégie en la matière.
Je suis ravie de constater votre engagement sur ce sujet ; en témoigne le large soutien dont bénéficie cette proposition de loi. Déterminé à obtenir des avancées concrètes pour ces personnes et leurs proches, le Gouvernement sera, bien évidemment, à vos côtés. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Burgoa. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. Laurent Burgoa. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, au sein de cet hémicycle, nous devons nous interroger sur la société que nous souhaitons. Toutefois, le législateur ne saurait se contenter d’être un penseur ; il doit s’efforcer d’être un faiseur.
Aux yeux de trop nombreux concitoyens – souvent abstentionnistes d’ailleurs –, notre vie politique ne se paie plus que de mots. Nous autres, parlementaires, serions des femmes et des hommes plus prompts à prendre des postures que des décisions qui se traduisent dans leur vie.
Le chemin vers une société toujours plus inclusive se prépare ; je veux à cet égard remercier ici très chaleureusement notre collègue Jocelyne Guidez, auteure de cette proposition de loi. Elle et moi avions eu le plaisir, avec Corinne Féret, de publier un rapport d’information portant sur la prise en charge des troubles du neurodéveloppement, rapport qui avait mis en lumière le manque de moyens en la matière.
Trop d’incantations, de vœux pieux et de belles annonces ont été faits à ce sujet. Aujourd’hui, les attentes restent nombreuses, trop nombreuses !
Aussi, mes chers collègues, l’adoption en commission de cette proposition de loi – saluons au passage le travail de Mme la rapporteure – est-elle une réelle satisfaction. Ce texte vise à améliorer le repérage et l’accompagnement des troubles du neurodéveloppement, mais aussi à favoriser le répit des proches aidants.
En effet, nous devons garantir la scolarisation, dans les meilleures conditions et sur tous les territoires, des enfants présentant un trouble de ce type.
Si certains dispositifs existants favorisent déjà l’inclusion de ces élèves, ils ne sont pas assez nombreux et je ne peux me résoudre à voir des familles quitter emploi et foyer pour accéder à l’un d’eux.
L’article 1er, réécrit en commission afin de permettre une mise en œuvre plus effective, prévoit la création d’au moins un dispositif dédié à la scolarisation en milieu ordinaire, avec l’appui de professionnels du secteur médico-social, dans chaque circonscription académique métropolitaine et académie d’outre-mer.
Les troubles du neurodéveloppement, comme l’accompagnement des personnes qui en sont atteintes, nécessitent un réel supplément d’énergie. Au travers de l’article 4, nous souhaitons contraindre l’administration à ne pas puiser dans cette énergie, si essentielle pour les familles.
En effet, dans ce domaine comme dans d’autres, la complexité des procédures constitue une charge administrative insupportable. L’article 4 consacre – enfin ! – la nécessité de notifier les aides scolaires pour la durée d’un cycle pédagogique, c’est-à-dire pour trois ans et non pas pour un an seulement, comme c’est le cas actuellement dans certaines MDPH.
Ce même article dispose que les professionnels impliqués dans le diagnostic devront recevoir une information sur les délais des MDPH pour prononcer les mesures d’inclusion, afin de permettre une mise en œuvre aussi rapide que possible de ces dernières.
L’article 2 tend, quant à lui, à renforcer la formation des équipes pédagogiques.
L’article 5 crée deux examens médicaux obligatoires de repérage des troubles du neurodéveloppement. Fixés à 18 mois et 6 ans, ils seront intégralement pris en charge par l’assurance maladie. J’ai bien noté votre léger désaccord sur ces dispositions, madame la ministre, mais cet article est très important, car le repérage précoce des troubles est décisif pour réduire les pertes de chance et, ainsi, améliorer l’efficacité des prises en charge.
En ce qui concerne la pérennisation du dispositif de répit pour les aidants, nous souhaitons permettre aux partenaires sociaux des branches concernées de l’ajuster aux réalités de terrain comme aux spécificités des troubles du neurodéveloppement.
Enfin, nous ne pouvons qu’encourager le Gouvernement à renforcer les actions de sensibilisation et de formation destinées aux professionnels de santé, en particulier aux médecins libéraux. Ils sont en effet les mieux placés pour déceler ces troubles et réduire ainsi les pertes de chance.
La stratégie nationale 2023-2027 pour les troubles du neurodéveloppement affichée par le Gouvernement semble témoigner que celui-ci mesure toute l’importance du sujet ; nous y serons attentifs.
Si cette proposition de loi ne peut pas tout résoudre, elle exploite les outils législatifs en notre pouvoir pour faciliter grandement la vie des familles concernées.
C’est la raison pour laquelle tous les membres du groupe Les Républicains la soutiendront pleinement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Marie-Claude Lermytte. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous débattons aujourd’hui des troubles du neurodéveloppement, ou TND : une abréviation que l’opinion publique – plus particulièrement les parents, la communauté éducative et les professionnels médicaux et paramédicaux – intègre de plus en plus.
Notre pays, animé de longue date par la psychanalyse, prend progressivement conscience de l’existence de ces troubles, quasiment ignorés depuis trop longtemps. On pointait du doigt le mauvais élève, le fainéant, les parents absents et fautifs, mais on ne concevait pas qu’un enfant puisse présenter des symptômes de TDAH, des troubles du langage et des apprentissages, ou encore de nombreux autres dysfonctionnements.
Comparativement à certains pays comme l’Allemagne et la Belgique, ou encore à la province du Québec, la France accuse un retard important en matière de TND.
C’est tout le mérite de la proposition de loi de Jocelyne Guidez que de sensibiliser l’opinion à ce sujet. Quelque 10 % des enfants seraient concernés, soit environ 100 000 naissances par an !
Or, si le dépistage est recommandé systématiquement par la Haute Autorité de santé, il n’est pas obligatoire. L’article 6 a précisément pour objet d’inscrire dans la loi un repérage, en instaurant deux examens obligatoires, qui seraient réalisés, à 18 mois et à 6 ans, par un médecin dûment formé.
Un pas de géant est donc franchi ; nous ne pouvons que nous en réjouir. Mais ce pas de géant risque d’être un pas de côté si vous ne prenez pas en compte, madame la ministre, l’absence cruelle de médecins formés à cette discipline !
C’est là que le bât blesse : seulement 300 médecins sur les 100 000 généralistes diplômés sont formés aux TND. Selon nos informations, il en faudrait environ 3 000 sur l’ensemble du territoire.
Plusieurs raisons expliquent cette réticence à l’égard de cette discipline. Les TND exigent une compétence transversale qui relève de la pédiatrie, de la neurologie, ou encore de la pédopsychiatrie. Ainsi, il n’existe ni spécialité, ni qualification, ni diplôme en la matière, ce qui rend la compétence difficilement lisible. Il faudrait donc une reconnaissance par le Conseil de l’ordre national des médecins et un diplôme.
Cette reconnaissance devrait être également assurée par la sécurité sociale, qui ne rembourse pas à leur juste valeur ces consultations particulièrement longues. (Mme Jocelyne Guidez applaudit.)
La réalité d’aujourd’hui est la suivante : un enfant dont on suppose qu’il est atteint d’un trouble du neurodéveloppement peut bénéficier du forfait d’intervention précoce, qui permet la prise en charge, pendant un an, des frais de bilans et des séances d’ergothérapeute, de psychomotricien ou de psychologue.
Ce forfait a pour but de faciliter le diagnostic. S’il doit être salué comme une avancée, il reste néanmoins limité à certains professionnels et le manque de coordination entre ces derniers est souvent regretté.
Encore faut-il décrocher un rendez-vous ! Ainsi, pour suivre des séances avec un orthophoniste, professionnel indispensable dans le cadre de l’accompagnement des troubles « dys », le délai est aujourd’hui d’une à deux années d’attente.
C’est un motif de découragement, qui peut avoir des conséquences néfastes, notamment sur la scolarité. De plus, il faut que l’enfant soit pris en charge par le professionnel adéquat.
Un médecin spécialisé dans les TND depuis vingt ans m’expliquait que, faute de spécialistes, nombre d’enfants ou d’adolescents sont orientés vers des prises en charge inadaptées. Cela peut entraîner des conséquences dramatiques, alors que, s’ils avaient été accompagnés par les spécialistes appropriés, la cause du trouble aurait été identifiée et le bon traitement aurait été prescrit.
Vous l’aurez compris : il ne suffit pas de dépister si l’on ne peut soigner correctement. Il faut donc prendre le problème à bras-le-corps pour réduire le coût humain et social d’un enfant non soigné. Faute de professionnels, dans certains cas, ce dernier développera des pathologies plus lourdes, telles que la dépression ou des addictions.
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Marie-Claude Lermytte. Il faut donc porter nos efforts sur la formation des médecins et la sensibilisation des personnels enseignants, comme il est proposé à l’article 2.
Cette proposition de loi va dans le bon sens ; c’est la raison pour laquelle notre groupe la soutiendra. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Henno. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer notre collègue Jocelyne Guidez pour sa détermination et la grande énergie qu’elle consacre à ce sujet, qui en a bien besoin ; je veux aussi saluer Mme la rapporteure, particulièrement à l’aise sur cette question, et la féliciter pour son premier rapport.
Madame la ministre, vous avez eu, au fond, la formule juste : tous les problèmes abordés lorsque nous débattons de ces sujets résultent d’un défaut de notre système de soins, celui d’avoir été, de tout temps, orienté vers le curatif au détriment du préventif.
C’est une des raisons pour lesquelles on se focalise souvent sur la crise des urgences. Certes, celle-ci occasionne beaucoup de souffrances, mais on oublie d’autres aspects, comme l’errance thérapeutique, qui rend les parcours douloureux et parfois dramatiques.
Dans un cas comme dans l’autre, on peut parler d’une perte de chance dont les conséquences sont souvent irréversibles.
Les troubles du neurodéveloppement sont un bel exemple de ces pathologies mal connues et mal identifiées, qui, faute de diagnostic et de prise en charge, ont maintenu trop de vies dans la souffrance.
Notre collègue Jocelyne Guidez, concernée à titre personnel par le sujet, est à l’écoute des patients et des familles depuis des années. Elle nous propose aujourd’hui un texte visant à mieux repérer, diagnostiquer et accompagner les TND. Notre groupe salue sa constance et son engagement, en espérant naturellement que cette proposition de loi tant attendue rencontrera le plus large soutien de notre assemblée.
Je rappelle que la catégorie des TND regroupe les troubles du spectre autistique, les troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité et les troubles spécifiques du langage et des apprentissages, dits troubles dys.
Je tiens au passage à excuser notre collègue Nadia Sollogoub, très investie également sur ces sujets, et qui regrette de ne pouvoir être parmi nous ce matin.
Il faut encore ajouter à cette liste les troubles oppositionnels avec provocation (TOP), souvent associés aux TDAH, qui sont extrêmement lourds à gérer et à vivre pour les familles.
Au total, les TND pourraient concerner plus d’une personne sur dix, soit une part très importante de la population, que nous ne pouvons pas laisser sans réponse, sans aide, sans piste, sans une porte à pousser pour mettre un nom sur les troubles et, surtout, sans organiser une prise en charge adaptée.
La Revue neurologique publiait en avril 2022 cette synthèse : « Les […] TND sont fréquents en population générale et perdurent souvent tout au long de la vie, même s’ils peuvent être masqués par des mécanismes de compensation. […] Une reconnaissance des troubles et une prise en charge adaptée favorisent une intégration sociétale de bonne qualité. »
Voilà pourquoi il est essentiel, comme le prévoit l’article 1er de cette proposition de loi, qu’un maillage de classes dédiées aux enfants présentant une forme de TND se mette en place sur le territoire national.
La présidente d’une association de mon département me disait de ces enfants, parfois infatigables, mais plus souvent très fatigables, qu’il leur faut une scolarisation de proximité, sans quoi la fatigue des transports fait perdre le bénéfice d’une scolarité adaptée.
C’est tout l’enjeu de l’inclusion scolaire, qui ne doit pas être source de complications supplémentaires ; il convient à l’inverse de la faciliter administrativement ; d’où les dispositions de simplification proposées à l’article 4. Dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, quand on interroge les familles, la lourdeur administrative fait figure de seconde peine. En matière de santé aussi, les codes ne cessent de grossir. Nous avons donc une obligation de simplification.
Toujours à propos des difficultés de scolarisation, on ne peut que regretter l’absence de mise en place des plans d’accompagnement personnalisés (PAP). S’ils étaient respectés à la lettre, ils permettraient parfois d’éviter des demandes d’heures d’AESH. Certaines choses sont simples, mais essentielles.
Le plus important – je rejoins en cela mon propos sur l’errance thérapeutique – reste la pose du diagnostic, qui doit être facilitée. C’est la raison pour laquelle la formation des soignants et des enseignants est absolument indispensable.
Voir que l’autre est différent, détecter ce qu’il possède de plus ou de moins que des enfants, des parents ou des patients comme nous toutes et nous tous, voilà ce qui permet de ne pas les envoyer, parfois sans retour, dans une voie de garage.
Je veux insister, pour conclure, sur la dimension humaine de cette proposition de loi. « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis », disait Saint-Exupéry. Ce pourrait être une belle devise pour notre société, une société où la différence, loin de faire peur, aurait sa place et laisserait éclore les talents, dans leur diversité.
Pour cela, il faut aussi que les aidants soient reconnus. Cette proposition de loi concerne beaucoup de familles. Je veux encore saluer le travail réalisé par son auteure et par Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier l’auteure de cette proposition de loi, Mme Jocelyne Guidez, et sa rapporteure, Mme Anne-Sophie Romagny, qui nous permettent de légiférer sur cet enjeu majeur, dans le cadre du temps réservé au groupe Union Centriste.
Je salue également nos collègues Corinne Féret et Laurent Burgoa, qui, avec Jocelyne Guidez, ont rédigé, en 2023, un rapport d’information au nom de la commission des affaires sociales sur les troubles du neurodéveloppement.
Je reprendrai leurs mots : non, concernant l’accompagnement des personnes présentant des troubles du neurodéveloppement, « le compte n’y est pas ».
En matière de scolarisation d’abord, si la loi dispose que l’État doit mettre en place les moyens financiers et humains nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants, adolescents ou adultes en situation de handicap, force est de constater qu’il n’y met pas suffisamment de moyens.
Comme tant de professeurs des écoles, je pourrais témoigner du nombre d’enfants qui ne disposent pas d’un accompagnement adéquat en classe. Quel dommage !
Je regrette que cette proposition de loi ne permette pas d’améliorer les conditions de travail des personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap. Nous avions proposé un amendement visant à lutter contre la précarité des AESH et des assistants et assistantes d’éducation. Il a été, malheureusement, jugé irrecevable pour des raisons financières. Dont acte.
Si la proposition de loi de notre collègue Cédric Vial que nous avons examinée au début de cette semaine nous permet d’espérer in fine – si l’État le veut bien – une amélioration de la rémunération des AESH pour leur travail sur le temps méridien, elle ne va pas assez loin. Philippe Mouiller, président de notre commission des affaires sociales, l’affirmait à cette occasion, il faut un véritable statut des AESH pour contrer les causes de la désaffection de ce métier essentiel : faible rémunération, manque de formation et complexité administrative. (M. le président de la commission acquiesce.)
Madame la ministre, l’État doit faire un effort sur cet accompagnement pour permettre la scolarisation de ces enfants en milieu ordinaire ; les personnes concernées le demandent.
Par ailleurs, il est souligné dans la présente proposition de loi que, malgré la prévalence des troubles du neurodéveloppement, aucun examen médical obligatoire parmi les vingt qui existent aujourd’hui n’est dédié spécialement à leur repérage.
L’introduction de deux examens spécifiques est donc une avancée certaine pour réduire les pertes de chance et améliorer l’efficacité des prises en charge et les conditions de scolarité liées à ces troubles. Malheureusement, le parcours auquel vous avez fait allusion, madame la ministre, reste largement insuffisant.
Enfin, le dispositif, prévu à l’article 7, visant à faciliter le recours des aidants au relayage sur le temps long permet une meilleure mise en œuvre du droit au répit des proches aidants, introduit dans la loi en 2015.
L’évaluation de l’expérimentation prévue par la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance est satisfaisante pour les personnes aidées comme pour les professionnels, tant sur le fond que sur l’encadrement des dérogations. Sa pérennisation est donc une bonne idée ; je la salue.
Pour résumer, si elle ne règle pas les questions d’accès à la scolarisation en milieu ordinaire, notamment en matière de formation, cette proposition de loi va dans le bon sens, en particulier en ce qui concerne le repérage des troubles.
Pour cette raison, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord souligner la constance du groupe Union Centriste sur le sujet des troubles du neurodéveloppement.
Nous avions débattu voilà deux ans de cette question, singulièrement des personnes atteintes de troubles du déficit de l’attention. Le groupe UC défend aujourd’hui un texte quelque peu différent : il nous propose d’améliorer non seulement le dépistage des troubles du neurodéveloppement dès le plus jeune âge, mais également l’accompagnement des personnes atteintes, ainsi que celui des personnes qui les entourent.
