M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 35, présenté par M. Durain, Mmes Narassiguin et de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
dans lesquels se tient un évènement exposé, par son ampleur ou ses circonstances particulières, à un risque de menace grave ou terroriste
par les mots :
par décret, dans lesquels se tiennent des grands événements et des grands rassemblements de personnes ayant pour objet d’assister à des événements exposés à un risque d’actes de terrorisme en raison de leur nature et de l’ampleur de leur fréquentation. Ce décret désigne également les établissements et les installations qui les accueillent ainsi que leur organisateur
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement a pour objet de préciser les lieux concernés par l’interdiction de paraître.
Nous estimons que cette mesure s’inscrit ouvertement dans la perspective des jeux Olympiques. Il convient donc de définir le plus précisément possible à quel type d’événement elle s’appliquerait.
Nous proposons de définir cette interdiction par décret, sur le modèle de ce qui existe déjà pour les grands événements, notamment pour les jeux Olympiques.
Nous nous inquiétons de ce que cet article, qui concerne un événement exceptionnel, pourrait devenir d’application courante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Nos collègues socialistes veulent limiter aux seuls grands événements et grands rassemblements le champ de l’interdiction de paraître, créée par l’article 7 bis et qui, je le rappelle, ne s’applique normalement que dans le cadre des Micas.
Une telle limitation ne me paraît pas nécessaire et me semble trop restrictive. Je veux donner un exemple : le procès des complices des attentats de Trèbes et de Carcassonne, qui se tient actuellement, peut nécessiter que des interdictions de paraître soient prises à l’encontre de certains individus ; or, si votre amendement était adopté, cela serait impossible !
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 25, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 5, dernière phrase
Supprimer les mots :
Sauf urgence dûment justifiée,
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. L’alinéa 5 de l’article 7 prévoit notamment de déroger à la notification d’une interdiction de paraître à la personne concernée au moins quarante-huit heures avant son entrée en vigueur en cas « d’urgence dûment justifiée ».
Si l’alinéa 7 du même article permet expressément l’exercice d’un référé-liberté à l’encontre de cette interdiction, le juge administratif ne dispose que de quarante-huit heures pour statuer sur un tel recours.
Dès lors, et par cohérence avec la garantie du droit à un recours effectif, il convient de prévoir de manière systématique une notification à l’intéressé au plus tard quarante-huit heures avant l’entrée en vigueur de l’interdiction de paraître, sans qu’une quelconque urgence puisse justifier l’inverse.
Le fait qu’une telle mesure d’interdiction soit autonome d’une Micas rend cette disposition d’autant plus nécessaire.
Mme Cécile Cukierman. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Par cet article, la commission a souhaité conférer un caractère beaucoup plus opérationnel à l’interdiction de paraître, dans un nombre de cas très limités et strictement nécessaires, dont la liste est précisée, afin de permettre au ministre de l’intérieur de notifier la mesure moins de quarante-huit heures avant son entrée en vigueur.
Toutefois, nous avons conservé la possibilité d’une contestation devant le juge des référés dans un délai maximum de quarante-huit heures, ce qui permet d’exercer les droits de recours : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 49, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
même code
par les mots :
code de justice administrative
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article 7 bis (nouveau)
Avant le dernier alinéa de l’article L. 228-2 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’annulation de la décision de renouvellement des obligations prévues aux 1° à 3° du présent article, le ministre de l’intérieur peut interjeter appel dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification dudit jugement. Il est statué sur cet appel par le président de la cour administrative d’appel ou un magistrat délégué par lui dans un délai de soixante-douze heures à compter de la saisine de la cour. La mesure dont le renouvellement a été annulé demeure en vigueur jusqu’à l’expiration du délai d’appel ou, en cas de recours, jusqu’à l’expiration du délai de soixante-douze heures précité. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 16 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
L’amendement n° 36 est présenté par M. Durain, Mmes Narassiguin et de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 16.
M. Guy Benarroche. Cet amendement tend à supprimer l’article 7 bis, qui a pour objet de rendre suspensif l’appel interjeté par le ministère de l’intérieur à l’encontre du jugement d’annulation de renouvellement des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance.
Cette mesure confère un pouvoir disproportionné aux magistrats du parquet d’aller à l’encontre des décisions d’annulation des magistrats du pôle antiterroriste, alors que ces derniers souffrent d’un manque d’indépendance, étant placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques.
Pour rappel, les jugements d’annulation des Micas sont prononcés lorsqu’il n’existe plus de raisons sérieuses de penser que le comportement de l’individu constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics.
Ce sont des mesures particulièrement attentatoires aux libertés individuelles, de nature à porter atteinte à la liberté d’aller et venir. L’opportunité de mettre fin ou non à de telles mesures doit donc être laissée à l’appréciation du magistrat, sans que sa décision soit assortie d’un quelconque effet suspensif.