Ce texte vise à répondre à un enjeu auquel nous sommes, tous et toutes, confrontés dans nos territoires, lors de nos rencontres avec les familles ou les professionnels : celui de l’insuffisance des moyens humains et financiers alloués aux troubles du neurodéveloppement.
Nous avons conscience de la nécessité de renforcer la formation des enseignants et des professionnels de santé et d’améliorer l’accès aux soins, en particulier des enfants.
Les troubles du neurodéveloppement nécessitent un repérage par une équipe pluridisciplinaire et une prise en charge globale adaptée aux symptômes.
Faute de moyens, les centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP) n’ont pas la capacité d’organiser les actions de prévention, de diagnostic et de soins. Les parents attendent malheureusement plusieurs mois – jusqu’à deux ans – avant d’obtenir un premier rendez-vous pour leur enfant.
Ce délai est évidemment inacceptable, d’autant que le retard de diagnostic reporte sur les parents la prise en charge des frais de soins.
Les bilans et les séances de consultation auprès de médecins libéraux représentent pour de nombreuses familles un coût prohibitif qui creuse les inégalités sociales.
Pour obtenir un rendez-vous chez un orthophoniste, par exemple, il n’est pas rare non plus de devoir attendre plusieurs mois et la longue attente, due au manque de spécialistes, retarde également la prise en charge des enfants atteints de troubles de déficit de l’attention.
La formation des équipes enseignantes passe également par une meilleure formation des AESH, qui se mobilisent d’ailleurs – elles nous ont sollicités – pour obtenir de meilleures conditions de travail et de salaire.
Il s’agit majoritairement de femmes en grande précarité qui subissent l’enchaînement de contrats à durée déterminée pendant des années.
Depuis l’instauration des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial), les AESH accompagnent de plus en plus d’élèves, au détriment de la qualité du suivi individuel.
Le personnel est épuisé, et ce sont malheureusement les enfants qui subissent les conséquences de la dégradation des conditions de travail des accompagnantes et des accompagnants.
L’absence de classes spécifiques pour l’accueil des enfants présentant un trouble du neurodéveloppement appelle une réponse d’urgence. Là aussi, des moyens supplémentaires sont nécessaires.
Le Gouvernement s’est engagé à ouvrir dans chaque département un dispositif consacré à l’accueil des élèves de l’enseignement secondaire d’ici à 2027. Nous attendons désormais des actes.
En conclusion, le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky votera évidemment en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les acronymes sont nombreux : TND, TSA, TDAH, TSLA, TDI, etc. Ils recouvrent une multitude de troubles et de situations, mais des difficultés très similaires, malheureusement.
Un enfant sur six est atteint de troubles du neurodéveloppement. Ceux-ci persistent à l’âge adulte chez près de 70 % des personnes concernées. Or la France reste en retard dans ce domaine – nous avons encore beaucoup de progrès à faire.
Cette proposition de loi vise précisément à améliorer les conditions de scolarisation des enfants atteints de ces troubles, à garantir l’établissement d’un diagnostic précoce et à développer les possibilités de répit pour les aidants, ce qui est essentiel.
Le groupe RDSE tient tout d’abord à remercier son auteure, Jocelyne Guidez, dont on connaît l’engagement de longue date et la pugnacité sur ces sujets. Nous saluons également le travail de la rapporteure, qui a amélioré le contenu du texte.
Les familles et le corps éducatif attendent des évolutions législatives, car leur quotidien est particulièrement épuisant.
Pour les enfants qui ne peuvent être accueillis en milieu strictement ordinaire, 11 000 dispositifs spécifiques existent en France : il s’agit, dans la plupart des cas, d’unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis), où les temps de classe ordinaire alternent avec les temps d’enseignement spécialisé.
La stratégie pour l’autisme et les troubles du neurodéveloppement 2023-2027 prévoit la création de 380 dispositifs supplémentaires de prise en charge de ces troubles. Mais cette offre demeure insuffisante pour faire face, notamment, aux quelque 7 000 naissances d’enfants autistes chaque année.
C’est pourquoi nous souscrivons pleinement à la mise en place, dans chaque circonscription académique, au plus tard en 2027, d’au moins un dispositif consacré à la scolarisation en milieu ordinaire d’élèves présentant un trouble du neurodéveloppement.
Cette proposition de loi vise également à mieux former les équipes pédagogiques à l’accueil et à l’éducation des élèves concernés, en complément de la réalisation des vingt-cinq heures de formation obligatoires sur l’école inclusive, qui ne sont d’ailleurs pas toujours intégralement dispensées aux enseignants.
Chacun connaît la prévalence de ces situations et la complexité qu’elles peuvent représenter pour les professeurs. Nous invitons donc le Gouvernement à améliorer, dans sa future réforme de la formation des enseignants, la qualité et la quantité des cours consacrés à l’école inclusive.
Nous souscrivons bien évidemment à l’article 4, qui prévoit, dans la lignée des bonnes pratiques déjà adoptées par certaines MDPH, la notification des aides scolaires pour toute la durée d’un cycle pédagogique, à savoir trois ans. Il est indispensable de soulager les familles confrontées à la complexité et à la longueur des procédures administratives.
Cela m’amène à la question de l’errance diagnostique qui touche encore trop de familles. Si nous devons sensibiliser davantage les professionnels de santé à la détection des troubles, cette proposition de loi apporte deux premières réponses intéressantes.
D’une part, elle met en place des examens de repérage par le médecin traitant aux âges de 18 mois et de 6 ans.
D’autre part, elle consacre le principe d’une détection précoce chez les enfants identifiés comme à risque. Le service de repérage créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 devra ainsi s’appuyer sur les examens obligatoires de l’enfant, mais aussi sur d’éventuels examens justifiés par une naissance prématurée ou par tout autre facteur de risque identifié.
L’enjeu est important : il s’agit de réduire les pertes de chance, d’améliorer les prises en charge et les conditions de scolarité, d’éviter, en somme, des années de souffrance liées à l’errance diagnostique et à une prise en charge inadaptée.
Enfin, cette proposition de loi n’oublie pas non plus les proches aidants. Sous réserve d’un accord de branche entre les partenaires sociaux, elle vise à pérenniser une expérimentation qui permet, depuis 2018, de déroger au droit en matière de temps de travail pour permettre des interventions de longue durée lorsque le proche aidant est en séjour de répit. Ces prestations de relayage sont indispensables pour préserver la santé physique et mentale de ce dernier.
C’est donc avec enthousiasme que l’ensemble du groupe RDSE – c’est assez rare ! (Sourires.) – apportera son soutien à cette proposition de loi. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, on estime qu’environ 11 millions de Français sont atteints d’un trouble du neurodéveloppement.
Les TND sont caractérisés par des perturbations significatives dans le développement de plusieurs fonctions du cerveau, qui affectent la socialisation, la communication, la motricité, l’attention, le raisonnement, la mémoire ou encore les apprentissages. Ils regroupent les troubles du spectre de l’autisme, le trouble du développement intellectuel, le trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité et les troubles dys.
Lors du comité interministériel du handicap du 6 octobre 2022, Élisabeth Borne avait annoncé la poursuite de la politique menée depuis 2018 en faveur des personnes concernées par ces troubles et de leurs familles.
Le Gouvernement a lancé, en novembre dernier, une nouvelle stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement. Fruit d’une concertation entre les différentes parties prenantes, elle a également fait l’objet d’une consultation citoyenne.
Cette nouvelle stratégie comporte six grands engagements : développer la recherche scientifique et partager les connaissances ; garantir l’accompagnement de chaque personne souffrant d’un TND par des personnes bien formées ; repérer encore plus tôt les TND pour aider les enfants à se développer ; adapter la scolarité à tous les âges ; accompagner les adolescents et les adultes ; enfin, faciliter la vie des personnes, des familles, et faire connaître les TND.
Ces six engagements se déclinent en 81 mesures et se traduisent par un budget de 680 millions d’euros pour la période 2023-2027, en nette hausse par rapport à la période 2018-2022.
Le présent texte s’inscrit en complément de cette stratégie gouvernementale. Loin de comporter des avancées exceptionnelles, il introduit néanmoins plusieurs mesures qui nous semblent utiles : scolarisation en milieu ordinaire avec un accompagnement médico-social dans tous les territoires, simplification des démarches administratives pour les familles, formation des professionnels de l’éducation nationale ou encore pérennisation du dispositif de répit pour les aidants.
Le groupe RDPI votera donc en faveur de ce texte, mais sans enthousiasme débordant : la portée de cette proposition de loi nous paraît en effet limitée et plusieurs des dispositifs proposés sont déjà pris en compte dans la stratégie annoncée par le Gouvernement. Nous soutiendrons les amendements de ce dernier, qui apportent des précisions bienvenues ; je vous invite à les considérer avec beaucoup d’attention, notamment en ce qui concerne le relayage à domicile – nous avions déjà défendu une mesure similaire lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
J’aurais aussi souhaité que l’on aille un peu plus loin sur le sujet spécifique de la prise en charge de l’autisme – trouble de neurodéveloppement mal quantifié –, notamment sur l’accompagnement des enfants autistes dans leur accès à l’éducation. Je soutiendrai un amendement à cet égard.
Par ailleurs, je souhaiterais qu’une attention spécifique soit accordée à l’outre-mer, où la connaissance et la prise en charge des troubles du neurodéveloppement est parfois plus lacunaire. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et UC.)
Mme Corinne Féret. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour débattre d’une proposition de loi portant sur un enjeu qui me tient particulièrement à cœur depuis mon élection au Sénat : le dépistage des troubles du neurodéveloppement et, plus globalement, la prise en charge de ces troubles, qui sont avant tout des handicaps, chez l’enfant comme chez l’adulte.
Souvent associés chez une même personne, les TND prennent des formes variées et ont des conséquences plus ou moins sévères : on peut citer les troubles du spectre autistique, les troubles de l’attention avec ou sans hyperactivité, ou encore les troubles dys, comme la dyslexie ou la dyspraxie. La stratégie nationale 2023-2027 pour les TND y intègre également les troubles du développement intellectuel.
La prévalence de chacun de ces troubles est en augmentation constante ces dernières décennies. On le sait notamment grâce à un meilleur repérage.
La loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a permis la reconnaissance des troubles dys ou TDAH en tant que handicap. Plus exactement, elle a reconnu l’existence d’un handicap dû aux troubles des fonctions cognitives, qu’elle a distingués des troubles mentaux ou psychiques. C’était une véritable avancée, qui n’a malheureusement pas été assez suivie d’effets pour les familles concernées, particulièrement en matière de scolarisation.
Pour ma part, je dois bien avouer que je ne suis pas toujours à l’aise avec ce terme de « TND », tant il recouvre des réalités variées et donc des handicaps différents, voire invisibles pour certains.
Surtout, comme je l’ai souligné l’an dernier lorsque j’étais rapporteure, avec Jocelyne Guidez et Laurent Burgoa, de la mission d’information de la commission des affaires sociales sur les troubles du neurodéveloppement, il est regrettable que notre pays ait pris tant de retard.
En 2024, nous pâtissons toujours d’un manque de données, notamment épidémiologiques, qui empêche l’ensemble des acteurs de prendre conscience de l’ampleur des besoins.
Selon la littérature internationale, entre 10 % et 15 % des enfants qui naissent chaque année seraient atteints d’un TND. Cette prévalence impose de renforcer l’action publique. Il nous faut construire une prise en charge globale, à la bonne dimension, pour répondre aux besoins des enfants, des adultes et de leurs familles.
La présente proposition de loi va dans le bon sens, car elle traite de la question du dépistage, du suivi des enfants nés prématurément, de la scolarisation, comme du soutien nécessaire aux proches aidants.
Je me réjouis aussi de la réécriture, en commission, de son article 1er, dont la portée était imprécise et, en tout état de cause, trop large pour garantir son applicabilité.
Il importe d’assurer une répartition équitable sur l’ensemble du territoire national des dispositifs consacrés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un TND, particulièrement de ceux qui sont atteints d’un trouble du spectre autistique complexe, autrement dit qui requièrent un accompagnement médico-social particulier.
Il faut garantir aux familles d’enfants présentant ce type de handicap l’accès à un dispositif adapté à proximité de leur domicile, y compris en zone rurale. Bien évidemment – je veux être parfaitement claire sur ce point –, les enfants présentant des TDAH ou des troubles dys ont toute leur place dans une classe ordinaire, dès lors que des mesures adaptées d’aménagement et d’accompagnement de la scolarité sont prises.
Oui, les enseignants et les personnels d’encadrement des établissements scolaires ont un rôle central à jouer. Ils doivent donc être formés en conséquence. Or leur formation demeure trop lacunaire et inadaptée aux enjeux. Une montée en compétences est nécessaire. Une simple sensibilisation aux difficultés ne suffit pas.
En amont, le rôle de l’enseignant est majeur, car il est le plus à même de repérer les troubles, ce qui ne signifie pas « diagnostiquer ». L’enseignant doit ensuite pouvoir orienter la famille vers un spécialiste, qui réalisera un diagnostic et un bilan pluridisciplinaire.
De même, après le diagnostic, il existe encore trop de disparités dans les accompagnements.
L’amélioration de la formation, initiale comme continue, des professionnels de santé sur le repérage, le diagnostic et l’accompagnement des TND constitue également un enjeu décisif.
On parle beaucoup des enfants, mais combien d’adultes n’ont jamais pu obtenir de diagnostic et ne bénéficient donc d’aucun suivi ? Cela signifie souvent que ces personnes subissent une errance médicale douloureuse, qui s’ajoute à des difficultés dans la vie personnelle et professionnelle.
Nous manquons fortement, il faut bien l’avouer, de professionnels de santé, même si les disparités territoriales sont fortes. Nous ne cessons pourtant d’alerter sur ce sujet, PLFSS après PLFSS, et nous l’avons encore fait l’an dernier dans notre rapport sénatorial. On peut voter toutes les lois, élaborer tous les plans et toutes les stratégies nationales que l’on veut, comment diagnostiquer de manière précoce, puis accompagner, si l’on manque de professionnels ?
Dans mon département du Calvados comme ailleurs, nombre de familles voient leurs vies bouleversées par le handicap. Acceptation du diagnostic, incertitude quant à l’évolution de l’enfant, de ses capacités cognitives, de son degré de dépendance, d’autonomie : ce ne sont pas de petits sujets !
Tout doit être fait pour faciliter la vie des familles et je souscris sans réserve à l’inscription dans la loi de la possibilité de prendre des mesures d’inclusion scolaire pour la durée d’un cycle pédagogique. C’est une mesure attendue.
Enfin, en ce qui concerne le soutien aux proches aidants, il convient de simplifier le recours au relayage sur le temps long, afin d’apporter durablement une solution de répit adaptée. Il faut donc pérenniser les dérogations au code du travail prévues par la loi Essoc.
Je prends acte de la volonté de la rapporteure de permettre aux partenaires sociaux des branches concernées d’ajuster les dispositifs de soutien, afin qu’ils répondent au mieux aux réalités du terrain. Je note surtout qu’ils restent encore trop coûteux pour les familles. Compte tenu de leur intérêt, il serait souhaitable que le financement des prestations soit adéquat.
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera ce texte.
Nous avons une pensée particulière pour toutes les familles en souffrance, pour celles dont la MDPH ne veut pas reconnaître administrativement le handicap de leur enfant, même lorsque le diagnostic a été posé.
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Corinne Féret. En sus de la question des délais de traitement des dossiers, cette disparité selon les départements constitue un vrai problème. Il faut encore agir : j’espère que cette proposition de loi contribuera à améliorer les choses. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord saluer notre collègue Jocelyne Guidez, auteure de cette proposition de loi, pour la qualité de son travail. Nous connaissons tous sa mobilisation au sein de notre commission des affaires sociales sur le sujet du handicap, notamment pour les aidants. Je l’en remercie.
Comme l’a rappelé notre rapporteure Anne-Sophie Romagny – que je remercie aussi et que je félicite pour son premier rapport –, Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa et Corinne Féret ont publié, en mai 2023, au nom de notre commission, un rapport d’information sur la prise en charge des troubles du neurodéveloppement.
Ils ont formulé des préconisations dans l’attente de la présentation par le Gouvernement de la nouvelle stratégie pour l’autisme et les troubles du neurodéveloppement, qui a finalement été dévoilée en novembre dernier.
Ils plaidaient pour que la stratégie vise tous les TND, non seulement les troubles du spectre autistique, mais aussi les troubles de l’attention avec ou sans hyperactivité, et les troubles spécifiques du langage et des apprentissages, dans la mesure où ces différents types de troubles sont souvent associés chez une même personne. Ils souhaitaient que les réponses soient ajustées aux besoins spécifiques de chacun. Cet équilibre est essentiel.
La proposition de loi de Jocelyne Guidez, que nous examinons aujourd’hui, s’inscrit dans le prolongement des travaux de la mission d’information et traduit plusieurs recommandations du rapport en dispositions législatives, afin notamment d’améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des TND, de favoriser la scolarisation des enfants concernés et d’offrir des solutions de répit aux proches aidants.
Malgré la forte progression du nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire, il convient de souligner le manque de fluidité des parcours entre les différents cycles scolaires, ainsi que les difficultés d’accès à l’école des enfants autistes : la scolarisation reste limitée à quelques heures par semaine pour un nombre considérable d’entre eux.