La prévention des actes de terrorisme est un objectif légitime, qu’il ne s’agit nullement de contester.
Cependant, cet article, comme l’ensemble de la proposition de loi, en rognant sur les libertés individuelles, sans apporter de garanties aux justiciables, témoigne d’une dérive inquiétante en écho à une logique de suspicion qui a pénétré notre État de droit.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 36.
Mme Corinne Narassiguin. En commission, M. le rapporteur a souhaité conférer un caractère suspensif à l’appel interjeté par le ministère de l’intérieur à l’encontre du jugement d’annulation du renouvellement d’une Micas.
Selon certains, ce ne serait pas grave, puisqu’il est statué en appel dans un délai de soixante-douze heures. Mais cet argument ne tient pas : comme M. le rapporteur l’a expliqué en commission, lorsque le tribunal administratif annule la mesure de renouvellement, la surveillance de l’intéressé prend fin, y compris si le ministre de l’intérieur et des outre-mer fait appel du jugement.
Pourquoi en irait-il autrement ? Dans notre pays, ce sont encore les tribunaux qui décident en la matière !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 16 et 36.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 50, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
Avant le dernier
par les mots :
Après le huitième
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7 bis, modifié.
(L’article 7 bis est adopté.)
Article 7 ter (nouveau)
Le II de l’article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° À la fin du troisième alinéa, les mots : « ayant autorisé l’exploitation des documents et données saisis » sont supprimés ;
2° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « autorisant l’exploitation des documents et données saisis » sont supprimés.
M. le président. L’amendement n° 45, présenté par M. Durain, Mmes Narassiguin et de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Par cet amendement de suppression, nous tenons à faire remarquer deux choses, qui sont révélatrices à la fois de la dynamique de cette proposition de loi et d’un mouvement de fond qui, ces dernières années, va toujours dans le même sens.
M. le rapporteur a expliqué l’insertion de cet article par la présence d’une malfaçon dans la loi du 30 juillet 2021. Lorsque l’on veut légiférer aussi régulièrement et aussi rapidement sur ces questions, doit-on se plaindre de constater des malfaçons ?
Monsieur le rapporteur, vous souhaitez une voie de recours contre la décision du juge des libertés et de la détention du refus d’exploitation de documents et de données saisis dans le cadre d’une visite domiciliaire. Permettez-nous de dire que cette hypothèse est suffisamment rare pour devoir être amplement justifiée !
Vous n’avez de cesse de proposer de limiter l’office du juge, mais jusqu’où et jusqu’à quand ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7 ter.
(L’article 7 ter est adopté.)
Article 7 quater (nouveau)
Après la première occurrence du mot : « consentement, », la fin de l’article L. 3211-12-7 du code de la santé publique est ainsi rédigée : « se voir communiquer :
« 1° Les données d’identification de cette personne et les données relatives à sa situation administrative portées à la connaissance du représentant de l’État dans le département d’hospitalisation ou, à Paris, du préfet de police en application des articles L. 3212-5, L. 3212-8 et L. 3212-9 du présent code ou dont il dispose en application du chapitre III du présent titre et de l’article 706-135 du code de procédure pénale, lorsque ces données sont strictement nécessaires à l’accomplissement de leurs missions ;
« 2° Les données relatives à la forme et à la durée de l’autorisation de sortie de courte durée, les données relatives à la modification de la forme de la prise en charge ainsi que les données relatives à la date de levée de la mesure de soins.
« Les données mentionnées aux 1° et 2° ne peuvent être communiquées lorsqu’elles sont antérieures de plus de trois ans à la date de levée de la mesure de soins sans consentement. »
M. le président. L’amendement n° 17, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Il s’agit, cette fois, de supprimer l’article 7 quater, qui a pour objet de renforcer la transmission des informations ayant trait à la prise en charge d’une personne radicalisée hospitalisée sans son consentement aux préfets du lieu d’hospitalisation et du lieu de domicile.
Le Syndicat de la magistrature avait souligné, lors de l’examen de la loi relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement, que ces dispositions marquaient une étape supplémentaire et significative dans le fichage et la surveillance des personnes souffrant de troubles psychiatriques.
Selon ledit syndicat, le secret médical est un principe fondamental de l’exercice de la médecine dont le respect découle des exigences du onzième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, relatives à la protection de la santé.
Sans confiance des patients envers leur médecin, par crainte de la diffusion de données médicales, l’incitation à aller se soigner se trouve dangereusement altérée, alors même que le code de déontologie médicale prévoit que le secret médical est institué dans l’intérêt des patients et pour préserver la confiance dans le corps médical.
Pour ces raisons, notre groupe s’oppose à cette mesure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7 quater.
(L’article 7 quater est adopté.)
Chapitre II
Rénover les moyens d’entrave administrative aux activités et groupements terroristes
Article 8
I. – Le chapitre II du titre Ier du livre II du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Avant le dernier alinéa de l’article L. 212-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La provocation mentionnée aux 1°, 6° et 7° est constituée lorsqu’une association ou un groupement de fait, à travers ses dirigeants ou un ou plusieurs de ses membres agissant en cette qualité ou directement liés à ses activités, dans les conditions fixées à l’article L. 212-1-1, incite des personnes, par propos ou par actes, explicitement ou implicitement, à se livrer aux agissements mentionnés aux 1°, 6° et 7° du présent article ou les légitime publiquement ou s’abstient de mettre en œuvre les moyens de modération à disposition pour réagir à la diffusion d’incitation à les commettre. » ;
2° Après l’article L. 212-1-1, il est inséré un article L. 212-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 212-1-2. – Lorsque l’autorité administrative engage une procédure de dissolution d’une association en application de l’article L. 212-1 ou à défaut, dès le prononcé de cette dissolution, elle saisit, par requête, le président du tribunal judiciaire du ressort du siège de l’association, aux fins de désignation d’un curateur. Le président de la juridiction statue dans les cinq jours de sa saisine. La mission du curateur prend effet à la date où la dissolution est prononcée.
« Lorsque l’ordonnance est rendue au cours de la procédure de dissolution engagée sur le fondement du même article L. 212-1, la mission du curateur prend effet à la date où la dissolution est prononcée.
« Le curateur exerce les pouvoirs conférés par les articles 809-2 à 810-8 du code civil aux curateurs des successions vacantes.
« Le curateur a pour mission de procéder à la liquidation des biens de l’association et de convoquer, dans un délai déterminé par le tribunal, la réunion d’une assemblée générale à seule fin d’adopter une délibération sur la dévolution des biens, nonobstant toute clause figurant dans les statuts de l’association ou toute délibération préexistante ayant cet objet. L’assemblée générale est convoquée et délibère valablement à la majorité des suffrages exprimés quel que soit le nombre de membres présents. Le curateur communique immédiatement copie de la délibération de cette assemblée générale à l’autorité administrative.
« Lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’en application de la délibération mentionnée au quatrième alinéa du présent article, les actifs de l’association dissoute risquent d’être transmis à une personne morale dont l’objet ou les agissements sont de même nature que ceux ayant justifié la mesure de dissolution, ou lorsque l’assemblée générale n’a pas décidé de la dévolution des biens, ou que le curateur a été empêché d’exercer sa mission, l’autorité administrative saisit le tribunal judiciaire aux fins d’annulation de la délibération de l’assemblée générale et de désignation d’une association ou d’une fondation reconnue d’utilité publique ou d’une personne morale de droit public à laquelle les biens seront dévolus. La demande est formée, instruite et jugée selon les règles régissant la procédure accélérée au fond. À peine d’irrecevabilité, l’assignation est délivrée dans le délai d’un mois suivant la date à laquelle la délibération mentionnée au premier alinéa a été portée à la connaissance de l’administration.
« La délibération de l’assemblée générale convoquée par le curateur ne produit ses effets qu’à l’expiration du délai imparti à l’autorité administrative pour saisir le tribunal judiciaire ou, le cas échéant, lorsque la demande est rejetée par une décision ayant force de chose jugée.
« Lorsque la décision de dissolution a fait l’objet d’une requête en annulation, la dévolution effective des actifs de l’association dissoute n’intervient le cas échéant qu’après rejet de cette requête.
« Dans l’attente des décisions juridictionnelles mentionnées aux sixième et septième alinéas, les actifs ayant fait l’objet de l’ordonnance de dévolution des biens par le tribunal judiciaire sont consignés à compter de son prononcé par le curateur. »
II. – L’article L. 212-1-2 du code de la sécurité intérieure s’applique aux procédures de dissolution engagées à compter de la publication de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 26 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 37 est présenté par M. Durain, Mmes Narassiguin et de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 26.
M. Ian Brossat. L’article 8 est celui qui a le plus attiré notre attention.
Il modifie les conditions de dissolution administrative des associations, en précisant la notion de « provocation » pouvant justifier une telle mesure.
Or cette dissolution dépasse largement le cadre de la seule lutte contre le terrorisme. Tel qu’il est rédigé, cet article modifie l’article L. 212-1 du code de sécurité intérieure, qui sous-tend le régime de dissolution de toutes les associations et groupements de fait.
Si l’islamisme est la mouvance la plus concernée par les mesures de dissolution, avec dix-neuf dissolutions sur quarante-six depuis 2012, aucune d’entre elles n’a été suspendue ou annulée en justice.