Le texte de la commission répond à ces constats, et c’est très naturellement que ses membres l’ont adopté à l’unanimité.
Je profite de cette tribune pour évoquer la nouvelle stratégie pour l’autisme et les troubles du neurodéveloppement. La commission des affaires sociales souhaiterait être associée à son suivi. Le groupe d’études Handicap du Sénat est déjà mobilisé sur ces enjeux.
Si nous reconnaissons l’effort réalisé par le Gouvernement depuis de nombreuses années, nous savons tous qu’il y a encore des manques, des difficultés. Nous sommes sollicités par beaucoup d’associations et de familles, parce que l’on constate parfois, dans les territoires, un manque d’accompagnement, un manque de places d’accueil dans les structures, notamment pour l’autisme lourd, même s’il est beaucoup question d’inclusion, de nos jours.
Je voudrais aussi rappeler que quelque 7 000 ressortissants français sont encore obligés d’aller en Belgique, faute de trouver une réponse adaptée sur le territoire national : plus de la moitié de ces 1 500 enfants et 6 000 adultes sont concernés par les troubles que nous évoquons.
Nous devons procéder pas à pas. Les moyens financiers déployés sont importants, mais nous avons besoin, madame la ministre, de porter un regard, d’effectuer un suivi particulier sur les politiques que le Gouvernement va mener dans ce domaine, qui constitue le parent pauvre de l’accompagnement du handicap, tant les situations familiales peuvent être délicates et certains handicaps difficiles à accompagner.
C’est un sujet essentiel, même s’il s’agit d’un petit élément de l’ensemble de la politique du handicap. Celle-ci doit être conçue autour du parcours de vie, depuis la détection jusqu’à la fin de vie, en passant par la scolarisation, le travail et l’accompagnement. Cette vision globale est essentielle pour une prise en charge adaptée aux besoins. Madame la ministre, nous sommes mobilisés à vos côtés. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre. Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de vos interventions. Merci pour votre proposition de travailler ensemble, monsieur le président de la commission des affaires sociales.
Je ne rappellerai pas les chiffres, vous les connaissez. Je prendrai simplement l’exemple de la cohorte Marianne, consacrée à la recherche dans le domaine de l’autisme : 1 200 femmes enceintes ainsi que 500 femmes ayant un ou plusieurs enfants atteints d’un TND feront l’objet d’un suivi. Il s’agit de mieux comprendre les facteurs environnementaux et biologiques en cause, de développer la prévention et d’améliorer l’accompagnement. C’est ainsi que nous pourrons avancer.
Madame Souyris, le statut des AESH évoluera. Ils deviendront des accompagnants à la réussite éducative, deuxième catégorie après celle des professionnels.
Madame Apourceau-Poly, grâce aux plateformes de coordination et d’orientation (PCO), nous orientons les enfants atteints de TND vers des séances d’orthophonie, de psychomotricité et d’ergothérapie, sans reste à charge pour les familles. C’est un premier pas, il faut aller plus loin.
Madame Guillotin, la formation des enseignants n’existait pas en 2017. Une centaine d’entre eux ont été formés depuis et nous allons continuer dans cette voie.
Madame Nadille, je vous remercie de votre engagement en faveur du relayage. Nous y reviendrons lors de l’examen des articles. J’ai bien noté vos propos sur les outre-mer ; ils nécessitent en effet une attention particulière.
Nous avons un travail important à réaliser sur les centres de ressource sur l’autisme. Le diagnostic repose sur les médecins généralistes et sur les plateformes de coordination, qui ont permis d’orienter plus de 55 000 enfants depuis leur création.
Monsieur Henno, je vous rejoins sur la nécessité d’assurer un continuum : c’est le sens de notre action.
Ce texte constitue une première approche et apporte quelques réponses concrètes. Les amendements du Gouvernement sont le signe que nous accompagnons votre démarche : je remercie l’auteure de la proposition de loi, ainsi que la rapporteure, dont le premier travail est très prometteur.
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement et à favoriser le répit des proches aidants
TITRE IER
AMÉLIORER LES CONDITIONS DE SCOLARISATION
Article 1er
Après l’article L. 112-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 112-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-1-1. – Au moins un dispositif spécifique dédié à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un trouble du neuro-développement avec l’appui de personnels des établissements et services mentionnés aux 2° et 3° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles est créé dans chaque circonscription académique métropolitaine et académie d’outre-mer au plus tard le 1er septembre 2027. »
Mme la présidente. L’amendement n° 7, présenté par Mme Romagny, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Au plus tard le 1er septembre 2027, sont créés, dans chaque circonscription académique métropolitaine et académie d’outre-mer, au moins un dispositif dédié à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves de l’enseignement primaire présentant un trouble du neuro-développement avec l’appui de personnels des établissements et services mentionnés aux 2° et 3° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles et, dans chaque département, au moins un dispositif dédié à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves de l’enseignement secondaire présentant un tel trouble avec l’appui de personnels des mêmes établissements et services.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Le dispositif adopté par la commission à l’article 1er prévoit la création, au plus tard à la rentrée 2027, d’au moins un dispositif consacré à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un trouble du neurodéveloppement nécessitant un accompagnement médico-social particulier, tous niveaux d’enseignement confondus, dans chaque circonscription académique de l’Hexagone et dans chaque académie d’outre-mer.
Sont ainsi visés les unités d’enseignement en maternelle autisme (UEMA), les unités d’enseignement en élémentaire autisme (UEEA) et les dispositifs d’autorégulation (DAR).
Cet amendement, qui traduit le compromis auquel ont abouti la commission et le Gouvernement, vise à réécrire l’article afin de créer, dans chaque circonscription académique de l’Hexagone et dans chaque académie d’outre-mer, au moins un dispositif consacré à l’accueil des élèves de l’enseignement primaire, c’est-à-dire une UEMA ou une UEEA.
Dans le même temps, nous souhaitons formaliser l’objectif d’ouverture de 102 dispositifs d’autorégulation supplémentaires dans les collèges et les lycées, fixé dans la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement pour 2023-2027, en prévoyant la création, dans chaque département, d’au moins un dispositif consacré à l’accueil des élèves de l’enseignement secondaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Le Gouvernement comprend le sens de cet amendement, dont l’adoption permettrait de clarifier l’ambition du texte. Un travail complémentaire pourra être mené pour affiner la maille territoriale retenue, afin de garantir la meilleure adéquation possible aux besoins des élèves et de leurs familles.
Sur cet amendement, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 1er est ainsi rédigé.
Article 2
Après les mots : « en situation de handicap », la fin de l’article L. 112-5 du code de l’éducation est ainsi rédigée : « ou présentant un trouble du neuro-développement et les différentes modalités d’accompagnement scolaire. »
Mme la présidente. L’amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À l’article L. 112-5 du code de l’éducation, les mots : « et qui comporte notamment » sont remplacés par les mots : « , et notamment de ceux qui présentent un trouble du neuro-développement, et qui comporte ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Avis favorable, madame la présidente.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 2 est ainsi rédigé.
Article 3
(Supprimé)
Article 4
I. – Le 1° du I de l’article L. 241-6 du code de l’action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les mesures propres à assurer son inclusion scolaire peuvent être accordées pour l’ensemble de la durée d’un cycle pédagogique au sens du code de l’éducation ; ».
II (nouveau). – Le cinquième alinéa du 2° du II de l’article 83 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les professionnels associés à ce parcours sont informés des délais de traitement nécessaires à la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles pour se prononcer sur les mesures mentionnées au 1° du I de l’article L. 241-6 du même code. » – (Adopté.)
Après l’article 4
Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’accès et l’accompagnement des enfants et adolescents présentant des troubles du neuro-développement dans les activités périscolaires mentionnées à l’article L. 551-1 du code de l’éducation.
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à appeler le Gouvernement à préciser les modalités d’accompagnement des enfants et des adolescents présentant des troubles du neurodéveloppement durant les activités périscolaires.
La stratégie gouvernementale 2017-2022 n’a pas permis d’améliorer leurs conditions de scolarisation ni leur accompagnement durant ces activités. Or tous les enfants, qu’ils présentent des troubles du neurodéveloppement ou non, doivent avoir le même accès aux activités périscolaires.
Dans certains cas, il est nécessaire de proposer un accompagnement pour qu’un enfant présentant des TND puisse exercer une activité périscolaire.
Une formation et un accompagnement doivent aussi être proposés aux professionnels des secteurs concernés, par exemple les professeurs de conservatoire.
Cet amendement d’appel vise à attirer l’attention du Gouvernement sur ce sujet.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. La question de l’accès, de l’inclusion, de l’accompagnement et de la participation des enfants présentant un TND aux activités périscolaires constitue bien sûr un enjeu important.
Je ne méconnais pas l’intérêt pédagogique majeur de ces activités, qui complètent, sous une forme différente, les apprentissages reçus à l’école. Je ne méconnais pas non plus leur intérêt pour l’épanouissement et le développement des élèves, notamment pour ceux qui présentent des difficultés scolaires et qui pourraient développer une certaine hostilité à l’égard de l’école.
Il est donc urgent de prendre les mesures nécessaires pour permettre l’inclusion dans ces activités périscolaires, dans des conditions adaptées, des élèves présentant un TND, afin qu’ils puissent, quel que soit leur trouble, en profiter au même titre que les autres élèves.
Je comprends l’intention des auteurs de cet amendement. Toutefois, s’agissant d’une demande de rapport, la commission des affaires sociales, conformément à sa position constante en la matière, émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Lors de la Conférence nationale du handicap, en avril dernier, le Président de la République a fixé comme priorité de garantir l’accompagnement des enfants sur tous les temps de la vie.
Le Gouvernement partage ainsi votre préoccupation, madame la sénatrice. Deux mesures ont d’ailleurs été annoncées en ce sens : d’une part, les AESH pourront intervenir durant le temps périscolaire ; d’autre part, les caisses d’allocations familiales déploieront un bonus périscolaire pour financer les adaptations et l’encadrement nécessaires à l’accueil des enfants de 3 à 17 ans en situation de handicap.
Il ne me semble pas pertinent de rédiger un rapport qui ne tiendrait pas compte des effets de ces nouvelles mesures : avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Le temps périscolaire est important pour l’enfant. Les communes ont besoin d’être accompagnées pour former leurs personnels, notamment les animateurs, à la prise en charge des enfants en situation de handicap durant le temps périscolaire, pour qu’ils puissent concevoir et mettre en place des animations périscolaires de qualité, adaptées pour ces derniers.
Je remercie Mme Guidez d’avoir déposé cette proposition de loi. Je sais, madame la ministre, que vous êtes sensible à la formation : n’oubliez pas cet enjeu. Le Gouvernement doit accompagner les collectivités. (Mme la ministre acquiesce.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
TITRE II
ÉTABLIR UN DIAGNOSTIC PRÉCOCE
Article 5
I. – (Supprimé)
II. (nouveau) – La seconde phrase du quatrième alinéa du 2° du II de l’article 83 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est ainsi modifiée :
1° Les mots : « à l’article L. 2132-2 et » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 2132-2 et L. 2132-2-2, » ;
2° Sont ajoutés les mots : « ainsi que, le cas échéant, sur les examens complémentaires justifiés par la naissance prématurée de l’enfant ou tout autre facteur de risque identifié ». – (Adopté.)
Article 6
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° (nouveau) Au deuxième alinéa de l’article L. 2132-1, les mots : « et L. 2132-2-1 » sont remplacés par les mots : « , L. 2132-2-1 et L. 2132-2-2 » ;
2° Après l’article L. 2132-2-1, il est inséré un article L. 2132-2-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 2132-2-2. – Lorsqu’ils sont âgés de dix-huit mois et dans l’année qui suit leur sixième anniversaire, les enfants sont obligatoirement soumis à un examen de repérage des troubles du neuro-développement, réalisé par un médecin dûment formé. Cette obligation est réputée remplie lorsque le médecin atteste de la réalisation de ces examens sur le carnet de santé mentionné à l’article L. 2132-1.
« Ces examens peuvent donner lieu à l’entrée de l’enfant dans le parcours prévu à l’article L. 2135-1. Ils sont pris en charge dans les conditions prévues à l’article L. 162-1-12-1 A du code de la sécurité sociale.
« Les conventions mentionnées à l’article L. 162-5 du même code déterminent, pour les professionnels de santé concernés, les modalités et les conditions de mise en œuvre de ces examens. Celles-ci concernent notamment l’information des personnes concernées, la qualité des examens, le suivi des personnes et la transmission des informations nécessaires à l’évaluation du programme de prévention, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. À défaut d’accord sur la nature, sur les modalités et les conditions de mise en œuvre de ces examens et sur la prise en charge des soins consécutifs à ces examens, ces dernières sont définies par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. »
II. – Le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 6° de l’article L. 160-8, il est inséré un 6° bis ainsi rédigé :
« 6° bis La couverture des frais relatifs aux examens de repérage des troubles du neuro-développement mentionnés à l’article L. 2132-2-2 du même code ; »
2° Après l’article L. 162-1-12, il est inséré un article L. 162-1-12-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 162-1-12-1 A. – Les examens de repérage des troubles du neuro-développement prévus à l’article L. 2132-2-2 du code de la santé publique sont pris en charge, en totalité, par les régimes obligatoires de l’assurance maladie et maternité, et les bénéficiaires de ces actes sont dispensés de l’avance des frais. » – (Adopté.)
TITRE III
SOUTENIR LES AIDANTS
Article 7
I. – La section 5 du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l’action sociale et des familles est complétée par un article L. 313-23-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 313-23-5. – I. – Les établissements et les services mentionnés aux 2°, 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 sont autorisés, lorsqu’ils recourent à leurs salariés volontaires ou à des salariés volontaires mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail et qu’ils ont placés dans les conditions prévues au 1° de l’article L. 7232-6 du même code en vue d’effectuer des prestations de suppléance à domicile du proche aidant d’une personne nécessitant une surveillance permanente, ou lorsqu’ils réalisent ces prestations en dehors du domicile dans le cadre de séjours dits de répit aidants-aidés dont la liste est fixée par décret, déroger aux dispositions législatives et conventionnelles mentionnées au II du présent article, sous réserve du respect du III.
« La mise en œuvre de ces prestations ainsi que des dérogations prévues au II est portée à la connaissance de l’autorité compétente mentionnée à l’article L. 313-3, lorsqu’il s’agit de salariés des établissements ou des services mentionnés au présent I, ou de l’autorité compétente mentionnée à l’article L. 7232-1 du code du travail, lorsqu’il s’agit de salariés placés par les établissements et les services mentionnés au présent I.
« Elle est subordonnée à la délivrance d’une autorisation de service d’aide et d’accompagnement à domicile ou d’un agrément prévu à l’article L. 7232-1 du code du travail lorsque ces prestations ne sont pas comprises dans le champ d’une autorisation ou d’un agrément préexistant.
« II. – Les salariés des établissements et des services mentionnés au I du présent article ne sont soumis ni aux articles L. 3121-13 à L. 3121-26, L. 3122-6, L. 3122-7, L. 3122-17, L. 3122-18, L. 3122-24 et L. 3131-1 à L. 3131-3 du code du travail, ni aux stipulations relatives aux régimes d’équivalence, aux temps de pause, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail de nuit et à la durée minimale de repos quotidien prévues par les conventions et par les accords collectifs applicables aux établissements et aux services qui les emploient.
« Les salariés placés par les établissements et les services mentionnés au I du présent article ne sont pas soumis aux stipulations relatives aux régimes d’équivalence, aux temps de pause, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail de nuit et à la durée minimale de repos quotidien prévues par la convention collective des salariés du particulier employeur.
« III. – La durée d’une intervention au domicile d’une personne mentionnée au II ou en dehors du domicile dans le cadre des séjours dits de répit aidants-aidés mentionnés au I ne peut excéder six jours consécutifs.
« Le nombre de journées d’intervention ne peut excéder, pour chaque salarié, un plafond de quatre-vingt-quatorze jours, apprécié sur chaque période de douze mois consécutifs.
« La totalité des heures accomplies pour le compte des établissements ou des services mentionnés aux 2°, 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 par un salarié ne peut excéder un plafond de quarante-huit heures par semaine en moyenne, apprécié sur chaque période de quatre mois consécutifs. Pour l’appréciation de ce plafond, l’ensemble des heures de présence au domicile ou en établissement, ou sur le lieu de vacances lorsqu’il s’agit des séjours dits de répit aidants-aidés mentionnés au I du présent article, est pris en compte.
« Les salariés bénéficient au cours de chaque période de vingt-quatre heures d’une période minimale de repos de onze heures consécutives. Cette période de repos peut être soit supprimée, soit réduite.
« L’intervention ouvre droit à un repos compensateur équivalent aux périodes de repos et de pause dont les salariés n’ont pu bénéficier, qui peut être accordé en partie pendant l’intervention.
« Un décret définit les conditions dans lesquelles l’établissement ou le service employant ou plaçant le salarié s’assure de l’effectivité du repos compensateur lorsque celui-ci est accordé pendant l’intervention.