À vrai dire, sur ces quarante-six dissolutions, seules deux ont été suspendues en justice et deux autres ont été annulées, dont celle qui visait les Soulèvements de la Terre.
On peut convenir que quatre sur quarante-six, cela ne relève pas exactement d’un « gouvernement des juges », expression qui revient de manière récurrente dans le débat public, de façon pour le moins confuse… C’est pourquoi nous ne comprenons pas la volonté de « moderniser et renforcer » – pour reprendre les termes de l’exposé des motifs du texte – ce régime de dissolution administrative.
Plus généralement, le rapport d’information de l’Assemblée nationale sur l’activisme violent publié en novembre dernier relève plusieurs des limites du principe même d’une telle mesure.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 37.
Mme Corinne Narassiguin. J’ai peu à ajouter à l’excellente présentation de M. Brossat.
Nous demandons également la suppression de ces dispositions, dont nous estimons qu’elles ne relèvent pas de l’objet de ce texte, consacré au terrorisme. Les dispositions de cet article vont bien au-delà et concernent directement la question des associations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 26 et 37.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 27, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Il s’agit d’un amendement de repli.
Nous proposons ici de ne supprimer que les dispositions de l’article qui touchent aux modalités de dissolution administrative des associations et groupements de fait, sans revenir sur celles qui instituent un régime de dévolution des biens de ces associations dissoutes, ajoutées en commission.
M. le président. L’amendement n° 51, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Constitue une provocation au sens des 1° , 6° et 7° , l’incitation explicite ou implicite, par propos ou par actes, à se livrer aux agissements qu’ils mentionnent ou la légitimation publique de ces agissements ou l’abstention à mettre en œuvre des moyens de modération à disposition pour réagir à la diffusion d’incitations à commettre ces agissements. » ;
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 27.
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Nous avons pris soin de reprendre les termes utilisés par le Conseil d’État dans sa récente décision sur les Soulèvements de la Terre.
Nous ne faisons donc que graver dans le marbre de la loi une définition jurisprudentielle, afin de sécuriser l’action des services du ministère de l’intérieur : avis défavorable sur l’amendement n° 27.
L’amendement de la commission vise simplement à rendre la rédaction de cet article plus lisible.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 27 et favorable à l’amendement n° 51.
M. le président. L’amendement n° 18, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« S’agissant des provocations à la violence contre des biens, la décision de dissolution de l’association ou groupement de fait doit être adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d’être portés à l’ordre public au vu des effets réels qu’ont pu avoir ces provocations. » ;
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Il s’agit d’un amendement important.
Nous souhaitons consolider la jurisprudence du Conseil d’État que vient d’évoquer M. le rapporteur, laquelle distingue les violences contre les biens et les violences contre les personnes.
À la suite des manifestations de Sainte-Soline, le ministre de l’intérieur avait qualifié les manifestants d’« écoterroristes » et avait fait des Soulèvements de la Terre l’objet de sa vindicte, remettant également en cause les travaux et le financement de la Ligue des droits de l’homme.
Notre groupe a toujours défendu toutes les libertés associatives et syndicales. Nous avons également toujours déploré l’acharnement déraisonnable et disproportionné qu’ont eu à subir certaines associations.
L’amendement que nous proposons nous semble essentiel à l’équilibre des droits des associations en ce qu’il vise à limiter l’arbitraire avec lequel l’État s’attaque à certaines manifestations.
Nous sommes stupéfaits par la minimisation de certains faits et l’acceptation de certaines dégradations par le ministre.
Rien que cette semaine, monsieur le ministre, nous avons assisté à une explosion revendiquée qui a soufflé le bâtiment de la direction de l’environnement à Carcassonne, ainsi qu’à un blocage des trains à Agen, avec déversement de pneus et fumier sur les voies ferrées… Il faut croire que toutes les actions ne se valent pas ! Pour autant, cela ne se justifie pas juridiquement.
Nous souhaitons permettre à toutes les colères de s’exprimer et protéger des tentatives de dissolution arbitraire certaines associations de désobéissance civile, qui organisent des actions d’occupation, qui ne véhiculent pas de haine, qui ne commettent pas de violences envers les personnes ou groupes de personnes.
À l’image des dernières déclarations du ministre Gérald Darmanin, nous comprenons que des actions menées par ces associations – blocus, occupation de lieux – ne peuvent être qualifiées d’« agissements troublant gravement l’ordre public ».
Nous souhaitons donc que la latitude d’expression accordée aux agriculteurs ces derniers jours puisse bénéficier à tous, quelles que soient les revendications, et pas seulement à ceux qui sont soutenus politiquement par le pouvoir.