« IV. – En cas de décès du conjoint employeur, il est permis au conjoint survivant non-employeur de poursuivre le contrat de travail avec l’aide à domicile employé, sous réserve de l’accord de ce dernier, sous la forme d’un avenant au contrat de travail.
« IV bis (nouveau). – Un accord de branche peut :
« 1° Fixer un nombre maximal de jours consécutifs d’intervention inférieur au nombre fixé au premier alinéa du III ;
« 2° Fixer un nombre maximal de journées d’intervention sur une période de douze mois consécutifs inférieur au plafond mentionné au deuxième alinéa du même III ;
« 3° Prévoir l’application, dans le cadre des prestations mentionnées au I, d’un régime d’équivalence spécifique.
« V. – Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret. »
II (nouveau). – Sont abrogés :
1° L’article 53 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance ;
2° L’article 55 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Mme la présidente. L’amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
1° Remplacer les mots :
et 7°
par les mots :
, 7°, 11° et 12°
et les mots :
sont autorisés
par le mot :
peuvent
2° Après les mots :
surveillance permanente
insérer les mots :
, définie selon des critères fixés par décret
3° Supprimer les mots :
dont la liste est fixée par décret
II. - Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
III. - Alinéa 5
1° Remplacer les mots :
aux articles L. 3121-13
par les mots :
aux articles L. 3121-16
2° Supprimer les mots :
aux régimes d’équivalence,
IV. - Alinéa 6
1° Supprimer les mots :
aux régimes d’équivalence,
2° Remplacer les mots :
des salariés du particulier employeur
par le mot :
applicable
V. - Alinéa 7
Supprimer les mots :
mentionnée au II
VI. - Alinéa 9
Remplacer les mots :
et 7°
par les mots :
, 7°, 11° et 12°
VII. - Alinéa 10
1° Première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, et, au terme de chaque séquence de six heures de travail, d’une pause de vingt minutes consécutives
2° Seconde phrase
Remplacer les mots :
peut être soit supprimée, soit réduite
par les mots :
et ce temps de pause peuvent être supprimés ou réduits
VIII. - Alinéa 13
Remplacer les mots :
l’aide à domicile
par les mots :
le salarié
IX. - Alinéa 17
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre. Le Gouvernement souhaite, par cet amendement, procéder à des ajustements de l’article 7, qui pérennise le cadre dérogatoire au temps de travail mis en place dans le cadre du relayage.
L’amendement vise à élargir les types d’établissements autorisés à faire du relayage, à cibler les profils des personnes aidées éligibles à ces prestations. Il tend à procéder à une clarification pour permettre aux branches de négocier l’application d’un régime d’équivalence et à supprimer la disposition prévoyant que la mise en œuvre des dérogations au droit du travail est subordonnée à la délivrance d’une autorisation de service d’aide et d’accompagnement à domicile afin de ne pas restreindre les prestations de relayage à ces services ou aux services à la personne.
En résumé, l’adoption de cet amendement ne modifierait aucunement l’esprit de l’article 7. Le dispositif proposé vise simplement à préciser ou à ajuster le dispositif.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 8, présenté par Mme Romagny, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 10 à 15
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Par cet amendement, déposé à la dernière minute ce matin, le Gouvernement propose des améliorations rédactionnelles et des assouplissements au dispositif prévu à l’article 7 : ces modifications vont dans le sens souhaité par la commission.
Deux points de divergence demeurent toutefois.
D’une part, le Gouvernement propose l’application des régimes d’équivalence dans le cadre du dispositif, c’est-à-dire la possibilité d’assimiler à la durée légale du travail une durée de présence supérieure pour les emplois qui comportent des périodes d’inaction. La commission avait souhaité qu’un accord de branche puisse définir, dans ce cadre de prestations de relayage, des régimes d’équivalence spécifiques. Toutefois, cette modification nous semble acceptable dans la mesure où ces régimes sont, en tout état de cause, définis par convention de branche.
D’autre part, le dispositif proposé introduit la définition par décret de critères auxquels les profils des personnes aidées doivent répondre pour avoir accès aux prestations de relayage. Ces critères pourraient se révéler restrictifs, raison pour laquelle la commission a déposé ce sous-amendement qui tend à supprimer ce renvoi à un décret.
La commission est donc favorable à cet amendement, sous réserve de l’adoption de son sous-amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 8 ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Madame la rapporteure, je tiens tout d’abord à vous dire que j’ai eu à cœur, depuis mon arrivée au Gouvernement, de vous recevoir et de travailler avec vous pour que nous puissions aboutir, dans un délai très court, à un texte consensuel.
Les sénateurs ne peuvent rien aux remaniements ministériels et les nouveaux membres du Gouvernement essaient de leur côté de s’adapter au plus vite. Je tenais à le souligner.
Votre sous-amendement vise à supprimer le renvoi à un décret en raison du manque de précision des critères évoqués et par crainte que cela ne conduise à restreindre le dispositif.
Il est vrai que la confiance n’exclut pas le contrôle. Toutefois, il est nécessaire de cibler et de définir correctement des critères dans une perspective de pérennisation du dispositif pour que le périmètre soit le plus pertinent possible. Or il n’est pas possible aujourd’hui de fixer ces critères dans la loi de manière limitative. C’est pourquoi le Gouvernement souhaiterait maintenir le renvoi à un décret.
Pour autant, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur ce sous-amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Après l’article 7
Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par Mme Nadille, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi puis tous les trois ans, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la prise en charge de l’autisme en général, en particulier sur l’accès à l’éducation des enfants autistes, intégrant une évaluation quantitative et qualitative de cet accès.
La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport, dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur du présent texte, puis tous les trois ans, sur la prise en charge de l’autisme en général, en particulier sur l’accès à l’éducation des enfants autistes.
En effet, plusieurs associations représentant les personnes autistes mettent en avant le manque de régularité dans la publication des indicateurs, ce qui tend à compliquer encore la définition d’objectifs précis.
L’État doit être capable de mesurer rigoureusement les moyens déployés pour répondre à cet enjeu et pour faire le point, vingt ans après la première condamnation par le Conseil de l’Europe pour discrimination à l’égard des enfants autistes dans leur accès à l’éducation, sur les avancées réalisées et sur celles qui sont encore à accomplir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Là encore, s’agissant d’une demande de rapport, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. La stratégie nationale 2018-2022 pour l’autisme au sein des troubles du neurodéveloppement a permis des avancées. Cette stratégie fait l’objet chaque année, depuis 2020, d’une étude d’impact ; il en ira de même de la nouvelle stratégie : une étude d’impact sera réalisée et rendue publique.
Cette évaluation englobera l’ensemble des troubles du neurodéveloppement, avec une attention particulière pour l’autisme – j’y veillerai, madame la sénatrice –, plus précisément l’autisme accompagné de troubles du développement intellectuel. Votre demande étant satisfaite, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi dont la commission a ainsi rédigé l’intitulé : proposition de loi visant à améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement et à favoriser le répit des proches aidants.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 113 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 339 |
Le Sénat a adopté à l’unanimité. (Applaudissements.)
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Je ne peux que me réjouir que cette proposition de loi soit adoptée par le Sénat. Il s’agit là d’un signal fort envoyé aux familles et aux enfants présentant des TND pour un meilleur repérage et un accompagnement renforcé.
Je me félicite également que nous ayons trouvé sur ce texte un accord transpartisan et je souhaite remercier l’ensemble des groupes politiques d’avoir de nouveau donné la preuve, à ceux qui en douteraient encore, qu’au Sénat les clivages politiques peuvent s’effacer sur des textes comportant des mesures utiles et opportunes au service des citoyens.
Je tiens enfin à remercier tout particulièrement l’auteure du texte, Jocelyne Guidez, (Mme Annie Le Houerou applaudit.) pour ses conseils, et à saluer de nouveau son engagement sans faille sur le sujet des TND comme sur celui des aidants. (Applaudissements.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Loïc Hervé.)
PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Droit applicable aux collectivités locales
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe Union Centriste, les explications de vote et le vote sur la proposition de loi tendant à améliorer la lisibilité du droit applicable aux collectivités locales, présentée par M. Vincent Delahaye et plusieurs de ses collègues (proposition n° 448 rectifié [2022-2023], texte de la commission n° 261, rapport n° 260).
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Nathalie Delattre, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour la troisième fois depuis 2019, notre assemblée est réunie pour examiner un texte dit Balai, issu des travaux du Bureau d’abrogation des lois anciennes et inutiles créé en 2018 sur l’initiative de notre collègue Vincent Delahaye, dont je salue l’engagement sans faille au service de la clarté du droit.
Lors de l’examen de la première proposition de loi Balai en 2019, pour laquelle j’étais également rapporteure, j’avais pu mesurer à quel point la complexité du droit est susceptible d’égarer les administrés. Comme le relevait Jean-Marc Sauvé, alors vice-président du Conseil d’État, dans son rapport publié en 2016, la simplification et la qualité du droit constituent « la garantie d’une compréhension et d’une prise en charge utile des besoins d’intervention publique [et l’un] des ressorts de la confiance de nos concitoyens dans la légitimité de l’action publique ».
En dépit de ce constat, la quantité de normes applicables ne cesse de croître. En 2023, d’après le secrétariat général du Gouvernement, 347 017 articles législatifs et réglementaires étaient en vigueur, soit 27 000 de plus que lors de l’examen de la proposition de loi Balai I, voilà pourtant moins de cinq ans.
Cosignée par quatre-vingt-dix collègues, la proposition de loi de Vincent Delahaye est l’une des traductions de la volonté du Sénat d’œuvrer en faveur de la qualité du droit, conformément aux principes constitutionnels d’intelligibilité, de clarté et d’accessibilité de la loi.
Les deux premières lois Balai répondaient à une logique chronologique : la loi Balai I a abrogé quarante-huit lois obsolètes adoptées entre 1819 et 1940, tandis que la loi Balai II a abrogé cent quinze lois adoptées entre 1941 et 1980.
La présente proposition de loi Balai III vise également à améliorer la lisibilité et la clarté du droit, mais diffère des deux précédentes lois Balai sur deux points.
D’une part, la proposition de loi Balai III obéit à une logique sectorielle, ciblée sur le droit des collectivités territoriales. En conséquence, l’étendue chronologique des modifications apportées au droit en vigueur est particulièrement large, puisqu’elle débute en 1942 et touche à des articles parfois très récents, comme les articles 55 et 58 de la loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi Agec.
D’autre part, la proposition de loi Balai III se démarque par l’ampleur et la nature des modifications qu’elle entend apporter au droit en vigueur. Elle comporte en effet dix-neuf articles. Parmi ceux-ci, le seul article 15 tend à abroger une soixantaine de lois jugées obsolètes.
Outre l’abrogation de lois obsolètes, la proposition de loi prévoit également, de façon inédite, de codifier des articles de loi, d’abroger des articles du code général des collectivités territoriales et de procéder à des corrections de mentions erronées ou devenues obsolètes au sein de lois ou codes encore en vigueur.
Je ne reviendrai pas sur les effets néfastes d’un droit trop complexe – de très nombreux rapports ont insisté sur ce sujet. Je formule cependant le vœu que la démarche que sous-tend ce texte soit systématisée : lors de l’examen de chaque texte, nous devons nous efforcer d’avoir le réflexe de chercher à abroger une norme antérieure qui serait rendue caduque par la nouvelle.
Le risque inhérent à une opération Balai est d’abroger par erreur un texte d’apparence obsolète, mais qui constituerait toujours le fondement légal d’un acte en vigueur ou d’une situation d’actualité. Les conséquences d’une abrogation accidentelle peuvent s’avérer particulièrement lourdes et préjudiciables.
C’est la raison pour laquelle la commission s’est astreinte à la plus grande rigueur et à la plus grande prudence lors de l’examen des mesures d’abrogation suggérées par cette proposition de loi, le doute sur les conséquences juridiques concrètes la conduisant toujours à renoncer à l’abrogation d’un texte.
En outre, la commission a estimé que ce texte ne devait procéder qu’à droit constant : les modifications de fond nécessitent un débat dédié.
Je vous précise par ailleurs, par souci de transparence, que la commission a conduit ses travaux sur la base de l’avis du Conseil d’État et en étroite collaboration avec les administrations centrales concernées, afin d’aboutir à un texte qui, je l’espère, n’induira aucun effet indésirable et améliorera la lisibilité du droit.
Suivant la position ainsi énoncée, la commission a adopté cinquante amendements. Ces dispositifs, qui œuvrent tous à droit constant, ont permis soit d’ajouter de nouvelles abrogations de dispositions caduques ou de procéder à de nouvelles corrections de références erronées, soit d’effectuer des coordinations manquantes, soit – et c’est la majorité des cas – de revenir sur des abrogations, codifications ou corrections suggérées par la proposition de loi lorsque, par exemple, le caractère obsolète du dispositif n’était pas suffisamment évident.
Dans la continuité de la position de prudence énoncée précédemment, je vous proposerai d’adopter un amendement supplémentaire à l’article 15 afin de rectifier une erreur matérielle et d’éviter l’abrogation d’un dispositif encore utilisé à l’heure actuelle.
Enfin, il est temps, à mon sens, d’évaluer les trois textes Balai et de tirer une méthodologie pour cette demande utile, mais périlleuse et chronophage.
Au bénéfice de ces observations et sous réserve de l’adoption de l’amendement que je vous présenterai, la commission des lois vous propose d’adopter la proposition de loi ainsi amendée. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI, UC, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, madame la rapporteure, monsieur le sénateur Delahaye, mesdames, messieurs les sénateurs, « les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires » : ces mots de Charles de Montesquieu résonnent encore plus fortement aujourd’hui. Cet adage, qui dépasse les clivages partisans, nous devons, ensemble, l’avoir comme boussole.
La clarté de la loi est seule à même de garantir l’effectivité et la légitimité de l’action publique. L’accumulation des normes est source de frustrations et la complexité des lois peut parfois conduire à leur inefficacité pour nos concitoyens, nos entreprises et nos collectivités territoriales.
Vous comprenez donc, monsieur le sénateur Delahaye, que je salue tant l’objectif de votre travail que sa qualité.
L’intention de ce travail d’ampleur, marqué du sceau de la chambre haute, est également partagée par le Président de la République et le Gouvernement. En effet, dès 2017, devant le Parlement réuni en Congrès, le Président de la République, Emmanuel Macron, avait affirmé que la loi « perd dans l’accumulation des textes une part de sa vigueur et certainement de son sens ».
La loi pour un État au service d’une société de confiance, dite loi Essoc, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, ou la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi Asap, ont permis de supprimer plusieurs comités Théodule et de simplifier les démarches administratives dont la complexité peut être source d’injustice.
Plus récemment – c’était le 16 mars 2023 –, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu, a signé avec le président du Sénat, Gérard Larcher, et la présidente de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, Françoise Gatel, une charte pour la simplification des normes applicables aux collectivités territoriales.
Nous devons passer d’une culture de production de la norme à une culture du résultat sur le terrain : proximité, accessibilité, bienveillance.
Je sais combien la commission des lois du Sénat est, depuis de nombreuses années, pleinement mobilisée sur la question de la simplification du droit applicable aux collectivités territoriales. Ce travail d’archéologie législative, amené à se poursuivre, doit néanmoins s’en tenir à ce qui est strictement nécessaire sous peine d’engendrer de l’insécurité juridique.
Le Conseil d’État, saisi de la proposition de loi initiale, avait d’ailleurs émis, dans son avis du 25 mai 2023, un certain nombre de réserves et de recommandations. Le texte que nous examinons aujourd’hui a été amendé en ce sens par la commission, sur l’initiative de sa rapporteure, à laquelle je veux rendre hommage pour son travail minutieux.
De nouveau, permettez-moi de saluer l’esprit constructif et la méthode rigoureuse des travaux du Sénat sur ce texte. Nous partageons totalement la philosophie de ce dernier : tendre toujours plus vers la simplification du droit des collectivités afin qu’elles agissent au mieux au service de nos concitoyens.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ce texte.
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, ce texte est examiné selon la procédure de législation en commission prévue au chapitre XIV bis du règlement du Sénat.
Par courrier en date du 18 janvier, M. Hervé Marseille, président du groupe Union Centriste, a demandé le retour à la procédure normale pour l’examen de l’article 15.
Le vote sur les autres articles de la proposition de loi est donc réservé.
proposition de loi tendant à améliorer la lisibilité du droit applicable aux collectivités territoriales
TITRE II
ABROGATION ET SUPPRESSION DE DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DEVENUES OBSOLÈTES
Chapitre II
Abrogation et suppression de dispositions non codifiées
Article 15
Sont et demeurent abrogés sur tout le territoire de la République :
1° (Supprimé)
2° La loi n° 49-1532 du 1er décembre 1949 mettant en vigueur, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, les dispositions législatives sur la police des bâtiments menaçant ruine ;
3° L’ordonnance n° 59-32 du 5 janvier 1959 portant allégement du contrôle administratif sur les départements et simplification de l’administration départementale ;
4° La loi n° 64-707 du 10 juillet 1964 portant réorganisation de la région parisienne, à l’exception des articles 1er, 12 à 25, 27 à 31, 37, 41 à 43 et 45 ;
5° La loi n° 66-1069 du 31 décembre 1966 relative aux communautés urbaines ;
6° (Supprimé)
7° La loi n° 72-619 du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions, à l’exception des articles 7-1, 16, 16-3 et 21-1 ;
8° La loi n° 75-1331 du 31 décembre 1975 portant réforme du régime administratif de la ville de Paris, à l’exception des articles 24, 28, 30, 31, 31 bis, 32 bis et du dernier alinéa de l’article 33 ;
9° La loi n° 82-623 du 22 juillet 1982 modifiant et complétant la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions et précisant les nouvelles conditions d’exercice du contrôle administratif sur les actes des autorités communales, départementales et régionales, à l’exception de l’article 15 ;
10° (Supprimé)
11° La loi n° 82-684 du 4 août 1982 relative à la participation des employeurs au financement des transports publics urbains et des chèques-transports ;
12° Les articles 60, 61 et 70 de la loi n° 82-1169 du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale ;
12° bis (nouveau) L’article 113 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État ;
13° La loi n° 84-422 du 6 juin 1984 relative aux droits des familles dans leurs rapports avec les services chargés de la protection de la famille et de l’enfance, et au statut des pupilles de l’État ;
14° La loi n° 84-1284 du 31 décembre 1984 portant modification de certaines dispositions relatives aux relations entre l’État et les collectivités locales, à l’exception de l’article 7 ;
15° La loi n° 85-97 du 25 janvier 1985 modifiant et complétant la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 et portant dispositions diverses relatives aux rapports entre l’État et les collectivités territoriales ;
16° La loi n° 85-692 du 10 juillet 1985 modifiant le code électoral et relative à l’élection des conseillers régionaux, à l’exception de l’article 11 ;
17° La loi n° 86-16 du 6 janvier 1986 relative à l’organisation des régions et portant modification de dispositions relatives au fonctionnement des conseils généraux, à l’exception des articles 29 et 36 ;
18° La loi n° 86-17 du 6 janvier 1986 adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière d’aide sociale et de santé, à l’exception des articles 50, 68, 75 et 79 ;
19° La loi n° 86-29 du 9 janvier 1986 portant dispositions diverses relatives aux collectivités locales ;
19° bis (nouveau) L’article 9 de la loi n° 86-972 du 19 août 1986 portant dispositions diverses relatives aux collectivités locales ;
20° La loi n° 87-529 du 13 juillet 1987 modifiant les dispositions relatives à la fonction publique territoriale, sauf l’article 53 ;
21° La loi n° 88-26 du 8 janvier 1988 relative aux élections cantonales ;
22° La loi n° 88-813 du 13 juillet 1988 relative à l’élection des conseillers généraux et dérogeant aux dispositions de l’article L. 221 du code électoral ;
23° (Supprimé)
24° La loi n° 89-899 du 18 décembre 1989 relative à la protection et à la promotion de la santé de la famille et de l’enfance et adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière d’aide sociale et de santé, à l’exception de l’article 17 ;
25° Les articles 13 et 27 de la loi n° 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives à la sécurité sociale et à la santé ;
26° La loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse, à l’exception de l’article 84 ;
27° La loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l’eau ;
28° Les articles 26, 30, 41, 53, 68 à 70, 74, 75, 112, 115, 122, 125 et 128 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République ;
29° L’ordonnance n° 92-254 du 4 mars 1992 portant extension et adaptation à la collectivité territoriale de Mayotte de diverses dispositions relatives aux marchés publics, à l’exception de l’article 5 ;
30° La loi n° 92-722 du 29 juillet 1992 portant adaptation de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d’insertion et relative à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale et professionnelle, à l’exception de l’article 29 ;
31° L’article 47 de la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 de finances rectificative pour 1992 ;
32° La loi n° 94-44 du 18 janvier 1994 rétablissant le renouvellement triennal par moitié des conseils généraux ;
33° La loi n° 94-590 du 15 juillet 1994 relative à la date du renouvellement des conseillers municipaux ;
34° La loi n° 94-1134 du 27 décembre 1994 modifiant certaines dispositions relatives à la fonction publique territoriale, à l’exception de l’article 62 ;
35° L’article 102 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions d’ordre social ;
36° La loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours ;
37° La loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l’attente du vote de la loi instituant une prestation d’autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l’institution d’une prestation spécifique dépendance ;
38° La loi n° 99-36 du 19 janvier 1999 relative au mode d’élection des conseillers régionaux et des conseillers à l’Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux ;
39° La loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale à l’exception des articles 51 à 56 et 67 ;
40° La loi n° 2000-295 du 5 avril 2000 relative à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d’exercice ;
40° bis (nouveau) L’article 9 de la loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 tendant à moderniser le statut des sociétés d’économie mixte locales ;
41° La loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse, à l’exception des articles 30 à 35, 40, 48, 50, 58 ;
42° La loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, à l’exception des articles 56, 114, 131, 155 et 156 à 158 ;
43° L’ordonnance n° 2002-1450 du 12 décembre 2002 relative à la modernisation du régime communal, à la coopération intercommunale, aux conditions d’exercice des mandats locaux à Mayotte et modifiant le code général des collectivités territoriales ;
44° La loi n° 2003-486 du 10 juin 2003 organisant une consultation des électeurs de Corse sur la modification de l’organisation institutionnelle de la Corse ;
45° L’ordonnance n° 2003-902 du 19 septembre 2003 portant suppression de procédures administratives de concertation applicables à certains projets de travaux, d’aménagements et d’ouvrages de l’État et de ses établissements publics ainsi que des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics en relevant ;
46° (Supprimé)
47° La loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004 relative à l’accueil et à la protection de l’enfance ;
48° La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, à l’exception du titre V et des articles 13, du IV de l’article 19, des articles 24, 25, 28, 30, 36, du IV de l’article 56, des articles 73, 84, 97, 98, 119 à 121, 154, 199-1 et 204 ;
49° La loi n° 2005-1563 du 15 décembre 2005 prorogeant la durée du mandat des conseillers municipaux et des conseillers généraux renouvelables en 2007 ;
50° La loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale ;
51° L’article 12 de l’ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007 portant extension des première, deuxième et cinquième parties du code général des collectivités territoriales aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics ;
52° Le IV de l’article 23 de la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire ;
53° L’article 64 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer ;
54° (Supprimé)
55° L’ordonnance n° 2010-137 du 11 février 2010 portant adaptation du droit des contrats relevant de la commande publique passés par l’État et ses établissements publics en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna ;
56° Les articles 28 à 35 de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;
57° La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, à l’exception de l’article 22, du VIII de l’article 24, du III de l’article 83, de l’article 85 et du 3° de l’article 86 ;
58° La loi n° 2011-871 du 26 juillet 2011 fixant le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région ;
59° La loi n° 2011-901 du 28 juillet 2011 tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap, à l’exception de l’article 20 ;
60° L’article 3 de l’ordonnance n° 2012-1398 du 13 décembre 2012 relative au transfert des personnels et des biens et obligations des départements et des régions aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique ;
61° et 62° (Supprimés)
63° La loi n° 2013-713 du 5 août 2013 fixant le nombre et la répartition des sièges de conseiller de Paris ;
64° L’ordonnance n° 2013-1184 du 19 décembre 2013 relative à l’amélioration des conditions d’accès aux documents d’urbanisme et aux servitudes d’utilité publique ;
65° L’article 17, le II de l’article 23 et les articles 31 et 36 de l’ordonnance n° 2014-1543 du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole de Lyon ;
66° L’article 19 de l’ordonnance n° 2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse ;
67° Les articles 12 et 17 de l’ordonnance n° 2018-75 du 8 février 2018 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la Ville de Paris ;
68° (Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mme N. Delattre, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 52
Après la référence :
84,
insérer la référence :
95,
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Nathalie Delattre, rapporteure. Cet amendement vise à rectifier une erreur matérielle afin d’écarter l’abrogation de l’article 95 de la loi de 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. En effet, cet article constitue la base légale de l’inventaire général du patrimoine culturel et ne présente donc pas un caractère obsolète.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous examinons à présent les articles qui font l’objet de la procédure de législation en commission.
Je vous rappelle que, en application de l’article 47 quater, alinéa 1, de notre règlement, seuls sont recevables en séance sur ces articles les amendements visant à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d’autres textes en cours d’examen ou avec les textes en vigueur ou à procéder à la correction d’une erreur matérielle.
En conséquence, nous allons procéder à l’examen des amendements identiques nos 1 et 2 à l’article 17.
TITRE III
ACTUALISATION DE DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES COMPRENANT DES MENTIONS ERRONÉES OU DEVENUES INUTILES
Chapitre Ier
Actualisation du code général des collectivités territoriales
Article 17
[Article examiné dans le cadre de la législation en commission]
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° L’article L. 1115-4-2 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– après les mots : « leurs groupements », sont insérés les mots : « , les entreprises publiques au sens de la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE, les entreprises chargées de l’exploitation de services d’intérêt économique général conformément aux dispositions en vigueur » ;
– les mots : « 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services » sont remplacés par les mots : « 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE » ;
b) Le dernier alinéa est ainsi modifié :
– après le mot : « groupements », sont insérés les mots : « , les entreprises publiques au sens de la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 précitée, les entreprises chargées de l’exploitation de services d’intérêt économique général conformément aux dispositions en vigueur » ;
– la référence : « 2004/18/CE » est remplacée par la référence : « 2014/24/UE » et les mots : « , du 31 mars 2004 » sont remplacés par les mots : « du 26 février 2014 » ;
3° À l’article L. 1421-1, les mots : « et L. 212-33 » sont supprimés ;
4° À l’article L. 1421-3, les mots : « les dispositions des articles L. 212-34 à L. 212-36 » sont remplacés par les mots : « l’article L. 123-3 » ;
5° À la fin du premier alinéa de l’article L. 1424-44, les mots : « dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours » sont supprimés ;
6° À la fin du cinquième alinéa du III de l’article L. 1424-49, les mots : « et celles de l’article L. 1424-8-2 » sont supprimés ;
7° À la fin de l’article L. 1424-50, le mot : « loi » est remplacé par le mot : « section » ;
8° (Supprimé)
9° L’article L. 1511-1-1 est ainsi modifié :
aa) (nouveau) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « des communautés européennes » sont remplacés par les mots : « de l’Union européenne » ;
a) Au dernier alinéa, les mots : « 88-1 du traité instituant la Communauté européenne » sont remplacés par les mots : « 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne » ;
b) Au même dernier alinéa, la référence : « 89 » est remplacée par la référence : « 109 » ;
10° (Supprimé)
10° bis (nouveau) Au dernier alinéa de l’article L. 1612-12, les mots : « , L. 2531-13 et L. 4434-9 » sont remplacés par les mots : « et L. 2531-13 » ;
11° et 12° (Supprimés)
13° Au premier alinéa du II (deux fois) et au IV de l’article L. 1618-2, au b de l’article L. 2221-5-1, à l’intitulé de la sous-section 6 de la section 2 du chapitre III du titre II du livre II de la deuxième partie, au premier alinéa de l’article L. 2223-47, aux premier et avant-dernier alinéas de l’article L. 2223-48, au a du 1° du I de l’article L. 2223-49, au d de l’article L. 4331-2 et, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 4425-26, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;
14° Le II de l’article L. 1822-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : « “dans les conditions fixées par l’article 8 de l’ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007 portant extension des première, deuxième et cinquième parties du code général des collectivités territoriales aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics.” jusqu’à la date prévue au III de l’article 7 de cette ordonnance et par » sont supprimés ;
b) À la fin, les mots : « après cette date » sont supprimés ;
15° À la fin du 5° du I de l’article L. 3131-2 et au 4° du I de l’article L. 4141-2, après la référence : « 2° », les mots : « de l’article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statuaires relatives à la fonction publique territoriale » sont remplacés par les mots : « du I de l’article L. 332-23 du code général de la fonction publique » ;
16° L’article L. 2224-8 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du second alinéa du I, les mots : « , avant la fin de l’année 2013, » sont supprimés ;
b) Au cinquième alinéa du III, les mots : « au plus tard le 31 décembre 2012, puis » sont supprimés ;
17° À la fin de la première phrase du second alinéa de l’article L. 2224-11-4, les mots : « ou, pour les contrats arrivant à échéance dans les six mois suivant la date de promulgation de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, à la date d’expiration du contrat et au plus tard dans un délai de six mois à compter de cette date de promulgation » sont supprimés ;
18° L’article L. 2224-31 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– le début du premier alinéa est ainsi rédigé : « I. – Sans préjudice de l’article L. 111-54 du code de l’énergie, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération, en tant qu’autorités concédantes de l’exploitation des réseaux publics de distribution d’électricité et de gaz en application de l’article L. 111-51 du même code, négocient… (le reste sans changement). » ;
– à la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « l’article 43 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée » sont remplacés par les mots : « les articles L. 135-13 et L. 142-37 du code de l’énergie » ;
– la seconde phrase du même quatrième alinéa est ainsi rédigée : « Ils encourent les peines prévues par les articles L. 111-80 à L. 111-82 du même code en cas de révélation d’informations réprimée par les articles L. 111-80 et L. 111-82. » ;
b) Au premier alinéa du II, les mots : « conditions énoncés à l’article 1er de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et à l’article 16 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée » sont remplacés par les mots ; « obligations énoncés aux titres préliminaires, Ier et II de la première partie du code de l’énergie, » ;
c) Le III est ainsi modifié :
– après le mot : « par », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « l’autorité administrative, dans les conditions précisées à l’article L. 432-6 du code de l’énergie. » ;
– à la seconde phrase, les mots : « le ministre chargé de l’énergie » sont remplacés par les mots : « l’autorité administrative » ;
d) Le IV est ainsi modifié :
– à la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « ou à l’article 61 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales » sont supprimés ;
– à la première phrase du dernier alinéa, les mots : « des dispositions des articles 12 et 24 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée » sont remplacés par les mots : « des articles L. 321-2, L. 321-4, 343-1, L. 343-2 et L. 343-3 du code de l’énergie » ;
19° (Supprimé)
20° Au 8° de l’article L. 2313-1, après la référence : « c », sont insérés les mots : « du 3° du II » ;
21° Au 1° de l’article L. 2333-56, les mots : « au I de » sont remplacés par le mot : « à » ;
22° (Supprimé)
23° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 2334-1, les mots : « aux articles L. 3334-1 et L. 4332-4 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 3334-1 » ;
24° L’article L. 2563-1 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Les mots : « huitième alinéa (7°) » sont remplacés par la référence : « 7° » ;
b) À la fin, les mots : « du dixième alinéa (9°) de l’article L. 2331-8 et des articles L. 2333-58 à L. 2333-63 » sont remplacés par les mots : « et du 9° de l’article L. 2331-8 » ;
25° À l’article L. 2563-5, les mots : « globale d’équipement » sont remplacés par les mots : « d’équipement des territoires ruraux » ;
26° Le second alinéa de l’article L. 3221-9 est supprimé ;
27° (Supprimé)
28° Le 1° du II de l’article L. 4425-22 est abrogé ;
29° L’article L. 4434-9 est abrogé ;
30° L’article L. 4437-3 est ainsi modifié :
a) Au d du 3°, la référence : « , 3 » est supprimée ;
b) (nouveau) Le b du 4° est ainsi rédigé :
« b) L’article L. 4434-8. »
31° La seconde phrase du premier alinéa des articles L. 5211-41-1, L. 5215-40-1 et L. 5216-10 est supprimée ;
32° Le premier alinéa du B du I de l’article L. 5211-9-2 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Après le mot : « culturelles », il est inséré le mot : « , récréatives » ;
33° À l’article L. 5214-16-2, après le mot : « sens », sont insérés les mots « du livre II de la première partie » ;
34° Le 2 ter du II de l’article L. 5842-25 est abrogé ;
35° Les articles L. 6264-7 et L. 6364-7 sont abrogés.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1 rectifié est présenté par Mme Saint-Pé, MM. Bitz, Bonnecarrère, Buis, Capo-Canellas, Cazabonne et Chauvet, Mme de La Provôté, MM. Delcros, Dhersin, Duffourg et Hingray, Mme Jacquemet, MM. Kern, Laugier et Maurey, Mmes Perrot, Romagny, Sollogoub et Vermeillet et M. Wattebled.
L’amendement n° 2 est présenté par M. Chaize.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 34
Après les mots :
en tant
insérer les mots :
qu’autorités organisatrices de la distribution publique d’électricité et de gaz et en tant
La parole est à Mme Denise Saint-Pé, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.
Mme Denise Saint-Pé. Cet amendement vise à assurer une cohérence entre le code général des collectivités territoriales (CGCT) et l’article L. 111-51 du code de l’énergie.
Il est en effet indispensable de conserver la notion d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité et de gaz, car le service public que les collectivités et leurs groupements concèdent ne saurait être circonscrit à l’exploitation des réseaux publics de distribution.
Tout d’abord, si le développement des réseaux relève bien de la mission concédée, les concessions de distribution ne sauraient correspondre à des affermages portant exclusivement sur l’exploitation d’un réseau existant. En outre, force est de constater que la mission de service public de la distribution confiée aux gestionnaires des réseaux de distribution « dans le cadre des cahiers des charges de concession » est, selon les termes mêmes de l’article L. 322-8 du code de l’énergie, bien plus étendue que la seule exploitation des réseaux qui ne constitue qu’un des neuf points cités dans la définition légale.
Il faut également rappeler que l’article L. 334-3 du code de l’énergie mentionne expressément le fait que les autorités organisatrices ont la charge à la fois de la fourniture d’électricité aux tarifs réglementés et de la distribution d’électricité. La mention des seuls réseaux ne serait donc pas compatible avec ces dispositions.
Dans ces conditions, substituer la notion d’autorité concédante de l’exploitation des réseaux à celle d’autorité organisatrice de la distribution dans le CGCT se ferait au détriment de l’amélioration de la lisibilité du droit applicable aux collectivités locales, objectif visé par la proposition de loi.
Mme Nathalie Delattre, rapporteure. Il est vrai que, pour un motif de lisibilité du droit, nous nous étions autorisés à raccourcir le titre de ces autorités en « autorités concédantes », ce qui faisait courir un risque – vous avez tout à fait raison, ma chère collègue – d’insécurité juridique dont les conséquences auraient pu être importantes.
Il est vrai également que ces autorités ne sont pas seulement concédantes, mais aussi exploitantes.
La rédaction proposée vise à revenir à une coordination entre les dispositions du CGCT et celles du code de l’énergie, en réintroduisant les termes « autorités organisatrices de la distribution publique d’électricité et de gaz ».
La commission est donc tout à fait favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je rappelle que le vote sur l’article 17 est réservé.
Avant d’en venir aux explications de vote sur l’ensemble, conformément à l’article 47 quinquies, alinéa 2, du règlement, je vais mettre aux voix l’ensemble des articles ayant fait l’objet de la procédure de législation en commission, précédemment réservés.
proposition de loi tendant à améliorer la lisibilité du droit applicable aux collectivités territoriales
TITRE Ier
CODIFICATION DE DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
Chapitre Ier
Dispositions relatives à l’organisation et au fonctionnement des collectivités territoriales et à leurs relations avec l’État
Article 1er
I. – Après l’article L. 5216-6 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5216-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5216-6-1. – La communauté d’agglomération est substituée dans les délibérations des communes membres, des établissements publics de coopération intercommunale ou des syndicats mixtes comprenant des communes membres, instituant un versement destiné au financement des services de mobilité en application des dispositions de l’article L. 2333-66.
« Jusqu’à la date à laquelle le conseil de la communauté d’agglomération a délibéré sur l’institution d’un versement destiné au financement des services de mobilité et dans un délai ne pouvant excéder six mois à compter de l’arrêté de création ou de transformation, la communauté d’agglomération perçoit le produit du versement sur le territoire des communes où un tel versement avait été antérieurement institué. Le taux applicable sur le territoire de chacune des communes est celui qui avait été adopté par le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’établissement public compétent. »
II. – Au b du 3 de l’article 1636 B undecies du code général des impôts, les mots : « ceux qui se mettent en conformité avec la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale ainsi que pour » sont supprimés.
III. – Le 1° de l’article L. 1221-13 du code des transports est ainsi modifié :
1° Après la référence : « L. 2333-71 », est insérée la référence : « , L. 5216-6-1 » ;
2° À la fin, les mots : « et par l’article 74-1 de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale » sont supprimés.
Article 2
Après l’article L. 1811-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1811-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1811-1-1. – Le haut-commissaire de la République assure, à titre d’information, la publication, y compris par voie électronique, des dispositions du présent code telles qu’elles sont applicables aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics. »
Article 3
(Supprimé)
Article 4
Après l’article L. 2223-40 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2223-40-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2223-40-1. – Les sites cinéraires situés en dehors d’un cimetière public ou d’un lieu de sépulture autorisé et créés avant le 31 juillet 2005 peuvent, par dérogation à l’article L. 2223-40, être gérés par voie de gestion déléguée. »
Article 5
(Supprimé)
Article 6
Après l’article L. 2113-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2113-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2113-1-1. – Les communes fusionnées avant le 17 décembre 2010, date de publication de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, demeurent régies par le présent chapitre et par l’article 1638 du code général des impôts, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 précitée. Toutefois, pour leur application à ces communes :
« 1° L’article L. 2113-16 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 2113-16. – Le représentant de l’État dans le département peut prononcer la suppression de la ou des communes associées lorsqu’il a été saisi d’une demande à cet effet soit par délibération à la majorité des deux tiers des membres du conseil municipal, soit par le tiers des électeurs inscrits de la commune ou de la portion de territoire en question après accomplissement des formalités prévues aux articles L. 2112-2 et L. 2112-3.” ;
« 2° L’article L. 2113-13 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 2113-13. – La création d’une commune associée entraîne de plein droit :
« 1° L’institution d’un maire délégué ;
« 2° La création d’une annexe de la mairie dans laquelle sont notamment établis les actes de l’état civil concernant les habitants de la commune associée.
« La création d’une commune associée peut également entraîner la création d’une section du centre d’action sociale dotée de la personnalité juridique, à laquelle est dévolu le patrimoine du centre d’action sociale ayant existé dans l’ancienne commune et dont les conditions de fonctionnement sont fixées par décret. Cette section peut être supprimée par délibération du conseil municipal ou ses compétences peuvent être transférées dans les conditions prévues au II des articles L. 123-4 et L. 123-4-1 du code de l’action sociale et des familles.
« Les communes associées des communes fusionnées avant le 17 décembre 2010 peuvent, par délibération du conseil municipal, être soumises à la section 2 du chapitre III du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du présent code dans sa rédaction en vigueur.” »
Article 7
I. – Le chapitre V du titre III du livre II du code des communes de la Nouvelle-Calédonie est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Dotations et subventions diverses » ;
2° (Supprimé)
II. – (Supprimé)
III (nouveau). – L’article L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les circonscriptions territoriales des îles Wallis et Futuna sont éligibles à la dotation prévue au présent article. »
IV (nouveau). – Le III de l’article 244 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 est abrogé.
Article 8
(Supprimé)
Chapitre II
Dispositions relatives aux contrats des collectivités territoriales
Article 9
I. – L’article 2060 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics sont autorisés, dans les contrats qu’ils concluent conjointement avec des sociétés étrangères pour la réalisation d’opérations d’intérêt national, à souscrire des clauses compromissoires en vue du règlement, le cas échéant définitif, de litiges liés à l’application et l’interprétation de ces contrats. »
II. – Le 5° de l’article L. 311-6 du code de justice administrative est ainsi rédigé :
« 5° Le dernier alinéa de l’article 2060 du code civil ; ».
Article 10
(Supprimé)
Chapitre III
Dispositions relatives aux sociétés auxquelles participent les collectivités territoriales
Article 11
I. – L’article L. 2141-10 du code de la commande publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lors d’un appel d’offres lancé par une société d’économie mixte locale, les entreprises présentant une candidature ou une offre ne peuvent être exclues du seul fait qu’elles sont actionnaires de la société d’économie mixte, sauf si le règlement de la consultation le prévoit expressément. »
II. – (Supprimé)
III (nouveau). – Au dernier alinéa de l’article L. 225-95-1 du code de commerce, les mots : « d’économie mixte locale » sont remplacés par les mots : « soumise au titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales ».
IV (nouveau). – À l’article L. 531-6 du code de l’énergie, les mots : « d’économie mixte » sont remplacés par les mots : « soumises au titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales ».
V (nouveau). – À la fin de la première phrase du II de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, les mots : « d’économie mixte » sont remplacés par les mots : « soumises au titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales ».
Article 12
(Supprimé)
TITRE II
Abrogation et suppression de dispositions relatives aux collectivités territoriales devenues obsolètes
Chapitre Ier
Abrogation et suppression de dispositions du code général des collectivités territoriales
Article 13
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Les articles L. 1424-13, L. 1424-14, le paragraphe 3 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre IV du titre II du livre IV, les articles L. 1424-36, L. 1424-46 à 1424-48, le II de l’article L. 1872-1, les articles L. 2312-4, L. 2321-4, L. 2334-9, L. 2334-31, le d du 3° du II de l’article L. 2531-13, les articles L. 2563-2, L. 2563-2-1, le II de l’article L. 2364-21, le II de l’article L. 2364-22, les articles L. 2364-23, L. 2564-26, L. 3663-8, le 1° du III et le 1° du IV de l’article L. 3663-9 et l’article L. 4433-24-1 sont abrogés ;
2° Le troisième alinéa de l’article L. 1614-6, les deux derniers alinéas de l’article L. 1852-4, la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 2224-12-3, le second alinéa du VI de l’article L. 2334-14-1, la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 2334-18-2, l’avant-dernier alinéa de l’article L. 2334-18-3, la seconde phrase du quatorzième alinéa et le quinzième alinéa de l’article L. 2334-21, les deux derniers alinéas de l’article L. 2334-24, le troisième alinéa de l’article L. 3334-4, la seconde phrase du 4° de l’article L. 3334-6, la troisième phrase du neuvième alinéa, la seconde phrase du dixième alinéa et l’avant-dernier alinéa de l’article L. 3334-6-1, le quatrième alinéa et la seconde phrase du cinquième alinéa de l’article L. 3334-7, l’avant-dernier alinéa du I de l’article L. 3662-4, le second alinéa de l’article L. 3662-7 et la dernière phrase du 1° de l’article L. 5219-8 sont supprimés ;
2° bis (nouveau) L’article L. 1711-4 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– la référence : « L. 1424-13 » est remplacée par la référence : « L. 1424-12 » ;
– la référence : « L. 1424-22, » est supprimée ;
– après la troisième occurrence du mot : « à », sont insérés les mots : « L. 1424-35-1, L. 1424-36-1 à » ;
– les mots : « , L. 1424-46 et L. 1424-48 à » sont remplacés par le mot : « et » ;
b) Les 2°, 5°, 7°, 10° et 11° du II sont abrogés ;
2° ter (nouveau) Le premier alinéa de l’article L. 1852-4 est complété par les mots : « , après avis du gouvernement de la Polynésie française et du conseil d’administration de l’établissement public d’incendie et de secours de Polynésie française » ;
3° L’article L. 2334-7-2 est ainsi modifié :
a) Le II est abrogé ;
b) La première phrase du deuxième alinéa du III est supprimée ;
4° (nouveau) À l’article L. 3443-1, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « quatrième ».
Article 14
Au premier alinéa de l’article L. 1424-41 du code général des collectivités territoriales, les mots : « transférés en application de l’article L. 1424-13 » sont remplacés par les mots : « qui relevaient d’une commune ou d’un établissement public de coopération intercommunale à la date de la promulgation de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours ».
Chapitre II
Abrogation et suppression de dispositions non codifiées
˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙
Article 16
(Supprimé)
TITRE III
Actualisation de dispositions relatives aux collectivités territoriales comprenant des mentions erronées ou devenues inutiles
Chapitre Ier
Actualisation du code général des collectivités territoriales
Article 17 (précédemment réservé)
Chapitre II
Actualisation d’autres codes
Article 18
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 141-1 est ainsi modifié :
a) À la fin du quatrième alinéa, les mots : « et, le cas échéant, des engagements qu’elle a pris dans le cadre d’un contrat de responsabilité parentale prévu à l’article L. 222-4-1 » sont supprimés ;
b) Au cinquième alinéa, les mots : « d’un contrat de responsabilité parentale dans les conditions fixées par l’article L. 222-4-1 du présent code ou » sont supprimés ;
2° L’article L. 141-2 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « qu’il n’a pas été conclu avec eux un contrat de responsabilité parentale dans les conditions fixées à l’article L. 222-4-1 du présent code et » sont supprimés ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
3° L’article L. 242-11 est abrogé.
II. – (Supprimé)
III. – Le code des communes de la Nouvelle-Calédonie est ainsi modifié :
1° Le septième alinéa de l’article L. 163-12 est supprimé ;
2° (Supprimé)
3° À la fin du 6° de l’article L. 231-2, les mots : « globale d’équipement » sont remplacés par les mots : « d’équipement des territoires ruraux » ;
4° À l’article L. 324-5, les mots : « des dispositions de l’article 44 du traité instituant la Communauté » sont remplacés par les mots : « de l’article 50 du traité sur le fonctionnement de l’Union » ;
5° Au dernier alinéa de l’article L. 352-3, les mots : « 18 de l’ordonnance n° 2006-172 du 15 février 2006 portant actualisation et adaptation du droit applicable en matière de sécurité civile en Nouvelle-Calédonie » sont remplacés par les mots : « L. 725-1 du code de la sécurité intérieure » ;
6° À l’avant-dernier alinéa de l’article L. 352-4, les mots : « 17 de l’ordonnance n° 2006-172 du 15 février 2006 portant actualisation et adaptation du droit applicable en matière de sécurité civile en » sont remplacés par les mots : « L. 742-11 du code de la sécurité intérieure dans sa rédaction applicable à la ».
IV. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° À l’article L. 312-4-1, les mots : « , L. 3231-7, L. 2252-1 et L. 2252-2 » sont remplacés par les mots : « et L. 2252-1 » ;
2° À l’article L. 371-3, la référence : « , L. 312-5-1 » est supprimée ;
3° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 421-9, les mots : « , ou du droit à la ville défini par la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 d’orientation pour la ville » sont supprimés ;
4° La seconde phrase du trente-troisième alinéa de l’article L. 422-2 est supprimée ;
5° À la fin du 3° du I de l’article L. 422-2-1, les mots : « , et par le droit à la ville défini par la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 d’orientation pour la ville » sont supprimés.
V. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° À la fin de la seconde phrase du 8° du II de l’article L. 211-3, les mots : « et suivants, L. 1412-1 et suivants et L. 1415-1 et suivants du code général des collectivités territoriales » sont remplacés par les mots : « à L. 1411-19 et L. 1412-1 à L. 1412-3 du code général des collectivités territoriales ou dans le cadre de contrats régis par l’article L. 1121-2 du code de la commande publique » ;
2° Au deuxième alinéa de l’article L. 229-51, après la référence : « L. 229-50 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
3° À la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 551-2, les mots : « et L. 1612-1 et suivants » sont remplacés par les mots : « ou L. 1612-1 à L. 1612-6 ».
VI. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° L’article 1048 ter est ainsi modifié :
a) Au 1°, les mots : « de l’article L. 1414-16 du code général des collectivités territoriales » sont remplacés par les mots : « des articles L. 2213-9, L. 2213-10 et L. 2233-1 du code de la commande publique » ;
b) Le 4° est complété par les mots : « , dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics » ;
3° (Supprimé)
VII. – (Supprimé)
VIII. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° L’article L. 2122-21 est abrogé ;
2° Le 6° de l’article L. 2331-1 est complété par les mots : « , dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics » ;
3° À la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 2122-6 et du deuxième alinéa du I de l’article L. 2341-1, les mots : « soumis à l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ou d’une autorité concédante soumise à l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession » sont remplacés par les mots : « ou autorité concédante soumis au code de la commande publique » ;
IX. – L’article L. 273-7 du code des juridictions financières est abrogé.
X. – (Supprimé)
XI. – À la fin de l’article L. 441-2 du code de la route, les mots : « L. 131-3, L. 131-4, à l’exclusion du 5e alinéa, L. 131-4-1, L. 131-4-2 et L. 131-5, 1er alinéa, du code des communes applicable dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et par les articles 25, 5e alinéa, et 34, III, 2e alinéa, de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions » sont remplacés par les mots : « L. 2213-1 à L. 2213-6-1 du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon ».
XII. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 112-12, les mots : « 77 de la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse » sont remplacés par les mots : « L. 4424-39 du code général des collectivités territoriales » ;
2° (Supprimé)
XIII. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le IV de l’article L. 1441-6 est abrogé ;
2° L’article L. 6143-1 est ainsi modifié :
a) À la fin du quinzième alinéa, les mots : « , les baux emphytéotiques et les contrats de partenariat mentionnés à l’article L. 6148-2 » sont remplacés par les mots : « ainsi que sur les marchés de partenariat conclus pour le compte de l’établissement par l’État sur le fondement de l’article L. 2211-3 du code de la commande publique » ;
b) Le b est complété par les mots : « du présent code » ;
3° Au 2° de l’article L. 6143-4, la référence : « 10° » est remplacée par la référence : « 9° » ;
4° Le 10° de l’article L. 6143-7 est abrogé ;
5° L’article L. 6148-4 est ainsi modifié :
a) Au début, les mots : « Les opérations mentionnées à l’article L. 6148-2, ainsi que les contrats de partenariat conclus en application du titre Ier de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 » sont remplacés par les mots : « Les marchés de partenariat conclus par l’État pour le compte des établissements publics de santé sur le fondement de l’article L. 2211-3 du code de la commande publique » ;
b) Après la référence : « L. 6111-1 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
6° (nouveau) Au 6° de l’article L. 6414-2, les mots : « les mots : “, les contrats de partenariat en application de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariats” sont supprimés, » sont supprimés.
XIV. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du 1° de l’article L. 381-30-6, les mots : « , en application de l’article 37 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État » sont supprimés ;
2° (Supprimé)
XV. – Le code des transports est ainsi modifié :
1° Au début de l’article L. 1213-4-1, les mots : « Les articles L. 1213-3-1 et L. 1213-3-2 ne sont pas applicables » sont remplacés par les mots : « L’article L. 1213-3-1 n’est pas applicable » ;
2° Au début de l’article L. 2311-1, les mots : « Les dispositions des articles L. 2112-1 et » sont remplacés par les mots : « L’article » et les mots : « ne sont pas applicables » sont remplacés par les mots : « n’est pas applicable » ;
3° Aux articles L. 2331-1 et L. 2341-1, la référence : « L. 2112-1, » est supprimée.
XVI. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° À la fin du 1° du II de l’article L. 321-23, les mots : « de la section 4 du chapitre II du titre Ier de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession ou de la section 4 du chapitre II du titre Ier de la première partie de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics » sont remplacés par les mots : « des articles L. 2511-1 à L. 2511-9 et L. 3211-1 à L. 3211-9 du code de la commande publique » ;
2° L’article L. 332-15 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Au deuxième alinéa, les mots : « par l’alinéa ci-dessus » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « au troisième alinéa du II de l’article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 342-12 du code de l’énergie ».
XVII (nouveau). – Le code de la commande publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 2111-3, les mots : « de biens et de services » sont supprimés ;
2° Au second alinéa de l’article L. 2211-1, les mots : « 12 de la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 » sont remplacés par les mots : « 23 de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 ».
Chapitre III
Actualisation de lois diverses
Article 19
I. – À la première phrase du dernier alinéa de l’article 3 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture, les mots : « l’article 4 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée » sont remplacés par les mots : « les articles L. 2422-8, L. 2422-9 et L. 2422-11 du code de la commande publique ».
II. – Le dernier alinéa de l’article 9 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne est ainsi rédigé :
« Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, l’assemblée délibérante précise les objectifs et les actions qu’elle estime devoir mener pour le développement et l’aménagement des zones de montagne, notamment dans le cadre de l’élaboration du schéma d’aménagement régional prévu à l’article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales. »
III. – À la fin de la dernière phrase du premier alinéa de l’article 44 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière, les mots : « , ou du droit à la ville tel que défini par la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 d’orientation pour la ville » sont supprimés.
IV. – (Supprimé)
V. – Au premier alinéa de l’article 8-1 de la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, la référence : « L. 1522-6 » est remplacée par la référence : « L. 1522-5 ».
VI. – Au premier alinéa de l’article 1er de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer, les mots : « 299, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne » sont remplacés par les mots : « 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».
VII. – L’article 27 de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, les mots : « Les dispositions de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée sont applicables » sont remplacés par les mots : « Le livre IV de la deuxième partie du code de la commande publique est applicable » ;
2° Au second alinéa, les mots : « le I de l’article 4 de cette loi » sont remplacés par les mots : « L. 2422-11 du même code ».
VIII. – La loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris est ainsi modifiée :
1° À l’article 16, les mots : « le II de l’article 2 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée » sont remplacés par les mots : « les articles L. 2211-4 et L. 2422-12 du code de la commande publique » ;
2° À la fin du IV de l’article 17, les mots : « la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 précitée » sont remplacés par les mots : « le livre IV de la deuxième partie du code de la commande publique » ;
3° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 18, les mots : « à la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 précitée » sont remplacés par les mots : « au livre IV de la deuxième partie du code de la commande publique ».
IX. – Au second alinéa de l’article 12 de l’ordonnance n° 2016-489 du 21 avril 2016 relative à la Société du Canal Seine-Nord Europe, les mots : « aux dispositions de l’article 5 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 2422-7 du code de la commande publique ».
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble des articles ayant fait l’objet de la procédure de législation en commission.
(Les articles 1er, 2, 4, 6, 7, 9, 11, 13, 14 et 17 à 19 sont adoptés, les articles 3, 5, 8, 10, 12 et 16 demeurant supprimés.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, nous passons aux explications de vote communes des groupes, à raison d’un orateur par groupe.
Je donne la parole à M. Pierre Jean Rochette, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
M. Pierre Jean Rochette. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, trop de textes, trop de normes, trop de contraintes : nous avons tous constaté, sur ces travées, l’inflation législative et normative, et nous l’avons tous dénoncée.
Ces textes toujours plus longs, amendés par centaines, nuisent en premier lieu à la compréhension et à l’efficacité des politiques publiques. Cette conviction est largement partagée ici, puisque cinq groupes ont cosigné cette proposition de loi, qui a donc un caractère transpartisan.
Comme de nombreux collègues, je suis régulièrement sollicité à ce sujet par les élus et les habitants de mon territoire. La loi est trop complexe, trop obscure et l’on s’y perd. Il arrive parfois que les fonctionnaires et les techniciens de notre pays ne s’y retrouvent pas, eux non plus, comme l’a rappelé hier le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau.
Il suffit également d’échanger avec le monde économique pour être convaincu du fait que cette complexité est un véritable frein à l’attractivité de notre pays. Le sac à dos législatif et normatif est trop lourd pour une société qui veut favoriser l’initiative entrepreneuriale.
Quant aux maires et aux autres élus locaux, ils se retrouvent souvent démunis. C’est pourtant simple : nos élus et nos concitoyens ont besoin de lisibilité pour mener à bien leurs missions. Le climat actuel de surenchère législative ne fait que les enliser davantage dans les difficultés et l’incompréhension.
Cette proposition de loi s’inscrit dans la droite ligne d’une initiative du Sénat, la bien nommée mission Balai, lancée en janvier 2018. Les « fossiles législatifs » – ainsi avaient-ils été alors dénommés – doivent être traqués et chassés de notre corpus juridique, déjà bien dodu.
Comme vous l’avez dit, chère Nathalie Delattre, deux premiers textes ont permis d’abroger 163 lois obsolètes, examinées de manière chronologique.
Le texte qui nous intéresse aujourd’hui innove par son approche sectorielle. L’ampleur de ses ambitions avait été soulignée par le Conseil d’État.
La rapporteure l’a dit, cette proposition de loi modifie une vingtaine de codes différents, en ciblant le droit des collectivités locales. Elle vise à atteindre les objectifs constitutionnels de clarté et d’accessibilité de la loi que nous appelons collectivement de nos vœux.
À cet égard, je tiens à saluer le travail de notre rapporteure. Ses nombreux amendements permettent, dans l’esprit de la mission Balai, de renforcer la visée simplificatrice du texte et de mieux répondre aux remarques du Conseil d’État.
Vous l’aurez compris, notre groupe porte un regard attentif et bienveillant sur ce texte. Plus encore, il y est favorable.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour le groupe Union Centriste.
M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, c’est avec un grand plaisir que je m’apprête à expliquer le vote du groupe Union Centriste sur cette proposition de loi Balai III.
Cette idée m’était venue voilà treize ans. J’avais en effet promis, lors de ma première élection au Sénat, d’œuvrer pour que, lors de l’examen de chaque nouveau texte, nous en supprimions deux anciens.
Je suis content de constater que l’Union européenne elle-même reprend ce principe pour ce qui concerne un certain nombre de normes ou de règles. Nous devons absolument suivre cette logique.
M’apercevant que ce projet était tout de même assez compliqué, j’avais d’abord adopté une démarche chronologique : de 1819 à 1940, puis de 1940 à 1980. Cette partie du travail était relativement simple, puisque les textes concernés ne contenaient aucun article susceptible de s’appliquer – dès lors, il était assez facile de les supprimer.
Avec la présente proposition de loi, nous avons quelque peu modifié notre logique, en suivant une démarche davantage sectorielle, ou thématique. Nous nous sommes alors aperçus que le travail était beaucoup plus compliqué.
Je tiens à cet égard à remercier la commission des lois, Mme la rapporteure, mais aussi le Conseil d’État, qui a passé beaucoup de temps à étudier cette proposition de loi. J’ai eu l’occasion d’assister à ses travaux, au niveau tant de la section que de l’Assemblée générale, et j’ai été sensible aux remarques portant sur le temps qu’il convenait de consacrer à ce travail et sur son utilité.
J’ai souhaité aller au bout de la réflexion sur cette proposition de loi Balai III, parce que le plus gros du travail était déjà fait. Mais nous devrons, pour la suite, continuer de nous interroger sur ce sujet, d’autant que le président Gérard Larcher a repris dans le programme portant sur les trois années à venir cette volonté d’améliorer la lisibilité du droit et de simplifier les textes.
Pour ce qui est du groupe Union Centriste, je veux tout d’abord remercier Denise Saint-Pé de sa vigilance, car elle nous a permis de corriger une erreur matérielle bien involontaire. Les articles que nous avons examinés étant très nombreux, nous avons pu laisser échapper quelques petites scories… Notre groupe, bien sûr, votera ce texte.
Nous devons poursuivre ces travaux. Il y a, selon moi, deux pistes à explorer.
Première piste : pour chaque nouveau texte examiné, il faudrait supprimer au moins deux textes anciens, et pour cela travailler en amont. Je pense notamment au projet de loi sur le logement qui nous sera bientôt soumis : il conviendrait de relever dans deux anciennes lois relatives au logement les articles qui s’appliquent encore, ce qui permettrait, par ailleurs, d’en débattre de nouveau.
Deuxième piste : la démarche historique. Dans les textes éliminés, il conviendrait de trouver les articles susceptibles de s’appliquer et de les reprendre sous forme d’amendements si l’on considère que c’est nécessaire, et ce au moment opportun. Ce serait une façon de réduire l’« ancienneté » de nos textes, de les actualiser, de les moderniser.
Il me semble que ces deux pistes sont intéressantes et que nous devrions y réfléchir collectivement. Pour ma part, j’alerterai le président du Sénat sur ces sujets afin que soient envisagés les moyens permettant de faire aboutir ce travail qui sera utile et apprécié par nos compatriotes. Car si nul n’est censé ignorer la loi, comme on le dit souvent, nombre de nos concitoyens ont du mal à s’y retrouver. Il serait bon de leur faciliter la tâche.
Cela ne se fera certes pas d’un coup de baguette magique, personne n’étant capable de dire aujourd’hui combien de textes sont en vigueur ! J’avancerais le nombre approximatif de 11 000 lois, mais on ne le sait pas précisément…
Il est important de continuer de travailler dans cet esprit pour aboutir à une meilleure lisibilité des lois, la plupart du temps à droit constant comme on l’a fait jusqu’à présent. Je suis disponible pour poursuivre cette tâche.
Je sais que l’une des clés de la réussite est la persévérance, et je suis persévérant ! (Mme la rapporteure opine.) Je continuerai donc de défendre les idées que j’ai développées et que j’essaye de partager dans mon département. Agir de même, collectivement, au Sénat, serait faire œuvre utile pour la France en général, et pour notre assemblée en particulier.
Je tiens à remercier mes collègues d’avoir tenu des propos aussi agréables à mon endroit et sur cette initiative et de soutenir ce texte. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guy Benarroche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette démarche du Sénat l’honore et ancre un peu plus son rôle dans la bonne santé de notre démocratie, ce qui est une bonne chose.
Comme l’a rappelé la rapporteure, les deux précédents textes – lois Balai I et Balai II –, « adoptés avec le soutien de la commission, poursuivaient les objectifs constitutionnels de clarté, d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi, à travers la réduction de la quantité de normes applicables, afin d’éviter tout risque de confusion avec des lois ultérieures et d’améliorer la lisibilité de notre droit ».
Le groupe écologiste a déjà eu l’occasion de saluer la mise en place de la mission dite Balai du Sénat, dont le nom assez explicite reflète l’ambition de se débarrasser des lois inutiles, que d’aucuns qualifient de « fossiles législatifs ». Depuis 2018, notre assemblée a procédé par deux fois à un toilettage législatif aussi important que nécessaire.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire, rien ne sert de répéter l’adage « nul n’est censé ignorer la loi » lorsque la frénésie du législateur ne permet plus raisonnablement à nos collectivités territoriales de connaître l’ensemble des textes qui s’y appliquent ; car il y a ceux qui ne devraient plus exister et d’autres, votés récemment, qui n’ont jamais été appliqués, faute – entre autres – de décrets d’application… Ce sujet est régulièrement évoqué, y compris au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, car c’est un réel problème pour toutes nos collectivités.
Trop de lois peuvent naître d’effets d’affichage, exploités davantage à des fins politiques que pour la mise en place de normes importantes.
Je salue le travail minutieux de notre rapporteure, Nathalie Delattre, et de la commission des lois dans son ensemble. C’est un sacré boulot qui a été abattu !
Nous devrions faire preuve de retenue lorsque nous écrivons le droit, l’inflation législative étant un écueil dont la responsabilité revient au Gouvernement comme au Parlement. Nous peinons parfois à contourner la règle « un fait divers, une loi », mais nous devons sortir de ce cycle infernal. Nous sommes encore trop enclins à réagir aux événements extérieurs, plutôt qu’à élaborer des lois respectueuses et constructives.
Je rappelle au Gouvernement, à l’instar de Vincent Delahaye, qu’il était précisé dans sa circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise du flux des textes réglementaires et de leur impact : « Toute nouvelle norme réglementaire doit être compensée par la suppression ou, en cas d’impossibilité avérée, la simplification d’au moins deux normes existantes. »
Le ministre avait également dit, lors de l’examen de la première loi Balai, avoir « décidé d’insérer, dans chaque projet de loi, un volet dédié à la simplification ». Je ne me souviens pas d’avoir vu de tels volets dans les projets de loi que nous avons eu l’occasion d’examiner depuis…
Une fois passée la déception des promesses non tenues de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS – le S signifiant « simplification » –, j’ai eu l’occasion d’auditionner, au sein de la délégation aux collectivités territoriales, sous la présidence de Françoise Gatel, que je salue, de nombreux élus locaux. Nous voulions qu’ils nous fassent part clairement des difficultés rencontrées par nos collectivités pour appliquer les lois. Ces élus naviguent dans les méandres des normes applicables et y perdent une grande part de leur énergie, pourtant indispensable pour avancer sur des sujets aussi essentiels que la transition énergétique, écologique et environnementale.
Je salue donc cette proposition de loi qui, au-delà de la simple abrogation, codifie certaines mesures visant à atteindre les objectifs constitutionnels de clarté, d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi. Ces codifications ont trait, par exemple, aux contrats des collectivités locales. Je pense notamment à l’article 10, relatif à la réduction de la consommation de plastiques à usage unique dans les achats publics.
À cet égard, mon groupe regrette fortement le retrait de l’ordre du jour de la proposition de loi visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé, figurant dans la niche du groupe UC, qui devait être examinée aujourd’hui. Mon collègue Jacques Fernique avait beaucoup travaillé sur ce texte, adopté à l’Assemblée nationale, que nous aurions volontiers soutenu.
Au-delà des clivages politiques, nous serons sans doute unanimes pour voter cette proposition de loi visant à assurer une meilleure lisibilité du droit et à faciliter le travail des collectivités. J’invite le Gouvernement à continuer, voire à amplifier le processus de codification permettant un accès facilité et lisible au droit applicable.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, lors de sa conférence de presse du 16 janvier 2024, le Président de la République a peu pris le temps de s’enquérir de la situation des maires, si ce n’est peut-être en les rangeant dans la catégorie de « ceux qui veulent agir et qui sont empêchés », pour paraphraser son propos. Il a estimé qu’« il y a encore trop de complexités qui découragent les entrepreneurs, les industriels, les commerçants, les agriculteurs, les artisans, les maires ». Si les maires sont derniers de cette liste, ce n’est pas un hasard…
Derrière ce propos sur la simplification, prenons garde aux raccourcis simplistes. Les maires connaissent les contraintes qui pèsent sur leurs mandats. À quelle place se situe la thématique des marges de manœuvre financières ?
Un maire sans argent est un maire sans pouvoir, démuni face à sa population. Si le Président l’ignore, pour notre part, nous le savons en tant que représentants de ces élus.
Ainsi, depuis 2010, la perte des recettes du bloc communal atteint 72 milliards d’euros du fait de la baisse et de la non-indexation sur l’inflation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Demandons aux maires ce qu’ils ressentent face à la dépossession du levier fiscal, depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron.
La recentralisation de la fiscalité locale, rendue possible par la loi organique de 2004, permet à l’État de transférer une ressource propre sur laquelle les collectivités n’ont aucun pouvoir, qu’il s’agisse de l’assiette ou du taux. Les maires sont mis hors jeu des orientations fiscales, et donc financières, de leurs communes. Or, sans autonomie financière, quid d’une autonomie politique ?
C’est peu dire que le droit des collectivités est poussiéreux et qu’un troisième coup de balai s’imposait.
« Balai », je le rappelle, est l’acronyme désignant ces textes de simplification, rédigés sur l’initiative du Sénat, qui ont vocation à simplifier et corriger les dispositions législatives applicables aux collectivités territoriales. La présente proposition de loi prévoit ainsi quarante-trois abrogations totales ou partielles de textes figurant dans le CGCT et, en sus, l’abrogation totale ou partielle d’un peu moins de soixante-cinq lois ou ordonnances. Le groupe CRCE-K remercie le groupe Union Centriste de faire le travail du Gouvernement ! (Sourires.)
La rapporteure s’est attachée à respecter la loi, mais aussi le sens de celle-ci.
J’évoquerai, pour ma part, la loi du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes, dite loi Marcellin, remplacée par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, qui a créé le statut de commune nouvelle.
Au-delà des considérations politiques dont je pourrais vous faire part sur la suppression de la fusion-association, procédure qui permettait d’éviter la disparition des locaux municipaux et dont la disparition a éloigné, à certains endroits, les administrés de leur administration, je tiens à souligner que le remplacement d’une loi par une autre ne doit pas nécessairement se traduire par l’abrogation de la première.
Cette loi fondatrice enrayait un mouvement politique révolutionnaire, ébauché par un décret qui entérinait 44 000 municipalités sur le territoire des anciennes « paroisses », qui deviendront les « communes » en 1793.
Le droit est aussi une affaire de symbole. L’histoire du droit sera reconnaissante au législateur d’en conserver des traces, ses moments fondateurs et ses hésitations. Mais quelques constats supplémentaires s’imposent.
Selon le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN), le coût financier de la réglementation que je viens d’évoquer, soit 2,5 milliards d’euros, a explosé entre 2019 et 2022. D’ailleurs, sur plus d’un millier d’avis émis sur ces textes, 102 ont été défavorables aux seuls motifs que lesdits textes niaient la concertation avec les représentants des élus ou qu’ils créaient des charges supplémentaires pour les collectivités territoriales.
Légiférer pour exister, par des textes à la portée normative plus que limitée, voilà qui mine la démocratie et entérine une forme d’impuissance à transformer la société.
Enfin, j’aimerais vous recommander, mes chers collègues, de cesser de renvoyer systématiquement au Gouvernement le pouvoir de faire la loi. L’ancien président du CNEN, Alain Lambert, alertait le Sénat en ces termes : « Une mesure simple va tomber entre les mains d’experts qui vont prévoir un dispositif et organiser un dispositif de contrôle à cracher le sang. […] Il y a donc bien des mesures que nous pouvons prendre pour alléger la réglementation qui frappe les collectivités. »
Mon groupe votera ce texte qui ne pose pas de difficultés majeures et dont l’adoption permettra d’élaguer un maquis législatif qui nuit notamment aux petites communes.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, voici donc le troisième volet de la saga « Balai », commencée en 2019, et qui a déjà donné lieu à deux initiatives sénatoriales : les lois du 11 décembre 2019 et du 14 février 2022 tendant à abroger des lois obsolètes pour une meilleure lisibilité du droit.
Je crois que le Sénat peut se féliciter de ces travaux qui nous conduisent à examiner une proposition de loi Balai III dont le style se renouvelle malgré tout. En effet, il n’est plus seulement question d’un balayage chronologique : on vise ici une branche spécifique du droit, celui des collectivités territoriales. Par ailleurs, nous ouvrons un nouveau chantier : celui de la codification et non plus seulement de l’abrogation.
Je ressens une forme d’admiration face à ces travaux d’une particulière minutie. Nos collègues Nathalie Delattre et Vincent Delahaye sont parvenus à élaborer un texte marqué par une fouille précise et prudente.
Aussi, comme à chaque étape de ce balayage législatif, il faut saluer la vigilance dont a su faire preuve notre commission des lois, qui a scrupuleusement vérifié, pour chacun des textes, que leur abrogation n’entraînerait pas la moindre conséquence juridique. Il va de soi que l’effort de clarté ne doit pas s’accompagner d’un risque d’imprévisibilité : c’est un impératif de sécurité juridique.
L’article 15, qui égraine chronologiquement les lois à abroger, se lit presque avec mélancolie. Il nous propose un voyage dans l’histoire de l’administration sous la Ve République.
Je citerai, pêle-mêle, quelques-uns de ces textes : l’ordonnance du 5 janvier 1959 portant allégement du contrôle administratif sur les départements et simplification de l’administration départementale ; la loi du 31 décembre 1966 relative aux communautés urbaines ; la loi du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions ; la loi du 13 juillet 1987 modifiant les dispositions relatives à la fonction publique territoriale ; la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité… Plus d’un demi-siècle de décentralisation et de développement des territoires qui aura vu se renforcer, loi après loi, le fameux millefeuille administratif, avec la naissance des régions et le développement des intercommunalités, souvent au détriment des figures historiques que sont les communes et les départements.
La présente proposition de loi participe sans aucun doute à une décomplexification du droit, mais il y a encore du chemin à parcourir, notamment d’un point de vue institutionnel.
Pour ce qui concerne la codification, je veux saluer une nouveauté, qui différencie cette proposition de loi des précédentes. Il faut rappeler qu’elle est non pas un artifice législatif, mais un moyen « de rendre le droit plus simple, plus accessible et de meilleure qualité », pour reprendre les mots du premier rapport d’activité qu’avait rendu la Commission supérieure de codification en 1990.
L’histoire législative a été marquée par un élan codificateur durant les années 1990 et 2000. Plus récemment, le groupe RDSE, sur l’initiative de Nathalie Delattre, avait travaillé sur des mesures de codification concernant un tout autre sujet : la médiation judiciaire. Nous sommes donc particulièrement sensibles à cette initiative, surtout lorsqu’elle concerne le droit applicable à nos administrations locales.
Le Sénat, qui assure la représentation des collectivités territoriales de la République, a la responsabilité de répondre aux attentes de celles-ci. Car à ce besoin de clarification des compétences et des institutions s’ajoute celui de précision des règles elles-mêmes, loin des faux-semblants de la simplification.
Les enjeux sont fondamentaux : la complexité du droit va toujours de pair avec la complexification de la décision publique locale, dont nos concitoyens se désintéressent de plus en plus : de quoi nous inquiéter sur l’état de notre démocratie !
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe RDSE votera unanimement en faveur de cette proposition de loi. (Mme Nathalie Delattre applaudit.)
M. Guy Benarroche. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés aujourd’hui à nous prononcer sur la proposition de loi que présente notre collègue Vincent Delahaye.
L’ambition que porte ce texte, comme son titre l’indique, est d’améliorer la lisibilité du droit applicable aux collectivités territoriales. Sous des aspects très techniques, ce texte assume en définitive une ambition républicaine : rendre le droit clair, intelligible et accessible pour le citoyen.
Cet objectif de simplification emporte une large adhésion au sein de notre hémicycle. Simplifier notre droit en améliorant la lisibilité et, in fine, faciliter l’action publique pour la rendre plus efficace : de tels objectifs, dont ce texte participe, font consensus au Sénat.
Ce texte parachève la démarche volontaire de notre assemblée en matière de simplification législative. La mission du bureau d’abrogation des lois anciennes et inutiles, dite mission Balai, créée en 2018, a permis l’adoption de deux précédentes lois de clarification de la norme.
Je salue le travail méticuleux mené par notre collègue Vincent Delahaye et par Mme la rapporteure Nathalie Delattre. Abroger des dispositions en vigueur s’est révélé être une tâche minutieuse. La commission a œuvré en responsabilité pour préserver la stabilité et la sécurité juridiques.
Cette volonté de simplification est partagée depuis 2017 par le Président de la République, qui s’est déclaré favorable à une maîtrise du flux législatif. C’est en substance cette même volonté qui l’anime lorsqu’il affirme vouloir incarner « la France du bon sens, plutôt que la France du tracas ».
Depuis le premier quinquennat, le Gouvernement a lui aussi pris part au chantier de simplification. La loi Essoc, la loi Pacte et la loi Asap ont supprimé des comités Théodule et simplifié les démarches administratives.
Le Gouvernement a instauré la règle dite du deux pour un, selon laquelle chaque norme autonome produite doit s’accompagner de l’abrogation de deux normes existantes. Car si nul n’est censé ignorer la loi, encore faut-il que celle-ci soit claire et accessible. Or nous constatons tous que l’inflation législative, l’empilement des normes et leur complexité peuvent rendre la loi illisible pour la plupart de nos concitoyens.
Ce défaut de clarté normative pénalise non seulement le citoyen, mais aussi les élus locaux. Dans nos circonscriptions, certains d’entre eux confessent se sentir dépossédés de leur mission face à cette profusion de normes.
Je souhaite attirer votre attention sur la situation des élus et des citoyens en outre-mer, pour qui ces difficultés sont souvent décuplées, madame la ministre. Aussi plaidons-nous, avec le groupe RDPI, pour un travail de fond sur ces difficultés propres aux outre-mer.
Pour ce troisième volet de la loi Balai, pour lequel nos efforts de simplification sont axés sur le droit applicable aux collectivités territoriales, une approche sectorielle a été retenue. Le groupe RDPI soutient cette approche et reconnaît l’importance d’actualiser et de simplifier le cadre juridique régissant nos collectivités territoriales.
En conclusion, le groupe RDPI soutient pleinement cette proposition de loi, en particulier pour son ambition renforcée et son approche sectorielle centrée sur le droit des collectivités territoriales. Nous sommes convaincus que cette initiative contribuera significativement à la clarté, à l’intelligibilité et à l’accessibilité du droit, conformément aux objectifs constitutionnels que nous partageons tous. (Mme la rapporteure applaudit.)
M. Guy Benarroche. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Christophe Chaillou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme cela a été dit à plusieurs reprises, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui selon la procédure de législation en commission est une réponse à la volonté du Sénat d’améliorer à la fois la qualité et la lisibilité de la loi s’appliquant aux collectivités territoriales.
Ce travail est issu d’une mission de simplification législative, dite mission Balai, créée par le bureau du Sénat en 2018, qui visait initialement à améliorer la lisibilité du droit en identifiant puis en proposant l’abrogation de dispositions législatives devenues obsolètes.
Les deux premières propositions de loi d’abrogation ont été promulguées en 2019 et 2022. Ce texte, qui est donc le troisième à être issu des travaux de cette mission, diffère des deux premiers pour trois raisons.
Premièrement, il s’agit d’un texte thématique, qui concerne le droit des collectivités territoriales.
Deuxièmement, pour ce qui concerne la méthode, cette proposition de loi vise à toiletter le droit de 1980 à nos jours. Il est d’ailleurs savoureux de constater que le Sénat ait à recodifier, voire à abroger partiellement la loi Agec – aux articles 8, 10 et 15 du présent texte –, votée voilà seulement quatre ans, soit très récemment.
Cela pose à l’évidence la question des conditions dans lesquelles le Gouvernement travaille comme celle des conditions dans lesquelles nous légiférons, à savoir, pour l’essentiel depuis sept ans, dans le cadre de la procédure accélérée, ce qui nuit à la qualité des travaux de la navette parlementaire.
Ce séquençage temporel emporte aussi un changement de méthode. Les auteurs des deux premiers textes de la mission Balai avaient fait le choix de n’abroger que des lois entières, en conséquence de quoi il suffisait qu’un seul article d’une loi continue à produire ses effets pour écarter le texte entier du champ des abrogations proposées.
Ce n’est plus le cas avec cette troisième proposition de loi, puisque sont désormais proposées des abrogations partielles, avec pour effet possible de conserver une loi dont l’essentiel du contenu serait abrogé et qui ne se limiterait alors plus qu’à quelques articles, voire à un seul.
Troisièmement, toujours au regard de la méthode, les auteurs de cette proposition de loi ont recodifié ou corrigé certaines dispositions.
Le texte initial – force est de le constater – comportait des mesures de codification qui auraient pu modifier le sens du droit ou compromettre sa lisibilité, soit l’inverse de l’effet recherché.
Tout comme Mme la rapporteure, le chef de file de notre groupe s’est attaché à corriger cet écueil lors des travaux de la commission. Sur le fondement de notre analyse, nous avons proposé des amendements tendant notamment à appliquer certaines préconisations de l’avis du Conseil d’État. Un certain nombre de nos amendements ont été adoptés en commission.
Nous avons particulièrement veillé à ce que cette proposition de loi ne porte que sur des éléments réellement obsolètes et à ce qu’elle ne contribue pas à complexifier le droit existant. Nous avions en effet quelques incertitudes au regard des modifications proposées sur le droit applicable aux territoires ultramarins.
Nous avons par ailleurs demandé l’abrogation d’un article de la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, dite loi Defferre, et rappelant notre attachement symbolique aux dispositions de la loi Marcellin, nous avons déposé un amendement de suppression visant à maintenir ces dernières. De manière générale, nous sommes favorables à un certain nombre d’amendements qui ont été adoptés.
Vous l’aurez compris, chers collègues, nous soutenons bien évidemment l’état d’esprit général de ce travail de simplification auquel les collectivités comme nos concitoyens sont attachés. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera donc en faveur de ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en pleine crise agricole, le Premier ministre promettait récemment de simplifier la vie des filières agricoles, qui n’échappent pas à la prolifération des normes, au demeurant de plus en plus contraignantes.
Il faut dire que notre pays connaît une boulimie normative dont chacun doit prendre la mesure. Fin 2022, on dénombrait 78 codes et plus de 347 000 articles de loi en vigueur. Dans ces conditions, comment garantir que la loi est lisible et accessible à tous ?
Comme l’a souligné le Conseil d’État dans son rapport public de 2006 intitulé Sécurité juridique et complexité du droit, l’accumulation de normes et la complexité juridique sont une menace pour l’État de droit.
Depuis 1999, le Conseil constitutionnel rappelle pour sa part que l’accessibilité et l’intelligibilité de la loi constituent un objectif de valeur constitutionnelle découlant de l’exigence de clarté de la loi.
Simplifier le droit est une nécessité pour nos collectivités territoriales qui sont confrontées à un empilement de normes et de contraintes, alors qu’elles réalisent 60 % de l’investissement public.
L’amélioration de la lisibilité du droit est une condition sine qua non de l’efficacité de l’action publique locale. C’est aussi une source d’économie : la direction générale des collectivités locales estime en effet le coût de l’inflation normative entre 2017 et 2022 à 2 milliards d’euros.
Non seulement la complexité juridique est source d’interprétations, mais elle se traduit souvent par un allongement du délai entre la décision de mener un projet et sa réalisation.
Chez nos concitoyens, cette réalité suscite incompréhension, réprobation, mais aussi perte de confiance dans la parole publique.
La complexité de notre droit est trop souvent à l’origine de retards dans de nombreux projets, voire de leur abandon. Cela est particulièrement vrai dans les petites collectivités, où l’ingénierie « politico-juridico-administrative » manque cruellement. Les élus locaux se retrouvent parfois bien seuls pour mener leurs projets à terme.
Cette situation est aussi source d’une insécurité juridique qui débouche parfois sur la mise en cause de la responsabilité pénale des maires et des élus locaux.
Ces difficultés participent de toute évidence de la crise de l’engagement local, caractérisée par la démission de 1 300 maires et de plus de 12 000 élus locaux depuis 2020. Les petites collectivités sont les premières à en pâtir, mais les grandes collectivités ne sont plus épargnées si l’on considère les difficultés de recrutement croissantes, en particulier dans les filières techniques.
Au fond, cette prolifération des normes traduit une réalité, celle d’un État trop vertical qui légifère sur tout et fait trop peu confiance aux élus locaux.
Si le Parlement doit lui aussi prendre sa part d’autocritique, il convient également de souligner les effets du droit européen qui, du fait de l’obligation de transposition dont il fait l’objet, prend de plus en plus de place dans notre ordre juridique national.
Enfin, notre droit des collectivités territoriales est devenu d’autant plus illisible que les élus locaux sont en permanence soumis à des injonctions contradictoires. Je citerai, entre autres, l’obligation de construire davantage et celle de ne pas artificialiser les sols, synthétisée dans l’objectif du zéro artificialisation nette, qui s’apparente à un véritable casse-tête en matière d’urbanisme et d’aménagement. (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Burgoa. Tout va bien !
Mme Marie-Do Aeschlimann. Pour agir efficacement et répondre aux attentes de leurs administrés, les élus locaux ont besoin d’un cadre législatif simple, clair et opérationnel.
Je veux donc à mon tour saluer mon collègue Vincent Delahaye et plusieurs de nos collègues qui, depuis 2019, mènent un important travail de simplification au sein du groupe transpartisan dit Balai – il fallait trouver cette dénomination ! – pour l’abrogation des lois anciennes et inutiles.
Cette démarche prend tout son sens au Sénat, dans la chambre chargée de représenter les collectivités territoriales et de défendre leur action. Cette mission est une étape indispensable qui doit nous permettre de mener une véritable réflexion sur la qualité de la loi.
Lors de son discours d’investiture, le président Larcher nous invitait à « combattre les lois de pulsion » et à « moins légiférer pour mieux légiférer ».
Je crois que ces remarques sont plus que jamais d’actualité et que les ministres, mais aussi les parlementaires que nous sommes, avons tous une part de responsabilité pour redonner à la loi ses lettres de noblesse. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, je constate que la proposition de loi a été adoptée à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)
5
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 30 janvier 2024 :
À quinze heures et le soir :
Lecture d’une déclaration du Gouvernement ;
Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur la proposition de loi instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste, présentée par M. François-Noël Buffet et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 259, 2023-2024) ;
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France (texte de la commission n° 253 rectifié, 2023-2024).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à quinze heures quarante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER